POV Ron :

Je n’en peux plus.

Je veux être utile. J’ai besoin d’être utile.

Mais personne ne semble avoir besoin de moi.

Alors, je force le destin.

Aujourd’hui, c’est noël.

Personne ne veut travailler. Mais je me suis proposé.

Drago en a fait de même.

Toute la famille a pensé que c’était pour ne pas me laisser seul.

C’est faux. Je le leur ai dit. Maman m’a dit que je ne faisais plus d’efforts pour comprendre les gens. Que j’étais devenu aveugle et sourd. Elle m’a rappelé que Drago n’avait plus de famille.

Qu’il avait perdu beaucoup plus dans cette guerre que je ne saurais l’imaginer.

Je me suis dit que vu sa famille, mieux valait qu’ils ne soient plus là mais je me suis tu.

Est-ce que j’étais devenu ce monstre d’égoïsme dont je renvoyais l’image ? Mon seul souhait avait toujours été d’être utile. Je voulais être utile à Harry, mais il s’est éloigné peu à peu avant de prendre le large. Je voulais être utile à Hermione, mais je n’étais pas là quand ce sortilège mortel l’avait frappé. J’ai voulu être utile à Drago, mais monsieur réussi très bien sa vie sans moi. J’oubliais la conduite, être son chauffeur, c’est tout ce que je suis à ces yeux. Je ne sais même pas pourquoi il ne passe pas tout simplement le permis. Je ne lui ai jamais vraiment demandé à vrai dire…

J’ai essayé de me remettre en question, mais c’est douloureux. Si je ne sais plus écouter, que me reste-t-il ?

Alors je réfléchis en m’installant à mon bureau. A moi, à lui, au reste…

On doit être une dizaine d’aurors en tout et pour tout, à sacrifier le jour de noël, pour une petite prime qui tombe à point. Malefoy va encore être furieux quand il va voir que je lui ai encore versé un loyer pour l’appartement.

Je sais que c’est stupide, que c’est de l’argent dépensé pour rien, puisque monsieur Malefoy junior ne veux pas que je lui verse une noise, mais je me refuse à vivre à ses crochets et par extension, de lui être redevable.

Enfin plus redevable que je ne le suis déjà.

Ça ferait de moi un être encore plus faible et méprisable que celui dont je croise le regard jour après jour dans mon miroir.

Et soudain, une alerte sonne, aux abords du quartier des docks. Une vieille dame moldue déclare avoir vu un individu suspect masqué rôder en cape noire, se déplaçant vers les docks, normalement désertes en cette journée de noël. C’est sans doute juste un détraqué, et on ne se déplacerait pas en temps normal sur des ouïe-dire mais j’ai besoin d’exercice et je saute sur l’occasion. Après avoir envoyé une courte magi-note à Malefoy qui gère à distance les éléments de l’équipe pour lui dire que j’étais sur le coup, je me prépare rapidement et me met en route.

Enfin un peu d’action !

POV Drago :

Ce travail m’ennuie. Vraiment.

Lorsque j’étais jeune, je me voyais très bien être à un bureau et donner ou plus exactement aboyer des ordres et laisser tout le travail aux autres.

Eh bien, vous savez quoi ? N’être là que pour donner des instructions et être responsable en cas de problème, ça craint.

Une note vient d’arriver magiquement sur mon bureau. Je l’aurais parié, Ron a sauté sur le cas du taré masqué. Et vêtu d’une longue cape noire. Comme un mangemort. Des images me reviennent en mémoire. Des images que je souhaiterais pouvoir oublier.

Je frissonne. Cette époque est révolue, elle ne devrait plus m’affecter de la sorte. Pourtant quand je regarde mes mains, je vois tellement de sang, comme des souillures invisibles et pourtant indélébiles…

Je me souviens cette promesse à moi-même faite dans un de mes derniers moments d’innocence. Ne plus tuer. Un sourire amer effleure mes lèvres.

J’y croyais vraiment, à ce moment précis. Que c’était possible. Que Dumbledore saurait trouver une voie pour moi, loin de toute cette violence…

Mais même ce vieux gâteux avait ses limites, et le chemin pour rentrer chez moi et dans la grâce de mes parents et des mangemorts en général, surtout après avoir failli à ma mission, avait été … atroce.

Repenser aux souffrances que j’avais moi-même enduré, face aux doloris que j’avais alors reçu n’était rien comparé au souvenir du mal que j’avais dû faire pour reprendre un statut de mangemort sans reproche et avoir de nouveau accès à des informations importantes. Car un espion ne sert à rien sans informations, n’est-ce pas ?

Mon cœur se serre à ces souvenirs, mais les larmes n’atteignent plus mes yeux désabusés depuis longtemps. A présent, je te comprends, Sévérus.

Avoir été espion, c’est garder une cassure dans son âme qui ne se résorbera sans doute jamais.

Une autre alerte, plus importante. Des mangemorts viennent de passer à l’attaque dans une rue passante moldue. La marque a été vue.

Mon cœur rate un battement et je m’empresse d’affecter tous les effectifs disponibles vers la zone sinistrée, en espérant qu’on arrive assez vite.

S’il vous plaît, plus de morts…

Et je me ressaisis et essaye de réfléchir. Quel est le sens de cette mascarade ? Les attaques de cet acabit avaient toujours été utilisées comme leurre pour cacher un élément apparemment moindre, mais d’une importance capitale par le seigneur des ténèbres et ses acolytes. Mais cette alerte a été la seule de la journée, mis à part… Impossible. Le détraqué. Et si…

Soudain, je réalise.

Ron.

Mon dieu, Ron a pris l’autre mission…

Mes mains se mettent à trembler. Que se passe-t-il ? Que signifie tout ceci ? Et Ron ? Ron est en danger ! Je le sais, mon instinct me le hurle.

Je jette un rapide coup d’œil aux petits papiers commençant à affluer sur mon bureau. La situation est en train de se réguler du côté des moldus, mais ça va encore prendre un moment avant de la stabiliser. Les oubliators sont déjà en route semble-il mais aucun des aurors présents ne peut à l’heure actuelle se détacher de cette mission.

J’essaie de garder mon calme et de réfléchir avant l’apparition de la dernière note. Le con !

Je saute sur les jambes et cours prendre mon manteau

« J’ai localisé le suspect. Je le suis vers l’entrepôt B de la zone sud. J’aurais besoin de renforts mais si pas dispo j'y vais en solo. Signé : auror Weasley R. »

Dans le bureau, la petite note écrite à la va-vite reste seule, ainsi que le reste des dépêches continuant d’affluer.  Je vais sans doute perdre mon travail, mais peu importe.

Weasley, je ne te laisserais pas te faire tuer, même si c’est la dernière chose que je dois accomplir de ma foutue vie ! Je te sortirais de là, foie de Drago Malefoy !

POV Harry :

L’inconnu est revenu. Avec dans les bras tout un tas de choses étranges. Il ouvre la porte grillagée de ma cellule et je ne peux m’empêcher de me tasser dans un coin.

Je murmure, éperdu : « Plus de mixtures, s’il vous plaît… Je ne veux plus, je ne veux plus L’entendre… »

La voix dans ma tête résonne d’un rire cruel « Tu es pourtant l’intrus dans ce corps, mais ça va changer, crois-moi et lorsque j’aurais le contrôle, rien ni personne ne saura se mettre en travers de mon chemin »

Je prends ma tête dans mes mains. J’ai l’impression qu’elle va exploser. Mon front me fait si mal, comme si quelque chose me transperçait le crâne à cet endroit et la douleur irradie tout autour, semblant se propager et enflammer tout mon système nerveux. Mes doigts se portent d’eux-mêmes au-dessus de mes yeux. Du sang. J’entends vaguement une voix d’homme dire que tout se passe comme prévu avant de me sentir sombrer dans le néant.

POV Ron :

Ce type est vraiment louche. Je balaye les environs du regard. Les renforts se font attendre, et je ne sais pas combien de temps ce type va rester bien sagement dans cet entrepôt. Tant pis pour eux, j’y vais.

Fort de cette décision, je me dirige vers la porte de l’entrepôt quand un bruit de transplanage me fait tourner la tête. Enfin, je me retourne, m’apprêtant à charrier mon collègue pour son temps de réaction, quand je me fige. Malefoy !

Il n’intervient jamais dans les missions. Jamais.

Je l’observe plus avant, cherchant à percevoir les raisons de sa venue en personne.

Ses yeux semblent hantés, il est fébrile. Je le vois ébaucher un pas vers moi puis se reprendre. Il se racle la gorge et finit par souffler un faible « Dis-moi que tu n’as rien »

Je secoue la tête et fronce les sourcils « Qu’est-ce que tu fais ici ? »

Il se masse l’arcade sourcilière et soupire « Une attaque de grande envergure dans un quartier moldu passant. Toutes les unités ont été dépêchées sur place. »

Je plisse les yeux « Donc tu es venu en personne. Toi. »

Il ferme les yeux et semble pâlir un peu plus. Je m’inquiète « Tu as le droit de laisser le commandement vacant ? » Je m’assure.

Il hausse les épaules et s’avance d’un pas vers moi, semblant avoir repris contenance.

« Il se passe quelque chose, Ron. Cette attaque n’est qu’une diversion, j’en suis sûr. Quelque chose est en train de se passer, ici. Quelque chose de grave. »

Je hoche la tête lentement. Il est on ne peut plus sérieux. Une terreur sans nom trouble son regard. Mais il semble avoir pris une décision et me lance un regard franc. « On est tous les deux dans cette galère, pas vrai ? Alors, allons-y ! »

Je lui lance un sourire de connivence. J’ai l’impression de partir au combat. Je suis serein, à nous deux, on réussira bien à se dépatouiller dans tout ce merdier.

Nous nous plaçons de parte et d’autre de la porte et il décompte avec ses doigts.

Trois.

Deux.

Un.

D’un seul homme, nous ouvrons la porte et nous plaçons dos à dos pour couvrir à la fois la droite et la gauche.

C’est parti !