Le dieu Héphaïstos les regardait tour à tour. Son corps difforme témoignait de sa douloureuse chute du haut du Mont Olympe. Il n'y avait en lui rien qui laissait penser qu'il faisait partie des Olympiens. Quand nous pensons à un dieu, c'est généralement quelqu'un de beau et de gracieux. Héphaïstos en était tout le contraire.
- Ne faites pas attention à mon apparence !
- Vous n'en êtes guère responsable, Seigneur Héphaïstos ! répondit Lou en s'inclinant légèrement en signe de respect.
- Je le sais bien, petite !
- Ceci est la faute de votre père, Jupiter non ? demanda Thomas
- Pour moi, c'est Zeus. Et non, ce n'est en rien de sa faute ! En fait, c'est ma mère, la déesse de la famille, Héra, qui m'a jeté du haut du palais de l'Olympe ! J'étais déjà laid et difforme à l'époque, cela n'a fait qu'aggraver les choses ! Enfin bon. Il semblerait que vous ayez eu un petit problème avec mon automate... J'en suis navré, je ne saurais dire comment il est sorti de la casse dans laquelle il se trouvait... Personne n'est blessé ?
- Non, Seigneur Vul... Héphaïstos ! répondit Thomas.
- Tant mieux ! Je préférerais que les demi-dieux voulant sauver le monde restent en vie quand même ! J'aimerais vous transmettre ceci de la part de l'un de mes frères.
Le dieu tandis à Cecil, qui se trouvait être le plus proche de lui, une petite boîte de fer-blanc surmonté d'un couvercle de couleur rouge. Cecil poigna dedans et retira sa main aussitôt. La boîte était brûlante.
- Oups... Désolé, mais, étant un dieu, je n'ai pas sentit la chaleur de la boîte... Votre main va bien jeune demi-dieu ?
- Ouai ouai, ça va ! râla Cecil en frottant sa main.
Héphaïstos fit apparaître une paire de gants qu'il tendit à Cecil. Le jeune garçon les prit précautionneusement et les enfila. Héphaïstos lui fit signe de reprendre la boîte, ce que le demi-dieu refusa tout d'abord, mais sous l'insistance du dieu, il finit par céder et approcha sa main de la boîte brûlante. Il l'effleura du bout des doigts, et ne ressentant aucune chaleur, il la prit en main.
- Ces gants sont résistants à la chaleur et protègent la peau des mortels. C'est mieux comme ça non ? rigola le dieu.
Toujours râlant, Cecil fit oui de la tête et fit mine d'ouvrir la boîte, mais le dieu l'en empêcha, lui disant qu'il leur faudrait attendre.
- Très bien. Alors, votre amie, la fille de Panacée, elle se trouve à cinq kilomètres d'ici, près de la voie ferrée. Ses ravisseurs sont des monstres très dangereux et très intelligents, c'est pourquoi il vous faudra faire preuve de prudence et d'ingéniosité. Je suis avec vous... Heum... Psychologiquement va-t-on dire, alors bonne chance !
Et le dieu disparu, laissant planter là trois demi-dieux perdus et ne sachant que faire d'une boîte brûlante et d'une information sur des ennemis inconnus et encore jamais répertoriés dans les mythes de l'Antiquité grecque. Thomas suggéra aux deux autres de se dépêcher d'aller chercher la demi-déesse et de reprendre la route à la recherche de Moïra. Lou et Cecil trouvèrent son envie pressante de trouver la déesse louche, mais aucun des deux n'en dire mots.
Ils trouvèrent la voie ferrée et en suivirent le chemin. Comme promis, au bout de cinq kilomètres, ils trouvèrent une vieille cabane en bois délabrée et à moitié brûlée. Les vitres étaient détruites et la porte pantelante et le toit était à moitié effondré. Elle n'avait l'air de rien comme cela. Relativement confiants, les trois demi-dieux s'avancèrent vers cette cabane qui ne payait pas de mine. Mais arrivés à dix mètres, ils sentirent soudainement leurs forces les quitter. Tous devinrent pâles. Continuant cependant d'avancer, ils se rendirent compte qu'aux fenêtres, des yeux les scrutaient. Ils étaient espionnés. Les yeux, tous de couleur rouges ou jaune, n'avaient pas de pupilles et ressemblaient à des fentes.
Sortant de son sac un poignard d'or, Thomas le pointa vers la cabane, chancelant. Il se sentait étrangement vide, comme si ses yeux qui le scrutaient le vidaient de ses forces. Il se surprit à se demander ce qu'il fichait ici en compagnie de deux autres adolescents. Puis, une idée lui vint à l'esprit. Il cria aux autres de ne surtout pas les regarder dans les yeux, et détourna les siens aussitôt. Il sentit très vite ses forces lui revenir. Il vit que Lou et Cecil reprenaient des couleurs. Il supposa que lui aussi devait en reprendre. À l'aveuglette, il tâta la cabane pour en trouver la porte d'entrée. Il la trouva et entra, brandissant son poignard qui s'allongea en épée.
- Salut bande de monstres, s'écria-t-il.
Mais personne ne répondit. Scrutant la pièce plongée dans l'obscurité, Thomas s'aperçut qu'elle était vide. Il se demanda comment la pièce pouvait être si sombre, le toit n'étant qu'à moitié au-dessus de sa tête et les fenêtres n'étant pas bouchées. Il en conclu qu'un sort avait été lancé à la cabane.
- Tu veux que j'annule le sort ? demanda une voix derrière lui qui le fit sursauter.
- Oui, s'il te plaît, répondit-il en reconnaissant Lou.
Une faible lumière emplit la pièce et très vite, le soleil pénétra dans à l'intérieur. Lou et Cecil, qui étaient rentrés à la suite du fils de Discordia, furent aussi surpris que lui en découvrant la pièce vide. Ils se mirent à fouiller la cabane, espérant y trouver un quelconque indice quant à l'endroit où pouvait se trouver Périthale, mais rien. Ce n'est seulement qu'au moment où ils allaient quitter la bâtisse que Cecil aperçut une silhouette au loin, s'enfonçant dans les petits bois qui bordaient la voie ferrée. Il prévint les deux autres et se mit aussitôt à la poursuite de cette ombre furtive.
La fille d'Hécate lança un sort en direction de son ami qui allait l'aider à courir beaucoup plus vite. Elle récupéra une arme dans le sac de Thomas que celui-ci lui tendait. Elle avait opté pour une petite dague en Or Impérial dont la poignée était incrustée de pierres. Thomas, voyant son regard étonné, lui expliqua que ce poignard lui venait de l'une de ses ancêtres et qu'il le prenait partout où il allait. Soudain, ils entendirent au loin un sifflement aigu qui aurait pu leur percer les tympans s'ils s'étaient trouvé dans un endroit plus proche. Le sifflement fut suivi par un hurlement de douleur que Lou reconnu comme étant celui de Cecil. Lou se précipita tête baissée dans la forêt à la rescousse de son meilleur ami.
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