Lucas La sonnerie de mon réveil me sortit du sommeil avec un bruit strident désagréable. Je descendis du paradis des rêves pour me retrouver sur Terre, mon enfer. Il était 6h30. Les cours commençaient à 8h30. J'avais largement le temps de me préparer... ce qui était totalement voulu. Je m'étirai comme un chat sur mon lit puis décidai enfin de me lever. L'angoisse de la veille ne m'avait pas quitté mais j'avais décidé de faire avec. Inutile d'y penser sans cesse, ça n'aurait fait qu'aggraver mon état. Je baillai et me dirigeai vers la porte de ma chambre. Avant de l'ouvrir, je poussai la commode que j'avais placé juste devant, ma dernière et ultime protection contre Rei... S'il avait peut-être la force de pousser la porte malgré ce poids placé devant, au moins je ne manquerai de remarquer son intrusion. La porte ouverte, je jetai un oeil à droite, à gauche, puis me faufilai en catimini vers la salle de bain. Après une douche rapide, je me vêtis d'un peignoir de bain et retournai dans ma chambre. Tout le monde dormait, Rei y compris. Que c'était agréable ! Je mis mon uniforme l'estomac noué, il m'allait bien, il fallait l'avouer... Je soupirai en priant pour que ma rentrée se déroule sans encombre... Après un dernier coup de brosse sur cette tignasse blonde qui ne voulait pas se laisser dompter, j'abandonnai et descendis prendre mon petit déjeuner. Shizuka n'était pas réveillée mais la table était déjà mise, à ma grande surprise. La nouvelle femme de mon père était vraiment prévenante. Celle-ci arriva une vingtaine de minutes plus tard. - Ohayô (Bonjour)Lucas, déjà réveillé ! J'acquiesçai, la bouche pleine de mon toast à la confiture. - C'était inutile de te lever si tôt, l'école n'est pas loin de la maison. J'avalai le contenu de ma bouche. - Ohayô Shizuka, je préférais être à l'avance pour mon premier jour... Je ne lui dis pas que le but premier de ce réveil si matinal n'était autre que d'échapper à ce monstre qu'elle avait pour fils... Mon père entra à sa suite dans la cuisine. - Salut Papa, dis-je en français. Il sursauta, me regarda d'un air hagard et répondit à mon salut avant de s'installer à table. Toujours à la masse celui-là. Une dizaine de minutes plus tard, alors que Shizuka et moi papotions tranquillement sur le bon déroulement de mon arrivée à l'école, Rei fit son entrée. - Ohayô ! La bête était déjà vêtue de son uniforme qui lui allait fichtrement bien. Sa veste était ouverte, sa cravate desserrée et le dernier bouton de sa chemise ouvert, ses cheveux noirs de jais aisément domptés... Il était sexy. Je me rendis compte soudain que je le dévisageais sans retenue, je secouai la tête et chassai ces pensées parasites qui me polluaient l'esprit. Rei m'avait une fois de plus empoisonné. Il fallait que je me reprenne. Ce genre de pensées ne me serait jamais venu à l'esprit avant mon arrivée au Japon. Je ne devais pas laisser ce monstre m'influencer... Le monstre en question profita de ma cogitation pour me voler un baiser et s'assit mes côtés avant que je ne puisse réagir. Il se tourna vers moi, un sourire insolent aux lèvres. - Ohayô Lulu-chan. Je me levai d'un bond, furieux, et me dirigeai vers la sortie. - Tu as fini de manger ? Me demanda-t-il sournoisement Je le fixai rageusement : - Quelqu'un vient juste de me couper l'appétit. Je quittai la pièce. Je montai dans la salle de bain me brosser les dents pour désinfecter ma bouche : aucune envie d'avoir le « goût » de Rei toute la journée. Je tentai une ultime fois de m'aplatir la tignasse sans résultat. Je soupirai et entrai dans ma chambre pour prendre mon sac de cours et redescendit les escaliers avant de sortir de la maison. L'air frais du matin me fit du bien, même si le vent me décoiffa davantage. Tant pis, au moins où j'en étais. Je pris le chemin du Lycée en savourant chaque pas... qui m'éloignait temporairement de Rei. Vive la liberté ! Le trajet n'était pas très long, je ne pris pas le métro même s'il avait pu me faire gagner du temps... du temps j'en avais aujourd'hui justement, alors autant en profiter ! Au bout d'une bonne demie-heure de marche, le bâtiment de mon établissement scolaire apparut soudain. Imposant était le premier mot qui me vint à l'esprit... imposant et grouillant de monde, monde qui ne se gênait pas pour me dévisager sans vergogne. J'ignorai les curieux et m'apprêtai à franchir les grilles du Lycée quand une moto pétaradante me doubla à toute vitesse, manquant de peu de m'écraser... Rei, à n'en pas douter. Je le traitai de tous les noms et poursuivit ma route. Cet enfoiré n'avait pas intérêt à me pourrir la vie jusqu'au Lycée... Pourvu qu'on ne soit pas dans la même classe !!! Le directeur lui-même m'accueillit à mon grand étonnement. Tout sourire, ce bonhomme jovial et potelé me fit visiter l'école avant le début des cours. Les élèves étrangers étaient rares, m'expliqua-t-il, et très enrichissant. Il espérait que je passerai un bon séjour ici puis il me laissa aux mains de mon titulaire : Nanahara-sensei (professeur Nanahara). Mon professeur principal et professeur de mathématiques était l'opposé total du directeur. Froid, intransigeant et sévère, il était un japonais typique aux yeux bridés et aux cheveux noir ébène coupés courts. Sur son nez, de petites lunettes accentuaient son air sérieux. J'étais dans la classe 2-5, la cinquième classe de deuxième année. Nanahara-sensei ouvrit la porte coulissante, mon ventre se serra. Rei ? Pas Rei ? Mon professeur entra, salua les élèves dans un silence de mort puis me fit signe d'entrer à mon tour. - Aujourd'hui nous accueillons un nouvel élève, je compte sur vous pour que sa rentrée se passe au mieux... Le professeur continua de parler, je ne l'écoutai pas, bien trop occupé à chercher Rei du regard... Rei que je ne trouvai nul part. Quel soulagement ! Toussotement. Je sursautai. Nanahara-sensei me regardai au travers de ses petites lunettes ovales avec un air agacé. - oui ? Fis-je innocemment - Je vous ai demandé de vous présenter. Mon professeur releva ses lunettes de l'index, énervé. Je me tournai vers la classe et m'inclinai légèrement avant d'annoncer haut et fort. - Bonjour, je m'appelle Lucas Chevalier – Lucas étant mon prénom, Chavalier mon nom de famille – je viens de France, pas trop loin de Paris, j'ai 17 ans et je suis ravi d'être parmi vous. Yoroshiku onegaishimasu (enchanté de faire votre connaissance). Étant donné que les Japonais avaient pour usage de donner d'abord leur nom de famille puis leur prénom, je m'étais autorisé à leur faire la remarque puis je terminai sur une formule habituelle. Nanahara-sensei m'envoya au bout de la classe sur un banc vide à côté de la fenêtre puis commença le cours. Pendant que je m'installai, je sentis tous les regards de mes nouveaux camarades converger vers moi. Un peu mal à l'aise, je me concentrai sur ma feuille et mon crayon (les Japonais n'utilisent que des crayons pour écrire en cours). Une fille assise à côté de moi engagea la conversation : - Moi c'est Keiko, Mimura Keiko, yoroshiku (enchantée) ! Je l'observai. Asiatique à n'en pas douter, elle s'était pourtant décoloré les cheveux pour qu'ils prennent une teinte plus claire, entre le brun et le châtain. Mignonne mais un peu trop maquillée, elle me fit un sourire resplendissant auquel je ne pus que répondre. - Tes cheveux sont blonds d'origine ? J'acquiesçai. - Quelle chance ! Je voudrais tant avoir cette couleur ! Elle me regarda avec envie. - Et tes yeux ? Pas de lentilles, n'est-ce pas ? Du naturel ? J'acquiesçai une seconde fois. Elle était verte de jalousie, je souris. - Tu es très bien comme tu es, inutile d'envier les autres pour des bêtises. Elle rougit du compliment et gloussa silencieusement... Pas assez silencieusement malheureusement : le professeur s'énerva. - Chevalier, je sais que c'est votre premier jour de classe mais je n'hésiterai pas à vous mettre dehors si vous continuez à draguer votre voisine ! Je rougis à mon tour et reportai mon attention sur ma feuille. - Gomennasai... (je suis désolé, excusez-moi...) Le cours se poursuivit, chiant et endormant. J'accueillis la sonnerie de la pause de midi avec soulagement. Deux heures de math suivies de deux heures d'histoires pouvaient certes paraître intéressantes, mais lorsque la matière n'était pas facile à intégrer et que l'on ne comprenait pas bien la langue, c'était une toute autre paire de manche. Keiko, ma voisine, se précipita vers moi tout comme plusieurs autres élèves, la plupart de sexe féminin. J'eus une pensée pour Kyo, peut-être que son stratagème me serait utile pour finir. - On mange ensemble ? - Volontiers, il y a une cafétéria tout près ? Je n'ai pas pris de quoi manger. - Je t'y emmène ! La porte de la classe s'ouvrit. Mon coeur s'arrêta. Rei. Ah non ! Ce démon n'allait pas venir me pourrir la vie jusqu'ici ! Il s'approcha de moi avec un sourire jusqu'aux oreilles. Importuné par cette vue déplaisante, je tournai la tête vers la fenêtre, bien décidé à nier ce grossier personnage. Il s'arrêta en face de mon banc. Je n'avais pas remarqué que mon récent entourage s'était soudain écarté de quelques mètres. - Lulu-chan ! Je poursuivis ma résolution : le snober complètement. Je ne répondis rien, mon regard toujours porté vers la fenêtre. - Tu as oublié ton bentô (déjeuner japonais) ! Me dit-il sans se départir de son sourire. Voyant mon total désintérêt, il me mit mon repas juste sous le nez. - Kâsan (Maman) l'a fait rien que pour toi, c'est pas gentil de ne pas le prendre. Je pris le paquet enroulé d'une serviette d'un geste rageur. - Merci. Puis mon regard se reporta une nouvelle fois vers la fenêtre. J'entendis Rei soupirer. Bien fait ! Ma petite revanche. Il s'apprêta à partir, j'étais prêt à crier victoire quand soudain, il fit demi-tour, m'ébouriffa les cheveux et m'embrassa sur la joue. Il quitta ensuite la pièce non sans ajouter : - À ce soir, Lulu-chan ! Puis le démon disparut... Et je pus enfin respirer en tentant d'apaiser mon coeur qui battait la chamade. Quel enfoiré ! oOo
Mes jours au Lycée se passaient sans encombre, si l'on oubliait le phénomène prénommé Rei qui s'amusait à mettre dans l'embarras dès qu'il en avait l'occasion. Je me rappelai de notre première confrontation dans l'enceinte de l'école, une fois qu'il eut quitté ma classe, Keiko m'avait interrogée d'une voix à la fois excitée et craintive... flash back - Tu le connais ? Mes autres camarades m'observaient en silence, retenant leur souffle. J'acquiesçai malgré moi, à quoi bon mentir ? - Mon père s'est remarié avec sa mère... on... j'hésitai, on vit sous le même toit. J'entendis quelques jurons étouffés parmi les élèves. J'observai Keiko qui me fixait avec des yeux brillants. Je ne comprenais pas son enthousiasme, ça me déconcerta. - Qu'y a-t-il ? Lui demandai-je anxieux - Rien ! C'est juste dingue que tu vives avec Lui. Mon visage un peu perdu la poussa à s'épancher davantage sur le sujet : - Sasagawa Rei... Je me rendis compte que c'était la première fois que j'entendais son nom de famille. Elle poursuivit : - Leader du gang Neverland. Il contrôle toute la ville dans l'ombre, il est prêt à tout pour assurer son pouvoir. Plus d'un se sont retrouvés à l'hôpital après l'avoir affronté... Elle rajoute à voix basse : - Et la rumeur dit même que le cimetière au Nord de la ville contient quelques unes de ses victimes... Je frissonnai pourtant sceptique face à de telles affirmations. Certes, Rei était dangereux, mais de là à ce qu'il tu quelqu'un... Je me rappelai soudain le regard de ce monstre lorsqu'il m'avait lâché que je lui appartenait. Un second frisson me parcourut l'échine. Oui, ce regard aurait pu tuer, j'en avais la certitude. Mon ventre se noua, je ne comprenais pas l'engouement de Keiko envers ce psychopathe. Était-elle masochiste ? Je chassai cette idée de ma tête et pris la parole d'une voix blanche pour mettre les choses au clair : - Lui et moi, on ne s'entend pas très bien, faut pas croire... J'entendis quelques soupirs de soulagement dans l'assistance même si la plupart de mes camarades gardaient encore leurs distances. Keiko n'avait pas l'air de s'inquiéter, au contraire, désireuse d'étancher sa soif de curiosité, elle ne cessa pas de me poser des questions : - Il est comment à la maison ? Je soupirai : - Insolant et exaspérant. - Il prend quoi au petit-déjeuner ? - Tu as déjà vu sa chambre ? - Quelle est sa couleur préférée ? Son repas préféré ? Son film préféré ??? J'éclatai : - ARRÊTE ! TAIS-TOI !!! Keiko se tut brusquement, stoppée plein élan. Je repris plus calmement, un peu gêné de m'être ainsi énervé... mais je ne comprenais vraiment pas comme elle pouvait s'intéresser à ce débile profond. - Désolé, s'il te plait, ne me parle plus de lui. Ça fait quatre jours à peine que je suis au Japon, je le connais à peine et franchement, je suis très loin de l'apprécier. Depuis lors, Keiko n'avait plus jamais abordé le sujet avec moi. J'étais soulagé... pourtant, au fond de moi, je sentais que quelque chose n'allait pas... fin du flash back - Lucas ! Tu m'écoutes ? Je sursautai, revenant soudain à la réalité. - Gomen (pardon), j'étais... ailleurs. Keiko afficha cette moue boudeuse qui la rendait tellement craquante. - Pas avec une autre fille j'espère. Mes lèvres s'étirèrent, sa jalousie me plaisait. - Ne t'inquiète pas, aucune fille ne t'arrive à la cheville. Elle m'offrit son plus beau sourire et s'empara de mes lèvres. Je goûtai à son gloss fruité, fraise-cerise aujourd'hui, elle changeait tous les jours. Nous étions dans le parc du Lycée. Ordinairement, les Japonais n'étaient pas expansifs dans leurs marques d'affection, mais Keiko n'hésitait pas à m'embrasser, même dans un lieu public. La pudeur, c'était pour les vieux, me répétait-elle sans cesse, et je n'allais pas la contredire. Cela faisait presque une semaine que nous sortions ensemble, et deux mois que j'étais arrivé au Japon. Je commençais à me sentir vraiment chez moi ici, Keiko y était sans doute pour beaucoup. La première fois que je l'avais vue, je n'aurais jamais imaginé sortir avec elle. Elle n'était pas mon style mais pourtant, au fil de nos discussions quotidiennes, je compris que cette façade de mascara et de fond de teint n'était qu'une toute petite partie de sa véritable personnalité. Keiko était drôle, vive d'esprit et toujours enthousiaste, nous avions beaucoup en commun, plus que je ne l'aurais jamais imaginé et sa compagnie m'était agréable... Si bien que, lorsqu'elle me demanda qu'on sorte ensemble, je ne trouvai pas de raison de lui dire non. - On rentre ensemble après les cours ? - Désolé, Nanahara-sensei m'a demandé de passer à son bureau après les cours... - Qu'est-ce qu'il te veut ? - Aucune idée... Cette entrevue avec mon professeur de mathématiques m'angoissait. Je n'avais jamais apprécié ce bonhomme et, visiblement, la réciproque était vraie. - Dommage ! Je voulais aller faire un tour dans le centre commercial pour m'acheter une nouvelle paire de boucles d'oreille ! Je souris malgré moi, elle possédait déjà une paire pour chaque jour de l'année, ou presque. - On ira demain si tu veux. - Moui... Elle était déçue, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure mais elle ne le cachait pas. Quand elle avait une lubie, il était difficile de la lui ôter de la tête, surtout si ça concernait son look... La cloche sonna la fin de la pause de midi. Nous reprîmes la direction de notre classe en silence. Keiko m'en voulait et pourtant je n'étais pas en tort. Tant pis, ça finirait par passer. Je ne fis plus attention aux regards craintifs que me lançaient les autres élèves durant le trajet. Le fait que Rei et moi vivions ensemble s'était propagé comme une trainée de poudre. J'avais fini par m'y habituer en comprenant que, où que j'aille dans cette ville, l'ombre de ce type planerait toujours sur moi. Rei De son côté, Rei fulminait. Une semaine, une semaine qu’il essayait de faire lâcher prise cette sale pute qui s’accrochait aux basques de son jouet ! Il n’avait pourtant pas hésité à utiliser toutes les méthodes imaginables en passant par la provocation, la menace et même la torture… Rien à faire. Rei en personne lui avait même fait part de son opinion sur le petit couple qu’ils formaient tous les deux : « très joli, certes, mais tu ferais mieux de casser avec lui si tu tiens à rester en vie »… Bien sûr, c’était la version officielle des choses, en vérité, Rei s’était montré beaucoup moins poli, pour ne pas dire carrément grossier. Le Nippon soupira d’agacement et donna un coup de bottine dans la table en face de lui. Son plan initial était de ne rien dire à Lucas, il ne devait pas être au courant des persécutions de sa petite copine cette dernière aurait dû rompe d’elle-même avec son jouet favori, c’était le plan de base. Cependant, cette sale peste était plus tenace qu’il ne l’avait cru et s’attachait telle une sangsue au bras de Lucas dès que Rei entrait dans son champ de vision… histoire de faire enrager davantage le Nippon. Il finirait pas la tuer, c’était certain… mais s’il le faisait maintenant, Lucas risquerait de ne pas le lui pardonner. Non, il fallait trouver autre chose, les forcer à ses séparer de leur plein gré… - Rei-sama L’intéressé observa un jeune garçon, Mishima Takeo, s’incliner devant lui. Le leader de Mikazuki l’avait envoyé espionner le couple Lucas-Keiko pour lui faire un rapport chaque jour sur l’état de leurs relations. Autant dire que pour le moment, cette démarche n’avait réussi qu’à le faire enrager davantage… D’un geste de la main, il ordonna à tout le monde de sortir de la pièce. Cette affaire était confidentielle, elle n’avait rien à voir avec Neverland. - Je t’écoute, dit-il une fois seuls - Chevalier et Mimura sont arrivés à 8h14 précise au Lycée. Ils se sont immédiatement rendus dans leur classe pour y discuter de musique, principalement un groupe nommé Devil qui semble beaucoup plaire au Français. Ensuite la discussion a dévié sur d’autres chanteurs populaires en ce moment comme… Rei n’écoutait qu’à moitié. Encore un compte rendu qui ne lui servirait à rien. Le temps était maussade, il se mettrait sans doute bientôt à pleuvoir… et dire que sa moto était en réparation ! Il devrait rentrer sous la pluie… sans parapluie. Il demanderait à Shinji de lui prêter le sien, aucune chance que ce dernier lui refuse cette petite faveur… surtout qu’en ce moment, le bras droit de Rei ne savait plus trop comment se tenir face à son leader : il n’avait toujours pas plus d’informations concernant le groupe Mikazuki et, peu importait ses recherches, il n’avait pas encore trouvé qui était réellement Kyôichi Sôma. - Pendant la pause de midi… Le subordonné de Rei continuait son discours, le Nippon continua ses réflexions. Il n’en revenait toujours pas que Shinji n’eût rien trouvé ou presque sur le chef de Mikazuki. C’était véritablement une première. Qui était donc ce mystérieux leader ? Qu’avait-il à cacher pour rester ainsi dans l’ombre ? Était-ce de la provocation ? De la prudence ? - …donc Mimura rentrera seule. Rei sursauta et revint à la réalité. - Quoi ? Takeo répéta, mal à l’aise. - Mimura rentrera seule chez elle. - Pourquoi ? Le gamin se rendit compte que son boss ne l’avait pas du tout écouté et hésita une seconde à se mettre en colère. Non, même pas une seconde, quelques centièmes seulement. Si l’on tenait à sa santé, ou même à sa vie, il valait mieux ne pas contrarier Sasagawa Rei. - Chevalier doit aller voir Nanahara-sensei après le cours, Mimura Keiko rentrera donc seule chez elle. Un sourire effrayant se dessina sur les lèvres du leader. Un frisson de terreur parcourut la colonne vertébrale de son subordonné. - Arigatô (merci) Takeo, ton discours aura servi à quelque chose pour une fois. D’un geste de la main, il congédia le jeune homme qui ne se fit pas prier pour s’enfuir de cette pièce. Le sourire de Rei s’élargit encore, il venait d’avoir une idée… Lucas La sonnerie de la fin des cours se fit entendre. Je me levai lentement de mon siège, me préparant mentalement à affronter mon professeur de mathématiques, ce bonhomme antipathique et désagréable comme pas permis. Je regardai du coin de l’œil Keiko qui discutait avec une de ses amies. Visiblement, elle avait retrouvé sa bonne humeur. Durant ces deux mois, je m’étais habitué à ses changements d’humeur fréquents qui la rendait tantôt adorable, tantôt irritable. Mes affaires emballées, je la rejoignis pour lui informer que je me rendais en salle des professeurs. Elle m’accorda à peine un regard, trop occupée à discuter du nouveau produit de beauté destiné à raffermir la peau du visage. Je haussai les épaules. Au moins, elle avait oublié sa précédente lubie. Tel un condamné marchant sur le chemin qui menait à la chaise électrique, je me dirigeai vers le bureau de Nanahara-sensei puis je frappai à la porte. Une voix d’homme me répondit d’entrer. J’ouvris la porte, prêt au martyre. - Bonjour, vous aviez demandé à me voir… L’homme me regarda d’un air glacial au travers de ses petites lunettes. - En effet. Prenez un siège et installez-vous… Rei - Keiko Rei patientait sagement à la grille d'entrée du lycée. Son apparence calme et sereine cachait de sombres desseins. Seuls ses yeux froids et avides de vengeance trahissaient ses pensées. La sonnerie de la fin des cours avait retenti quelques minutes plus tôt et le leader de Neverland s'était presque précipité dehors pour ne pas manquer sa proie. La pluie coulait à flot et, si le second de sa bande lui avait gracieusement prêté son parapluie, le Nippon ne l'utilisa pas pour autant, pas encore. La pluie ruisselait sur son visage, lui donnant une image presque irréelle de mannequin faisant la pub pour un shampooing. Le jeune homme regarda d'un oeil glacial les élèves qui rentraient chez eux sous des parapluies colorés. Il commençait à s'impatienter... De son côté, Keiko n'avait pas du tout envie de rentrer chez elle. Il pleuvait des cordes dehors et sa coiffure allait en prendre un coup, même sous son parapluie. De plus, son plan de faire du shopping après les cours tombait à l'eau. La demoiselle soupira, ses amies étaient déjà parties en direction de leurs divers clubs d'activités extra-scolaires et Lucas avait disparu. Elle se rappela soudain qu'il lui avait vaguement parlé d'un rendez-vous avec leur professeur de math... Elle haussa les épaules. Sortir avec cet européen lui avait plu un moment, mais elle finissait par se lasser d'être avec lui. Pourtant, elle ne romprait pas. Aucune chance. Voir le leader de Neverland, vert de rage devant le petit couple qu'ils formaient la satisfaisait entièrement. Certes, elle en avait bavé, Rei s'était montré souvent très inventif dans ses tentatives d'intimidation, mais Keiko était tenace, très tenace. Quand elle voulait quelque chose, elle l'avait. Toujours. D'un geste machinal, elle récupéra son sac et quitta la classe. Elle passa devant son casier y prendre quelques affaires puis se dirigea vers la sortie du bâtiment. La pluie n'avait pas cessé. Keiko soupira une nouvelle fois en jurant entre ses dents. D'un geste, elle attrapa son parapluie (rose flash) et l'ouvrit. Tenta de l'ouvrir. - MERDE ! Tu vas t'ouvrir saleté ?!?! Rei commençait sérieusement à s'énerver. La fin des cours avait sonné depuis près d'un quart d'heure. Le flux des élèves s'était rapidement estompé et sa proie n'était toujours pas arrivée. À moins qu'il ne l'ait ratée ? Non, impossible. Elle allait arriver, devait arriver. L'attention du leader fut soudainement attirée par un juron strident venant de la porte du bâtiment principal. Une silhouette longiligne se profilait sous le minuscule abris qu'offrait l'entrée du bloc de béton. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire carnassier lorsqu'il reconnut la demoiselle. La chasse était ouverte. Pendant ce temps, Keiko s'énervait sur son parapluie. - Tu vas t'ouvrir oui ! Quelques jurons plus tard, elle parvint enfin à « ouvrir » l'objet... La demoiselle s'énerva encore plus à la vue du résultat : la toile rose était déchirée et plusieurs baleines pendouillaient lamentablement. Elle pouvait dire adieu à sa coiffure. - MEEEEERDE !!!! Toussotements discrets. - Un problème ? Keiko sursauta, elle n'avait pas entendu le jeune homme arriver... Et quel jeune homme ! Rei, en chair et en os, mouillé certes, mais incroyablement sexy, se tenait devant elle, un fin sourire ironique aux lèvres. Il avait vu son petit numéro, c'était certain. Le rouge de la honte lui monta aux joues, bientôt remplacé par un sentiment d'énervement profond. - C'est évident, non ? Elle secoua le pauvre cadavre du parapluie qu'elle venait d'assassiner. - En effet... Rei avait du mal à ne pas rire. Il n'aurait pas hésité si la situation ne l'arrangeait pas à ce point. C'était une occasion inespérée... Le ciel était avec lui, littéralement. Il ouvrit son propre parapluie et le passa au-dessus de la tête de la demoiselle. - Un peu d'aide ? Demanda-t-il avec tout le sérieux dont il était possible. Keiko observa Rei d'un air stupéfait. Elle s'attendait à une blague vaseuse ou à une remarque pleine d'ironie de la part du type qui faisait tout pour la rendre folle depuis quelques semaines, pas à la main secourable qu'il lui tendait. Prête à accepter ce cadeau inespéré, elle hésita soudain. C'était louche tout ça, très louche, trop louche... un piège trop gros comme une maison pour qu'elle ne s'en aperçoive pas. Fallait pas la prendre pour une conne non plus ! Elle était intelligente... elle y croyait fermement. - Que me vaut cet honneur ? Rei haussa les épaules, plaça le parapluie au-dessus de sa propre tête et fit mine de s'en aller. - Si tu ne veux pas... Les yeux de Keiko s'agrandirent en voyant son sauveur providentiel s'en aller. Du pallier de la porte, elle jeta un cri désespéré. - Attends ! J'ai jamais dit que je ne voulais pas !!! Rei s'arrêta. Un sourire fendit ses lèvres. Il avait gagné. Reprenant son sérieux, il se retourna lentement et observa la jeune fille. C'était pathétique, tout ça pour quelques gouttes de pluie. Il avait presque pitié, presque. Il revint sur ses pas et attendit que la jeune fille se place à côté de lui sous le parapluie. Un soulagement sans nom s'abattit sur Keiko lorsqu'elle vit le célèbre leader se retourner et revenir près d'elle. Sa coiffure avait une chance de s'en sortir ! Elle questionna cependant le jeune homme avant d'accepter l'offre. - Pourquoi ? Rei la regarda d'un oeil agacé. Elle allait se décider oui ou merde ! Il secoua la tête pour remettre ses idées en place. Il ne devait pas s'énerver, tout son plan tomberait à l'eau. Il lui offrit un sourire resplendissant et plein de son ironie habituelle. - Mais je suis une crème voyons, tu le sais bien. Keiko fit une grimace. Si lui était une crème, elle voulait bien être le Pâpe. - Sérieusement, pourquoi ? Le sourire du jeune Nippon s'effaça. Elle n'allait visiblement pas lâcher le morceau cette garce. Ce n'était pas nouveau, Rei avait déjà remarqué combien Keiko était tenace et ça ne facilitait en rien le bon déroulement de ses projets. Il décida de jouer la carte de la franchise... du moins jusqu'à un certain point. - J'ai appris que Lucas ne rentrait pas avec toi aujourd'hui alors j'en ai profité pour t'attendre, j'avais envie de te voir pour... discuter. Les yeux de Keiko s'élargirent pour la deuxième fois en quelques minutes. Rei n'avait pas l'air de mentir et pourtant... quelque chose n'allait pas. - Et bien vas y, je t'écoute. AAAAHHH !!! il allait la tuer cette salope ! Si ce n'était pas pour récupérer Lucas qu'il faisait ça, le jeune homme lui aurait déjà fracassé la figure. Cependant, il contint ses pulsions meurtrières, il ne devait surtout pas craquer... - On en parle en chemin, ok ? Je commence sérieusement à me les geler. Keiko observa Rei. En effet, trempé jusqu'aux os comme il était, le pauvre devait être transit de froid. Prise de pitié (elle était peut-être salope, elle restait humaine), elle accepta l'offre. Qu'avait-elle à perdre ? |