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Pain melon
Par Ein
Originales  -  Romance  -  fr
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Arrivée au Japon

Note de l'auteur :

N'étant pas bilingue français-japonais, excusez-moi si je fais des fautes de japonais lors des rares passages écrits dans cette langue (ça se fera de plus en plus rare au fil du temps, vu que le personnage principal comprendra de mieux en mieux le japonais). N'hésitez pas à me corriger si vous vous y connaissez un peu mieux que moi !

N'hésitez pas non plus à me laisser quelques reviews... positives ou négatives (tant qu'elles m'aident à m'améliorer, je ne demande pas mieux)

Je précise tout de même que c'est ma première fiction yaoi (même si au début ça reste très soft hein ;)) et première fiction qui dépasse les trois premiers chapitres... Donc navrée si mon manque d'expérience se fait ressentir... Sur ce, Bonne lecture !

Edit : Chapitre corrigé par Atsuna ! Merci à elle =3

 

Chapitre 1 : Arrivée au Japon

 

Lucas

Ma mère me conduisit à l'aéroport de Paris Charles de Gaule. Il pleuvait ce jour-là, ce qui n'arrangeait en rien l'humeur exécrable de celle-ci. Le ciel gris reflétait parfaitement mon état d'esprit : morose. Quitter mon pays natal pour aller m'installer dans un archipel totalement inconnu m'angoissait mais moins encore que l'idée de retrouver ce père que je n'avais pas revu depuis mon enfance. Je n'avais gardé de lui que quelques photos, les rares que ma mère n'avait pas brûlées dans un accès de colère, et aucun souvenir. Cet homme à la carrure athlétique et au sourire Colgate me faisait l'effet d'un parfait étranger... avec lequel j'allais désormais passer le reste de ma vie, ou du moins jusqu'à ma majorité. Plus qu'un an à tenir, donc, et je n'étais même pas encore arrivé.

Mon père vivait au Japon depuis son divorce... ou plutôt mes parents ont divorcé parce que cet homme avait soudain décidé d'aller s'installer dans ce pays du soi-disant soleil levant. Ma mère n'avait jamais voulu m'expliquer le pourquoi de la chose et, à force de l'entendre crier qu'elle en avait rien à faire de ce type cinglé, j'avais abandonné l'idée de lui poser la question. Cet homme que j'avais pour père restait donc un parfait mystère...

- Il est toujours temps de changer d'avis...

Je regardai ma mère d'un œil morne et secouai la tête. Aucune chance que je revienne sur ma décision. La France, c'était terminé pour moi, j'en avais eu mon compte. Ces dix-sept années de ma vie, j'aurais bien voulu les oublier. Trop douloureuses. Il était temps que je me reprenne en main et pour ce faire, il me fallait changer de milieu, du tout au tout. Ce projet m'avait déjà trotté dans la tête un bon bout de temps, depuis un an et demi pour être précis. J'avais entrepris d'apprendre le japonais en douce dans le dos de ma mère et je m'étais aperçu avec surprise que cette langue me plaisait.

- Tu es sûr de ce que tu fais ?

Je soupirai et l'observai du coin de l'œil. On aurait dit qu'elle était sur le point de faire une crise de nerf. Pris de pitié, je la rassurai.

- Certain. Tout ira bien, Maman, je pars peut-être à l'autre bout du globe, ce n'est pas pour ça qu'on se parlera plus. Tu oublies les merveilles technologiques de notre temps...

Ces merveilles en question ressemblaient à des extra-terrestres pour ma mère quelques mois auparavant. Avant qu'elle ne me donne son autorisation de quitter le pays, elle m'avait obligé à lui dévoiler les arcanes de l'ordinateur et d'Internet. Cela avait pris du temps, beaucoup de temps mais ça valait la peine. Au bout de six mois, j'eus enfin la permission de rejoindre mon père.

Celui-ci s'était montré ravi de me recevoir. Il ne m'avait pas revu depuis dix ans et ces retrouvailles tardives l'enthousiasmaient plus que moi. J'allais débarquer chez lui comme un envahisseur car, entre-temps, mon père n'avait pas chômé : il s'était remarié et avait même eu un fils...

- Je ne devrais pas tarder sinon je vais rater mon avion...

Ma mère gémit. Visiblement elle ne s'était toujours pas fait à l'idée de me quitter, espérant peut-être secrètement que je change d'avis à la dernière minute. Pas de chance, ça ne risquait pas d'arriver. Certes, je n'étais pas très motivé de m'exiler au Japon, mais c'était toujours mieux que de rester dans ce pays de dingue.

Je me dirigeai à pas lents vers la zone d'embarcation puis me retournai vers ma mère. Je portais mon habituel jeans délavé usé aux genoux, des baskets blanches avec trois bandes noires, mes préférées, et un sweat-shirt bordeaux à capuche. Je la serai une dernière fois dans mes bras en guise d'adieu.

- Tout se passera bien.

Je lui jetai un dernier coup d'œil, puis montai à bord sous le regard de chien battu que ma mère m'offrait. Il ne fallait pas exagérer, ce n'était pas comme si je la laissais toute seule. Lorsqu'elle rentrerait à la maison, elle retrouverait son mari, Daniel, et ma charmante petite peste de demi-sœur, Marie.

L'avion décolla.

 

Le trajet Paris-Tokyo dure une douzaine d'heures. Pendant ce temps j'eus tout le loisir de m'enfiler quelques films mis à la disposition des voyageurs et de récupérer quelques heures de sommeil. Mes dernières nuits françaises n'avaient pas été terribles et l'angoisse de ce nouveau départ n'était pas le seul coupable. Le vol fut agréable et je n'eus pas le temps trop long. L'avion atterrit à 16 heures, heure locale.

Mon père m'avait promis de m'attendre à l'aéroport. Je récupérai donc mes valises et m'installai dans un coin où j'avais une vue d'ensemble sur la zone de débarquements. Je ne savais pas si j'allais le reconnaitre et, lui ayant fait part de mon angoisse, il m'avait assuré qu'il m'attendrait avec une grande pancarte de bienvenue. Je l'avais remercié, mais sans façon, trop la honte. Mon père ne voulut pas en démordre. Je m'attendais donc au pire en me convaincant mentalement que ce n'était qu'un mauvais moment à passer.

Au bout d'une demi-heure passée à l'attendre, je commençai à m'impatienter. Mon père m'avait laissé son adresse et son numéro de téléphone au cas où j'aurais eu un problème... Je n'hésitai plus et monopolisai une cabine téléphonique. La sonnerie résonna dans ma tête et me donna mal au crâne. Si ce vieux m'avait oublié, il allait le regretter. Je tombai sur le répondeur et raccrochai le combiné. J'hésitai un instant et refis le numéro, sans plus de succès. Il m'avait définitivement oublié. Je sortis de la cabine et ouvrit mon portefeuille pour compter ma richesse : 20550 yen, environs 150 euros. J'avais les moyens de me payer un taxi, mon père n'habitait pas trop loin de l'aéroport... mais ce vieux aurait intérêt à me rembourser.

Je hélai donc un taxi et m'engouffrai dedans avec angoisse. Je donnai au chauffeur le bout de papier où était inscrite l'adresse de mon père et baragouinai un charabia qui était censé être une formule de politesse. Vingt minutes plus tard, j'arrivai enfin à destination, le portefeuille allégé de moitié. La maison était énorme, je ne m'attendais pas à ça. L'allée bordée de buissons impeccablement bien taillés menait à une immense porte de bois peinte en blanc et encadrée de deux colonnes toscanes qui n'avaient rien de japonais. Je respirai un bon coup et appuyai sur la sonnette.

Si mon père m'ouvrait, il allait m'entendre. Trépignant d'impatience, j'attendis prêt à exploser à tout instant. Personne ne vint m'ouvrir. Je pestai et m'acharnai sur la sonnette en appuyant généreusement dessus à plusieurs. Mon doigt venait à peine de quitter le bouton, après une bonne vingtaine de coups de sonnette, que la porte s'ouvrit violemment. J'ouvris la bouche sur le point d'exploser... puis suspendit mon geste. Ce n'était pas mon père qui se tenait devant moi, même sans l'avoir revu depuis dix ans je pouvais le deviner. L'homme qui venait d'ouvrir cette porte devait avoir à peine quelques années de plus que moi. Cheveux noirs de jais mi-longs tombant sur son visage de manière désordonnée, yeux noirs perçants, cigarette au bec, le teint halé de sa peau tranchait admirablement bien avec la blancheur de son t-shirt sans manches qui moulait une musculature superbement dessinée. Il portait un large pantalon noir à poches et avait visiblement un goût prononcé pour l'argent étant donné les nombreux clous, anneaux et pendants métalliques suspendus à ses oreilles, ses nombreuses bagues aux doigts et la chaîne affichée à son cou. Son visage fin avait des traits soignés et laissait entrevoir une franche irritation. Il n'était pas de bonne humeur le bonhomme et, au fond de moi je savais qu'il valait mieux ne pas l'énerver davantage au risque d'y perdre la vie. Je fermai vivement la bouche, certain de m'être fait passer pour un véritable crétin et sourit mal à l'aise.

- Konnichiwa... (Bonjour)

Pas terrible... Il fallait que je me rattrape et que je m'en aille au plus vite.

- Euh.. Je... crois que je me suis trompé, désolé.

Je m'inclinai rapidement pour m'excuser – à ce qu'il parait, c'était la coutume dans ce pays – et fis demi tour pour prendre mes jambes à mon cou. Du moins c'est ce que j'espérais. Mes espoirs furent bien vite envolés lorsqu'une main s'abattit soudain sur mon épaule. Une goutte de sueur coula le long de mon dos, je déglutis péniblement. Merde ! Je n'aurais définitivement pas dû entrer dans ce pays de dingues ! Je commençais sérieusement à regretter ma décision... Adressant des prières à un Dieu en qui je ne croyais même pas, je fus interrompu par une voix étonnée qui me paraissait lointaine :

- Lucas ?

Je me retournai. À côté du jeune homme qui venait de m'ouvrir se tenait... mon père ! Je n'y comprenais rien.

Je me forçai à sourire, enlevai la main du beau ténébreux de mon épaule et tentai de reprendre contenance.

- Ah, visiblement je ne me suis pas trompé.

- Qu'est-ce que tu fais là ?

Ce que je faisais là ? J'ouvris une seconde fois la bouche sur le point d'exploser, puis je me précipitai vers ce père incompétent et lui marchai sur le pied d'un geste rageur. Celui-ci étouffa un cri de douleur à mon plus grand bonheur.

- Je te signale que t'étais censé venir me chercher, crétin ! J'ai poireauté pendant une bonne demie heure à l'aéroport, j'ai essayé de te téléphoner, rien ! J'ai dû me payer un taxi pour arriver jusqu'ici, comment tu as pu m'oublier ?

Mon père me regarda sans comprendre.

- Tu n'arrivais pas le mois prochain ?

 

oOo

 

Au moins c'était clair entre nous : mon père s'était planté d'un mois, conséquence : rien n'avait été préparé pour ma venue. Je dus donc « camper » dans la nouvelle chambre que l'on m'attribua. Cependant cette situation n'était pas si précaire, la chambre d'ami que l'on m'alloua était grande, presque deux fois la taille de ma chambre française. Un lit simple, un petit bureau, une commode et une penderie meublaient la pièce, j'étais comblé, c'était tout ce qu'il me fallait.

La plus grosse surprise fut le fils de mon père. D'après ce que ma mère m'avait raconté, Papa s'était remarié avec une femme et ils avaient eu un fils de leur union. Rien à voir... En réalité mon père s'était remarié avec une femme qui était elle-même divorcée et avait eu un fils de son premier mariage. En clair, au lieu de me retrouver avec un demi-frère de dix ans, je me retrouvais à cohabiter avec Rei, un canon de dix-sept ans qui n'avait aucun lien de sang avec moi. Rien à voir donc.

Je terminai de ranger mes affaires dans une commode en pin et dans une penderie de style ancien. Sur l'une des portes de l'armoire se trouvait un grand miroir dans lequel je me permis d'observer les ravages qu'avaient pu m'occasionner cette demi-journée de vol. Mes cheveux blonds coupés relativement courts pointaient sur le haut de mon crâne en quelques mèches rebelles désordonnées, mes yeux bleus étaient soulignés de larges cernes, héritage de mes précédentes nuits sans sommeil, et mon teint paraissait blafard. Encore une fois je remarquai la ressemblance frappante que j'avais avec ma mère. Je me claquai les deux joues pour me redonner de la couleur... en vain. Je soupirai et allai me coucher sur mon lit. Il était presque 18 heures et j'avais déjà envie de dormir... ce que je fis.

 

Je me réveillai en sursaut, les yeux toujours fermés. Un bruit m'avait tiré de mon sommeil sans rêve. J'ouvris prudemment les paupières et criai de frayeur, ou voulus crier... une main m'empêcha d'émettre le moindre son. Devant mes yeux, se tenait Rei à quatre pattes au-dessus de moi, qui me lançait un regard effrayant. Je tentai d'enlever sa main de ma bouche et de lui dire de se bouger le cul mais le jeune homme ne me laissa pas faire, continuant de m'observer en silence. Après ce qui me parut une éternité, il me relâcha enfin et se remit debout. Avant que je n'aie pu dire quoique ce soit, il m'informa d'une voix grave et posée :

- Taberu

« Manger ». Puis s'en alla en claquant la porte. Je restai encore quelques instants sur mon lit, essayant tant bien que mal de remettre mes idées en place. Dès que j'avais vu Rei, je m'étais tout de suite dit que ce n'était pas un type normal, plutôt du genre racaille à faire peur qu'il ne vaut mieux pas approcher de trop près... mais je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il soit un attardé ! Qu'est-ce qu'il lui avait prit de se jeter ainsi sur moi ? Depuis combien de temps m'observait-il pendant que je dormais ? Je venais d'avoir la frousse de ma vie, mes bras en avaient encore la chair de poule. Une certitude cependant : à l'avenir, je me tiendrais le plus loin possible de ce dégénéré.

Le repas s'était déroulé plutôt calmement. À ma grande surprise, manger avec des baguettes ne se révéla pas trop difficile, mon entraînement intensif du mois passé y était sans doute pour quelque chose. Shizuka, la nouvelle femme de mon père, s'était montrée charmante et agréable à vivre. Ce qui m'avait frappé lorsque je l'aperçus pour la première fois, ce fut sa jeunesse : elle semblait avoir dix ou quinze ans de moins que mon père. Elle me questionna tantôt en japonais, tantôt en français sur mon voyage et sur mon installation ici si bien que, malgré ma faible connaissance de la langue nippone, je n'eus pas trop de problèmes pour comprendre la conversation. C'était une japonaise typique qui prenait soin de ses hôtes sans pour autant être trop curieuse. Je l'aimais déjà. Mon père, quant à lui, semblait totalement à côté de ses pompes. On aurait dit que mon arrivée l'avait complètement déstabilisé. Le débarquement de petits hommes verts dans son jardin n'aurait pas fait plus de dégâts sur son mental. Quant à Rei... malheureusement pour moi je m'étais retrouvé assis en face de lui et durant tout le repas, je dus ignorer tant bien que mal les regards un peu trop soutenus à mon goût qu'il me portait. Ce type était sans conteste timbré, j'avais plutôt intérêt à l'oublier.

Shizuka m'informa que la rentrée scolaire japonaise se déroulait en avril mais qu'il n'y aurait pas trop de problèmes à ce que j'entre en cours d'année. Elle s'était déjà renseignée avec le collège du coin et le directeur n'avait vu aucun inconvénient à l'arrivée tardive d'un nouvel élève. Toujours d'après la jeune femme, je pourrais commencer les cours dès le début de la semaine prochaine, elle y veillerait personnellement. Je la remerciai chaleureusement tout en comptant mentalement combien de jours de liberté il me restait pour me familiariser avec ce nouvel environnement : nous étions vendredi, il me restait deux jours minimum. C'était juste, mais mieux que rien.

Après le repas, j'informai ma nouvelle famille de mon désir de faire seul un petit tour des environs, histoire de repérer un peu les lieux. Rei était remonté à l'étage (dans sa chambre ?), à mon grand soulagement, Shizuka s'occupait de la vaisselle tandis que mon père regardait la télévision. J'accueillis la fraicheur du soir avec délice. La rue était calme, bordée de cerisiers et de parterres de fleurs... on voyait tout de suite que c'était un quartier de riches, ce qui m'incita à m'interroger sur le boulot de mon père. Je savais qu'il était dans les affaires mais ma mère n'avait pas su m'en dire davantage. En tout cas, les affaires en question marchaient visiblement très bien.

Ma nouvelle maison ne se trouvait pas loin du centre-ville, une chance ! Pas besoin de prendre le métro, j'avais presque tout à portée de la main. Vu l'heure, les rares magasins encore ouverts étaient les konbinis, c'est supermarchés ouverts 24h/24, très répandus au Japon, et autres nightshops. Je m'engouffrai avec curiosité dans l'une de ces supérettes. J'avais toujours rêvé de goûter ces fameux pains melons que l'on retrouvait dans presque tous les mangas. Je fus un peu surpris lorsque je découvris qu'un pain melon pouvait être aromatisé à autre chose qu'au melon. Cela ne m'empêcha pas d'en prendre quelques-uns aux goûts exotiques tels que melon (évidemment), mais aussi ananas et mangue.

Une fois sorti du magasin, je repérai un parc non loin du centre et m'installai sur un banc pour déguster tranquillement mon butin. L'endroit était relativement désert et les seuls passants que je rencontrai me jetaient de drôles de regards. Je mis leur attitude étrange sur le compte de mes cheveux blonds et de mon allure européenne, ces japonais n'avaient sans doute jamais rencontré d'étrangers comme moi... enfin, c'est ce que je pensais. Je compris bien plus tard que je m'étais complètement trompé, pour mon plus grand malheur.

L'horloge du parc – très pratique d'avoir installé une horloge dans cet endroit – indiquait vingt-deux heures, j'avais englouti mes trois petits pains et projetais déjà d'en racheter le lendemain. Pour l'heure, il se faisait tard et je songeai à rentrer... quoique non, pourquoi ne pas dormir dehors en fin de compte ? Ainsi, je ne devrais pas me taper les regards effrayants de ce timbré de Rei, ni ses intrusions soudaines dans la chambre... L'idée de me retrouver dans mon lit en sachant qu'il y avait un malade mental dans la même maison ne me plaisait pas du tout. Perdu dans mes réflexions angoissées, je ne remarquai pas la désertion subite et totale du parc, ni l'arrivée d'un groupe de jeunes pas très nets. Ce n'est que lorsqu'un homme se planta devant moi que je revins à la réalité. Levant la tête, je vis avec horreur une tête blonde décolorée effrayante, décorée d'une dizaine de piercings sur tout le visage et les oreilles. Ses yeux pétillaient d'une joie malsaine et je me sentis comme un lapin pris au piège. Je déglutis péniblement. C'était la deuxième fois en une journée que j'avais un visage terrifiant devant les yeux, je n'avais vraiment pas de veine. Pourquoi le Japon était-il un pays rempli de dingues ???

- Kon...banwa. (Bon...soir)

Petit sourire, pas très rassuré pour accompagner cette salutation, je n'espérais qu'une chose : avoir la vie sauve.

- Doke, koso ! (Dégage, gamin !)

Je le regardai sans comprendre. J'avais déjà du mal à assimiler la langue en temps normal, ce type ne m'aidait pas sans articuler, je n'avais rien compris à son baragouin. Cependant, à son air furieux et à ses yeux fous, il n'était pas très compliqué de deviner qu'il voulait que je m'en aille, ce que je me précipitai de faire. D'un seul mouvement, je me levai et m'apprêtais à quitter le petit groupe de racailles qui s'était formé autour de moi quand soudain, pour la deuxième fois de la journée, une main s'abattit sur mon épaule. Pitié ! Pas encore !!!

- Oï oï, matte ! (eh eh, attends !)

Je me retournai pétrifié. Un autre délinquant me faisait face, un sourire peu rassurant aux lèvres.

- Kawai na ? (Mignon, non ?)

Oh ! Je venais de comprendre un mot ! « Kawai » signifiait mignon dans le langage courant... mais qu'est-ce qu'il voulait dire par « mignon » ? Une autre racaille s'approcha de moi et m'observa attentivement.

- hééé... sô da na. Tanoshisou ! (ééééh c'est vrai. Ça a l'air amusant.)

- Ishou ni asonde iku ka ? (Tu viens t'amuser avec nous ?) poursuivit un autre tendant une main vers moi.

L'ensemble de ces Yankees se rapprochèrent de moi, empêchant définitivement toute tentative de fuite. Je ne savais pas quoi faire, incapable de bouger ni même de prononcer le moindre mot. « Tasukete » était le premier mot que j'avais retenu de cette langue : SOS, au secours, à l'aide, sauvez-moi !!! Ça m'aurait bien été utile en ce moment précis... quoique, vu qu'il n'y avait personne dans les environs, j'avais peu de chance de trouver une main secourable... J'étais fait comme un rat. Je ne savais pas ce que ces affreux me voulaient, mais ça n'avait certainement pas l'air d'être drôle, en tout cas pas pour moi. Inutile même de penser une seule seconde à me battre, seul contre cinq, sans avoir jamais appris aucun art martial, je n'avais aucune chance... Tendu comme un arc, j'étais prêt à profiter de la moindre occasion pour me faufiler dans une ouverture et filer comme un pet jusqu'à mon nouveau chez moi. L'idée de me taper ce dérangé du cerveau me paraissait soudainement beaucoup plus alléchante que de faire mu-muse avec cette bande de psychopathes.

Le faux blond m'attrapa le bras et m'attira à lui d'un coup sec. Il me fit un sourire terrifiant et me prit le menton de sa main libre. Incapable de bouger, je fermai les yeux en me demandant à quelle sauce il allait me manger... Je sentis soudain un coup de langue sur mon oreille et sursautai de frayeur. Je rouvris les yeux rapidement pour voir le blond me faire un sourire pervers. Il avait un problème mental ce type ou quoi ? Depuis quand on me confondait avec une fille ? Pris d'un soudain dégoût, je tentai de m'écarter de lui en le repoussant de toutes mes forces... Le seul résultat que j'obtins fut les rires gras de ces délinquants, le blond n'avait pas bougé d'un pouce.

- Oï oï, chibi-chan... (eh eh Chibi-chan (surnom attribué à Lucas (Chibi = petit ; -chan = suffixe utilisé généralement lorsque l'on s'adresse à une petite ou jeune fille))

Il se rapprocha une nouvelle fois de moi...

- Yamero ! (Arrêtez !)

Une voix de ténor retentit derrière moi. Comme un seul homme les cinq racailles se figèrent. De surprise, le blond décoloré me lâcha même le bras et j'en profitai pour filer sans demander mon reste sans un regard derrière moi. Quel que fut ce miraculeux sauveur, merci à lui, mais je n'avais pas le temps de trainer.

Je dus faire le meilleur temps de sprint de toute ma carrière sportive inexistante. Je n'avais jamais été doué en sport et encore moins en athlétisme. Généralement je ne savais pas courir dix minutes sans m'arrêter, à bout de souffle. Ce jour était à marquer d'une pierre blanche, je fis un véritable marathon. La peur me donnait des ailes, je n'avais qu'une seule chose en tête : courir. Je rentrai directement chez moi, ouvrant la porte d'entrée à toute volée et grimpant les marches d'escalier quatre à quatre. Ce ne fut qu'une fois dans ma chambre que je me remis enfin à respirer normalement, le cœur battant la chamade et les larmes aux yeux. Foutue journée !

 

Rei

Rei observa le blond s'enfuir à toute vitesse. Regarde-moi, Regarde-moi bon sang ! Le japonais jura entre ses dents. Malgré cet ordre silencieux, le jeune homme ne se retourna pas une seule fois et disparut rapidement de sa vue. Rei n'avait pas eu l'intention de sauver cette tête blonde gratuitement... Lorsque le japonais avait vu ce gamin encerclé par de petits délinquants, un superbe plan machiavélique s'était imposé à son esprit : Rei accourait pour délivrer Lucas des griffes de ces affreux et en échange, le beau blond tombait éperdument amoureux de lui. En clair, il voulait se faire facilement un nouveau petit jouet sexuel et quoi de mieux si le jouet est consentant et amoureux ? Mais le plan ne se passa pas comme prévu... Rei avait voulu que le jeune homme lui sois redevable pour cet acte « héroïque », qu'il paye sa dette en nature, mais le blond s'était enfui comme un voleur, laissant une note salée et non payée.

Rei observa avec dégoût les petites frappes qui s'en étaient pris à Lucas quelques minutes plus tôt. Ainsi prostrées à terre baignant dans leur sang, elles avaient moins fière allure... Ce n'est qu'après avoir massacré ces délinquants que le japonais se calma. Certes son plan initial avait échoué mais il n'abandonnait pas pour autant. Cette petite tête blonde lui appartiendrait tôt ou tard, Rei en avait décidé ainsi et il parvenait toujours à ses fins.

S'éloignant de quelques pas du spectacle glauque qu'il venait d'accomplir, Rei s'assit sur un banc et s'alluma une cigarette. Il observa un instant la fumée sortir de sa bouche et se dissiper dans les airs tel un rêve. Le parc était calme ce soir, le silence de la nuit était seulement perturbé de temps à autre par les petits gémissements de ses récentes victimes. Il n'était pas encore l'heure pour que sa bande arrive, trop tôt. Rei avait donc tout le loisir de penser, penser à sa première rencontre avec cette tête blonde si alléchante...

 

Il était presque dix-sept heures, Rei se trouvait dans sa chambre, clope au bec, il lisait tranquillement un magazine de motos et reluquait particulièrement la nouvelle Ducati 1098R qu'il convoitait déjà. Elle avait de la gueule, elle était classe et puissante. Une certitude : il l'aurait. Un coup de sonnette retentit, Rei n'y fit pas attention, il continua d'admirer l'engin de ses rêves. Quelques secondes plus tard, ce fut un concert de coups de sonnette qui se fit entendre dans la maison.

- 'Taku ! Dare ka ? (P'tain ! Qui c'est ?)

Il soupira, retira sa clope des lèvres et cria :

- 'Kâsan ! Doa !

« Maman, la porte », rien de plus simple, clair et net. Rei en avait marre d'être dérangé par ce taré qui s'excitait sur la sonnette. Quelques secondes plus tard, sa mère lui répondait qu'elle était occupée avec son mari et lui demandait d'ouvrir. Rei jura. Voilà qu'il devait jouer les larbins maintenant. Il abandonna sa Ducati à regret et obéit non pas pour plaire à sa mère, mais parce que ce fou furieux lui tapait vraiment sur les nerfs. Les yeux noirs d'une rage portée vers cet odieux individu qui osait le déranger, il se dirigea vers la porte d'entrée, qu'il ouvrit et... tomba sur une charmante tête blonde. Il fallait l'avouer, le jeune homme était mignon, très mignon même avec sa tignasse dorée comme les blés et ses yeux bleu océan. Visiblement, il était mal à l'aise, le nouveau venu bredouilla une salutation puis, après un petit charabia se retourna pour décamper. Rei eut un sourire carnassier et le retint d'une main sur son épaule. Pas si vite, bonhomme, j'ai pas fini de te reluquer. Les doigts de Rei rencontrèrent une épaule peu musclée. Visiblement, le jeune homme n'avait pas une carrure d'athlète, mais se présentait tout en finesse, grand et maigre... enfin pas aussi grand que le mètre quatre-vingt-deux de Rei. Son beau-père arriva derrière lui, il semblait connaître l'individu aux cheveux blonds... « Lucas » d'après ce qu'il avait compris. Le blondinet se mit en colère et cria sur l'adulte. Il était encore plus mignon comme ça, il donnait envie à Rei de le dévorer...

Quelques minutes plus tard, le japonais apprit le pot au rose : Lucas était le fils de Vincent, son beau-père et il allait vivre avec eux ! La surprise passée – Rei n'était pas au courant ni de l'existence de ce fils et encore moins de son arrivée ici – le Japonais savoura cette nouvelle. La vie à la maison promettait d'être beaucoup plus agréable... Il allait s'amuser.

Lucas était monté dans sa nouvelle chambre, Rei grimpa dans la sienne et se remit à feuilleter son magazine. Après une petite heure, sa Ducati ne réussit plus à le charmer comme avant. Rei avait autre chose en tête, une petite tête blonde pour être précis qui logeait dans la chambre juste à côté de lui ! N'y tenant plus, le Japonais abandonna sa revue sur son lit et sortit de sa chambre... direction la porte à côté. Il fallait bien que les deux jeunes hommes fassent un peu plus ample connaissance...

La porte était entrouverte, Rei ne prit pas la peine de frapper et poussa doucement le battant de bois. Lucas était allongé sur son lit et semblait dormir. Un vrai petit ange avec sa chevelure blonde ébouriffée qui faisait office d'auréole. Rei s'approcha sans bruit pour l'observer d'un peu plus près jusqu'à se positionner à quatre pattes au-dessus du Français. Vraiment très mignon... et innocent, ça lui donnait envie de faire des choses indécentes. Rei s'approcha un peu plus son visage de celui du bel endormi, ses yeux se posèrent sur ces fines lèvres rosées bien dessinées... il s'avança encore...

Lucas ouvrit les yeux.

Dommage... encore un peu et je jouais au prince charmant réveillant sa belle... pensa-t-il à cet instant.

Rei resta sans bouger à quelques centimètres du visage du français. Il observait ses yeux bleu azuré introuvables sur l'archipel nippon, sa chevelure blonde d'origine... Lucas était vraiment une perle parmi tous ces japonais aux cheveux et aux yeux noirs qui se ressemblaient tous. Au bout de quelques secondes, Rei sentit qu'il mettait le jeune homme mal à l'aise, quoi de plus normal ! Le Nippon sourit intérieurement, il connaissait déjà son nouvel hobby qui allait lui prendre tout son temps : taquiner et embêter ce nouveau frère... Rei se releva et indiqua au blond que le repas était prêt, puis s'en alla de la chambre, un sourire triomphant et sadique au bout des lèvres. La partie ne faisait que commencer !

À table, Rei continua son petit jeu en fixant inlassablement le blond avec des yeux pénétrants. La réaction de Lucas était hilarante, il faisait tout pour éviter de croiser son regard et s'obstinait à ne pas lui adresser la parole. Les prochains jours allaient se révéler très réjouissants...

 

Un bruit de moteurs pétaradants fit sortir Rei de ses pensées. Sa bande était arrivée au point de rendez-vous, la nuit allait commencer... Au programme ? Boîtes de nuit, bars, fête à volonté, bagarres inévitables, alcool, sperme et sang. Toujours la même chose en somme, mais Rei ne s'en lasserait jamais...

 

Lucas

Assis contre la porte fermée de ma chambre, les jambes repliées contre moi et mes bras enroulés autour de mes genoux, il me fallut près d'une heure pour que je puisse me calmer et reprendre mes esprits. Plus jamais, me promis-je, plus jamais je ne sortirais le soir dans cette ville de dingues, c'était certain. Ce cauchemar éveillé me paraissait tout droit sorti d'un manga, cette scène semblait irréelle et pourtant le frisson qui me parcourut en y repensant était bien réel. Passant une main encore un peu tremblante dans ma chevelure blonde, je respirai une grande bouffée d'air et me relevai lentement. Il était tard et je n'avais qu'une envie, me laisser bercer dans les bras de Morphée pour tout oublier, chasser ce mauvais rêve. J'attrapai mon pyjama composé d'un simple caleçon américain et d'un t-shirt noir et ouvrit la porte de ma chambre furtivement. Après un bref coup d'œil à droite puis à gauche, je fus rassuré : le couloir était vide, pas de Rei en vue. Avec un soupir de soulagement, j'entrai vivement dans la salle de bain et fermai la porte à clé. Après une douche rapide, je me faufilai rapidement dans ma chambre puis me glissai dans mon nouveau lit.

J'eus du mal à trouver le sommeil cette nuit-là.

 

Rei

Rei avait laissé sa moto sous le carport de la villa, il cherchait désormais la clé de la porte d'entrée dans une des multiples poches de son pantalon noir. Le japonais cracha un juron, l'obscurité de la nuit n'aidait pas... et l'alcool qu'il avait ingurgité ce soir non plus. Il était presque 3 heures du matin, Rei s'était éclaté comme jamais avec sa bande et les nombreuses filles présentes pour oublier sa récente frustration prénommée Lucas. Il trouva enfin l'objet de ses recherches et le fit glisser dans la serrure de la porte d'entrée. Le Nippon rentra en douce chez lui et monta les escaliers en titubant un peu. Il avait trop bu, il le savait, c'était déjà une chance qu'il fût arrivé chez lui en un seul morceau et sans accident, mais il était toujours assez lucide pour reconnaître la porte de sa chambre... et celle de Lucas. Pris d'une soudaine impulsion, il ouvrit silencieusement cette dernière et pénétra à pas de loup dans la chambre du jeune Français. Il se déchaussa puis se déshabilla sans un bruit, ne gardant que son boxer noir, puis se glissa sous la couette tout en douceur en prenant soin de ne pas réveiller le bel endormi.

 

 
 
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