Illiréa. Magnifique cité bâtie contre un escarpement et illuminée par la douce lumière du soleil levant. Les murs de pierres blanche brillaient sous les rayons de l’astre du jour. Sortant d’un immense bâtiment, un homme seul apparut. Il était grand avec des cheveux coupé court de couleur brune. Ses yeux, bruns également, étaient bordés par des touches de d’or et posaient un regard vif et alerte autour de lui. Il était vêtu d’un tunique de la même teinte que les nouvelles feuilles des arbres et d’un pantalon. De hautes bottes chaussaient ses pieds et remontaient jusqu’à mi-mollet. Il avançait d’un pas décidé et se dirigeait vers un espace dégagé. Lorsqu’il y arriva, une ombre cacha les rayons du soleil durant un court instant. Peu après, un immense dragon atterrit près de l’homme, qui s’approcha de lui. Avec agilité, il monta sur le dos du dragon en un bond et à peine s’était-il installé que le dragon déployait à nouveau ses ailes et décollait. En seulement deux coups d’ailes puissants, le duo se retrouva en plein milieu du ciel.
*Où allons-nous ?* demanda le dragon, qui répondait au nom de Fuego.
*A la recherche de nouveaux Dragonniers*, lui répondit son cavalier.
*Encore ?!* s’énerva le dragon. *Pourquoi toujours la même chose ?* ajouta-t-il plus pour lui-même que pour Aozora, son Dragonnier.
* A cause de ton ‘don’*, lui répondit pourtant Aozora.
Le dragon ne répondit rien d’autre qu’un grognement et poursuivit sa route. Ils se dirigeaient approximativement vers le sud, se contentant de survoler les différents villages croisés pour savoir si le dragon sentait la présence d’un possible candidat. Ce n’est que lorsqu’ils approchèrent de Furnost que le dragon fit signe à son Dragonnier.
*Aozora, on a de la chance*, lui dit-il.
*Tu ressens quelque chose ?*
*Oui, mais ce n’est pas de Furnost, plutôt d’un des villages alentour.*
*Vas-y, je te fais confiance pour nous mener à cette personne.*
Fuego acquiesça d’un grondement et accéléra le battement de ses ailes. Rapidement, un petit village se dessina au loin, à plusieurs lieues de Furnost. Ce n’était guère plus qu’un regroupement de plusieurs habitations, mais Aozora pensait qu’il devait y faire bon vivre. Le dragon amorça sa descente et se posa avec délicatesse sur le sol à quelques mètres d’une entrée du village. Le Dragonnier mit pied à terre et s’approcha ensuite de la tête de son dragon et le caressa un moment. Puis il se dirigea enfin vers le village. Cependant, avant qu’il ne se soit éloigné de plus de cinq mètres, son dragon l’interpella à nouveau. Il avait vu ce que son Dragonnier n’avait pas remarqué, à savoir le petit groupe d’enfants qui observaient Fuego depuis la lisière d’un petit bosquet d’arbres. Le groupe en question était composé de quatre enfants, deux filles et deux garçons. Pourtant, il n’y avait que l’une des deux filles qui retenait l’attention du dragon.
*La personne que nous cherchons se trouve parmi ces enfants ?* questionna Aozora.
*Oui, c’est la fille aux cheveux noirs*, répondit Fuego.
Aozora acquiesça d’un signe de tête et se dirigea ensuite vers les groupe d’enfants. Ces derniers furent très surpris de constater que, non seulement, un Dragonnier soit là devant eux, mais qu’en plus, il vienne vers eux, de simples enfants. Arrivé devant eux, il les salua, puis se tourna vers la jeune fille aux cheveux noirs et lui demanda :
- Tes parents sont-ils dans les parages ?
- Oui, ils sont chez nous, à la maison, répondit-elle en désignant le village, un peu nerveuse d’attirer l’attention d’un Dragonnier.
- Peux-tu me mener à eux ?
La jeune fille hocha la tête et s’excusa auprès de ses amis, puis partit, suivit du Dragonnier. Alors qu’elle s’éloignait, elle entendit ses amis murmurer rapidement entre eux et se dit qu’elle aurait droit à un interrogatoire quand elle reviendrait. Le Dragonnier la ramena à la réalité en lui demandant comment elle s’appelait.
- Mélia, répondit-elle. Et vous ? Vous êtes vraiment un Dragonnier ?
- Oui, dit-il avec un sourire. Je m’appelle Aozora et mon dragon Fuego.
- Ça lui va bien, commenta Mélia en jetant un coup d’œil au dragon qui dardait un œil ambré sur elle.
Mélia n’eut pas le temps de questionner plus avant le Dragonnier que déjà ils arrivaient au village. Mais il y avait encore le chemin menant du l’entrée du village à la maison de ses parents, aussi Mélia demanda pourquoi un Dragonnier voudrait venir dans un lieu aussi reculé que leur village. A cela, Aozora répondit qu’il était à la recherche de jeunes personnes pour les œufs de dragons qui attendaient à Illiréa.
A l’énoncé de ces paroles, l’esprit de Mélia fit tout de suite le rapprochement, mais elle n’eut guère le temps de poursuivre ses questions davantage, car ils arrivaient à la maison des parents de la jeune fille. Entrant, cette dernière annonça qu’elle était accompagnée d’un visiteur et rejoignit ses parents.
Installés autour d’un verre, Aozora expliqua la raison de sa présence dans ce lieu et demanda ensuite si Mélia pouvait l’accompagner à Illiréa pour probablement devenir une Dragonnière. Les parents se regardèrent en entendant cette demande. Bien sûr, ce serait une grande joie que leur fille devienne une Dragonnière, mais c’était aussi leur seule enfant. Après en avoir discuté un court instant, ils répondirent que la décision ne leur appartenait pas et tous se tournèrent donc vers Mélia. Celle-ci comprit tout de suite que c’était elle qui allait décider de partir ou non.
- J’irais ! déclara-t-elle.
Ce n’était pas tant la perspective de devenir une Dragonnière qui la motivait, mais plutôt celle d’avoir quelqu’un qui serait toujours auprès d’elle, d’un être qui la défendrait sans poser de questions, d’un ami indéfectible, instantanément conscient de ses pensées, de ses sentiments et de ses désirs. Le souvenir de son rêve lui revint brusquement à l’esprit et elle comprit qu’elle avait fait le bon choix.
Aozora, qui souhaitait repartir le plus vite possible afin d’arriver avant la nuit à Illiréa, conseilla à Mélia d’aller préparer ses affaires. La jeune fille acquiesça et partit vers sa chambre, sa mère suivant pour l’aider. Toutes deux préparèrent quelques affaires qu’elles mirent dans un sac, le tout en silence. Quand elle eurent terminé cette tâche, Mélia s’assit sur son lit et demanda à sa mère :
- Dois-je leur révéler ma véritable nature, maman ?
C’était une chose à laquelle la jeune fille venait de penser alors qu’elles préparaient ses affaires. Elle avait donné sa réponse un peu vite et ce n’était qu’à présent qu’elle se rendait compte qu’elle ne pourrait peut-être pas continuer à cacher sa nature, comme elle le faisait depuis longtemps. Sa mère mit un moment avant de lui répondre.
- Je ne sais quoi te dire. Ce sera à toi de voir à qui tu désireras montrer à tous ton ascendance ou continuer à garder ce secret. Ni ton père, ni moi ne seront là pour te dire ce que tu devrais faire désormais. Il va falloir choisir par toi-même.
Mélia resta silencieuse un moment, puis dit :
- Vous auriez préféré que je reste, n’est-ce pas ?
- Oui, nous aurions préféré, mais c’est ton avenir, personne ne peut te forcer à faire ou devenir ce que tu ne veux pas, répondit la mère avec un sourire en s’installant à côté de sa fille.
- J’ai fait un rêve cette nuit. J’y ai vu une magnifique dragonne qui me disait qu’elle m’attendait. Je pense que partir dans la Cité des Dragonniers est la route que je dois suivre.
Encore une fois, la mère resta silencieuse un moment, puis dit :
- Je pense que tu as raison. Et puis, il me semble qu’on a pas tous les jours un Dragonnier qui vient nous proposer de devenir une Dragonnière, n’est-ce pas Mélia ?
- C’est vrai. Et si mon rêve se confirme et qu’un œuf s’ouvre pour moi, je suis sûre de ne pas manquer d’une amie à qui je pourrais me confier sans crainte.
- Oui, tu n’as pas tort sur ce point. Bon, il est peut-être temps de retourner à côté, dit la mère, avant de s’en aller.
Mélia resta encore un moment seule, puis son sac à la main, suivit sa mère et rejoignit ses parents et le Dragonnier qui les attendaient patiemment. Aozora se tourna face à elle et lui demanda si elle était prête à partir. Mélia confirma d’un signe de tête.
- Bien, dans ce cas, nous pouvons y aller.
Encore une fois, Mélia hocha la tête et fit ses adieux à ses parents. Aozora attendait patiemment près de la porte et quand la jeune fille s’écarta de ses parents, il sortit, suivit de Mélia. Puis tous deux refirent le chemin en sens inverse jusqu’à la sortie du village et rejoindre Fuego. Ses amis se trouvaient toujours là où elle les avait laissé, observant encore le dragon. Elle s’excusa auprès du Dragonnier et les rejoignit rapidement pour leur dire au revoir à eux aussi. Les trois jeunes s’étonnèrent de la voir encore en compagnie du Dragonnier et dès qu’elle fut près d’eux, la pressèrent de questions, comme elle l’avait pensé. En quelques mots, elle expliqua la situation, qu’elle partait dans la Cité des Dragonniers afin de peut-être devenir une Dragonnière. Elle leur promit, comme à ses parents plus tôt, de revenir pour leur présenter sa dragonne, si un œuf venait à s’ouvrir devant elle, mais que ce ne serait peut-être pas pour tout de suite. Quand ses amis consentirent enfin à la laisser partir, Mélia rejoignit le Aozora et son dragon qui commençait à s’impatienter.
C’était un magnifique dragon aux écailles qui déclinaient toutes les nuances du jaune, de l’orange et du rouge, le faisant paraître de feu. Son poitrail était recouvert d’une sorte d’armure naturelle rouge foncée et se dégradant vers le violet. Sa crête, composée de longs pics violets foncé, partait du haut de sa tête et descendait tout le long de son dos jusqu’au bout de sa queue. Cette dernière était pointue à son extrémité, comme une flèche et présentait un dégradé du jaune , au centre, vers le rouge, à l’extérieur. Ses yeux, d’une belle couleur d’ambre clair et ses griffes et cornes d’un blanc immaculé, brillaient sous l’éclat du soleil. La membrane de ses ailes était, du côté extérieur, identique aux écailles de son corps, tandis que sur la face interne, elle était d’un jaune intense.
Agilement, Aozora monta sur la selle du dragon, puis il se pencha et tendit sa main pour aider Mélia à monter. Fuego, obligeant, lui présenta sa patte pour qu’elle puisse y prendre appui. Puis elle se retrouva assise derrière le Dragonnier. Elle remercia Fuego de l’avoir aider, puis attendit que ce dernier décolle. Il déploya ses large ailes et d’un bond, les précipita tous dans les airs. Surprise, Mélia s’était immédiatement agrippée au Dragonnier, passant ses bras autour de sa taille. Quand le dragon fut arrivé au milieu des nuages, il stabilisa son assiette et partit en direction d’Illiréa. A partir de ce moment-là, Mélia pu contempler le paysage qui défilait au-dessous d’elle. Elle ne croyait pas sa chance, car peu de personne avait la possibilité de monter sur un dragon. Pensant qu’elle aurait bientôt sa propre dragonne, car elle était sûre que son rêve était d’un genre prémonitoire. En effet, ordinairement, elle ne se souvenait pas de ses rêves une fois le matin venu, alors que cette fois-ci, chaque détails étaient restés bien présent dans son esprit.
- J’arrive, Fille de Minalth et Myrenth, murmura-t-elle, le vent emportant ses paroles.
Pourtant, Fuego l’entendit néanmoins, ayant une ouïe bien plus fine que les humains, mais ne dit rien, bien qu’il fut surpris que cette jeune fille puisse connaître deux noms de dragons, qui plus est de deux dragons qui se sont accouplés ensemble. Lui aussi était certain qu’un œuf s’ouvrirait pour cette jeune personne, mais en revanche, il ne savait pas lequel. Mélia semblait savoir qu’un œuf d’une couvée de Myrenth lui était destiné. Préférant laisser cette pensée de côté, le dragon se concentra plutôt sur son vol.
Quelques heures plus tard, alors que le soleil teintait de rose et d’or les nuages, ils arrivèrent en vu de la magnifique cité. Fuego amorça sa descente et se posa à l’endroit exact où il s’était posé le matin même. Son Dragonnier descendit, puis aida sa passagère à en faire de même. Fuego redécolla ensuite, laissant les deux humains seuls. Mélia le regarda s’éloigner, comme elle l’avait fait pour la dragonne dans son rêve, puis suivit ensuite Aozora sur les routes de la cité, jusqu’à un bâtiment de taille modeste pour l’un, mais imposant pour l’autre. Ils entrèrent et Aozora la mena jusque dans une pièce dont les murs étaient couvert d’étagères allant jusqu’au plafond de l’imposante salle. Et dans chacune de ces étagères se trouvait un œuf de dragon.
- Voilà tous les œufs de dragons que nous conservons en attendant que leur Dragonnier vienne, expliqua le Dragonnier.
- Il y en a beaucoup, comment cela se fait-il ?
- Oui, c’est vrai, la fréquence d’œufs qui éclot est inférieure à celle des œufs qu’on nous confie.
- Qu’on vous confie ? Qui vous confierait un œuf de dragon ?
- Les dragonnes de nos Dragonniers qui ont eu une couvée pour commencer et également les dragons sauvages.
- Les dragons sauvages ? Ils n’ont pas tous un Dragonnier ?
Aozora rit et répondit que ce n’était pas le cas et lui expliqua que les Dragons sauvages devaient confier un ou deux œufs de leurs couvées par an. Bien sûr, ce n’était pas beaucoup, mais étant donné que les Dragonniers ne sont pas toujours trouvés pour chaque œufs, ces derniers s’accumulent. Mélia ne comprenait pas vraiment, mais préféra ne pas prolonger ce sujet de conversation, pensant qu’elle finirait bien par comprendre un jour ou l’autre, mais pas aujourd’hui. Quand le silence revint et qu’elle se demanda quoi faire maintenant, elle s’avança dans la salle, suivit par Aozora, et s’arrêta devant l’un des œufs. Il était violet et veiné de bleu et de rouge. Sous l’étagère était fixée une plaque dorée sur laquelle étaient gravés les noms de Minalth et de Myrenth. Mélia leva la main et passa ses doigts sur la surface lisse de l’œuf immobile, quand il se mit soudainement à s’agiter. Surprise par l’activité soudaine de l’œuf, Mélia recula de quelques pas, avant de se reprendre et de se contenter d’observer l’occupante de cet œuf tenter de s’extraire de sa prison. S’agitant de plus en plus, Mélia observait, fascinée, quand une fissure apparut sur le dessus de la coquille. Rapidement, d’autres craquelures apparurent et la créature commença à s’extirper de l’œuf qui l’avait protégé jusqu’à présent.
- As-tu déjà penser à un nom ? lui demanda soudainement Aozora.
Mélia y avait effectivement réfléchit et avait choisit le nom de Manath. Il ressemblait beaucoup à celui de ses parents et espérait grandement qu’il plairait à la jeune dragonne. Elle le dit au Dragonnier. Quand la dragonne aux écailles violettes se fut entièrement extirpée de son œuf, Mélia tendit la main pour la caresser. La dragonne, qui commençait à explorer son environnement, tourna sa tête triangulaire vers la main qui s’approchait d’elle, attirée par le mouvement. Curieuse, elle allongea son long cou sinueux pour identifier ce que c’était et finalement, les doigts de la jeune fille entrèrent en contact avec les écailles de l’animal. A ce moment-là, Mélia ressentit un éclair de douleur partir de ses doigts, courir le long de son bras pour ensuite se propager dans tout son corps. Ne contrôlant plusses mouvements, elle bascula en arrière et fut rattrapée par Aozora, qui savait à quoi s’attendre, y étant passé lui-même. Il fallu encore un bon moment avant que la jeune fille ne retrouve le contrôle de son corps. Elle se redressa et demanda ce qui s’était passé. La paume de sa main droite se mit ensuite à la démanger furieusement et, quand elle regarda, vit un ovale argenté apparaître lentement au centre de celle-ci.
- Le lien qui t’unit à ta dragonne vient de se créer. Maintenant, tu peux entendre les pensées de ta dragonne et elle entendre les tiennes. Quand à ça, dit-il en désignant la paume de Mélia, c’est la Gedwëy Igniasia, la marque des Dragonnier.
Pour confirmer, il montra sa main droite qu’ornait également un ovale argentée, identique à celui qui était apparu sur la main de Mélia. Cette dernière se retourna vers la jeune dragonne, qui regardait ce qui l’entourait avec une curiosité dévorante. Manath la regarda à son tour et lui envoya une spirale de pensées. La jeune fille leva la main pour la caresser, mais suspendit son geste au souvenir récent de la première fois. Aozora la rassura en lui disant qu’une fois le lien créer, elle pouvait toucher sa dragonne sans risques. Mélia hocha la tête et poursuivit son geste. Manath, examina un moment cette main et frotta sa tête contre cette main. Mélia se mit ensuite à la caresser. La dragonne lui envoya, après un moment, une nouvelle spirale de pensées, lui indiquant qu’elle avait grand faim.
- Elle a faim, dit-elle simplement.
- C’est normal, les jeunes dragons sont toujours affamés à leur éclosion. Prends ta dragonne et suis-moi.
La jeune fille invita la dragonne à venir dans ses bras, puis suivit le Dragonnier hors de la salle. Avant de sortir, Mélia eut le temps de voir la plaque de l’œuf qui se trouvait sur l’étagère au-dessus de celle où se trouvaient encore les débris de l'œuf de Manath. Il était d’un beau mélange entre de l’or et un blanc argenté, et parcourut de veines de couleur de cuivre. La plaque en dessous indiquait également les noms de Minalth et Myrenth, la jeune fille supposant que cet œuf et celui de sa dragonne provenait de la même couvée. Alors qu’ils parcouraient les couloirs, Mélia demanda à sa dragonne si le nom de Manath lui plaisait et la dragonne se mit à ronronner comme un petit chat satisfait. |