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au 31 Mai 21 :
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Ezéchiel [Sous contrat d'édition]
Par Natalea
Originales  -  Fantastique  -  fr
16 chapitres - Complète - Rating : K+ (10ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 9     Les chapitres     7 Reviews    
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9. ADN

C'est un immeuble immense, un gratte-ciel de plus de cent dix étages qui abrite le siège du cabinet Calbot. Un homme et une femme prennent l'ascenseur pour le soixante et unième niveau. Ils n'ont pas de rendez-vous, mais une plaque qui leur donne accès aux locaux sans que quiconque ne leur pose la moindre question.

Les portes se rouvrent sur un couloir identique à celui du rez-de-chaussée : design moderne, linoléum anthracite marbré de blanc, panneaux coulissants en verre sur fond gris. Magnifique, vraiment. La vue depuis les baies vitrées est à couper le souffle.

Ils sont accueillis par un comptoir géométrique aux angles durs, d'un noir profond, peu engageant. L'homme qui a décoré l'intérieur sait comment s'y prendre pour intimider... Le tout respire la sévérité, la rigueur, et un mental écrasant.

— Je suis l'inspectrice Bell, et voici l'inspecteur Clervaux, dit la femme. Nous voudrions voir monsieur Calbot.

Elle exhibe sa plaque sous le nez de l'hôtesse d'accueil, qui la fixe à travers ses faux cils. Jeune, jolie, sophistiquée. À croire que les stéréotypes ne mourront jamais.

— Je regrette, mais monsieur Calbot est en conseil d'administration et ne peut pas être dérangé pour l'instant, répond l'hôtesse d'une voix de miel préprogrammée.

— Je crois qu'on ne se comprend pas bien, insiste l'inspectrice. Nous devons lui parler tout de suite. Alors vous allez décrocher votre téléphone et le prévenir de notre arrivée.

— Je ne peux pas faire ça.

— Parfait. Où est la salle de réunion ?

Bell regarde autour d'elle. Heureusement, l'immeuble est suffisamment grand pour qu'on ait jugé utile d'y indiquer les directions : un corridor sur la droite mène au conseil d'administration. Elle et son collègue s'engagent dans le couloir, poursuivis par l'hôtesse perchée sur ses talons aiguilles :

— Vous ne pouvez pas entrer ! Inspecteurs !

Elle les stoppe au seuil d'une porte vitrée :

— Laissez-moi au moins le prévenir.

Une douzaine de bureaucrates sont rassemblés autour d'une longue table ronde en bois sombre verni. La jeune femme entre et murmure à l'oreille de l'un d'eux : un quinquagénaire de forte carrure, les cheveux grisonnants aux tempes, des rides estampillées autour de son regard dur. Il jette un coup d'œil au corridor où les deux policiers l'attendent. L'hôtesse ressort et il cesse de leur prêter attention.

— Monsieur Calbot va venir s'entretenir avec vous, indique la jeune femme. Suivez-moi je vous prie.

Elle les conduit dans une autre salle de réunion vide, la lumière des diodes se reflétant sur l'écran mat des systèmes de vidéoconférence. D'ici, ils bénéficient d'une vue plongeante sur la ville et sur son monstrueux Central Business District. Les voitures tout en bas s'écoulent comme du sang dans les veines d'un géant mécanique.

— Comment comptes-tu lui en parler ? demande Clervaux à sa collègue dès qu'ils se retrouvent seuls.

— Directement. Il n'y a pas trente-six moyens d'annoncer ce genre de choses de toute façon.

Victor Calbot entre. Vu de près, il est encore plus impressionnant. On reconnaît l'homme qui s'est bâti un empire sur un océan de justice et de moralité. Le meilleur avocat du pays, sénateur, en passe de renouveler son mandat, si ce n'est plus encore.

— Inspecteurs Clervaux et Bell, c'est bien cela ? commence-t-il en les détaillant tour à tour.

— Oui, Monsieur.

Calbot ignore la place d'honneur et tire une chaise à lui, leur faisant signe de s'asseoir :

— Je n'ai pas beaucoup de temps à vous accorder, précise-t-il. Qu'y a-t-il de si urgent pour que vous m'interrompiez en plein conseil d'administration ?

— Nous sommes navrés, Monsieur. Mais comme vous l'avez dit, c'est urgent.

L'attention de Calbot se tourne vers Bell. Elle a trente-huit ans, inspectrice de police depuis des années, et elle n'a jamais perçu une telle tension chez un autre être humain. Pas d'angoisse, pas d'appréhension, rien que la pression d'un esprit incommensurable contre le sien. Elle pressent le poids des responsabilités que s'est infligé cet homme, et le combat qu'a été sa vie, chaque seconde.

— Il y a trois jours, la police a retrouvé le corps d'un adolescent dans une ruelle, raconte-t-elle. Un junkie, Michael Clerc. Il a été battu à mort.

— Je ne vois pas ce que ça a à faire avec moi, objecte aussitôt Calbot.

— Pardonnez-moi d'être directe. Mais nous avons relevé du sang sur lui, appartenant à votre fils.

Calbot se trouble. Un véritable éclair d'inquiétude emplit son regard :

— Noah ?

Bell secoue la tête. La gêne l'envahit malgré elle, mais les mots franchissent malgré tout ses lèvres :

— Non Monsieur, votre autre fils. Ézéchiel.

Calbot se raidit d'un seul coup. Les deux inspecteurs voient cet homme titanesque, terrifiant, diriger toute la force de sa rancœur droit sur eux :

— C'est une plaisanterie ?

Ses yeux pâles comme des toiles d'araignée les dévisagent l'un après l'autre, sans la moindre considération, comme on fixerait le pire résidu de médiocrité jamais né sur Terre.

— Croyez-moi, j'aimerais avoir tort, se défend Bell. Mais les résultats sont formels. C'est le sang de votre fils qu'on a identifié dans cette ruelle.

— Vous êtes en train de me dire que vous avez retrouvé le corps de mon fils ?

Nouvelle montée de panique ; une gêne plus étouffante que les autres, dépassée par l'horreur de ce qu'elle a à annoncer :

— Non, c'est... Le sang était sur le corps. Mais ce n'était pas celui de la victime.

Calbot garde le silence pendant de longues secondes. Son visage se fait vide de toute expression, Bell n'ose imaginer le néant qui doit se creuser en lui, la chute vertigineuse du passé qui avale le présent sans prévenir :

— Êtes-vous en train d'insinuer que mon fils, qui a disparu depuis dix-huit ans, est en vie quelque part là dehors, et qu'il est devenu un meurtrier ?

Calbot a parlé d'une voix basse, et ça n'en est que plus abominable. Comment annoncer cela à un père qui a perdu son enfant ? Comment ?

Bell se racle la gorge :

— On ne peut rien affirmer pour l'instant... Il a très bien pu être témoin de la scène. Le fait est que cela indique que votre fils est en vie, et...

— Comment osez-vous dire une chose pareille ?!

Calbot s'est levé d'un coup ; son poing cogne contre la table :

— Mon fils est mort ! Les monstres qui ont tué sa mère me l'ont enlevé lui aussi, et vous n'avez jamais été fichus de retrouver son corps ! Comment osez-vous vous présenter devant moi après ce qui est arrivé ? Avez-vous la moindre idée des dégâts que vous venez de causer ?

— Monsieur Calbot...

— Silence ! Il n'avait que cinq ans. De quel droit osez-vous...

Bell se mord la lèvre, émue et coupable, furieuse contre elle-même, mais sa conviction reste intacte. Elle fait signe à Clervaux, qui tend à Calbot un dossier avec les résultats des analyses A.D.N :

— Je suis désolée, mais l'A.D.N ne ment pas, insiste-t-elle. Le sang récolté sur les lieux correspond aux prélèvements que vous avez fournis à la police il y a dix-huit ans. Écoutez... Quelles que soient les circonstances, c'est la preuve que votre fils est en vie !

— Il y a forcément une erreur ! Refaites les analyses.

— C'est inespéré !

— Sortez ! Sortez avant de dire quelque chose que vous regretterez.

— Monsieur Calbot...

— SORTEZ !

Bell et Clervaux battent en retraite. Bell n'a jamais vu une colère aussi déchirante que celle de cet homme ; une colère qui le broie de l'intérieur.

— Nous vous tiendrons au courant, dès que nous en saurons plus, risque-t-elle.

Lorsqu'ils se résignent enfin à sortir, Victor Calbot se tourne vers le vide, vers les deux cent cinquante mètres qui le séparent du sol, et les dizaines de milliers de personnes qui vivent et meurent à ses pieds.

Loin de la tristesse et de la fureur, son regard cherche dans le hasard, dans ce qu'il ne peut pas voir, et s'interroge.

 

 
 
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