Chapitre 5 : Retour inattendu
Une semaine plus tard,la Saint-Valentinarborait le sujet de toutes les conversations. Certaines adolescentes désespérées avaient comme objectif de se procurer leur partenaire idéal pour absolument passer cette fameuse journée ensemble. Des couples se formaient assez rapidement. Quelques imbéciles de la gente masculine attendaient avec impatience qu’une poignée de jeunes filles viennent leur apporter du chocolat fait maison, comme on en apercevait dans une majorité de dessins animés irréalistes.
Se tenir main dans la main, s’embrasser tendrement, passer de bons moments avec son compagnon, se murmurer une infinité de mots d’amour… Tout cela était bien beau, mais Ellen n’avait pas la moindre envie d’aborder ce genre de pensées, selon elle, ennuyeuses et stupides. Elle préférait de loin se focaliser sur ses études, car ces derniers temps, elle se relâchait beaucoup, et elle apprécierait améliorer, ne serait-ce qu’un peu, ses notes, ainsi que ses appréciations. Elle n’avait tout simplement pas le temps de se préoccuper de telles absurdités, telles que l’amour, ou autre. Dégoûtée de scruter sans le vouloir une foule de baisers dans le couloir menant à sa salle de classe, la jeune fille au regard ambré ne prêta pas attention à ce qui se déroulait devant elle. Elle bouscula alors accidentellement un professeur transportant quelques dossiers, ayant l’air très importants. Ceux-ci s’envolèrent et se dispersèrent sur le sol, lors du choc de l’enseignant. D’ailleurs, ce dernier eut l’air d’humeur exécrable depuis qu’Ellen occupait tout l’espace de son champ de vision. Et cela s’avérait pareil pour elle. Il s’agissait du professeur de mathématiques, celui avec lequel l’adolescente à la chevelure ténébreuse avait eu pas mal de tensions récemment. Des éclairs se dégageaient vaillamment de leur regard déterminé. Comme si eux deux avaient véritablement besoin de clarifier les choses, comme il se devait. Un sentiment de courroux régna dans la totalité de l’établissement, ce qui effraya grandement les personnes étant en train de profiter de cette journée où la romance était sensée être à l’honneur. Un combat misé sur le mental débuta, puis perdura. Cependant, il fut malencontreusement interrompu par la sonnerie indiquant le commencement des cours, ce qui apporta la déception à Ellen et à l’enseignant, ainsi qu’aux élèves assistant au spectacle. La jeune fille fut surprise lorsqu’elle s’aperçut que même Jonathan faisait partie de ceux-ci…
[…]
« Hey ! Ca avait l’air chaud entre toi et le prof tout à l’heure ! On peut dire que t’as du cran de te mesurer à lui comme ça ! »
La voix d’un certain blond vint gaiement saluer l’adolescente à la fin de la matinée, qui elle, fit mine de ne pas avoir remarqué sa présence déstabilisante. Néanmoins, Jonathan n’abandonna pas, et fit mettre en marche une nouvelle tentative afin d’attirer son attention…
« Moi non plus, j’l’aime pas, ce prof. Il pense juste qu’à faire son boulot, c’est tout. Il se préoccupe même pas de ceux qui sont en difficulté, tout ce qui compte, c’est l’argent qu’il touche en enseignant. Je hais trop ce genre de types ! »
Cette fois-ci, Ellen réagit à ces propos, puis se retourna, dévoilant de ce fait son expression irritée au jeune homme, qui fut étonné de la voir dans un tel état. Il n’avait jamais connu cette facette d’elle. L’abasourdissement devint alors évident au vu des ses haussements de sourcils, et de ses yeux pratiquement exorbités.
« C’est vrai, ça ! Qu’est-ce qu’il m’énerve, celui-là ! A chaque fois que je le vois, j’ai envie de le remettre à sa place, de le frapper, de le tabasser, de…AH, je sens que je vais pas tarder à péter un câble ! Retiens-moi, s’il te plait !!
- H…Hé, calme-toi. Je ne pensais pas que tu le détestais à ce point…Il s’est passé un truc sérieux entre vous, ou quoi ?
- Euh…Oh, rien de spécial. Mais je ne peux pas le supporter, je n’en peux plus, c’est plus fort que moi !! »
Jonathan agita plusieurs fois consécutives sa tête de gauche à droite, afin de s’assurer que personne ne faisait face au comportement démentiel de la fille aux yeux ambrés, ayant l’impression de se sentir légèrement embarrassé à ce sujet. Se rendant compte par la suite qu’il n’était pas en mesure de lui faire changer d’opinion sur l’individu abhorré, il haussa les épaules en laissant échapper un charmant sourire, ne manquant pas d’envoûter Ellen. Celle-ci eut alors beaucoup de mal à contenir ses battements de cœur, ses sentiments à ce moment là. Elle eut soudainement envie de lui répondre également par un sourire, mais lorsqu’elle s’apprêta à le faire, Sarah arriva inopinément, ce qui surprit les deux énergumènes. Jonathan, gêné, plongeant tout à coup dans sa bulle étouffante, étant extrêmement mal à l’aise, choisit, une fois de plus, de prendre discrètement la fuite. Ellen se maudit de penser à de telles cruautés, mais parfois, elle se disait que si sa meilleure amie n’était jamais venue au monde, tout se passerait comme elle le désirerait. L’adolescente aux cheveux ténébreux s’offrit incessamment, et sans pitié, une série de claques impétueuses, comme pour se punir d’introduire d’horribles idées dans son esprit confus. Sarah se questionna intérieurement sur l’attitude plus qu’intrigante de sa camarade.
« Ben alors ? Depuis quand tu te frappes, comme ça ? T’es la première fille que je vois en train de faire ça ! Y a pas à dire, t’es bizarre, mais c’est en quelque sorte pour ça que je t’adore !
- Et toi, t’es bizarre de m’adorer rien que pour cette raison ! Je ne mérite pas qu’on me traite de cette façon…
- Hein, qu’est-ce que tu dis ?
- Ah ? Non non, rien ! T’en fais pas, comme d’hab, je cause toute seule ! Encore une fois, j’suis bizarre, héhé ! »
Deux rires fusionnèrent instinctivement. C’était magique, il suffisait d’un rien pour divertir les deux alliées. Une heure plus tard, après avoir digéré le repas pas très bien supputé du self, la brune à la queue de cheval devint encore plus dynamique qu’elle ne l’était précédemment, et ce, pour une raison bien particulière…
« Ah, comment j’ai pu zapper un truc aussi important ? On a cours d’anglais avec Mister Holloway !!! Viens vite, Elie ! »
Sarah ayant apparemment l’air de bonne humeur, Ellen n’osait pas interroger cette dernière sur les dernières nouvelles à propos du cabalistique personnage qui l’espionnait, la harcelait secrètement. Son but n’était certainement pas de l’offusquer en lui adressant la parole en débattant subitement sur ce fait. Et puis, peut-être avait-il décidé de disparaître de sa vie, de ne plus la poursuivre en cachette de manière oppressante. Ou peut-être avait-elle réellement de vilaines hallucinations, et qu’à présent, celles-ci s’étaient miraculeusement dissoutes… Bref, la jeune fille au regard ambré secoua énergiquement sa tête, ne souhaitant pas être en retard au cours suivant en pensant une fois de plus aux mêmes problèmes.
[…]
“Who wants to translate this sentence, please ?Sarah ? »,demanda gentiment Mister Holloway, la question accompagnée d’un attrayant accent anglais. L’adolescente visée, hypnotisée par cette tonalité, s’éternisa dans son instant de rêverie, n’ayant pas prêté la moindre attention à qui il était en train de parler à ce moment là. Autrement dit, elle se plaisait tellement dans son propre paradis qu’elle ne frôlait même pas la réalité…
« Miss Sarah ? Do you sleep ? Wake up, and answer at my question, please !”
Ellen étant installée à ses côtés, tenta par tous les moyens de la ressaisir, de lui faire calmement retrouver ses esprits. Mais visiblement, rien n’y faisait. Un long soupir se fit, de façon non circonspecte, entendre. Le professeur, amusé, prit l’initiative d’envoyer l’adolescente à la chevelure ténébreuse traduire la fameuse phrase à la place de la concernée, cette dernière ayant censément toujours la tête dans les nuages. Un nouveau souffle exprimant une frivole irritation, ne manqua pas de jaillir des lèvres de la jeune fille. Cependant, cela s’avérait l’occasion idéale pour prouver à tout le monde qu’elle aussi était capable de se démarquer, de scintiller dans certaines compétences. A cette idée, elle sourit en papillonnant inconsciemment ses paupières, de telle sorte que l’enseignant crut véritablement qu’elle s’avérait aussi songeuse, voire pire que Sarah. Même une poignée d’élèves furent possédés par cet étrange, mais réaliste sentiment. Néanmoins, une fois arrivée devant le tableau, la craie à la main, l’expression de son visage se modifia aussitôt. Une interminable méditation s’imposa. Plus le temps passait, plus les lamentations, les grognements, retentirent. Mister Holloway dévoila son exaspération, vis-à-vis de la réponse d’Ellen qui ne parvenait pas à faire surface, par les tonitruants clapotis de ses pieds sur l’estrade, rythmés par les regards rivés plusieurs fois d’affilée vers sa montre. L’adolescente en question se sentit alors excessivement gênée, et n’arriva plus, dès lors, à se concentrer. Sachant qu’elle représentait un désarroi, qu’elle n’était en mesure que de semer la pagaille aux yeux de tout le monde, elle fit chuter la tête en direction du sol, puis retourna tristement à sa place, comme si elle s’était rendue malheureusement compte qu’elle n’était d’aucune utilité, qu’elle ne servait à rien. Au moment où elle se réinstalla, la sonnerie vint déjà annoncer la fin de l’heure du cours d’anglais.
[…]
Suite à un monologue de l’enseignante de biologie à propos des caryotypes, le dénouement de cette journée se manifesta, sans que les jeunes ne le remarquent, bien trop occupés à dissimuler du mieux qu’ils le pouvaient leur ennui profond à celle qui avait pour rôle d’apprendre à ces derniers les sciences. Ellen, ayant également courageusement lutté contre le sommeil durant toute l’heure, n’avait finalement pas été capable de résister à la multiplicité de bâillements se dégageant de ses lèvres, elle aussi. Elle s’était affalée sur sa paillasse dans le laboratoire, le stylo à la bouche. Sarah, trouvant intéressante cette matière, était restée éveillée. Cela l’amusait de scruter son amie les yeux fermés, cette dernière ronflant de temps à autre. Par contre, Jonathan, lui, se situant derrière la brune à la queue de cheval, n’avait pas du tout prêté attention à la jeune fille à la chevelure ténébreuse, et à la place, prenait du plaisir à scruter celle dont il était sincèrement amoureux. Lorsqu’Ellen se réveilla tout en effectuant une série d’étirements, et qu’elle fit de nouveau face à, selon elle, cette insupportable scène, qui bloquait sa respiration et qui faisait souffrir son cœur, elle n’eut que le réflexe de se hâter vers la sortie de l’établissement, comme si elle cherchait à échapper à une foule de journalistes n’ayant aucunement l’intention d’abandonner leur course acharnée.
[…]
Les écouteurs d’Ipod positionnés dans ses oreilles, l’adolescente au regard ambré savoura, tout en admirant le paysage devenu splendide à contempler grâce au majestueux coucher de soleil, une douce musique, histoire de se plonger à la perfection dans l’atmosphère paisible de l’environnement qui l’entourait. Elle ferma ses yeux, inspira, puis expira pacifiquement. Elle ne se lassait pas d’agir de la sorte face à ce spectacle naturel. Elle avait constamment l’impression que chaque jour, un détail de ce fameux décor se transformait, ce qui expliquait en quelque sorte ce comportement, pouvant évidemment paraître pour beaucoup inhabituel.
Quelques minutes après, Ellen eut brusquement le sentiment qu’on lui caressait posément le visage. Interrompue dans son instant d’intimité avec elle-même, elle sursauta. Lorsqu’elle vit la silhouette de celui qui avait posé la main sur elle, elle fit deux pas en arrière, comme si elle était pétrifiée à cause de l’énergumène n’hésitant apparemment pas à se dresser devant elle. Plus elle reculait, plus il se rapprochait.
« Qu’…qu’est-ce que tu fais ici, salaud…
- Ben…J’voulais te revoir…Je suis si horrible que ça pour que je sois insulté comme ça…J’aurais du m’en douter que tu ne souhaitais plus avoir affaire à moi, vu l’accueil chaleureux que tu m’as donné quand je t’ai appelé il y a…une semaine ?
- Bien sûr ! Tu…tu ne m’as jamais donné de tes nouvelles…Je t’ai appelé je ne sais combien de fois…Aucune réponse…TU T’ES BIEN FOUTU DE MOI !
- Attends, t’énerve pas, s’il te plait…Je sais que tu crois que je t’ai trahi, que je t’ai définitivement oublié. Mais si c’était vraiment le cas, est-ce que je me trouverais là, devant toi, aujourd’hui ? Pourquoi cherches-tu à m’éviter ? Tu ne veux pas avoir d’explications ? Tu ne veux pas qu’on en discute franchement ?
- Attendre, attendre…J’ai fait que ça, sans rien obtenir en retour ! Dire que j’ai perdu un temps précieux à cause d’un gars comme toi…J’suis vraiment trop nulle ! Je n’ai plus envie de t’écouter, maintenant…Yann ! »
Yann, l’ex petit ami de la jeune fille à la chevelure ténébreuse, détourna honteusement son regard noisette, étant pleinement conscient que jusqu’ici, il ne lui avait fait connaître qu’une injuste souffrance. Cette souffrance, il n’avait jamais espéré une seule seconde qu’elle plane incessamment autour d’Ellen lors de son absence non désirée. L’adolescent en question plongea délicatement une de ses mains au cœur de ses mèches rousses cuivrées et la frotta lentement contre elles, démontrant ainsi son béant embarras vis-à-vis de celle qu’il chérissait. Il souhaitait se faire pardonner, et ce, par n’importe quel moyen, même les plus inconcevables. Il devait prononcer quelque chose. N’importe quoi. Tant que cela était en mesure de la retenir, de la faire rester à ses côtés, ne serait-ce que quelques petites minutes, peu importe si la concernée s’éternisait à le haïr de toute son âme.
« Et…Emily, elle va bien ?
- T’as oublié qu’elle et moi, on était pratiquement jamais en contact, même à la maison…
- Je…J’espérais que ça s’était arrangé pendant mon séjour en Amérique…
- Ah oui…Et il était bien, ton SEJOUR en Amérique ?
- Oh, je t’en prie ! Tu sais bien que j’avais pas le choix ! Mes parents m’ont imposé cette nouvelle vie, tu crois qu’à ce moment-là, j’étais en mesure de leur dire « Non, je veux rester ici ! » ?
- Mais…Au final, elle t’a plu, ta nouvelle vie, je suppose ! Pour que t’y sois resté pendant autant de temps !
- A ton avis, si je suis là, tu crois qu’elle m’a plu ? Tu me manquais, un an c’est beaucoup trop, je voulais te revoir ! D’ailleurs, tu n’as pas changé, ça fait plaisir.
- Arrête d’essayer de me flatter, ou quoique ce soit d’autre…Je t’ai déjà oublié. Ca ne peut plus marcher entre nous.
- Et…Tu penses sincèrement que je vais te laisser me jeter aux oubliettes, comme ça, sans rien dire ? T’es vraiment cruelle…Je ne pensais qu’à toi là-bas, je cherchais toujours à garder le contact avec toi, mais…Ma mère, elle m’en a empêché, elle a tenté de me persuader de ne plus prêter à attention à toi en me répétant sans arrêt que tu n’en valais pas la peine, que si tu m’aimais vraiment, tu aurais essayé de me retenir, ou alors de me suivre ! Mais elle ne se rend compte de rien ! Elle est complètement à côté de la plaque sur ce sujet-là ! Ce n’est pas parce qu’elle a divorcé que moi aussi, je suis obligé de rompre avec toi ! Elle ne se rend pas compte de nos problèmes, ni de nos sentiments ! S’il te plait, crois-moi, j’ai vraiment tout fait pour écouter ta voix, TOUT !
- …
- Pourquoi tu me regardes comme si pendant tout ce temps, je me suis moqué de toi ? Comme si je t’ai toujours menti ? Tu n’en as pas assez ? Tu veux que je me mette à genoux, aussi ?
- Je dois y aller…
- Non, attends ! Je t’en prie ! »
Ellen, souhaitant à tout prix se protéger de cet air irrespirable, s’enfuit, ne pouvant plus supporter davantage l’incommensurable persévérance de Yann. Elle était douée en athlétisme, et pourtant la jeune fille aux yeux ambrés avait l’impression que l’épuisement la submergeait subitement, telle une vague lui supprimant toute force lorsque celle-ci la faisait chanceler, avant même qu’elle ne débute à dégourdir de la sorte ses jambes. Elle avait égaré une bonne partie de ses repères, sa vue devenant extrêmement floue. Elle se mit machinalement à boiter, les genoux frissonnant, comme si un pondéreux poids écrasait peu à peu, et sans pitié, son dos. Trébuchant, elle s’écroula, puis tenta de crier le plus fort possible, ceci étant considéré comme un appel au secours, sa fatigue ne le lui permettant malheureusement pas. Puis, avec le peu de vision qui lui restait, elle aperçut brièvement une ombre s’avancer vers elle. Pensant qu’il s’agissait une nouvelle fois de Yann, elle scella ses paupières, afin de ne pas avoir encore à lui faire face. De toute manière, elle n’avait plus le pouvoir de lutter contre son affaiblissement, celui-ci du à ses sentiments filandreux. De grands bras prirent l’initiative de la porter, tout en s’assurant de ne pas la froisser en effectuant ce geste. L’individu possédant ces bras, constata qu’Ellen s’avérait plutôt légère. Il en sourit.
[…]
« ATTENDEZ-MOI !!! »
Le car était prêt à démarrer. Une foule d’élèves scrutèrent d’un air antipathique l’adolescente à la chevelure ténébreuse, cette dernière se trouvant alors dans une situation plus que dérangeante pour elle. Non seulement elle était en retard, mais de plus, ses soi-disant camarades prenaient ce détail pour un crime. Elle soupira. Aujourd’hui, toute sa classe devait se rendre à un musée de l’Antiquité afin d’en faire une visite guidée. Elle ne supportait pas ce genre de sorties, qu’elle estimait la plupart du temps inutiles. Après une poignée de minutes à lui répéter la même morale harassante, les professeurs accompagnant les jeunes permirent finalement à Ellen de s’installer confortablement dans le moyen de transport. Sarah, ayant pris le soin de lui garder une place, l’invita à s’asseoir à ses côtés.
« On peut dire que t’as de la chance, au moment où t’es arrivée, le car allait s’en aller ! Si t’étais pas venue à temps, j’aurai failli crier « STOP ! » au chauffeur ! Ah là là, t’as du bol d’avoir une amie comme moi !
- Mais oui, c’est ça ! Merci, Sarah.
- Ah, et, pourquoi t’étais en retard, en fait ?
- Ben en fait, tu sais, j’me suis réveillée comme d’habitude, chez moi, sauf que j’avais l’impression que quelque chose n’allait pas…Quelque chose en rapport avec hier soir…Je ne parviens pas à me souvenir de ce qui s’est passé à ce moment là…Je courais, je courais, et après…plus rien. C’est vraiment bizarre, et du coup, ça m’a tellement torturé l’esprit que je n’ai pas vu le temps qui passait, et…ben voilà !
- Ah ouais, en effet…Ben bonne chance pour te remémorer ça, alors ! La prochaine fois, tu feras quand même plus attention ! J’ai pas envie de m’attirer la honte devant tout le monde à cause de toi, hein !
- Haha, t’inquiète ! »
Arrivée au musée après environ une heure de route, les attentes d’Ellen étaient comme celle-ci l’avait prédit. La contrariété était donc au rendez-vous. Seule, parmi ce décor inspirant selon elle l’ennui, une amphore de couleur cuivrée accompagné de rigoureux motifs représentant à la perfection l’Histoire, réussit à susciter un peu l’intérêt de la jeune fille au regard ambré. Elle admira, en seulement un millième de secondes, sa somptueuse forme arrondie. Les tableaux, les sculptures, les statuettes… Rien de tout cela ne l’intéressait, n’attirait son attention.
[…]
Lorsque la visite fut enfin terminée, des sourires se dessinèrent sur une majorité de visages, ceux-ci précédemment ridés à cause d’une certaine morosité apparue dès le commencement des sempiternelles explications du guide, visiblement enthousiasmé de leur venue dans ce bâtiment historique. Ellen fut soulagée d’être parvenue à atteindre la sortie de ce dédale infernal. Quand elle s’apprêta à se diriger vers l’autocar afin de se reposer suite à de longues heures passées à reluquer son portable, l’unique raison étant de s’informer du temps qui s’écoulait à une vitesse assez douteuse, elle devint tout d’un coup surprise. Quelqu’un la dépassa en lui murmurant rapidement des propos embarrassants dans son oreille au passage…
« T’es toute mignonne quand tu dors, j’aurais jamais cru ça…»
D’abord choquée de cette révélation osée, voire scabreuse, l’adolescente à la chevelure ténébreuse ne put s’empêcher par la suite d’étirer au maximum son sourire lorsqu’elle s’aperçut que celui qui l’avait complimenté s’avérait être un blond qui lui semblait particulièrement familier… |