Chapitre 3
Le lendemain matin, alors que tout le monde se levait pour aller prendre un petit déjeuné, Gabrielle resta dans sa chambre.
_ « Gabbô, affiche moi une page blanche s’il te plaît. »
Le petit objet ailé s’éleva dans les airs, ouvrit sa grande bouche en direction du plafond et une page holographique en sorti.
_ « Ecris ce que je vais te dicter, et envoie le à Timcampy, qu’il le montre à Allen. »
Le dit Allen était en compagnie de Lenalee dans le réfectoire, à se goinfrer comme pas possible. Il n’avait pas vu sa sœur et s’était dit qu’elle était encore en train de dormir, n’osant pas aller la réveiller. Instinct de survie. Tim, qui était posé sur son épaule, sursauta et se tourna vers le blandinet avant d’afficher un message.
_ « Allen, pourrais-tu me rejoindre dans ma chambre un peu plus tard ? La dernière fois je n’ai finalement pas eu le temps de te parler de la prophétie. Désolée de te faire déplacer, c’est juste que ce matin je n’ai pas vraiment envie de sortir de ma chambre, et je ne passerais pas au réfectoire. Trop de monde. Ok c’est peut-être aussi mon côté égoïste flémarde, mais vraiment un tout petit peu. Ps : Lenalee peut venir si elle veut, c’est toujours un plaisir de la voir.
Signé : Moi. »
Lenalee, qui avait lu aussi esquissa un grand sourire en arrivant à la fin de la page. Allen prit un air exaspéré devant l’asociabilité de sa sœur.
_ « On y va dans un petit quart d’heure ? »
_ « Oui ! »
OoOoOoOoOoOoOoO
Allen et Lenalee étaient devant la porte de Gabrielle et toquèrent doucement.
_ « Entrez. »
Les deux arrivants entrèrent donc et tombèrent sur la jeune asociale, debout devant un énorme tableau tactile sortant de son golem. Il y avait une multitude d’équations mathématiques et de formules que Gabrielle étaient en train d’écrire.
_ « Le résultat est 496. »
_ « Hein ? »
_ « Gabbô, envoie une copie du tableau à Komui. »
Le golem s’exécuta, et ravala l’hologramme.
_ « Qu’est ce que… ? » Allen ne comprenait pas vraiment, ignorant qu’un golem était capable de ça.
_ « Tu n’as pas cherché à connaître toutes les fonctionnalités de Timcampy n’est-ce pas ? »
_ « Heu, pas vraiment non… »
_ « Tu devrais, ça peut s’avérer utile. »
Lenalee sortit de sa contemplation et adressa la parole à Gabrielle.
_ « Dis moi, c’était quoi tous ces calculs ? Et pourquoi les envoyer à mon frère ? »
_ « Tout à l’heure des stagiaires scientifiques étaient venus se caler devant ma porte pour échapper à l’agitation des labos. Je les entendais parler. Ils se posaient un calcul mental et ne trouvaient pas la réponse. Donc je la leur ai donnée, en ayant marre de les entendre. Du coup ils m’ont montré un papier avec une énorme équation et m’ont demandé si j’étais capable de la résoudre. Apparemment Komui avait bloqué dessus et leur avait donné pour s’en débarrasser. Du coup je l’ai faite et lui ai envoyé le résultat, avec le semi développement pour qu’il voit le cheminement. »
_ « Et où as-tu appris à faire ça ? »
_ « Comme je l’ai déjà évoqué, Nara était une scientifique et m’a enseigné tout ce qu’elle pouvait m’apprendre sur les sciences. Mais bon… bref. Ce n’est pas de ça dont je voulais vous parler à la base, mais de la prophétie, car si on n’agit pas, on avancera jamais.
Les trois exorcistes étaient à présent assis sur le lit. Lenalee et Gabrielle étaient côtes à côtes adossées au mur, dans le sens de la longueur du lit. Allen était en face d’elles, en tailleur.
_ « Alors ? Tu disais qu’il fallait agir. De quoi parlais-tu.
_ « De la prophétie. Les deux derniers vers sont assez clairs. « L’annihilation des faucheurs d’âmes » désigne clairement les Noah, et « un frère et une sœur » nous désigne. Nous sommes donc appelés à détruire les Noah. C’est peut-être un peu prétentieux, mais c’est explicite, c’est la réalité. Pour le vers qui précède, celui qui parle de l’union du cœur, je sais aussi de quoi il s’agit, c’est également assez logique… »
_ « Logique ? Heu… peut-être… », Allen avait suivi jusque là mais commençait à se sentir pommé, et regardait dans le vide, l’air de réfléchir intensément. Lenalee, elle, regardait attentivement Gabrielle. Enfin, la regardait et était attentive aux informations qu’elle donnait.
_ « Je pense que Hevlaska faisait référence à l’innocence appelée Cœur. »
_ « Ouais, c’est cool mais personne ne sait où il est, alors comment veux-tu le lier à quelque chose ? Et d’abord à quoi veux-tu le lier ? »
_ « Ce n’est pas comme ça qu’il faut réfléchir. D’autant plus qu’avec ce que je t’ai dit dans le train tu devrais pouvoir faire le rapprochement. »
_ « Heu… »
_ « Je te donne une piste. Tout le monde dit que si le cœur est détruit, toutes les autres innocences disparaîtront à leur tour. »
_ « Oui ? Et ? »
_ « Et cette hypothèse n’a jamais été fondée. Tout le monde a fait une fixette sur un mythe sans jamais le remettre en question. Parce que c’est plus facile de croire que l’on sait, plutôt que de douter de ce que l’on croit savoir, c’est plus facile, plus rassurant. Maintenant si tu partais du principe que ce mythe s’avérait faux, et que le cœur avait une autre particularité. »
_ « … »
Gabrielle soupira, exaspérée.
_ « Les Noah ont le pouvoir de détruire les innocences et ils l’ont toujours fait sans problème. Seules nos deux innocences ont résisté, et se sont reformées, encore plus puissantes qui plus est. Je pense que seul le cœur possède ce pouvoir d’auto régénérescence. De plus, les nôtres étaient à la base une seule et même innocence. Elle a pu se scinder en deux et se conserver intacte. Lorsque nous sommes proches et que nos innocences sont activées, notre taux de compatibilité augmente. Allen, je pense que nous possédons le cœur, et qu’il est appelé à se réunifier pour obtenir la puissance nécessaire à l’extermination des Noah. Je pense également que cette réunification ne se fera pas d’elle-même si on ne fait rien. »
_ « Ok, admettons. Mais sur quoi veux-tu partir pour ça ? »
_ « Sur le premier vers de la prophétie, rappel toi. « L’harmonie des sons et des âmes ». On peut essayer de chercher la signification de ces éléments. »
_ « Et tu n’as pas une idée de ce que ça peut être ? »
Cette fois ci ce fut à Lenalee de réagir.
_ « Ames pourraient faire référence à des âmes sœurs. C’est le seul moyen que je connaisse d’harmoniser deux âmes. On n’est pas obligé de garder l’optique des deux jumeaux ensembles, mais séparément. Je ne vois rien d’autre. »
_ « C’est exactement ce que j’ai dit à Komui, malgré le fait que ça me paraisse surfait. Enfin bon, il fallait juste que vous sachiez tout ça au cas où l’un de vous découvrirait quelque chose qui puisse avoir un rapport avec le son… ou les âmes au cas où notre hypothèse des âmes sœurs serait erronée. »
Les deux autres acquiescèrent, encore songeurs quant aux informations qu’ils venaient de recevoir. Allen sorti de ses pensées et regarda sa sœur qui avait maintenant les yeux fermés.
_ « Dis moi, la dernière fois je voulais te poser une question à propos de Cross, mais ça m’était sorti de la tête… Heu… Tu n’as pas vraiment eu l’air de trimer physiquement avec lui. Je voulais savoir comment ça se passait. »
_ « ça a été dur, mais pas physiquement comme toi. Je n’ai jamais eu à bosser pour rembourser ses dettes, je prenais les devant. C’est pour mon état mental que ça a été violent. On a beaucoup bougé et dès qu’on arrivait quelque part, je me prenais une journée pour faire le tour des commerces aux alentours et les prévenir. Je leur disais bien de ne jamais faire crédit à Cross, et de lui proposer leurs services uniquement s’il payait directement. Ou à leurs risques et périls. Malgré mes avertissements il y a quand même quelques commerces qui se faisaient berner, et qui se retrouvaient impayés. Dans ce cas là je les manipulais, je négociais et j’arrivais toujours à les persuader qu’ils étaient en tort. Je m’en sortais toujours. La manipulation et la persuasion sont des arts. Au final on a passé un marché. Il ne contracterait plus de dettes et payerai directement à condition que je lui rapporte assez d’argent… du coup… »
_ « Poker ! » Allen et Gabrielle avait prononcé ce mot en même temps, un grand sourire plaqué sur le visage. Lenalee, amusée, s’adressa à l’autre fille sur laquelle sa tête était maintenant posée, au niveau de l’épaule.
_ « Est-ce que toi aussi tu triches en maniant les cartes ? Comme Allen ? »
_ « Non. Je ne manie quasiment jamais les cartes, ce qui permet de ne pas me faire soupçonner. Je triche autrement. »
_ « Comment peut-on tricher autrement ? A part le comptage des cartes, qui est très peu connu et quasi mythique tellement cette technique est complexe, je n’en connais pas d’autre. »
Gabrielle le regardait avec un air malicieux.
_ « Nooon… Tu ne vas pas me dire que… »
_ « Si. D’ailleurs c’est étonnant que tu connaisses ça, c’est une méthode tellement impensable que personne n’en parle en principe. »
_ « Je n’en ai entendu parler qu’une seule fois, et très brièvement, lors d’un tournois. »
Soudain, alors qu’un blanc était apparu dans la conversation, les trois exorcistes entendirent toquer à la porte.
_ « Oui ? »
_ « C’est Kanda. Aurais-tu vu Allen ? Et Lenalee par la même occasion ? Je ne les trouve nulle part. »
Gabrielle voulut se lever pour aller ouvrir mais elle n’avait pas envie de bouger alors que la chinoise était calée contre elle.
_ « Ils sont là, entre. »
Ils virent alors le beau japonais apparaître, un pantalon noir taille basse et une chemise ouverte. Allen crut tomber du lit en observant la vue qui s’offrait à lui, puis fut sorti de ses pensées par la voix du kendo ka.
_ « J’aime quand les choses tombent bien. Komui m’a chargé de vous ramener tous les trois dans son bureau. Il nous attend. »
Allen se leva et s’approcha de lui pour le suivre jusqu’au bureau de l’intendant. Lenalee soupira et se colla un peu plus contre Gabrielle.
_ « On est obligé ? »
La jeune maudite eu un grand sourire et regarda la chinoise. Kanda et Allen restaient perplexes devant cette scène, échangeant un regard complice, amusé et plein de sous entendus concernant les deux filles. Le blandinet failli pleurer de joie pour ce premier contact positif avec le japonais. Gabrielle, à qui rien n’échappait, jeta un coup d’œil vers Lenalee pour voir si elle avait vu. Celle-ci sourit vicieusement. La sœur d’Allen avait sa réponse. Tous se levèrent et se dirigèrent vers le bureau du scientifique fou.
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