Greg Cornebuse et Franck Baudelaire étaient nés avec trois ans d’écart, mais ce soir-là, quand ils moururent, ce ne fut qu’avec trois minutes de différences, l’aîné restant l’aîné même dans la mort. Franck, alors âge de trente-huit ans, trépassant le premier et Greg, âgé quant à lui de tout juste de trente-cinq ans, y passant en second.
Ils se connaissaient depuis leur plus tendre enfance, avaient traîné dans les mêmes bandes et avaient même effectué leur service militaire dans la même caserne et à quatre mois d’intervalle à peine ; enfin ils se trouvaient être les derniers de leurs amis à habiter toujours leur ville d’Ustariz et à se côtoyer encore, se retrouvant la plupart du temps dans le vieux bistro de la place centrale pour picoler plus que de raison en se rappelant du bon vieux temps où ils étaient encore jeunes et insouciants.
Alors que ne furent pas la surprise et la joie de Greg quand il arriva devant les portes du paradis et qu’il reconnut son vieil ami qui, lui tournant le dos, faisait déjà la queue devant celles-ci.
Et comment pourrait-on décrire l’étonnement et le plaisir que ressentit ce dernier de voir ce premier quand il se retourna après qu’il lui est tapoté sur l’épaule pour attirer son attention.
Ils se serrèrent dans les bras l’un de l’autre, longuement et chaleureusement, les larmes aux yeux, du moins dans leur tête, car en vérité les anges ne pleurent pas. Puis, après qu’on les ait laissés passés, ils ne cherchèrent même pas à en apprendre plus sur l’endroit où ils se trouvaient alors, ne posant, en fait, qu’une seule et unique question à la première personne qu’ils croisèrent et qui était :
“ Est-ce qu’il y a un lieu où l’on peut boire un godet ou deux, voir plusieurs dans le coin ? ”
Fin !
Écrit en Juin 2015.
S.flagg
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