Venceslas essuya ses yeux rougis par le sommeil, la plume qu'il tenait dans sa main continuant à gratter rapidement le parchemin qui s'étalait sur la table où il était installé. Il ne savait déjà plus depuis combien de temps il était ainsi occupé à travailler, s'acharnant sur la punition que Flitwick lui avait donnée. Trois rouleaux de parchemin sur le sortilège de lévitation...Tout ça parce que Venceslas avait mal visé, lors de leur dernière leçon, et que son professeur s'était alors retrouvé à flotter dans les airs, battant de ses petits bras pour essayer de retourner au sol. Ce n'était pas de sa faute, il était épuisé... D'ordinaire, le jeune garçon aurait aisément fini ce qui lui était demandé, en moins de temps qu'il n'en faut pour dire ouf, mais, ces derniers jours, les professeurs les avaient assommés de travail et Venceslas, lui, devait faire un effort double, s'occupant des devoirs de Zacharias comme des siens. Personne ne le savait et, surtout, personne ne devait s'en douter... En plus de cela, Ven avait dû remplir un parchemin sur les propriétés de l'asphodèle, en s'efforçant d'écrire différemment pour que sa copie et celle destinée à Zacharias ne puissent pas être rapprochées. Sa main le faisait souffrir et il n'aspirait qu'à une chose : se recroqueviller sous sa couette et se réfugier dans le sommeil. Mais il ne pouvait pas...Si cela venait à arriver, il serait puni plus encore...et il se ferait remarquer. Il ne devait surtout pas ! Son père serait furieux...Plus qu'il ne l'était déjà... Lord Voldemort était terriblement nerveux, depuis quelques temps...L'heure de la mission approchait à grands pas et il voulait être certain que rien ne manquerait. Venceslas n'en savait pas beaucoup, mais il était au courant d'une chose : le jour venu, il devinerait facilement en quoi consistait son plan et il lui faudrait alors s'arranger pour faire diversion, sans en avoir l'air. Venceslas ignorait ce qu'il lui faudrait faire, mais une chose était sûre : il n'avait pas le droit à l'erreur. Venceslas soupira, bâilla une nouvelle fois et se leva pour sautiller un peu, espérant chasser le sommeil de cette manière. Cela devenait difficile pour lui de tenir...Il avait fait plusieurs nuits blanches et son organisme avait besoin de repos. Mais son père se fichait bien de son état de santé, tant qu'il accomplissait ce qui lui était demandé... Tout en sautillant, Venceslas se remémora les événements des derniers jours, espérant réveiller un peu son cerveau en le sollicitant de cette manière. Tant de choses s'étaient passés...Le professeur Bibine avait finalement réussi à lui parler, même s'il avait tenté de l'éviter, craignant qu'elle ne lui pose des questions gênantes quant à ce qui s'était passé. A sa grande surprise, elle s'était montrée très enthousiaste et, après s'être enquise de son état de santé, elle lui avait révélé qu'il était doté d'une disposition naturelle en ce qui concerne les balais. Pas pour le vol, comme c'était le cas pour Potter, qui était récemment devenu le plus jeune attrapeur que l'école ait connu depuis bien longtemps, mais pour l'objet lui-même. Il «ressentait» les balais, la magie qui en émanait...Bibine lui avait signalé fièrement que les plus grands fabricants de balais magiques possédaient ce même don. Comète, Nimbus...Toutes ces grandes marques avaient bénéficié de talents semblables à celui que Venceslas présentait. Lui-même ne savait pas trop quoi en penser...En tout cas, l'Etoile filante qu'il avait chevauchée durant le cours s'était grandement attachée à sa personne, ce pourquoi les autorités professorales avaient daigné faire une exception pour lui et l'autoriser à posséder un balai, bien qu'il soit un élève de première année. Venceslas avait été persuadé que Voldemort le tuerait pour cet «éclat» de sa part, mais il avait sans doute autre chose à penser, à ce moment-là...Et puis, l'histoire s'était vite fait oublier, grâce à Harry et son entrée dans l'équipe de Gryffondor. Venceslas ne remercierait jamais assez son camarade d'avoir fait preuve d'un timing louable et de l'avoir sauvé d'une attention non désirée... Il devait rester dans son coin et n'intéresser personne. Ne susciter aucune curiosité. C'était le principal... Pensant que son activité l'avait aidé à retrouver ses esprits, Venceslas retourna s'asseoir et se pencha à nouveau sur son parchemin, décidé à terminer tout cela cette nuit. Même s'il se sentait tellement...fatigué...et même épuisé... Le jeune garçon dodelinait de la tête, peinant à tracer des formes compréhensibles à l'aide de sa plume. Il ne s'était encore jamais retrouvé dans un tel état de lassitude, pas même lorsqu'il vivait encore avec ses véritables parents. Cette pensée fit remonter quelques souvenirs que Venceslas s'empressa d'enfouir au plus profond de lui-même, son corps parcouru de frissons. Le passé devait rester là où il se trouvait actuellement...Ne pas revenir... Alors que Venceslas était sur le point de succomber au sommeil, une main secoua doucement son épaule. Le jeune garçon ouvrit les yeux qu'il avait fermés, levant son regard vers la personne qui venait de le réveiller.
« Bah alors, P'tit Ven, qu'est-ce que tu fiches ici à deux heures du mat' ? »
Jeremiah Hampton...Qui d'autre pouvait-il lui donner ce surnom humiliant ? Le né-moldu, drapé dans une robe de chambre sombre, était penché sur lui, ses longs cheveux noirs, emmêlés au possible, chatouillant la peau de Venceslas. Le Prince des Ténèbres s'écarta de lui, se donna quelques claques pour éviter de s'endormir à nouveau avant de marmonner, tout en reprenant son travail :
« J'ai une punition à faire...
-Ah oui, c'est vrai ! J'ai entendu des gamins en parler... 'Paraît que t'as fait connaître à Flitwick les joies de l'anti-gravité ? »
Jay éclata de rire, un rire sonore et tonitruant. Venceslas pria pour qu'il ne réveille personne, désirant retrouver au plus tôt sa solitude.
« Je ne comprends pas ce que tu essaies de me dire, mais oui, je suppose que c'est cela...J'aimerais bien pouvoir la terminer, donc... »
Jeremiah s'assit en face de lui, au grand dam de Venceslas. Ne comprenait-il donc pas que sa présence était indésirable ? Comment pouvait-il se concentrer sur sa tâche alors que cet énergumène était à ses côtés ? Faisant fi de l'aura négative que semblait dégager le Prince des Ténèbres, son aîné jeta un oeil au parchemin, adressant un sourire compatissant à son cadet :
« Le sortilège de lévitation, hein ? Flitwick a toujours eu un sacré sens de l'à-propos... »
Venceslas haussa les épaules à cette remarque, ignorant autant que faire se peut la présence du Poufsouffle.
« Besoin d'aide ? J'suis parti pour faire une nuit blanche, moi aussi... »
Jeremiah ajouta dans un murmure, sur le ton de la confidence :
« Ne le dis à personne, P'tit Ven, mais Ced ronfle comme un moteur ! Une horreur absolue ! J'ai l'impression d'être sur le périph' quand je l'entends...Pas très glamour, le bourreau des coeurs...»
Jay éclata de rire à nouveau, avant de constater l'expression d'incompréhension certaine qui se dessinait sur le visage de Venceslas :
« Ouais, t'as rien capté...Laisse tomber, c'est des trucs de moldus. Je t'en apprendrais un peu plus sur mon monde plus tard ! Mais on va d'abord s'occuper de c'te punition. Comme ça, tu pourras pioncer tranquillement... »
Sans laisser le temps à Venceslas de protester, Jeremiah se pencha sur le parchemin du jeune garçon et commença à lui donner des directives, des idées, des pistes à suivre...De temps en temps, il secouait Venceslas pour lui permettre de terminer son ouvrage, s'efforçant de le dérider un peu à l'aide de blagues stupides ou incompréhensibles. Une expression satisfaite s'étira d'ailleurs sur son visage lorsque Venceslas lui consentit un faible sourire. Quand la fatigue devint insurmontable, le jeune garçon ne put que s'incliner face au sommeil. Il s'écroula sur son parchemin, son souffle devenant lent et régulier. Attendri, Jay s'occupa de remplir les dernières lignes qui manquaient au devoir, avant de soulever le petit garçon et de le caler contre lui, alors qu'il s'installait sur l'un des canapés de la salle commune. Il caressa ses cheveux d'un geste doux en constatant que le sommeil de Venceslas était agité, loin de l'apaisement dont le garçon aurait dû avoir besoin après avoir passé la nuit à travailler ainsi. Dans un murmure, le Poufsouffle chantonna une berceuse, attendant que son camarade parvienne enfin à se détendre. Lui-même était heureux de pouvoir s'occuper ainsi de cet enfant...Tout cela le ramenait à une lointaine époque, à laquelle il aurait tant aimé pouvoir revenir...
AAAAAA
Flitwick avait paru satisfait par son devoir lorsque Venceslas le lui avait rendu, le regard creusé par des cernes disgracieuses. Il avait évité les questions inquiètes de son professeur en marmonnant qu'il avait dû rendre des devoirs en retard, s'apprêtant à s'éclipser pour se rendre à un cours d'histoire de la magie. Néanmoins, un détail l'arrêta...Visiblement, le professeur de Sortilèges faisait cours aux Gryffondors et Serpentards quand le Poufsouffle l'avait rejoint pour lui remettre sa punition, comme en témoignait la sortie rapide d'Hermione Granger, les larmes aux yeux. Curieux, Venceslas voulut l'arrêter, mais il fut interrompu par deux voix bien familières :
« Hey, Ven ! Ca faisait un moment qu'on ne s'était pas vus !
-Qu'est-ce que tu fais ici ? »
Ronald Weasley et Harry Potter...Il était vrai qu'il n'avait guère eu le temps de les revoir depuis la rentrée, occupé qu'il avait été par son quotidien à Poudlard. Ron lui donna une accolade amicale et Harry lui adressa un sourire plus discret, auquel Venceslas répondit sans conviction. Difficile de se montrer chaleureux envers lui, après tout ce qui s'était passé avec son père...Comment réagirait-il s'il savait que Harry Potter et lui entretenaient des relations de camaraderie ? Venceslas eut un frisson en y pensant. Copiner avec l'assassin de son cher paternel n'était sans doute pas la plus brillante de ses idées... Le Poufsouffle fut ramené à la réalité par la main que Ron agitait furieusement devant ses yeux, espérant attirer son attention. Il répondit machinalement qu'il avait une punition à rendre, avant de souffler sur le ton de la conversation :
« Qu'est-ce qu'elle a, Granger ? »
Ron leva les yeux au ciel à sa question :
« Rien de grave, Miss Je-Sais-Tout a compris qu'elle était insupportable ! Elle n'arrête pas de faire sa maligne au cours de Flitwick... »
Il tourna vivement la tête et le soulagement l'envahit en constatant que le professeur de sortilèges était parti, sans doute depuis longtemps. Autant éviter d'avoir des ennuis...
« Bref, au moins, on est tranquille, maintenant ! T'as vu le Nimbus 2000 de Harry ? McGo le lui a envoyé pour son admission dans l'équipe de Quidditch... »
Le ton de Ronald était envieux, bien qu'admiratif. Cela s'entendait aisément et Harry devait probablement en avoir conscience, ce dernier se dandinant sur place, un peu embarrassé. Venceslas, lui, était d'une grande curiosité. Il se demandait si le phénomène qui s'était déroulé avec l'Etoile Filante se reproduirait avec le balai de Harry... Devinant ses pensées, le Survivant proposa à Ven de le lui prêter à l'occasion.
« Tu ne me le prendras pas, hein ? Il paraît que tu as fait des tiennes avec l'un des vieux balais de l'école...J'ai bien l'intention de garder mon Nimbus aussi longtemps que possible ! »
Harry eut un petit rire. Mal à l'aise face à ceux que Venceslas savait qu'il devait identifier comme ses ennemis, il prétexta qu'il allait bientôt avoir un cours et alla s'isoler à la bibliothèque, se cachant derrière un exemplaire de L'Histoire de Poudlard pour éviter la moindre tentative de conversation. Il voulait être seul...et s'il pouvait en profiter pour dormir un peu, cela ne serait pas plus mal...Il avait désespérément besoin de se reposer. Alors qu'il s'allongeait à moitié sur sa table, prêt à s'endormir, une voix se fit entendre. Une voix qu'il était le seul à percevoir...
*L'heure est venue...Mon fils...*
Venceslas grimaça de douleur alors que l'esprit de son père s'infiltrait au sein de son âme, sa puissance destructrice assaillant sa pauvre tête de migraines insupportables. Le jeune garçon crispa ses doigts sur son crâne, le souffle court, mordant sa langue pour ne pas hurler face à la souffrance.
*Faible…Tu es si faible…*
La présence de Voldemort s'évanouit en lui et ce fut les larmes aux yeux que Venceslas s'effondra d'épuisement sur sa table, profitant de la dissimulation que lui offrait son livre pour récupérer un minimum d'énergie. Il n'allait pas pouvoir tenir, à ce rythme-là…
AAAAAA
« Je n'en reviens pas que tu aies pu oublier que c'était Halloween, aujourd'hui ! Ven, c'est le meilleur jour de l'année ! Avec mon anniversaire et Noël, bien sûr… »
Venceslas répondit à la déclaration véhémente de Justin par un bâillement long et appuyé, déclenchant les rires de ses camarades. Vexé, son ami lui asséna une redoutable pichenette, avant de retourner à son jus de citrouille, affichant un air boudeur. Déconcerté, Venceslas tourna un regard interrogatif vers Susan, qui peinait à cacher son sourire amusé :
« Laisse-le donc, cet idiot, et profite de la fête. La Grande Salle est magnifique, aujourd'hui, tu ne trouves pas ? »
Venceslas haussa les épaules avant de daigner jeter un regard autour de lui. Mouais...Très classique, cette décoration d'Halloween...
« Ils auraient dû utiliser des navets pour faire les lanternes. C'est beaucoup plus joli qu'une vulgaire citrouille, un navet... »
Une nouvelle fois, sa remarque déclencha des rires chez ses camarades et même Justin daigna se dérider face à l'attitude décalée de Venceslas. Celui-ci essaya de partager leur hilarité, mais le cœur n'y était pas. Son esprit était entièrement accaparé par la mission qu'il lui faudrait bientôt remplir. Quand ? Comment ? Lord Voldemort n'avait pas daigné lui en dire plus. Son père profitait sûrement de l'occasion pour tester ses capacités, notamment dans une situation sur laquelle il n'avait aucun contrôle. Il espérait ne pas rater son signal...Son père lui avait dit qu'il serait des plus évidents, mais sa perception étrange du monde aurait très bien pu l'empêcher de voir ce qui aurait sauté aux yeux de n'importe quelle autre personne. Alors qu'il jouait distraitement avec le contenu de son assiette, l'estomac trop noué pour seulement espérer grignoter, les portes de la Grande Salle s'ouvrirent dans un grand fracas. Venceslas fut le seul à ne pas sursauter, gardant son attention rivée sur sa nourriture. Sa surprise se manifesta avec un temps de retard, lorsque la voix balbutiante de Quirrell, aux accents de panique, se fit entendre :
« Un troll...dans les cachots...je voulais vous prévenir... »
Puis il s'effondra, semblant perdre connaissance. Pour un signal, c'était un signal...Venceslas devait en profiter... Comment pouvait-il faire diversion ? Son cerveau fonctionnait à toute allure, le poussant à réfléchir à une vitesse prodigieuse. Il n'allait pas retourner à sa salle commune, bien évidemment...Que faire, alors ? Mû par une inspiration, il décida de s'enfuir, sans chercher à se faire discret, bien au contraire. Alors qu'une partie du corps professoral s'efforçait de trouver ce troll dont Quirrell avait parlé, le Professeur Chourave et le Professeur Bibine s'étaient lancés à sa poursuite, criant son nom en espérant le faire revenir. Il allait les balader quelques temps, avant de trouver une cachette que nul ne soupçonnerait. Ainsi, les professeurs finiront par partir à sa recherche et son père aurait alors le champ libre pour faire tout ce qu'il désirait... Le premier lieu qui lui vint en tête, lorsqu'il commença à songer à une place dans laquelle on ne le cherchera pas, fut les toilettes des filles. Le jeune garçon accéléra sa course et profita d'avoir pu les distancer pour entrer dans les toilettes et se dissimuler dans une cabine. Alors qu'il reprenait son souffle, épuisé, une petite voix larmoyante le surprit tant qu'il laissa échapper une exclamation :
« Qui est là ? Tu viens pour m'insulter, toi aussi ? »
Ce timbre-là, Venceslas l'aurait reconnu entre mille...Hermione...Mais qu'est-ce qu'elle faisait là ? Pourquoi n'était-elle pas au banquet, avec les autres ? Mû par la curiosité, le jeune garçon sortit du cabinet et tomba sur la fillette, toute échevelée, les yeux gonflés par les larmes. Alors qu'il allait l'interroger sur sa présence, Venceslas se rappela de sa courte entrevue avec Ron et Harry. Et de la remarque du rouquin sur Hermione...Visiblement, elle avait été extrêmement blessée par les propos de son camarade.
« Je voulais juste l'aider...Je ne comprends pas ce que j'ai fait de mal... »
Venceslas ignorait ce qu'il était censé faire, désemparé par la tristesse d'Hermione. Celle-ci le regardait avec espoir, semblant attendre un secours de sa part, une épaule sur laquelle s'appuyer, quelque chose...Mais il n'était rien de tout cela. Non seulement il ne savait pas quelle attitude il devait adopter, mais, de surcroît, il n'était pas certain de vouloir réellement lui venir en aide. Au fond de lui, une voix lui disait d'envoyer balader la fillette, qu'elle n'était qu'une Sang-de-Bourbe pathétique et qu'elle allait devoir s'habituer à être rejetée et traitée comme une moins que rien, de toute manière. Peut-être même devait-il l'humilier...Il n'était sûr de rien. Mais il savait une chose : il n'aimait pas voir Hermione en larmes. Il ne comprenait pas pourquoi, mais...ça lui faisait mal.
Perdu entre ses sentiments et son éducation, Venceslas ouvrit la bouche et ce qui en sortit décontenança la Gryffondor, au point qu'elle ne put que marmonner un « Quoi ? » reniflant et ébahi :
« Il y a un troll à Poudlard. »
Devant l'incompréhension de la demoiselle, Venceslas se répéta, heureux d'avoir trouvé une échappatoire. Il souffla à celle-ci qu'elle ferait mieux de retourner à son dortoir, mais elle n'eut pas le temps de le faire. Un pas lourd se fit entendre. Lentement, Venceslas se retourna, appréhendant déjà ce qui allait se trouver sous ses yeux. Le troll était là. Le Poufsouffle n'eut que quelques instants pour se jeter sur Hermione et l'entraîner dans un roulé-boulé désespéré. Déjà, le troll assénait un coup de massue de sa force inhumaine. En pensant qu'il aurait pu avoir le crâne explosé, s'il n'avait pas eu ce réflexe, Venceslas eut un rire nerveux. Son attitude était loin d'être appropriée, il en avait conscience, mais il ne pouvait que ricaner face à l'incongruité et la dangerosité de la situation. Très vite, cependant, il retrouva son calme et son détachement habituel et, tout en entraînant Hermione dans un coin des toilettes afin de se protéger temporairement de l'affreuse créature, il réfléchit froidement à la situation. Il savait qu'il pouvait défaire aisément ce troll grâce aux sorts noirs qu'on lui avait enseigné durant toute son enfance, mais, ce faisant, il prenait le risque de voir sa couverture réduite en morceaux et, dans le pire des cas, son père découvert, son masque abattu, comme la masse du troll qui se précipitait vers eux deux avec lourdeur. Venceslas tira sa baguette de sa poche et cria un «Expelliarmus !», premier sort non noir qui lui était venu à l'esprit. Et cela fonctionna. Le troll recula d'un pas et sa masse alla terminer sa course aux pieds du Prince des Ténèbres et de sa camarade, tirant un cri à celle-ci et un frisson au jeune garçon. Ils essayèrent d'atteindre la sortie des toilettes, mais le troll bouchait le passage et ne semblait pas décidé à les voir s'échapper. Il lâcha un grognement monstrueux avant de se précipiter sur eux. Venceslas réitéra le sort, mais sans succès, cette fois. Le troll recula à peine et continua à s'avancer vers eux. Ce fut au tour d'Hermione de sortir sa baguette et d'essayer le repousser, réussissant à le faire lâcher sa massue. Surpris par la puissance de sa camarade, Venceslas s'en retrouva distrait et ne put éviter la main géante qui s'abattit sur lui, le tenant au niveau des côtes. Tandis qu'il reprenait sa massue, le troll serra, serra, prêt à broyer sa proie entre sa main puissante. Les sortilèges d'Hermione ne lui firent pas lâcher prise et un râle douloureux s'extirpa de la gorge de Venceslas, qui commençait à tourner de l'œil. Ce fut l'intervention providentielle et inattendue de Harry et Ron qui lui sauva la vie. Tous deux lancèrent des débris au Troll et crièrent pour attirer son attention. La dernière manœuvre fut la plus efficace. Son intérêt tourné vers ces deux êtres braillards et gesticulants, le troll lâcha le jeune garçon, qui tomba au sol d'une certaine hauteur et ne dut son salut qu'à Hermione, qui eut le réflexe de lancer un Wingardium Leviosa des plus réussis. Venceslas flotta quelques instants, porté par ses vêtements touchés par le sort, avant d'atterrir lentement au sol, sous la direction de la fillette. Son idée fit visiblement des émules car Ron Weasley, après que Harry eut l'étrange idée d'enfoncer sa baguette dans l'une des narines du troll, fit flotter la massue de la bestiole avant de relâcher son sort. L'arme du troll causa sa perte. Celui-ci chancela avant de tomber sur le carrelage dans un bruit sourd, évanoui sous le choc. Harry et Ron se précipitèrent vers le Prince des Ténèbres, qui grimaçait en massant ses côtes. Hermione était avec lui, affichant un air profondément inquiet.
« Tout va bien ? »
Venceslas hocha la tête :
« Rien de grave. Mes côtes ne sont pas cassées, même si cela aurait pu être le cas. Vous êtes arrivé juste à temps. »
Il hésita un peu, avant de souffler d'une petite voix :
« Merci...de m'avoir sauvé la vie. »
Harry et Ron lui adressèrent un sourire, tout comme Hermione, qui lui adressa, ainsi qu'aux deux garçons, les mêmes remerciements. Venceslas regarda Harry reprendre sa baguette et afficher une moue dégoûtée face à la matière répugnante qui recouvrait le bois, songeant que le destin était tout de même fort ironique. Sa vie avait été sauvée par le garçon qui avait assassiné son père...Etrange coïncidence, tout de même...
AAAAAA
Quelques minutes plus tard, une partie du corps professoral de Poudlard arriva sur les lieux, surprenant Venceslas, qui venait juste de retrouver la force de se lever et de tenir sur ses jambes sans grimacer de douleur. Il n'osa pas regarder Quirrell dans les yeux lorsqu'il vit celui-ci aux côtés du Professeur Rogue. Manifestement, il avait échoué...Leurs deux diversions n'avaient pas suffi. Venceslas se mordit la lèvre et attendit que la punition vienne, sachant déjà que celle de son père pour s'être montré défaillant serait terrible. Quel ne fut pas son étonnement lorsque Hermione mentit au sujet de la raison pour laquelle elle se trouvait ici et mit en lumière les exploits de Harry, Ron et Venceslas. McGonagall décida de retirer 5 points à Hermione pour son imprudence et en accorda 5 aux trois garçons pour, disait-elle, «leur chance insolente». Ven n'était pas certain d'avoir beaucoup de chance, mais il était rassuré de ne pas avoir été puni. Alors qu'il s'éclipsait pour retourner à son dortoir, comme le faisait les trois Gryffondors, McGonagall le retint :
« Monsieur Malefoy, Dumbledore vous attendra dans son bureau demain soir. Il m'avait demandé de vous signaler cette convocation si vous veniez à vous faire remarquer d'une façon ou d'une autre. »
Le professeur de Métamorphose afficha une expression désolée alors que les yeux de Venceslas s'écarquillaient d'horreur. Une convocation...chez Dumbledore... Il n'eut pas la force de supporter le regard de son père. Sa voix dans son crâne, sifflante et implacable, lui donnant le tournis, était suffisamment pesante, suffisamment terrifiante. Il courut à son dortoir dès que McGonagall lui en donna l'autorisation, les larmes aux yeux, la peur au ventre. Il ne perçut pas l'œil inquisiteur que Rogue, également présent, avait posé sur lui, semblant le scruter jusqu'aux tréfonds de son âme…
AAAAAA
Venceslas évita ses camarades alors que ceux-ci l'attendaient, morts d'inquiétude, ne désirant qu'une seule chose : s'isoler et oublier tout ce qui venait de se passer. Oublier sa déception, faire taire cette voix sifflante dans son crâne... Il ferma les rideaux de son lit, jetant un sort pour que nul ne puisse les ouvrir ainsi qu'un autre pour que personne ne soit en mesure de l'entendre, et se recroquevilla en pleurant. Natschel sortit de sa cachette, rampant jusqu'au petit garçon :
Ven ? Ven, qu'est-ce qui se passe ?
Mon...Mon père...J'ai échoué...Il va me tuer...et Dumbledore...et...
Le reste de ses explications se perdit dans un sanglot et Natschel ne put que se coller contre le jeune garçon et lui faire profiter de sa présence et de son écoute attentive. Venceslas ne tiendrait pas le coup, sur le long terme...C'était certain...La pression était trop forte et, même s'il était le Prince des Ténèbres, le fils de Lord Voldemort...Il n'était qu'un garçon de onze ans, perdu et perturbé...
AAAAAA
La voix de Lord Voldemort réveilla l'enfant aux environs de deux heures du matin. Venceslas poussa un cri de douleur, tirant du sommeil son serpent. Il lui fit signe de ne pas s'inquiéter, sans succès, et s'extirpa de son lit avec toute la discrétion qu'il avait à sa disposition. Un sursaut le prit lorsque la voix de Jeremiah, assis sur son habituel canapé, se fit entendre :
« Ça va, P'tit Ve...?
-Oubliettes ! »
Venceslas avait agi d'instinct, jetant le sort sur son camarade avec la rapidité à laquelle on l'avait accoutumé. Le regard de Jay se fit vitreux. Le Poufsouffle ne prit pas le temps d'inventer une quelconque histoire à lui raconter, s'extirpant de la salle commune en espérant qu'il avait réussi, pour une fois, à lancer ce maléfice. Fort heureusement, le jeune garçon ne croisa personne, pas même Miss Teigne, et atteignit le bureau de son père sans encombres.
Le cœur battant, le souffle court, il hésita à activer la poignée et à entrer. Il n'avait qu'une idée : tourner les talons et s'enfuir loin, très loin d'ici...Mais s'il osait faire cela, les conséquences seraient telles qu'il ne pourrait qu'empirer son cas. Regrettant déjà son geste, le jeune garçon ouvrit la porte et pénétra dans le bureau. Un sifflement furieux l'accueillit, une fois que Quirrell eut jeté les sorts de protection nécessaires :
« INCAPABLE ! ENDOLORIS ! »
Le jeune garçon poussa un hurlement et se retrouva à terre, convulsant de douleur et de souffrance. Les larmes jaillirent à nouveau et Venceslas eut l'impression que son pauvre cœur était en train d'exploser dans sa poitrine sous le choc et la terreur. Le Poufsouffle n'était pas certain de pouvoir conserver toute sa santé mentale car, il en était conscient, une longue nuit, la plus longue de son existence, l'attendait...Il ne fallait jamais attirer la fureur de Lord Voldemort, en particulier si l'on se nommait Venceslas Malefoy, alias Serpentard-Black…Le Prince des Ténèbres. |