Chapitre 10
21 septembre 2002
Hermione soupirait en fermant la porte de sa boutique. Elle avait une réunion du Magenmagot ce soir et elle n'avait pas du tout envie d'y aller. Elle avait été convoquée à la dernière minute et ne comprenait pas pourquoi. Tout ce qu'elle voulait elle c'était dormir. Elle allait prendre des congés maintenant que la rentrée était passée. Elle n'était pas membre à cent pour cent du Magenmagot et heureusement. On faisait appel à elle à titre plus honorifique qu'autre chose. Elle était sollicitée pour des questions sur les droits des créatures magiques principalement. Après tout elle n'avait pas laissé tomber son association et se battait toujours pour les droits des elfes de maison.
Elle verrouilla sa boutique et se dirigea d'un pas lent vers le Ministère. Elle arriva dans le hall et marcha à contre courant de la foule qui quittait le travail. Elle enviait tout ces gens qui rentraient chez eux. Elle espérait fortement que la réunion ne durerait pas longtemps.
Elle prit l'ascenseur et pesta quand celui-ci s'arrêta à peine démarré. Elle appuya fortement sur le bouton du deuxième étage et l'ascenseur repartit comme si de rien n'était. Elle allait se diriger vers la salle de réunion habituelle quand elle croisa Perkins, le nouveau chef des Aurors.
- Ah Madame Weasley, vous êtes là, la réunion est dans la grande salle.
- Vraiment ? Vous venez également ?
Hermione était plutôt surprise. Elle ne voyait pas pourquoi le chef des aurors était convié.
- Oui réunion d'urgence.
Ils entrèrent ensemble dans la grande salle et Hermione put voir non seulement tout le magenmagot réunit mais aussi tous les chefs de département, le Ministre en personne et une bonne dizaine d'aurors dont Ron.
Le Ministre se leva et s'avança afin de faire face à tout le monde.
- Merci d'être venus si rapidement à cette réunion d'urgence. Vous êtes tous convoqués parce que vous êtes tous concernés. I peine deux heures, il y a eu une évasion à Azkaban. Bellatrix Lestrange s'est enfuie et est à ce jour introuvable, Kingsley avait été direct.
Il n'était pas dans ses habitudes de passer par quatre chemins.
Hermione hoqueta de surprise. Elle voyait le visage de Ron fermé, la mâchoire crispée, lui qui s'était donné comme but de capturer tous les mangemorts, il devait se sentir particulièrement concerné.
Les gens commencèrent à discuter, murmurer et certains ne se sentaient pas très bien. Hermione, elle, patienta calmement, attendant les détails du dispositif de sécurité qui allait être mettre mis en oeuvre.
- Calmez-vous s'il vous plait, prononça Kingsley d'une voix forte et ferme.
Une fois que tout le monde fut revenu au silence et ait reporté son attention sur le Ministre, ce dernier continua.
- Nous allons mettre plusieurs dispositifs en oeuvre. Les aurors vont dès à présent se lancer dans l'enquête et traquer Bellatrix. Ron Weasley, vous êtes nommé responsable de l'enquête, vous managerez une équipe de huit personnes. Je vous laisserai prendre vos ordres de Perkins.
Ron acquiesça silencieusement. S'il était surpris d'avoir cette responsabilité en charge, il n'en montra rien. La traque des mangemorts était sa raison de vivre. Il allait utiliser les aurors sous ses ordres comme des outils. En regardant l'équipe présente sur place, il commença dès à présent à leur attribuer des tâches mentalement et à échafauder un plan.
- Dans un second temps, j'aimerais que le magenmagot se penche sur un sujet : doit-on prévenir la communauté sorcière au risque de les paniquer ?
Les membres du magenmagot s'entre-regardèrent, chacun ayant déjà son idée sur la question. Hermione soupira, la discussion allait probablement se prolonger une bonne partie de la nuit.
- Concernant les autres chefs de département, j'aimerais que vous soyez prêt à répondre aux questions de vos employés mais aussi aux différentes conséquences que cette fugitive pourrait entraîner. Merci pour votre présence.
Les gens se levèrent, les chefs de département s'apprêtant à rentrer chez eux. Les aurors eux voulaient se réunir immédiatement mais Hermione arrêta Ron en le retenant par le bras.
- Ron !
- Hermione, j'ai beaucoup de travail là, je suis désolé.
- Il faut prévenir Rogue et Malfoy.
- J'y compte bien.
Ron se dégagea sèchement mais Hermione ne lui en tint pas rigueur. Elle savait que quand il se plongeait dans une enquête, plus rien ne l'en sortait et rien d'autre ne comptait et surtout pas elle.
Hermione se retourna vers ses collègues du magenmagot et s'apprêta à argumenter en faveur d'une communication maitrisée auprès de la population. De toute manière, ils finiraient bien par le savoir, alors autant leur faire croire que le ministère maitrisait le sujet.
####
Harry était attablé face à Draco, il n'était absolument pas à l'aise. Depuis quelques semaines, leur relation avait bien évoluée. Certes il n'était pas passé à l'acte comme se le répétait en pensée le brun mais ils avaient dépassé le stade des sages baisers et des câlins habillés. Il était plutôt à l'aise avec ça, après tout il ne faisait que ce qu'il avait envie de faire et Draco semblait le vouloir autant que lui. Il se demandait juste quand Draco voudrait aller plus loin, et si déjà il ne s'impatientait pas. Lui avait loupé une partie de sa vie, cette période charnière entre l'adolescence et l'âge adulte durant laquelle il aurait du expérimenter les choses sexuelles en ayant l'excuse d'être trop jeune et inexpérimenté si le résultat n'était pas concluant.
Aujourd'hui c'était différent et surtout il se sentait gauche face à Malfoy. Lui était si sûr de lui et avait bien plus d'expérience. Autant le dire, il n'avait pas confiance en lui.
Divaguer sur ce qu'il faisait ou ne faisait pas sexuellement n'allait pas l'aider à se sentir plus à l'aise à ce repas. Draco souhaitait officialiser leur relation. Il n'avait rien contre, au contraire. Ils avaient déjà dîner avec Ron et Hermione par exemple. Même Fred avait paru accepter leur relation et le plus étonnant, le petit Eliott semblait adorer Malfoy. Ce que le Serpentard trouvait parfaitement normal puisqu'il était, d'après lui, une personne exquise et raffinée qu'on ne pouvait qu'aimer.
Mais ce soir… Harry aurait préféré être en compagnie de Pansy, exubérante et bavarde, ou même de Théo qui oscillait entre regards noirs et blagues graveleuses à son encontre. Là l'ambiance était carrément mortelle. Il se concentrait sur son assiette pour ne pas regarder Severus Rogue à sa droite et son air désapprobateur. Draco ne disait pas un mot et semblait parfaitement décontracté. La petite Alhena boudait son assiette et jouait avec une poupée de chiffon.
Quelques semaines plus tôt, ils avaient tenté de brider sa magie. Ils avaient pu réduire sa puissance mais elle faisait toujours des cauchemars. A croire que Bellatrix était déjà entré dans son esprit et qu'il était impossible de l'en faire sortir. Il fallait la forcer à manger et elle ne souriait plus que rarement. Elle ne parlait plus du tout, même à Rogue ou à Tonks. Ils avaient essayé de nombreuses choses mais rien ne fonctionnait. Ils avaient fait les démarches pour rendre visite à Bellatrix à Azkaban. La procédure était en cours mais même avec l'appui de tous les héros du monde sorcier, la paperasse prenait toujours du temps.
Ils ne savaient pas vraiment ce qu'une telle discussion pourrait donner mais Severus était prêt à tout tenter.
Les couverts tintaient contre les assiettes de porcelaine, brisant le silence, quand on frappa à la porte. Les trois hommes relevèrent la tête avec un bel ensemble. Alhena continua de fixer sa poupée sans un mot.
Draco se leva en faisant attention de ne pas faire racler sa chaise sur le sol. Une éducation de sang pur restait dans vos gènes en toutes circonstances. Il ouvrit la porte et salua le nouveau venu en dissimulant sa surprise sous un masque froid.
Ron Weasley avait donné des ordres à tous les aurors qu'il avait en charge. Certains étaient partis à Azkaban pour interroger les gardiens et les autres prisonniers, d'autres avaient rejoint leurs contacts peu recommandables et les derniers bossaient sur la protection de toutes les cibles potentielles de Bellatrix.
Lui il avait voulu se charger personnellement de la fille de Rogue et Bellatrix, premièrement parce que presque personne n'était au courant de son existence, deuxièmement parce qu'Harry était impliqué. Il sortait avec le cousin de la fillette et le filleul du père. Draco Malfoy était beaucoup trop proche de l'enfant et il était également une cible de part son rôle actif dans la chute de Voldemort. Quant à Harry… Il était celui qui avait mis fin aux jours du Lord noir et donc Bellatrix voudrait sa mort, logiquement. A moins qu'elle ne soit sortit que pour sa fille. Dans tous les cas, tout le monde était en danger.
Il avait d'abord été chez Severus Rogue mais ce dernier n'était pas chez lui. Il avait alors rapidement transplané chez Malfoy. Après tout, Severus Rogue n'avait pour ainsi dire pas d'amis et il était fort probable de le trouver chez son filleul.
- Bonsoir Ron, que nous vaut ta…
Mais Draco ne termina pas sa phrase, Ron avait ce visage fermé et un peu inquiétant qu'il avait en mission. Il le savait parce qu'il l'avait croisé une fois, dans un bar malfamé. Il avait voulu le saluer mais le regard noir et perçant du roux l'en avait dissuadé. Il s'était alors assis dans le fond de l'établissement et avait observer l'auror dans son milieu. Il avait été impressionné par la force et l'assurance qu'il dégageait, mais bien sur, jamais il ne le dirait, même sous la torture.
Weasley l'avait carrément ignoré et avait à peine jeté un oeil à Potter. Il s'était dirigé vers Rogue et lui avait dit qu'il devait lui parler.
Severus s'était levé et avait suivi Ron près de la baie vitrée qui donnait sur la terrasse. Ils restaient dans la même pièce mais étaient assez loin et parlaient assez bas pour que les trois autres ne les entendent pas.
Harry haussa les sourcils d'un air interrogateur vers Draco mais ce dernier ne put que faire un léger signe de tête négatif. Il ne savait pas de quoi il en retournait.
De loin, il voyait le visage de Rogue perdre le peu de couleur qu'il avait et son regard se durcir. Génial pensa Harry, il allait être encore plus morose et pénible.
Rogue lui, encaissait la nouvelle. Son ancien élève, l'un des pires, il devait le dire, venait de lui annoncer que Bellatrix s'était échappée. Il était désormais en train de lui énoncer les différentes mesures de sécurité qui allaient être prises pour Alhena. Severus Rogue n'en écoutait pas un mot, il fixait sa petite fille, la si douce enfant qui était sous le joug cruel de cette femme qu'il exécrait. Cette femme l'avait fait souffrir plus que n'importe qui, ce qui n'était pas peu dire. Il était hors de question qu'il se laisse faire, il se battrait et cette fois il était prêt. Elle ne le prendrait plus jamais par surprise.
En revanche, il devait confier Alhena à quelqu'un de confiance.
Il reposa son regard sur le roux aux yeux bleus si sur de lui dans lequel il ne reconnaissait plus le Gryffondor stupide et immature. Il était en train de lui dire qu'on allait l'emmener avec sa fille pour le mettre en sécurité.
- Hors de question Weasley, le coupa-t-il.
- Ce n'est pas une option. Le ton était ferme et sans appel, la voix d'un homme qui a l'habitude qu'on lui obéisse ou tout du moins qui s'y attend.
- C'est hors de question, il détacha chaque mot avec soin comme s'il parlait à quelqu'un de mentalement attardé. Ce qui pour lui n'était pas loin d'être le cas.
- Je ne me cacherais pas, reprit-il. Il faut que vous mettiez Alhena en sécurité mais moi j'ai une vengeance à assurer.
- Ce n'est pas une question de vengeance. Elle est dangereuse et…
- Et je suis le mieux placé pour le savoir. Connais-tu une seule personne qui en sait plus que moi sur la magie noir ? Sur les mangemorts ? Sur les atrocités dont Bellatrix est capable ? Personne n'est mieux préparé que moi pour se charger de ce genre de chasse.
Ron prit le temps de regarder son ancien professeur. Il vit une lueur qu'il connaissait trop bien dans son regard et il savait que si un homme pouvait se défendre c'était bien lui.
Il capitula, il n'avait pas le temps de toute façon de batailler avec un homme qui avait pris sa décision.
- Très bien, je vais mettre deux aurors sur la protection d'Alhena.
- Non, Draco et Potter s'en sortiront parfaitement.
- Ils ne sont pas entrainés pour cela.
- Vraiment ? Vous pensez que Potter, l'homme qui ne peut mourir et Draco Malfoy, qui a frôlé la mort et participé activement à la chute de Voldemort, ne peuvent pas se charger d'une fillette? De plus, Draco protégera son esprit. Et je ne fais pas confiance à vos aurors, ajouta-t-il avec mépris.
Ron haussa les sourcils, il ne dit rien mais si Rogue faisait confiance à Harry alors il pouvait dire qu'il avait tout vu.
Le roux se retourna vers les deux autres hommes de la pièce. Ils les regardaient avec le même air frappant.
L'un blond aux yeux gris et l'autre brun aux yeux vert, mais le même regard curieux et légèrement inquiet.
- Draco, Harry, les salua-t-il finalement d'un signe de tête. Il préférait garder ses distances.
- Qu'est-ce qu'il se passe, osa demander Harry.
- Bellatrix s'est évadée.
Ron préféra ne pas y aller par quatre chemins. Harry écarquilla les yeux de surprise et d'horreur mais Draco ne broncha pas. Foutu Malfoy et son masque impassible. Il porta juste son regard sur Severus.
L'homme les avait rejoint près de la table. Il expliqua qu'il voulait prendre part à l'enquête et qu'ils devaient mettre Alhena en sûreté.
Harry fut surpris d'être inclus dans ce "ils" mais Severus lui répondit brusquement que s'il existait bien une personne au monde capable de survivre à Bellatrix c'était bien lui. Le brun se contenta de hocher la tête.
Ron leur expliqua la procédure à suivre et les deux hommes prirent la cheminette pour se rendre dans une maison isolée au fin fond de la campagne. Draco avait eu le temps de faire ses valises mais Harry n'avait pas pu repasser chez lui. Ron avait transplané avec Rogue au 12 Square Grimaud pour prendre des affaires pour Alhena pendant que Draco préparait ses affaires et que Harry tournait en rond.
Arrivés sur place, Draco pesta parce que la maison était bien trop petite. Il n'y avait que deux chambres à l'étage et une salle de bain, au rez-de-chaussée un salon et une cuisine ouverte. Harry lui commença à paniquer parce qu'ils ne savaient absolument pas où ils étaient et cela lui rappelait désagréablement son réveil dans la maison avec Dumbledore. Ils n'étaient peut-être même plus en Angleterre.
Alhena n'avait toujours pas bronché et suivait docilement les deux adultes. Elle avait appris à faire confiance à Draco et connaissait Harry. Elle était toujours perdue dans son monde et les deux hommes se dirent qu'ils pourraient en profiter pour la sortir de son mutisme.
La petite fille alla s'asseoir dans un fauteuil et entreprit de coiffer sa poupée, toujours en silence.
Draco monta les affaires dans les différentes chambres et grimaça devant l'ameublement. Non seulement tout était de très mauvais goût, limite d'un autre temps mais en plus c'était minuscule. La première chambre dans laquelle il avait déposé les affaires d'Alhena était clairement une chambre d'enfant. Un petit lit en bois clair avec une commode assortie, un affreux tapis bleu et jaune sur le sol et des peintures représentant des bateaux et la mer peintes de toute évidence par quelqu'un qui n'avait aucun talent. Les draps roses bonbons juraient avec le tapis et les murs orange pâle.
Toutes ces couleurs lui donnaient envie de vomir. Discrètement, il sortit sa baguette et changea la couleur des murs pour un beige clair et la couleur du tapis pour qu'il soit uniquement bleu. Les meubles étaient toujours moches mais au moins cela ne lui piquait plus les yeux.
La deuxième chambre ne comportait qu'un lit double, évidemment, à la base c'était juste pour Severus. Ici pas de couleurs qui juraient mais tout était d'une tristesse. Le lit et l'armoire de bois foncé, de la moquette verte foncée au sol et même du lambris au plafond. Il soupira mais ne dit rien. Ses capacités en sort de décoration avaient des limites.
Il redescendit pour trouver Harry le nez dans le frigo de la cuisine. Les aurors avaient apparemment fait des courses et le brun comptait préparer à manger.
- Alors ces chambres ?
- C'est l'endroit le plus affreux qu'il m'ai jamais été donné de voir, soupira le blond.
Harry se mit à rire, faisant sursauter Alhena dans son fauteuil. Elle le regarda avec les yeux grands ouverts. Le rire du Gryffondor mourut dans sa gorge. Elle avait le même regard que Sirius, ou que Draco en fait, purement Black. Le genre de regard qui vous clouait au sol, qui vous transperçait et semblait lire en vous. La petite avait surtout l'air surpris, elle finit par faire un mince sourire auquel Harry ne put que répondre. C'était la première fois qu'elle lui souriait, à lui.
Draco avait suivi l'échange entre l'enfant et Harry. Il ne dit rien et jeta lui aussi un regard dans le frigo. Au moins la nourriture paraissait appétissante.
Harry proposa de faire la cuisine pendant que Draco faisait sa traditionnelle séance avec Alhena.
En effet depuis que Severus avait débarqué à Ste Mangouste, Draco avait pris en charge la santé de la petite fille. Il n'était pas psychomage mais les causes du mutisme de la fillette n'étaient pas psychologiques. Tout était du à un sortilège ou un quelconque pouvoir lié au sang entre Bellatrix et elle. Malheureusement, ils n'avaient pas pu interroger la mangemort avant son évasion, faute de preuve du lien, et maintenant c'était trop tard.
Draco avait tenté de rentrer dans son esprit mais c'était impossible, il était bloqué. Il avait essayé de nombreuses méthodes magiques plus ou moins légales et déontologiques. Il avait même tenté de pénétrer ses rêves mais tout ce qu'il avait gagné c'était une migraine atroce.
A croire que Bellatrix avait érigé des barrières infranchissables autour de l'esprit de sa fille. La seule question c'était de savoir si c'était pour la protéger ou pour la pervertir à ses idées.
Il s'assit donc dans un fauteuil à côté d'Alhena pendant que Harry coupait des carottes, à la moldue bien sûr. Il se demandait quel était le problème avec cet homme.
- Alhena, tu peux me laisser accéder à ton esprit ?
Il posait toujours la même question et la fillette hochait toujours la tête, les yeux brillants d'appréhension et d'espoir à la fois.
Il lança son sort sans vraiment y croire. Une nouvelle fois il se heurta à un mur brumeux, noir, pas un mur solide sur lequel il pouvait poser la main mais plutôt un brouillard qui le repoussait gentiment s'il s'approchait et carrément violemment s'il voulait entrer en force. Il ne tentait donc plus cette dernière technique.
Il tourna autour, ne comprenant pas ce phénomène. Il ne le comprenait d'autant moins que cela ressemblait terriblement aux brumes dans lesquelles étaient piégés les souvenirs d'Harry. Sauf que là il n'avait accès à strictement rien. Tout l'esprit de la petite fille était entourée de brumes noires, elle était comme piégée à l'intérieur.
Le pire de tout était qu'il savait que cette vision était exactement ce que le rêve d'Harry représentait. Et que selon toute vraisemblance c'était à lui de sauver Alhena. Il n'y arrivait pas et cela le remettait sérieusement en question.
Dans un premier temps il avait trouvé cette idée stupide, il n'était pas un héros, même si la Gazette pouvait dire le contraire. Il n'était pas noble, enfin de naissance si mais pas de coeur, il ne méritait sûrement pas cette baguette. Il était incapable de sauver Alhena et son égo en prenait un sacré coup. Il se sentait faible, impuissant et avait l'impression d'être de nouveau ce Serpentard lâche cherchant à se mettre sous la protection des plus grands. Il prenait sur lui pour ne pas demander de l'aide à Harry Potter ou même à Hermione Granger. C'est dire s'il se sentait désespéré.
Pourtant il avait vaincu sa lâcheté, il avait combattu contre Voldemort, certes pas de face à face et le Lord n'en savait strictement rien mais il avait pris des risques. Il avait redoré le nom des Malfoy, il était devenu un guérisseur renommé et il n'arrivait pas à percer cette foutue brume.
- Tu sais. Bellatrix est probablement à ce jour la sorcière la plus maléfique et la plus puissante en magie noire.
L'intervention d'Harry ne le fit pas sursauter, un Malfoy ne sursautait pas, néanmoins elle perturba ses pensées. A croire que le brun lisait en lui et il n'aimait pas cette sensation.
- La magie noire… souffla Draco.
Cela avait fait écho au fond de lui, il ne savait pas pourquoi. Après tout, il avait l'habitude d'entendre ces mots, et ce depuis sa plus tendre enfance. Bellatrix était effectivement la pire, non pas qu'elle soit la plus intelligente mais elle était la plus folle. Elle n'avait aucune limite.
Draco fronça les sourcils, il avait tenté de bannir tous les souvenirs en lien avec son ancienne vie et sa tante cinglée. Pourtant c'était peut-être le moment de se les remémorer. Il soupira et fit signe à Alhena que c'était terminé.
Elle hocha la tête, l'air un peu déçu mais résigné.
Harry était en train de mettre au four une tourte et commençait à préparer un dessert. Draco le rejoint et s'appuya sur le rebord de la table à manger. Ils étaient ensemble de manière plus ou moins officielle depuis presque un mois. Il avait pris l'habitude de le regarder cuisiner. Il ne voyait pas l'intérêt de faire tout ça de manière moldue mais cela avait l'air d'apaiser le brun. Lui, il aimait voir ses mains s'activer, découper, peser, ouvrir les portes de placards ou touiller dans les casseroles. Il trouvait les mains de Potter fascinantes, ni trop grandes, ni trop petites, les doigts agiles et cette jolie couleur caramel clair. Ses mains à lui étaient longues, fines et blanches bien sûr. Il pensait qu'elles manquaient de vie contrairement à celles de Potter. Les siennes étaient régulièrement parées de griffures ou d'égratignures, il avait une cicatrice qui courait entre le pouce et l'index de sa main droite. Des mains d'une personne qui s'en servait, vivait avec et n'avait pas peur.
Il n'avait pas vu mais Alhena les avait rejoint dans la cuisine et s'était assise sur une chaise. Elle dessinait sur une feuille. Elle était cantonnée aux jeux non magiques. Ils pensaient tous qu'il était trop risqué de la laisser faire de la magie ou d'être en contact directement avec des objets magiques.
Harry sourit, il sentait la présence de Draco et d'Alhena derrière lui, même si les deux étaient parfaitement silencieux. Il avait un peu l'impression d'avoir une famille. Cette impression lui passa rapidement. Effectivement, ils étaient tout de même enfermés dans une maison jusqu'à Merlin sait quand parce qu'une cinglée voulait récupérer sa fille. Enfin c'est ce que les aurors croyaient.
###
Ron avait déposé Rogue au Ministère avec un sourire sadique. Il savait qu'en l'emmenant là-bas, son chef allait obliger Rogue à rester sur place pour donner toutes les informations qu'il pouvait avoir sur Bellatrix. Le seul moyen pour lui de participer à l'enquête, enfin à la chasse, était d'être considéré comme consultant expert pour le bureau des aurors. Ce qui incluait de ne pas être sur le terrain.
Ron lui voulait en savoir plus, et pour cela, il savait qu'il devait interroger de nombreuses personnes. Il avait certes dédié des aurors à ce travail mais il avait ses propres indics. De plus, il avait besoin d'être sur le terrain, il était plus facile pour lui de trouver des pistes. Il avait fait plusieurs lieux magiques, cela lui avait pris une bonne partie de la soirée. Il remontait le Chemin de Traverse quand il vit des gens sortir du Ministère au loin. Probablement les membres du Magenmagot qui s'étaient enfin décidé sur la marche à suivre. Il était pas loin de minuit. Il voyait la chevelure broussailleuse de sa meilleure amie à quelques mètres devant lui. Il ne la héla pas, parce qu'il voyait son frère sortir de sa boutique pour aller l'accueillir. Il avait du repasser en urgences et en profiter pour raccompagner sa femme. Ce mot arrachait toujours une grimace à Ron.
####
Hermione était assise dans la grande salle de réunion, elle soupirait de soulagement parce que la réunion était enfin terminée. Les sorciers seraient prévenus de l'évasion de Bellatrix dès le lendemain. L'information serait dans la Gazette et en parallèle, un dépliant serait envoyé à toutes les familles avec la liste des mesures de précaution à prendre.
Il était bien minuit et elle sortait, épuisée, les cheveux en bataille et de l'encre partout sur les mains. Elle voulait juste dormir. Elle voyait probablement double d'ailleurs parce qu'elle voyait deux têtes rousses sur le Chemin de Traverse. Elle fronça les sourcils et se frotta les yeux.
Fred était venu la chercher, elle se demandait s'il avait Eliott avec lui. L'autre roux était Ron qui devait rentrer pour faire le bilan sur l'enquête en cours. Ron était beaucoup plus loin et il paraissait concentré. Il ne la regardait pas, il ne l'avait sûrement pas vu. Fred, en revanche, affichait un large sourire, malgré des légères cernes sous ses yeux, il avait l'air d'être l'homme le plus heureux du monde et pressait le pas.
####
Quand Hermione lui avait envoyé un hibou pour lui dire qu'il y avait une réunion urgente du Magenmagot, Fred avait soupiré. Il fallait vraiment que sa femme lève le pied, elle était épuisée. Il faisait le maximum pour la décharger des tâches domestiques, en fait, il prenait en charge toutes les tâches domestiques. Heureusement qu'il était un inventeur ingénieux et que la plupart des choses lui prenait très peu de temps. Entre sa boutique et son fils, il n'avait plus beaucoup de temps non plus. Il passa la soirée à jouer avec Eliott, le nourrir et le baigner. Il le mit au lit puis alla s'asseoir dans le salon pour attendre sa femme. Comme à chaque fois qu'il avait un peu de temps, son cerveau se mit à cogiter tout seul et il assembla plusieurs éléments. Il avait une idée mais il fallait du temps pour la mettre en place. Avec Georges, ils avaient abandonné l'idée des semelles massantes, il était impossible de les régler correctement. Avec tous leurs essais, ils avaient néanmoins un nouveau projet. Un nouveau moyen de transport, enfin plutôt de déplacement. Ils avaient eu l'idée en faisant un tour dans le Londres moldu. Ces moldus étaient ingénieux mais eux ils pouvaient améliorer leurs inventions avec la magie.
Leurs semelles s'étaient transformées en chaussures flottant à quelques centimètres du sol et capable d'avancer. Une sorte de mélange entre les balais et des chaussures. Il fallait juste qu'ils brident la hauteur et la vitesse pour éviter les accidents et là ils pêchaient un peu.
Il piqua du nez et finit par se réveiller en sursaut en entendant les pleurs de son fils. Il était pas loin de minuit. Il monta dans sa chambre et prit Eliott pour le bercer. Il se rendit compte qu'Hermione n'était pas rentrer et décida d'aller voir au Ministère ce qu'il en retournait. En plus, il pourrait en profiter pour passer à la boutique modifier un schéma.
###
Ron avançait calmement, faisant comme s'il ne voyait pas son frère et sa belle-soeur.
Hermione souriait à son mari en luttant pour ne pas fermer les yeux et s'endormir sur le sol.
Fred trépignait et marchait plus vite que d'habitude, ayant hâte de serrer sa chère épouse dans ses bras.
Severus sortait tout juste du Ministère, cet abruti de Perkins l'avait gardé longtemps, avait refusé de lui dire où était sa fille et lui avait ordonné, ORDONNÉ, de venir le lendemain dès huit heures. Il fulminait et trouvait qu'il y avait beaucoup de monde dans la rue à une heure pareille.
Des membres du magenmagot, des roux, une femme brune, des aurors… Rogue stoppa son pas brutalement. Une femme brune.
Il allait crier quand il fut soufflé et projeté en arrière, il s'écroula contre la porte du Ministère, et sentit son bras craquer.
Fred courait presque maintenant et fut fauché sur le chemin, il faisait très très chaud d'un coup et il s'écroula en ayant comme dernière vue sa femme, au sol, les yeux agrandis de peur.
Hermione, qui regardait Fred avancer de plus en plus vite, avait vu cette femme que tout le monde cherchait et avait instinctivement plongé sur le sol. Bien lui en pris, elle sentit une vague de chaleur passer au-dessus d'elle et un bruit d'écroulement, ainsi qu'un poids sur ses jambes.
Ron était plus loin, il avait tout vu, Bellatrix, l'explosion, son frère à terre et en sang, Hermione qui plongeait, les membres du Magenmagot éparpillés comme des quilles, les aurors blessés mais baguette sortie.
Il avait fermé les yeux brièvement pour ne pas être ébloui par l'explosion et sortit sa baguette tout en courant vers le lieu d'action.
Il n'y arriva jamais, perdant connaissance après trois pas, un grand BANG et le trou noir. |