Johannes regardait toujours son petit frère sangloter. Il ne résista pas et s'assit à ses côtés, entourant ses épaules de son bras droit.
Fabian releva la tête et le regarda avec étonnement, comme si celui-ci n'avait pas pris son petit frère dans ses bras, mais un dangereux psychopathe.
L'aîné l'attira contre lui, serrant dans ses bras le jeune batteur en larmes.
Fabi murmura alors à l'attention de son frère :
" Je suis un monstre, pardon. Je...je n'aurais jamais du...je suis horrible... "
Johannes ne le laissa pas finir sa phrase et étouffa ses paroles dans un chaste baiser qui en disait long.
Les frères Halbig restèrent silencieux, le seul bruit que l'on pouvait entendre étant celui de leurs respirations et le bruit que faisait Paulichen en se faisant les griffes sur le cadre de la porte.
Johannes regardait le chat comme s'il le voyait pour la première fois.
Lorsque le félin jugea que ses griffes étaient assez aiguisées et qu'il descendit les escaliers à pas de velours, Johannes tourna la tête vers son cadet blotti contre lui. Il constata alors que celui-ci dormait.
Johannes le souleva, l'emmena dans sa chambre et le posa délicatement sur son lit.
Il remarqua à nouveau le tiroir ouvert, le petit carnet à couverture orange était à l'intérieur, ses pages attiraient Johannes inexorablement.
Il se mordit les lèvres et se promit de ne lire que quelques lignes, après tout, ça ne tuera pas Fabi nan ?
Johannes ne réfléchit pas plus et s'empara du carnet et l'ouvrit sur une page au hasard.
" Lundi 29 décembre 2005.
Ça fait plus de troismois que je suis en 7e (1), pour moi tout ce passe merveilleusement bien. Je ne peux pas en dire autant de Jo...
Il revient à la maison tout triste, je crois qu'il a des problèmes, c'est même une certitude. Il a des bleus, pas au visage, mais ailleurs, je l'ai vu lorsque que je suis rentré par mégarde dans la salle de bains alors qu'il se changeait.
Il m'a dit qu'il s'était simplement "fait bisuté", mais je sais que c'est plus grave que ce qu'il peut bien prétendre. Il refuse de m'en parler, j'ai l'impression qu'il s'éloigne de moi.
Depuis ce qu'il s'est passé en novembre, l'an dernier, j'ai bien réfléchi. Je crois que je le considère comme plus qu'un frère. Je devrais peut-être lui en parler ? Oui, sûrement.
Demain. C'est décidé, demain je lui en parlerai. "
Johannes, tenant la promesse qu'il s'était faite à lui-même, bravant la curiosité grandissante qui le submergeait, referma le journal de son frère.
Il était tombé sur la veille de l'élément déclencheur, de ce mardi où tout s'était passé si vite, où leurs vies on basculé à cause d'eux. Et à cause de Johannes.
Celui-ci vit alors son esprit ravagé de mauvais souvenirs. Il ne les repoussa pas, contrairement à son habitude. L'aîné des frères Halbig se plongea dans ses souvenirs, tentant, non sans difficultés, de se rappeler, de trouver un argument qui pourrait le disculper. Il n'y croyait pas trop, mais il essayait, profitant du sommeil de son frère pour réfléchir à ses côtés.
Analepse...Johannes avait alors 15 ans et Fabi 12.
Johannes stressait un peu, depuis qu'il était rentré au lycée le mois précédent, tout allait de travers, il n'était pas accepté par les autres élèves, notamment les plus vieux qui lui faisaient comprendre leur aversion envers lui en le violentant. Les parents Halbig n'étaient bien sûr pas mis au courant de ses "bisutages" comme Jo les appelait en présence de son frère. Un seul élève semblait apprécier Jo.
Mäximillian qu'il s'appelait, il lui avait, à nombreuses reprises, prêté main forte lors de ces altercations violentes.
Fabian pensait, quand à lui, qu'il ne s'agissait que de petites tapes sans gravité, et se faisait pas plus de soucis que cela pour son aîné, d'après ses dires.
Les deux frères n'avaient pas mentionné l'épisode du baiser depuis le mois de décembre, Jo préférant laisser Fabi prendre lui-même la décision de le suivre ou de changer de chemin.
Un jour, le jeune Fabi, sûr de lui, avait été chercher son grand frère le midi, ravit d'avoir une raison d'échapper aux "grands" de Terminale, Johannes avait accouru vers son petit frère, lui attrapant la main et guidant son cadet sous les regards vicieux de ses tortionnaires.
Il n'avait pas vu les sourires et les regards pervers qu'ils affichaient lorsqu'ils virent le jeune Fabian.
Nan, il ne se doutait pas de ce qu'il arriverait par la suite. |
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