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au 31 Mai 21 :
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A Coeurs Perdus : 2e Génération
Par Natalea
Harry Potter  -  Romance/Amitié  -  fr
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    Chapitre 26     Les chapitres     48 Reviews    
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Décision

Rose avait commencé par réserver un hôtel dans un quartier Moldu de Londres, histoire de ne pas tomber par hasard sur une ancienne connaissance. Ensuite, elle avait passé une journée entière à flâner dans les rues de la capitale, redécouvrant l’ambiance de la ville et de ses habitants, ravivant le souvenir de ces quelques semaines heureuses qu’elle y avait passées en tant qu’étudiante, plus de six ans plus tôt.

Elle réalisait avec surprise qu’elle pouvait désormais penser à cette période avec une douleur chaleureuse au fond du cœur. Plus le genre de déchirement mêlé de regrets d’autrefois, mais simplement… le sentiment d’avoir grandi. Le sentiment d’avoir été heureuse, puis malheureuse, et d’avoir dépassé ce qu’elle était alors, pour devenir autre chose.

Bien sûr, cela l’avait endurcie. Changée. Rose avait l’impression d’être paradoxalement devenue moins riche qu’elle ne l’était alors. Adolescente, elle était une jeune fille pleine d’idéaux qui croyait en l’avenir, qui aurait été prête à se jeter à l’assaut de ses passions pour les vivre, plus profondément que tout. A présent, elle était plus mesurée. Elle ne se laissait plus emportée par ses émotions comme elle pouvait le faire autrefois. Elle modérait ses ambitions, son enthousiasme, ses espoirs, elle ne témoignait plus la même curiosité à l’égard du monde, et elle avait conscience que sur ce point, ses épreuves l’avaient amputée de quelque chose. Ce quelque chose que Scorpius avait aimé chez elle, peut-être…

Scorpius. Rose avait mis à profit sa journée de réflexion pour faire le point sur sa vie, sur sa famille, ses amis, sur toutes ces personnes qu’elle avait quittées si brusquement des années plus tôt, sans un regard en arrière, et qu’elle était venue retrouver aujourd’hui…

Elle avait conscience de la brutalité qu’auraient ces retrouvailles. Et c’était bien cela qui lui faisait peur. Pendant six ans, Rose avait vécu seule aux quatre coins du monde, s’imposant une vie de bohème certes, mais plus ou moins tranquille sur le plan émotionnel. Elle avait rencontré des gens fascinants, mais ne s’était jamais attardée longtemps au même endroit, et ne s’était pas fait d’amis à long terme. Elle avait fait cela par choix. A l’époque, son cœur saignait tellement de ses derniers rapports sociaux qu’elle ressentait le besoin de rester seule. De s’en sortir seule. Comme si elle voulait non seulement éviter de souffrir, mais aussi se prouver à elle-même qu’elle pouvait se reconstruire…

Le résultat avait fait d’elle une jeune femme plus renfermée encore qu’elle ne l’était auparavant. Elle se savait froide à l’égard de ses semblables, étrangers comme connaissances, et elle avait parfois l’impression d’avoir bâti autour d’elle une forteresse qu’elle n’était plus capable de franchir. Même si elle l’avait voulu, elle ne parvenait plus à quitter ses murs. Elle ne savait plus comment communiquer, échanger, s’attacher à quelqu’un et prendre le risque de lui donner ce pouvoir sur elle-même en retour…

Alors, à l’idée de retrouver sa famille…

Rose tenait toujours énormément à eux, bien sûr, en profondeur. Dans ce qui formait son identité propre. Mais elle avait étouffé leur souvenir pendant si longtemps qu’il lui était à présent difficile de réaliser qu’elle était sur le point de les revoir. Qu’il lui suffirait de transplaner, en fait, pour les retrouver.

Et puis surtout, Rose imaginait sans peine le raz-de-marée émotionnel que provoquerait son retour chez elle, et elle avait besoin de rassembler tout son courage pour pouvoir l’affronter.

Elle ne voulait causer de peine à personne. Elle ne voulait pas bouleverser la vie de ses proches comme elle l’avait fait en les abandonnant. Elle ne voulait pas être responsable d’une crise familiale de plus.

C’est pourquoi, pour s’habituer à leur proximité, Rose avait entrepris dans les jours qui avaient suivi d’observer les membres de sa famille, de loin. C’était un moyen pour elle de se préparer à leurs retrouvailles, de se montrer forte, d’être prête, lorsque le moment serait venu… Intérieurement, elle tentait également d’imaginer un moyen plus doux de reprendre contact, mais elle n’en trouvait aucun. On ne revenait pas soudainement du néant sans faire de vagues.

Au fil des jours, Rose avait ainsi découvert que son frère faisait de brillantes études à Oxford, et qu’il était tombé très amoureux d’un Moldu dont elle ignorait le nom. Elle avait vu le visage d’Albus Potter étalé sur plusieurs affiches de théâtre à Londres. Elle était même passée voir son spectacle, en se dissimulant au fond de la salle. Les vers de Roméo et Juliette avaient réveillé en elle les mêmes souvenirs doux-amers.

Elle avait vu avec une émotion sincère son cousin se promener main dans la main avec Emily après la représentation, regagnant le même appartement que celui qu’ils habitaient six ans plus tôt.

Elle avait vu sa mère se rendre à son travail au Ministère, et Drago Malefoy donner une conférence sur les potions avancées au Wizard University College…

Mais le plus dur avait sans aucun doute été Scorpius. Dès son retour à Londres, Rose avait brûlé de le revoir. Et pourtant, elle avait attendu le dernier moment pour oser. Lorsqu’elle l’avait trouvé néanmoins, elle n’avait pu s’empêcher de le suivre tous les jours, jour après jour, questionnant ses émotions contradictoires en elle, et tous les souvenirs qu’elles ranimaient.

Scorpius avait changé depuis ce jour terrible où ils s’étaient séparés. Evidemment. Elle aussi devait avoir changé.

Ses cheveux étaient plus courts, obéissant à une discipline qui lui donnait l’air sévère et intelligent. Il ne devait plus avoir besoin qu’on les dégage de son col, à présent… Il avait grandi et maigri, étirant sa silhouette d’une manière un peu trop longiligne. Il fumait toujours, voire même plus qu’avant – une habitude qui ne lui était jamais passée, même lorsqu’ils sortaient ensemble. Il portait des tenues sobres adaptées à son poste d’enseignant… D’un point de vue général, il avait l’air d’un jeune homme trop austère pour son âge, concentré sur une tâche inaccessible au commun des hommes, fasciné par des visions qui n’effleureraient jamais l’esprit de ses semblables… Il était beau, intriguant, délicieusement inaccessible. Lorsqu’elle l’avait vu, Rose n’avait pu retenir les battements lents et douloureux de son cœur, qui avait palpité en elle plus profondément qu’il ne l’avait fait ces six dernières années. Cette fois, elle avait eu mal, et elle s’était sentie aussi perdue qu’au jour de son départ.

Que ressentait-elle pour Scorpius à présent ?

Tandis qu’elle le pistait dans les rues de Londres, entre son université, son appartement, et les différentes bibliothèques et musées dans lesquels il se rendait, Rose ne se lassait pas de sa démarche discrète et assurée, du sérieux qu’il manifestait en toute chose, de la fougue passionnée qui l’animait lorsqu’il donnait des visites groupées à des enfants à la Cité des Sciences.

Scorpius n’avait pas tant changé que cela, finalement… Il restait ce jeune homme incroyable et passionné qui l’avait subjuguée en une seule conversation. Il restait cet esprit débordant qui voulait comprendre le monde, en examiner les moindres facettes, et en inventer de nouvelles… Il restait ce garçon capable de la faire tomber amoureuse par sa seule façon d’être, sans même lui avoir parlé.

Rapidement, Rose avait pu constater par elle-même les menaces qu’avait sous-entendues Lily. Elle avait tout de suite vu que Scorpius passait beaucoup de temps avec une jeune femme qui devait suivre le même cursus que lui. Ils mangeaient souvent ensemble, et le reste de la semaine, leurs emplois du temps étaient plus ou moins les mêmes.

Rose avait tenté de prendre du recul par rapport à cette situation. La jeune femme était belle et délicate. Elle portait elle aussi son intelligence sur son visage, et de toute façon, il était évident qu’elle devait l’être pour susciter ainsi l’intérêt de Scorpius. Rose s’était aussi tout de suite rendue compte qu’elle ne cachait pas son admiration. La jeune femme était amoureuse de Scorpius, c’était évident, avec la même force que Rose lors de leurs conversations nocturnes en haut de la tour d’Astronomie, et Rose ne pouvait pas vraiment l’en blâmer. Qui ne succomberait pas à une telle lueur, si elle croisait son chemin ? Qui ne se laisserait pas atteindre par l’extrême subtilité présente dans chaque geste, chaque parole de Scorpius, par la poésie même qui régissait son esprit et son âme ?

Rose reprenait conscience de ses émotions longtemps endormies à mesure qu’elle contemplait cette fille dévorer Scorpius du regard. Elle avait l’impression de la comprendre, de se retrouver en elle, et c’était une sensation étrange que de revivre leur histoire d’amour en direct, juste sous ses yeux.

Qu’en était-il de Scorpius ?

Il se montrait distant, comme il l’avait été avec Lily. Pourtant, c’était parfois lui qui prenait les devants auprès de la jeune femme. Il était passé plusieurs fois la prendre chez elle, et il arrivait qu’il l’attende à la sortie de ses cours. Il lui gardait un siège lors de certaines conférences…

Assurément, Rose le sentait hésiter entre des signaux et des émotions contradictoires, et elle imaginait sans peine ce qu’il ressentait. C’était elle qui était responsable de tout cela. C’était elle l’origine de la retenue de Scorpius, désormais.

Aussi, c’était avec un doute terrible au creux du cœur que Rose était venue assister de loin au mariage d’Albus et Emily. Elle avait volontairement choisi de ne pas se montrer, pour ne pas voler la vedette à ses deux meilleurs amis. Réapparaître de nulle part le jour de leur mariage aurait tout simplement été incorrect. Elle s’était contenté de sourire en les voyant danser sous le chapiteau au Terrier, et elle avait gardé un œil sur Scorpius, jusqu’à ce qu’il décide de transplaner pour rentrer chez lui.  

Rose avait aussitôt transplané dans sa rue pour le suivre, et c’était alors qu’elle l’avait vu ressortir pour une balade nocturne dans les rues de Londres.

A présent, Rose était toujours sur ses pas, vaguement inquiète. Elle voyait bien qu’il avait un peu bu, et sa mélancolie prenait forme autour de lui comme une aura palpable. Rose comprit avant lui qu’il se rendait jusque devant l’immeuble de sa collègue, et alors, l’urgence saisit toutes les fibres de son être.

Rose vit Scorpius hésiter, s’arrêter, réaliser où il était. Elle le vit démêler ses émotions avec une intensité qui lui fit mal. Il luttait contre lui-même, toujours à cause d’elle, à cause d’un fantôme qui avait déserté sa vie plus de six ans plus tôt.

Le cœur battant, Rose resta dans l’ombre, là où elle ne saurait être vue. Que devait-elle faire ? Tout dans son esprit lui criait : « C’est maintenant ou jamais ! ». S’il frappait à cette porte, s’il parlait à cette fille… Une nouvelle histoire commencerait pour lui, et il serait trop tard. Cette perspective seule broyait le cœur de Rose en deux. Et pourtant, elle hésitait.

Que pouvait-elle faire ? Marcher dans la rue, l’appeler, se révéler ? Revenir ainsi, au beau milieu de la nuit, et débarquer dans sa vie comme une fleur ? Quelles conséquences cela aurait-il sur l’esprit de Scorpius ? Que pourrait-elle bien lui dire ? Comment pourrait-elle lui justifier, s’excuser de son départ, de ces six années d’absence et de souffrance, en se manifestant simplement ainsi la bouche en cœur, pour l’empêcher de rejoindre celle qu’il aimait ?

Tapie dans l’ombre, au beau milieu de la capitale, Rose enfouit son visage entre ses mains. Plus qu’au sommet de l’Himalaya, elle se sentait seule au monde. Au bord d’un précipice qu’elle n’aurait d’autre choix que de dévaler, sans savoir encore de quel côté elle pencherait.

Elle se dit qu’elle n’aurait pu choisir pire instant pour revenir. Cela aurait pu sembler parfait pour un scénario de film à l’eau de rose, ou de roman de gare, mais… Ils n’étaient pas dans une fiction. Dans la vraie vie, l’héroïne ne revenait pas juste à temps pour empêcher son amant de tomber dans les bras d’une autre. Dans la vraie vie, les gens changeaient, apprenaient, évoluaient. Ils allaient de l’avant.

Rose réalisa tout à coup qu’elle avait peur que Scorpius la rejette. Les multiples excuses qui se formaient dans son esprit pour ne pas l’aborder renvoyaient à cette seule terreur : que pourrait-il lui dire après toutes ces années ? Serait-il en colère contre elle ? Souffrirait-il de la revoir ? Rose ne voulait pas le faire souffrir. Pas encore une fois. Mais elle ne pouvait tout simplement pas disparaître sans plus jamais le revoir…

Inspirant à fond, Rose s’exhorta au calme. Elle s’efforça de prendre de la distance face à la situation et envisagea toutes les issues possibles, pesant les pour et les contre. Elle aimait Scorpius. Elle n’avait jamais cessé de l’aimer, même dans les neiges éternelles de l’Everest. Ce n’était pas pour rien qu’elle s’était tenue à l’écart de toute relation amoureuse en six ans. Et le retrouver à présent lui faisait prendre conscience de l’intensité de l’amour qu’elle avait tenté d’oublier… Un amour absolu, parfait, parce qu’il n’existait personne d’autre comme lui, tout simplement.

Mais Rose devait vivre avec ce constat tout simple : elle était revenue trop tard. Même s’il n’y avait encore rien entre eux, même si elle surgissait tout à coup de sa cachette pour l’empêcher de frapper à la porte… Scorpius avait des sentiments pour cette fille Moldue qui avait partagé son quotidien en son absence.

Rose ne lui en voulait pas. Bien au contraire. Elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même. Elle avait suffisamment de lucidité à présent pour comprendre que ce n’était pas son père qui les avait séparés, c’était bien elle et elle seule. Même en cet instant, Rose s’en voulait de voir à quel point Scorpius se refusait le bonheur, à cause d’elle…

L’aimait-il toujours ? Probablement. Pour une raison étrange, Rose n’avait pas le moindre doute à ce sujet, et cela ne lui causait pas le moindre plaisir. Car elle savait que Scorpius était ainsi. C’était dans sa nature. Elle se souvenait de ses paroles, en haut de la tour d’Astronomie, lorsqu’il lui avait avoué qu’il l’aimait. Il lui avait dit qu’il l’avait aimée dès la première fois où il l’avait vue. Dès leur enfance, il l’avait choisie elle. Rose avait été bouleversée par ses paroles à l’époque, mais à présent…

Rose réalisait le piège dans lequel cela avait enfermé Scorpius. Personne ne devrait être condamné à aimer comme lui-même l’avait été. L’amour qu’il ressentait pour elle avait quelque chose d’irréversible qui l’avait fait souffrir la majorité de sa vie. Aujourd’hui, elle revenait alors qu’il semblait sur le point de s’en délivrer…

Au bord des larmes, Rose réalisa que la plus belle forme d’amour n’est pas le coup de foudre qui nous enchaîne et nous déclare totalement esclave de l’autre. Ce n’est pas le genre d’amour qui nous transforme en créature pathétique prête à oublier toute morale, toute dignité et toute estime de soi-même pour obtenir ne serait-ce qu’un fragment de l’autre. La plus belle forme d’amour, c’est l’amour choisi. En toute connaissance de cause.

A observer Scorpius ainsi, tourmenté sur les marches d’une inconnue dont elle ignorait même le nom, Rose se dit qu’elle pourrait le récupérer ce soir si elle le voulait. Elle pourrait entrer dans sa vie tel un raz-de-marée et voler la chance de cette inconnue, voler le destin qu’ils pourraient avoir ensemble, pour s’emparer de lui à nouveau, s’emparer de son cœur, de sa destinée, l’affecter en écrasant au passage tout ce qu’il s’était efforcé de construire pendant son absence.

Mais elle pouvait aussi attendre. Elle voulait attendre. Scorpius frapperait à la porte de cette Moldue, il l’embrasserait, il l’aimerait, et il guérirait de l’absence de Rose pour devenir finalement celui qu’il avait toujours été destiné à être : un homme accompli, entier, vivant avant tout pour lui-même.

Rose réalisa ce qu’elle n’aurait auparavant jamais eu la maturité d’admettre : elle voulait être aimée par choix, et non par obligation. Elle voulait que Scorpius la choisisse elle, après avoir goûté à toutes les possibilités que lui offraient le monde, après avoir appris à vivre sans elle, après avoir aimé sans elle. Elle voulait qu’il la choisisse en dépit de tout le reste, en dépit de tout ce qu’il avait connu d’autre, parce qu’il l’aimait, et pas parce qu’il avait eu le coup de foudre pour elle alors qu’il n’était qu’un gosse, et qu’il s’était interdit d’aimer qui que ce soit d’autre ensuite. Pour cela, elle devait le laisser grandir.

Inspirant profondément, Rose recula de quelques pas. Elle vit Scorpius lever la main pour frapper à la porte de sa collègue, et elle le laissa faire. La jeune femme ouvrit. De là où elle se trouvait, Rose entendit Scorpius prononcer son prénom : Maya. Il balbutia ensuite quelques explications qu’elle ne comprit pas. Puis il se pencha soudain pour l’embrasser, et la jeune femme l’enlaça en retour avec toute la ferveur que provoque une très longue attente. Rose n’attendit pas d’en voir davantage. Elle transplana, une douleur amère au fond de la gorge, mais avec le sentiment de s’être accomplie en tant qu’être humain.

 
 
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