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A Coeurs Perdus : 2e Génération
Par Natalea
Harry Potter  -  Romance/Amitié  -  fr
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    Chapitre 8     Les chapitres     48 Reviews    
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Scorpius et Lily

Emily n’était pas du genre à chercher ses mots. Depuis qu’elle l’avait rencontrée le soir de la cérémonie de la Répartition, Rose avait découvert une jeune fille très sûre d’elle, à l’aise en société, particulièrement avec les gens de son âge, et non intimidée par les feux des projecteurs, du moins en apparence. Dynamique, vive, un brin hyperactive, elle avait une façon de s’exprimer qui l’apparentait bien souvent à une tornade, même si son élocution demeurait à tout instant claire, mutine, et enthousiaste. Pourtant ce matin-là, Emily cherchait ses mots. Les mains croisées devant elle, elle tordait ses doigts sans s’en rendre compte, sans regarder Rose, que sa gêne apparente angoissait plus que tout.

Emily n’était pas prude. Elle n’était ni timide, ni réservée : n’importe quel sujet pouvait passer entre ses lèvres sans rencontrer de résistance. Bien souvent, c’était ce franc-parler qui faisait grande impression auprès de ses camarades. Pourtant ce matin-là, Emily ne disait rien. Elle cherchait visiblement le meilleur moyen d’aborder la question, ce qui signifiait forcément que ce qu’elle allait dire était important, et qu’elle avait peur de blesser Rose. Rose s’en moquait. Elle voulait savoir, et elle devait s’enfoncer les ongles dans les paumes pour se retenir de secouer son amie par les épaules à cet instant. Elle n’avait pas l’habitude de voir Emily ainsi : hésitante, déstabilisée, et cela lui faisait peur plus que tout le reste. L’anticipation. L’attente.

Finalement, Emily sembla lasse de tergiverser :

- Tu te souviens du match de Quidditch, l’année dernière ? demanda-t-elle en plantant brusquement ses yeux dans ceux de Rose. Celui où Gryffondor a gagné la coupe ?

- Vaguement, répondit Rose en fronçant les sourcils, ne percevant pas le rapport.

Le Quidditch n’était pas sa plus grande passion, et comme à l’époque, elle haïssait Scorpius cordialement, elle n’avait pas prêté grande attention à lui durant le match, jusqu’à ce qu’il attrape le Vif d’or.

- Les Gryffondors ont donné une grande fête dans leur dortoir après le match, continua Emily.

- Ils donnent des fêtes presque tous les soirs.

- Arrête de m’interrompre, s’il te plait.

Rose se tint coite.

- Albus m’a dit que Scorpius était quelqu’un de plus torturé qu’il n’y parait, reprit Emily en pesant soigneusement ses propos. Il se met énormément de pression. Il nourrit des doutes terribles sur son avenir et le sens de ses actes. Des questions que les gens de notre âge ne se posent pas avec autant de sérieux, d’habitude. Mais surtout, il a une très mauvaise estime de lui-même. Il se bat constamment contre ses propres démons, et… à l’époque, c’étaient les démons qui gagnaient.

La jeune fille prit une grande inspiration, fuyant son regard une fois de plus :

- Scorpius avait tendance à boire, l’année dernière. A boire trop. Lors de cette fameuse soirée, il avait trop bu, et Lily aussi.

Rose commençait à entrevoir où la discussion les menait, et elle n’était pas sûre de vouloir entendre la suite. Néanmoins, à présent qu’elle avait commencé, elle n’avait plus le courage de stopper Emily :

- D’après Albus, Lily avait le béguin pour Scorpius depuis assez longtemps. L’alcool aidant, elle l’a approché pendant la fête, et il s’est montré… réceptif. Ils se sont embrassés. Une chose conduisant à une autre, ils se sont isolés, et… ils ont passé la nuit ensemble.

Voilà, c’était dit. Emily lui jeta un vague retard, mais ne laissa pas le silence s’installer :

- Le lendemain, Scorpius s’est réveillé sans souvenir de la nuit passée, complètement nu, avec Lily dans son lit. Il en a conçu une profonde culpabilité. Lily n’avait que quatorze ans. Il a décidé de rester avec elle, pour… ne pas être un salaud. Ne pas heurter ses sentiments alors qu’il était fautif. Se comporter comme quelqu’un de bien. Seulement, après quelques semaines, il a compris que ça ne marcherait pas. Il n’était pas amoureux de Lily, mais Lily, elle, était sincère. En ne voulant pas la blesser, il lui avait donné de faux espoirs, ce qui était pire. Il a rompu avec elle.

Sentant que l’œil du cyclone était passé, Emily osa de nouveau regarder Rose dans les yeux :

- Et il se sent toujours coupable depuis. Lily est toujours amoureuse de lui, et il le sait. Lui-même l’apprécie beaucoup, sincèrement, mais… Pas comme ça. Il sait qu’il est responsable de ce qui s’est passé : c’était lui le plus âgé, lui qui aurait dû se retenir. Il sait qu’il est responsable d’avoir blessée Lily, deux fois. D’avoir joué avec ses sentiments, et de continuer à la blesser depuis, parce qu’elle l’aime toujours. Voilà pourquoi il ne voulait pas que tu les mettes ensemble…

Emily expira lentement, soulagée de n’avoir plus rien à dire, mais anxieuse de sa réaction. Rose se sentait perdue. Hébétée, il n’y avait pas d’autre mot. L’histoire d’Emily était sordide, et tandis qu’elle refusait d’en repasser les grandes lignes, ce fut un détail qui retint son attention :

- Et Albus n’est pas fâché contre lui ? s’entendit-elle demander. Lily est sa sœur…

Emily haussa les épaules :

- C’est toujours difficile de savoir ce qu’Albus ressent. Il a beaucoup d’estime pour Scorpius. Il n’avait pas l’air de le condamner, même si j’ignore pourquoi.

- Il n’a pas hésité à te raconter toute l’histoire pourtant… C’était peut-être parce qu’il lui en veut.  

- Scorpius lui a bien raconté toute l’histoire à lui. Alors qu’il est le frère de Lily.

- C’est différent : Scorpius est fondamentalement honnête. S’il lui en a parlé, c’est sans doute parce qu’il ne voulait pas le lui cacher.

De nouveau, Emily haussa les épaules :

- Pas si honnête que ça, finalement…

Rose en conçut de la colère, mais elle ne dit rien. Brusquement, elle réalisait ce que cette situation avait dû être pour un mental comme Scorpius. Un mental répondant à des principes moraux très stricts. Seigneur, quel dilemme cela avait dû être… Quelle torture intérieure… Elle ne pouvait imaginer Scorpius en proie avec cette erreur, et elle avait soudain envie de se gifler pour toutes les fois où elle avait compris la situation de travers, et fait empirer les choses.

Accablée de fatigue, Emily la laissa sur ces révélations, et Rose s’étendit elle aussi. La nuit blanche se faisait ressentir aux frontières de son esprit, pourtant, elle était incapable de dormir. Elle demeura ainsi les yeux grands ouverts, jusqu’à ce que l’horloge sonne midi. Tout le reste de la journée, elle fonctionna sur pilote automatique, se levant, terminant ses devoirs, oubliant l’heure du repas. Ce ne fut qu’à la nuit tombée que l’épuisement eu raison de ses pensées. Elle sombra dans un sommeil hanté, où l’inquiétude se disputait aux visions terribles qu’Emily lui avait livrées.   

Tout au long de la semaine, Rose s’efforça de garder les révélations d’Emily hors d’atteinte. A chaque fois que le sujet effleurait sa conscience, elle le repoussait, se plongeant dans ses études plus farouchement qu’elle ne l’avait encore jamais fait, ne vivant que pour cet examen d’Arithmancie qui arriverait au milieu du mois de décembre. L’école commençait doucement à se parer aux couleurs de Noël, et pour l’occasion, Rose avait pris à cœur son rôle de préfète, évitant le sillage d’Albus, mais déployant le maximum de soin et d’effort à suivre ses directives. A la fin de la semaine, elle mangeait peu, dormait beaucoup car son travail l’assaillait de fatigue, et subissait les regards préoccupés d’Emily, qui n’osait pas poser de questions.

Plus que tout, Rose redoutait le vendredi soir, où il lui faudrait tenir une nuit entière aux côtés de Scorpius, auprès de lui et de cette vérité qu’elle voulait désapprendre. Seulement, elle ne pouvait plus fermer les yeux. Heureux sont les ignorants…

Pendant la semaine, elle avait réussi à maintenir Scorpius à l’écart, aussi bien physiquement que mentalement. Elle avait cessé ses petits manèges avec Lily, qui l’observait de temps à autre du coin de l’œil pour se demander quand est-ce qu’elle reviendrait à la charge. Mais Rose se tint tranquille. Elle fit de l’esquive un sport de compétition : chaque fois qu’elle apercevait Scorpius ou Lily dans un couloir, elle faisait demi-tour, quitte à se mettre ridiculement en retard. Les raisons de cette fuite, elle ne se les expliquait pas. Elle refusait d’y penser. Elles lui donnaient l’impression étrange d’être une Malefoy, une Malefoy de la vieille époque, et ça ne pouvait pas être une bonne chose. Mais son instinct lui criait au plus profond d’elle-même qu’une analyse introspective serait pire. Elle lui révèlerait ce qu’elle ne voulait pas entendre. Pour l’instant, la voix incisive de son esprit s’était tue, bâillonnée par la stupeur récente, et ce n’était pas elle qui irait la rechercher.

Néanmoins, la vivacité naturelle qui caractérisait son esprit la trahit. Même lorsqu’elle s’efforçait de ne pas y prêter attention, elle ne pouvait s’empêcher de remarquer les discussions de Scorpius et Lily dans la Grande Salle, la session de travail qu’ils semblaient s’organiser deux ou trois soirs dans la semaine à la bibliothèque, et la fois où Lily embrassa Scorpius sur la joue, avant son entraînement de Quidditch. Où qu’elle aille, Rose avait l’impression de les voir toujours ensemble, et plus les jours passaient, plus son malaise s’accentuait. Bientôt, leur vision lui devint insupportable, et elle en conçut une crispation qui prit cœur au creux de son ventre, l’empêchant d’avaler quoi que ce soit. Elle en était malade, littéralement, sous les yeux d’Emily dont les regards clairvoyants trahissaient néanmoins l’impuissance.

La jeune fille brune sembla même accueillir le vendredi soir avec un certain soulagement. Peut-être espérait-elle qu’ainsi, les choses se dénoueraient. Qu’en étant directement confrontée à l’objet inavoué de son mal-être, Rose finirait enfin par parler. Mais lorsque la nuit fatidique arriva, cette soirée qu’elle avait redoutée et espérée toute la semaine, Rose scella son cœur et ses lèvres, bien décidée à ne plus se laisser atteindre.

Elle gravit les marches de la tour d’Astronomie comme on monte à l’échafaud. A chaque spire de l’escalier en colimaçon, elle craignait d’apercevoir la chevelure claire de Scorpius, qui l’aurait devancée. Elle allait bien devoir lui faire face pourtant. Il fallait qu’elle se fasse à l’idée.

Lorsqu’Aurora Sinistra leur assigna leur télescope, Scorpius était en retard. Le mélange de soulagement et de déception que Rose ressentit alors manqua de la faire vomir, mais au même instant, Scorpius arriva enfin, essoufflé, avec un sourire d’excuse, totalement inconscient des tourments qu’il causait. Rose en fut prise de vertige. Savoir ce qu’elle savait sur lui, tandis que lui l’ignorait… Elle se sentait mal, plus mal à l’aise qu’elle ne l’avait jamais été, mais pire encore : elle se sentait coupable. Coupable d’avoir fourré son nez dans ce qui ne la regardait pas… Pourtant, si le choix était à refaire, elle savait qu’elle referait le même. Elle préférait la connaissance, si terrible soit-elle, aux spéculations sans fins de son esprit.

Curieux devant son silence, Scorpius tâcha de se montrer agréable. Elle le détesta pour cela. Mon Dieu, ne pouvait-il pas la laisser tranquille ? Ne comprenait-il pas qu’à cet instant, le moindre contact visuel lui était une brûlure ?

Rose se plongea dans le travail. Comme durant ses autres cours, elle se mit à l’ouvrage avec l’énergie du désespoir : concentrée, méthodique, efficace, tout pour distraire son esprit de l’incube qui se tenait debout à côté d’elle. Comme les autres soirs, elle ne put néanmoins s’empêcher de remarquer ce qu’il portait : un pull à col roulé noir, encore plus rayonnant de contraste avec sa peau, ses yeux et ses cheveux pâles, comme une gradation dans le magnétisme lunaire de leurs rencontres nocturnes.

Elle le haït aussi pour cela. Pour capturer son attention alors même qu’elle s’efforçait de le fuir. Alors que ses propres pensées et sentiments étaient devenus ses ennemis, n’attendant qu’un instant de relâchement de sa part pour la trahir…

Elle voyait bien que Scorpius la dévisageait sans comprendre son attitude. Malgré toutes les fois où il avait imposé ses vues en dépit des siennes, elle ne pouvait plus nier désormais qu’il était sensible aux émotions des autres. Peut-être était-il d’autant plus sensible aux siennes, et cette perspective seule la terrifiait. Il fallait à tout prix qu’elle cache ses émotions, mieux que ça…

Sans un mot, il la prit soudain par surprise en l’agrippant par les épaules pour l’écarter du télescope :

- Et si tu me laissais travailler un peu ? dit-il doucement, sans colère ni suspicion. Tu ne vas pas tout faire toute seule.

Rose recula et ne dit rien. Elle sentait encore la pression de ses mains sur elle, comme si elles y étaient toujours, comme si elles s’étaient imprimées dans sa chair. La gêne lui monta aux joues brusquement. Heureusement, Scorpius lui tournait le dos, l’œil fixé à la lentille, incapable de la voir.

Sans rien à faire, Rose se trouvait démunie. En désespoir de cause, elle s’assit sur le parapet à côté de Scorpius et tenta de se perdre dans l’éclat de la Lune.

Seulement, la Lune était noire, ce soir. Aucun rempart ne venait se dresser entre Rose et ses pensées. Alors, irrésistiblement, elle tourna son regard vers Scorpius.

Concentré, il semblait avoir oublié son trouble pour l’instant. Avant même qu’elle ne s’en rende compte, Rose détaillait sa posture, son visage, ses mains. Elle éprouvait une véritable fascination pour ses mains. Elle ne s’en était jamais rendue compte jusqu’à présent. Elle aimait l’assurance posée qu’elle sentait dans ses gestes. Sa façon subtile et délicate de manier les choses, comme s’il les connaissait intimement, les respectait, leur apportait juste ce qu’il fallait d’impulsion. Il avait la main sûre, il ne tremblait pas. Il ne tremblait jamais, sauf cette fois où la fièvre l’avait affaibli par sa faute.

En temps normal, Rose aurait remarqué le regard trop prolongé qu’elle portait à son demi-frère. Mais cette nuit-là, brusquement, le récit d’Emily éclata dans son esprit. L’association entre deux images : Scorpius maintenant, et Scorpius et Lily ensemble, la plongea dans une spirale hypnotique dont elle ne put s’échapper avant qu’il ne soit trop tard. Rose aimait les mains de Scorpius, et son visage lisse, sa haute stature, ses cheveux trop longs qui se prenaient constamment dans le col de ses pulls. Rose aimait tout cela, elle découvrait toutes ces choses chaque jour, jour après jour, comme si c’était la première fois, mais elle découvrait qu’elle les aimait, cette nuit-là, bel et bien pour la première fois. Et cependant, elle ne pouvait s’empêcher de les associer à Lily. Ces mains que Lily avait touchées, ce visage qu’elle avait embrassé, et ses cheveux qui devaient être doux, mais qu’elle était la seule à connaître…

Irrésistiblement, son imagination l’entraîna plus loin. Le corps de Scorpius brûlait de ce qu’Emily lui avait révélé. Contre sa volonté, malgré elle, Rose concevait l’image de Scorpius et Lily cette fameuse nuit du match de Quidditch, elle voyait Scorpius et Lily, et les étreintes qu’ils avaient partagés, les gestes de tendresse qu’ils s’étaient accordés, lui en elle, et cela lui était insupportable.

Elle inspira brusquement et détourna les yeux, soudainement saisie par son idiotie, et sur le point de fondre en larmes. Scorpius perçut son geste. Reculant un peu du télescope, il l’interrogea du regard, lui laissant le choix de ne pas répondre. Il avait l’air sincèrement préoccupé, mais son respect pour son trouble à cet instant la frappa droit au cœur, d’une pointe acide et nue. Dieu qu’elle aimait sa façon de se comporter… Dieu qu’elle le haïssait pour cela.

- Rose, je sens bien que quelque chose ne va pas, dit-il quand même. Si c’est à cause de ce que j’ai dit l’autre fois, je m’en excuse.

Il s’agenouilla devant le parapet, les yeux dans les siens, la mettant au supplice :

- Je n’aurais pas dû être si dur avec toi.

Il se sentait coupable… Elle le voyait sur son visage. Elle ne voulait pas qu’il se sente coupable, pas à cause d’elle. Elle ne voulait pas ajouter à son fardeau… Pourtant, son envie de pleurer la dévorait toute entière à cet instant, parce qu’alors qu’elle le regardait dans les yeux, plus proche de lui qu’elle ne l’avait jamais été, Rose sut qu’elle ne le reverrait plus jamais comme avant.

Les paroles d’Emily avaient changé quelque chose. Scorpius lui apparaissait plus magnétique encore qu’auparavant, plus sensuel, et les raisons de ce changement dans son regard lui paraissaient obscènes. Pour la première fois, Rose posait sur son visage un mot qu’elle ne s’était jamais avoué : elle le trouvait beau. D’une beauté surnaturelle, interdite, presque indécente. Il était là, assaut permanent contre sa conscience : dangereux, immoral, terrible. Elle voyait toutes ces choses associées au corps et à la perfection de Lily, et toute lutte lui semblait alors vaine.

Le mal irrationnel qui l’avait saisie toute la semaine lui laboura soudain les entrailles avec une force inouïe, mais Rose continua désespérément de fuir la voix qui se frayait un chemin jusqu’à son esprit :

« Qu’est-ce qui te dérange, au juste ? Que ta cousine ait couché avec un Malefoy ? »

Non, ce n’était pas cela qui la dérangeait. A l’instant où cette pensée éclatait enfin à la surface, en pleine lumière, Rose sut que la créature qui se débattait au fond d’elle, c’était de la jalousie, et que ce nouveau regard qu’elle portait sur Scorpius, c’était du désir. Elle en resta littéralement sans voix. Ce paradoxe qui s’enclencha immédiatement en elle la figea sur place. Scorpius tenta bien de la faire réagir, mais alors, brusquement, une voix adulte cria son nom, forte, masculine et fébrile, visiblement colérique :

- ROSE WEASLEY !!! criait la voix.

Rose mit quelques instants à la reconnaître. En fait, elle ne la reconnut que lorsqu’elle vit le profil de son oncle Harry débarquer dans son champ de vision, rouge de colère, enveloppé dans une cape de voyage et brandissant à la main les derniers feuillets qu’elle lui avait envoyés :

- Est-ce tu peux m’expliquer ceci ? criait Harry en ignorant totalement les autres élèves.

- Je…

Sous le choc de sa révélation intérieure, Rose ne répondit pas. Elle avait conscience qu’il venait de se passer quelque chose de grave, et que plus rien ne serait comme avant. Scorpius les dévisageait tour à tout sans comprendre, mais il n’osait pas intervenir.

- Tu vas venir avec moi, décréta Harry en l’agrippant par le bras pour la relever. Ton frère et toi, nous avons à parler. Réunion de famille.

- Mais, mes cours…

- J’ai parlé à McGonagall, tout est réglé. Tu as trois minutes pour aller enfiler ton manteau et je te préviens, ne m’oblige pas à venir te chercher.

Tétanisée, devant tous ses autres camarades stupéfaits, Rose s’avança vers la cage d’escalier. Son oncle la retint une dernière fois par le bras avant qu’elle ne descende. Ses traits congestionnés par la fureur étaient à peine reconnaissables :

- Je nous savais en désaccord toi et moi, Rose. Mais je ne m’attendais pas à des mensonges de ta part. Tu as trahi ma confiance. La confiance de toute notre famille. Et tu as trahi ton père, même si tu refuses de l’admettre !

Rose ne répondit rien face à son regard brûlant. Mais au fond d’elle, elle se sentait sombrer, loin, très loin au cœur des ténèbres.

 

 
 
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