Chapitre de Torajio ! Enjoy !
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L'allée des Embrumes n'est pas épargnée par l'interminable pluie battante. Le peu de ciel que l'on peut apercevoir apparait gris, alors que la journée n'arrive pas encore tout à fait à son terme. L'eau vient s'écraser sur les façades dans un bruit assourdissant, et finit par s'écouler à travers les étroites ruelles sombres telle autant de torrents de crasse et de boue, s'infiltrant par dessous les portes des mansardes. Impossible de voir au loin : une brume malsaine obstrue de manière presque tangible les chemins. Mais seule la pluie est inhabituelle, forçant la vermine humaine qui fréquente ces bas quartiers à se réfugier dans le premier abri disponible, cependant que d'autres, loin de s'enfuir, profitent du chaos qui règne à l'extérieur pour accomplir leurs basses besognes.
C'est en ce lieu qu'évolue Harry, se déplaçant telle une ombre indifférente au froid, à l'humidité et à la saleté, ne voyant pas même les hauts murs qui tentent de l'oppresser de part et d'autre de chaque rue où ses pas l'emmènent. Il ne sent pas les relents écœurants de moisissure qui émanent des sinistres sous-sols du quartier. Il ne prête aucune attention aux murmures que sa sombre silhouette sans visage provoque. Car ses pensées sont ailleurs. Il était parti de Sainte Mangouste avec peu d'indices sur ce qu'il devait chercher. Rien que Lewison, cet ignoble personnage. Il est mort à présent, il l'a tué de ses propres mains. Mais il lui a également soutiré l'information qu'il cherchait, l'origine du Furosensis. Et maintenant, il a Barjow, ce lâche, ce détritus, cette immondice à sa botte, prêt à lui livrer ses contacts, ses affaires, n'importe quoi du moment que ce n'est pas sa vie.
Ainsi, aujourd'hui, grâce à lui, Harry est sur la piste de Travers. Cet ancien Mangemort n'est plus rien depuis que l'Élu a vaincu le Seigneur des Ténèbres. Il est devenu insignifiant, il ne mérite même pas que l'on s'intéresse à lui. Mais il a acheté le Furosensis. Jamais cet homme n'aurait pu prendre cette décision seul : agissant uniquement par intérêt, aurait-il seulement été capable de développer une quelconque rancœur envers l'Elu ? Quelqu'un lui a ordonné de se procurer le poison, alors le poison, il se l'est procuré. Qui a donné cet ordre ? Qui est le vrai meurtrier ? Quelle vie Harry devrait-il prendre pour obtenir sa vengeance ? Travers lui livrerait certainement la réponse. Le tout est de le trouver.
Harry s'arrête à une intersection et s'adosse contre un mur dans un coin d'ombre. Voilà un bon quart d'heure qu'il erre sans but ni volonté dans ces quartiers malfamés. Ce n'est pas ainsi qu'il trouvera sa cible. Il jette un œil autour de lui. En plus de la saleté et de la promiscuité qui font la réputation de l'allée des Embrumes, ce lieu transpire un fort sentiment de malaise : les bâtiments, ou ce qu'il en reste, sont plus hauts et leurs faîtes plus larges, interdisant le passage du moindre rayon de lumière naturelle. La pluie est concentrée par les toits pour former de larges filets d'eau noire qui coulent le long des façades délabrées. Une faible lueur brunâtre émane de trous béants creusés à même les murs, se réverbérant sur la moindre surface pour créer un éclairage uniforme et surnaturel, dévoilant la moindre particule de poussière que l'air vicié porte. Une chaleur à peine perceptible émane de ce lieu, une chaleur semblable à celle qui naît de la pourriture et de la putréfaction. Les hommes et les femmes qui s'affairent ici paraissent habitués à cet environnement, ils s'y trouvent à leur aise. Une silhouette informe qui doit être un homme, une masse squelettique qui autrefois ressemblait peut-être à une femme, et une masse désorganisée de personnes, le dos voûté ou droit, le pas incertain ou assuré, le regard soit vide soit pernicieux. Dans cette rue où toute vie semble être fantôme, ni la pluie ni le froid n'ont l'air d'affecter le fourmillement incessant.
Harry, se détachant de son mur, fend la foule, et apprend à connaître ce monde. Les gens le croisent sans même le voir. Ceux qui le voient ne le reconnaissent pas. Personne ne connait l'Élu, personne ne connait Harry Potter ici. Il n'est qu'un autre spectre sans nom. Certains murmurent des paroles de folie en marchant, alors qu'on entend un rire dément retentir quelques mètres plus loin, avant de se taire aussi sèchement qu'il éclatait quelques instants plus tôt. Harry en vient même à oublier la raison de ses pérégrinations dans les tréfonds de l'allée des Embrumes. Cet endroit est purement malsain.
Rebroussant chemin, il se trouve vite de retour sous la pluie, et ressent presque un soulagement en la sentant s'insinuer sous ses vêtements froids. Mais il ne peut continuer ainsi à marcher sans réfléchir. Cela fait des heures qu'il a abandonné un Barjow tout tremblant. Il ne pourrait déterminer si la nuit a déjà étendu son voile noir sur la voûte céleste, mais il est néanmoins épuisé. Repensant à la bourse sans fond qui l'attend dans sa poche, il se met à la recherche d'un endroit où passer la nuit.
Faute de pouvoir demander son chemin, une autre heure passe avant qu'il n'aperçoive ce qui autrefois a dû être un panneau oscillant au gré d'une brise inexistante. Il a été lissé par des années d'abandon et fendu par la morsure du temps. Mais la porte qu'il indique ne tenant plus sur ses gonds, on peut deviner à l'intérieur un semblant d'auberge.
L'endroit est désert : trois sorciers trempés se regardent avec méfiance autour d'une des tables, à la lumière d'une unique chandelle à la flamme vacillante. Une lampe à huile couverte de poussière diffuse une pâle lueur jaunâtre, permettant de repérer la silhouette vague d'un comptoir. Derrière celui-ci, un homme de taille moyenne se tient debout, immobile. On ne voit de lui que sa peau grise et ses yeux jaunes luisants comme ceux d'un serpent. Le reste de la pièce est plongé dans une sombre pénombre.
Harry trébuche plusieurs fois sur des obstacles invisibles avant d'atteindre le comptoir, soulevant chaque fois les rires discrets d'un quatrième client, dissimulé dans l'ombre à l'autre bout de la pièce, et les couinements indignés des rats délogés de leurs habitations. Le bois émet un craquement sinistre lorsque le tenant de l'auberge s'appuie de tout son poids sur le meuble en bois, dévoilant en s'approchant un visage squelettique, comme un crâne dépecé de sa chair. Un large sourire étire ses lèvres crevassées :
- Monsieur. Que puis-je... pour vous ?
- Il me faut une chambre, murmure Harry.
- Je ne donne pas de chambres ! Dites-moi seulement... combien de temps vous voulez disparaître.
- Aussi longtemps que je le voudrai, répond-il sèchement. Quel est votre prix ?
L'homme aux yeux de serpent s'approche encore davantage d'Harry. Il ouvre lentement la bouche, dévoilant des dents noires acérées et brillantes, comme soigneusement taillées dans l'obsidienne. Il passe rapidement sa langue sur sa lèvre supérieure, puis reprend avec la même nonchalance :
- Autant que je vous demanderai... chaque jour où... vous serez là. À l'étage, chambre trois... monsieur.
Sur ces mots, il indique un point dans l'ombre à sa droite, puis fait un pas en arrière, retournant dans les ténèbres, ses yeux seuls trahissant encore sa présence. Harry s'éloigne pas à pas du comptoir pour rejoindre en aveugle ce que l'aubergiste a montré. Ses yeux s'étant habitués à la pénombre, il distingue en se rapprochant les premières marches d'un escalier. Chacune d'elles craque si fort lorsqu'il y pose le pied que personne ne se serait étonné de les voir céder et s'ouvrir sur un gouffre sans fond. Arrivé en haut, le noir est total.
- Lumos.
Un mince faisceau de lumière sort de la baguette d'Harry, lui permettant seulement d'arpenter le couloir crasseux qui se présente devant lui. Il repère vite la « chambre trois » dont la porte bringuebalante doit être sous l'emprise d'un sortilège pour être encore entière. Elle s'ouvre sur une pièce carrée, tout juste assez grande pour y avoir placé un lit de fer rouillé dont il ne reste que l'ossature. Les murs sont recouverts de taches brunes, sur l'origine desquelles on ne peut émettre que de vagues spéculations. Pas de fenêtre, pas de lampe, pas de lumière d'aucune sorte. Juste ce lit et quelques insectes rampant sous la poussière.
Harry, après un bref coup d'œil au sommier, renonce à jamais à s'y allonger avant d'avoir trouver quelque chose pour le recouvrir. Il s'assoit alors dans un coin et s'enroule dans sa cape. Il fait froid, l'air est irrespirable, et une flaque d'eau se forme peu à peu au fur et à mesure que les gouttes coulent du plafond dans un ploc ploc incessant. Il ne sait même pas combien il va devoir payer pour ça. Mais au moins, personne ne viendra le chercher ici. À bout de force et de volonté, Harry ferme les yeux et laisse échapper une larme :
- Nox.
XXX
Lorsqu'Harry se réveille pour la quatrième fois, s'estimant assez reposé pour avoir les idées claires, il illumine une nouvelle fois sa baguette, chasse un rat occupé à arracher des lambeaux de sa cape, et s'assoit sur la structure en fer du lit. Ses mains sont gercées par le froid, rendant difficile le mouvement de ses articulations. Prenant le parti que sa chambre ne saurait être dans un pire état, il allume un feu magique en face de lui afin de se réchauffer et de sécher ses vêtements humides.
Il est temps de se préparer. Que doit-il faire déjà ? Trouver Travers. Aviser ensuite. Mais comment le trouver, si même Barjow, celui qui sait tout ce qui se trame dans les bas-fonds de la société, ne sait pas comment le trouver ? Harry n'a pu tirer qu'une seule information du vieillard : Travers fréquente l'allée des Embrumes. Tout ce que vous pouvez faire, c'est attendre qu'il se montre. Quel conseil ! Harry doit trouver quelque chose, une idée, une piste, n'importe quoi ; il ne peut pas simplement se poster dans un coin de rue à attendre qu'il se montre. Il lui faut un point de départ.
Il sait que Travers a trempé à ses débuts dans des affaires de trafic d'absinthe en tant que petit revendeur. D'aussi loin qu'Harry peut s'en souvenir, ce trafic n'a jamais cessé, mais s'est fait de plus en plus discret au fil des années ; suffisamment pour que le gouvernement finisse par décider de l'ignorer complètement. Il serait presque logique que sortant d'Azkaban et ne voulant pas se faire remarquer, Travers ait au moins tenté de rejoindre ses vieilles connaissances. Vague hypothèse peut-être, ce n'en est pas moins la seule dont Harry dispose.
S'il s'en tient à cette piste, il doit donc trouver un moyen d'approcher le domaine de ce trafic, d'une manière ou d'une autre. Mais aborder le premier inconnu et lui extorquer ce genre d'information serait sûrement peu efficace, et risquerait d'attirer la méfiance des trafiquants. Un minimum de subtilité... ou plutôt de comédie dans ce cas : Harry peut profiter du fait que personne ne semble lire la Gazette dans ces quartiers, et se faire passer pour un client régulier à court de son élixir. Il ne reste plus qu'à être convaincant dans le rôle.
Ainsi, bravant une nouvelle fois l'obscurité de son gîte, Harry sort dans le couloir miteux, et s'approche des escaliers branlants. Une faible lumière grise émane du rez-de-chaussée, accompagnée de quelques murmures étouffés. Harry descend lentement les marches qui gémissent violemment à chacun de ses mouvements. Arrivé en bas, il est un homme complètement différent de celui qui est entré par dépit la veille. Harry a les yeux grands ouverts, roulants follement de droite à gauche dans leurs orbites, incapables de se fixer sur quoi que soit. L'eau qui imprègne ses cheveux lui donne l'air d'un individu en pleine crise de sueurs froides. Il serre puis relâche les poings sans cesse, faisant glisser de temps à autre ses mains moites sur sa bouche crevassée ou dans ses cheveux humides. De violents tremblements lui agitent la poitrine, et rendent chacun de ses pas hésitant, chacun de ses gestes imprécis.
Il y a dans la pièce une dizaine de sorciers, discutant en silence, chacun de son côté, tenant pour certains une chope remplie d'un liquide difficilement identifiable. Seul un homme reste isolé, assis seul à une table, avachi sur sa chaise, respirant à peine, la tête encapuchonnée dans une longue cape grise usée par le temps. On n'aurait su dire s'il attendait quelque chose ou s'il s'était tout simplement assoupi. L'aubergiste lui est tout bonnement absent. Et personne ne fait attention à Harry. Comme si la présence d'un quelconque toxicomane était normale ici. Ce qui n'est certainement pas faux.
Harry s'approche de la table occupée la plus proche avec le même pas si assuré et rassurant :
- V-Vous... Vous en avez ? lâche-t-il après un instant de silence.
Les messes basses des intéressés cessent instantanément, et quatre paires d'yeux se plantent avec méfiance sur le personnage en plein delirium tremens qu'il joue :
- Tu cherches quoi ? crache l'un des hommes.
- Une amie... v-vous savez, la... la fée ver...
- J'en ai pas. Dégage, étranger.
- M-mais, vous... vous savez où... je... peux en trouver ?
- Va voir Prentis, et fiche-nous la paix. Il traîne du côté de l'impasse du Rôdeur.
- N... non, je peux... pas.
- Alors vas voir Boyd, ajoute un second sorcier. Il est dans le coin, aujourd'hui.
- I-i-impos... impossible.
- T'as encore le vieux Edgar, continue le troisième. Tu le choperas au Dragon Vert en train de vider une de ses bouteilles, je parie.
- Pas lui ! lâche brutalement Harry en frappant sur la table.
Le premier sorcier se lève et l'empoigne par le col de sa cape :
- Écoute-moi, crevard, crache-t-il sorcier. Tu nous déranges, ok ? On te donne des noms, t'es pas content, alors casse-toi !
- Vous... de-devez savoir ! gémit Harry en se prenant la tête dans les mains. Un... un autre !
- Encore un mot, et....
- Mais... mais...
Deux des attablés se lèvent. L'un a la taille d'Harry, le second est légèrement plus grand. Ils le prennent chacun par un bras et le tirent vers la sortie. Harry se débat tant qu'il peut, dans la limite de son rôle, mais finit malgré tout jeté avec violence sur le pavé humide, face contre terre. La porte de l'auberge claque derrière lui. Il se relève péniblement, à nouveau trempé et couvert de boue.
- Douze mornilles », siffle une voix derrière lui.
Il se retourne et voit l'aubergiste aux yeux de serpent tendre une main squelettique, souriant de tous ses crocs. Harry fouille sa cape, tire l'argent de sa bourse sans fond, et tend les douze mornilles à cette sordide créature. Rouvrant la porte, le tenancier rentre dans l'auberge alors qu'un autre homme en sort. C'est le sorcier qui restait comme figé sur sa chaise, isolé il y a quelques instants encore. Il a enlevé sa capuche, dévoilant un visage aux longs cheveux brun sombre, mal rasé, avec deux grands yeux bleus perçants :
- C'est bien ce que je me disais, murmure-t-il. J'ai à vous parler.
Harry a un geste de recul. Il est prêt à neutraliser cet étranger et à prendre la fuite s'il lui donne la moindre raison de le faire, mais l'inconnu reprend :
- Je crois pouvoir vous aider.
- M'aider ? À quoi ?
- À le trouver.
Harry se tait. Qui est cet homme sans nom, et comment sait-il qu'il cherche quelqu'un ?
- À votre réaction, je suppose que j'ai visé juste, sourit l'inconnu. Marchons un peu, voulez-vous ? Les murs ont des oreilles, mais ce sont celles des passants qui me gênent le plus.
Ils marchent quelques minutes en silence, la tête baissée sous leurs capuchons, évitant soigneusement de croiser le regard de qui que ce soit, jusqu'à arriver dans une impasse étroite. Harry suit son étrange guide jusqu'à ce qu'il pousse une porte dérobée, et ils entrent tous deux dans une pièce déjà plus spacieuse que la « chambre trois » de Harry. Le lit est ici pourvu d'une literie certes sale, mais bien présente. Pas de fenêtre, mais une douzaine de bougies aux flammes magiques sont dispersées le long de murs. Au milieu, une table de bois sommaire soutient une montagne de papiers, ainsi qu'une plume et un encrier noir. Dans un coin de la pièce, comble du luxe, un fauteuil éventré attend que quelqu'un veuille bien se risquer à s'y asseoir.
- Bienvenue dans mon palace ! lance jovialement l'hôte. Ce n'est pas merveilleux, mais c'est toujours mieux que votre chambre, n'est-ce pas ? Enfin... nous sommes là pour discuter, alors discutons.
- Pour commencer, qui êtes-vous ? demande Harry, défiant.
- Ce n'est pas important. Ce qui est important, c'est que je peux vous aider.
L'inconnu prend place sur l'unique chaise de la pièce, et désigne le fauteuil à son invité. Harry l'ignore, préférant rester debout, à proximité de la porte. Désignant son « hôte » d'un hochement sec du menton, il lance :
- Alors, comment pouvez-vous m'aider ?
L'inconnu le transperce de son regard bleu vif :
- Je ne suis pas idiot : vous jouez au picoleur en manque pour trouver un revendeur d'absinthe. Mais vous rejetez trois noms, ce qui me laisse à penser que vous en cherchez un en particulier. Et il n'y en a qu'un qu'ils n'ont pas cité. Travers est peu connu.
- Et vous pouvez me dire où il est, peut-être ?
- Où il est, non. Mais... je sais où le trouver.
Voilà qui devient intéressant. Si cet inconnu sait réellement par où passe Travers, sa traque pourrait très bien prendre fin en moins d'un jour de recherches :
- Eh bien ? dit-il. Je vous écoute.
- Travers n'est pas qu'un simple revendeur,reprend l'homme. Il s'est surtout fait connaître en tant que fournisseur dans quelques tavernes.
- Arrêtez de tourner autour du pot ! Lesquelles ?
- Je ne les connais pas toutes. Je sais seulement que son plus gros client est l'Auberge du Passeur. C'est dans la rue des Moires. Je peux même vous y emmener.
XXX
La rue des Moires est plus large que n'importe quelle autre rue de l'allée des Embrumes, mais elle n'en est pas moins repoussante. La pluie a cessé de tomber, mais les traces du déluge n'en sont que plus évidentes, que ce soit la boue mêlée d'ordures ou l'odeur de moisissure qui émane maintenant de partout. Avec la fin des intempéries, l'Auberge du Passeur s'est remplie de sorciers aux allures rebutantes.
L'inconnu qui a guidé Harry jusqu'à cette taverne est reparti dès qu'ils sont arrivés sur place, le laissant seul à attendre l'arrivée de Travers. Mais le soir venu, le Mangemort en question n'est toujours pas passé. N'excluant pas une visite nocturne, Harry s'installe inconfortablement dans une ruelle sombre à proximité afin de ne pas se faire remarquer. Mais la rue reste cette nuit là désespérément déserte.
Sa patience paye le lendemain, en fin de matinée. Travers marche d'un pas rapide dans la rue des Moires, accompagné de deux autres hommes chargés comme des baudets de lourdes caisses tintant au rythme de leur marche. Ils entrent dans la taverne, et y restent une dizaine de minutes avant de ressortir. Les trois acolytes échangent un regard, puis se séparent. Harry attend que Travers s'éloigne un peu, puis, une fois certain que l'activité de la rue l'empêchera de le remarquer, il le prend en filature.
Il manque le perdre de vue à plusieurs reprises, mais après un long trajet à travers les ruelles étroites et sombres de l'allée des Embrumes, sa cible finit par entrer dans une baraque isolée.
Travers est là. À portée de main. Il suffit à Harry de rentrer, baguette à la main : le Mangemort serait sans défense face à lui. Il fait un pas vers la porte. Il lui faudrait seulement quelques minutes pour lui soutirer les informations qu'il cherche – qui a demandé le Furosensis ? –, et l'éliminer, purement et simplement. Il est devant l'entrée... Une mince cloison de bois... c'est tout ce qui le sépare désormais de ce misérable, peut-être la dernière étape pour enfin obtenir sa vengeance...
Harry approche sa main de la poignée... quand une main se pose lourdement sur son épaule, le stoppant net.
Le cœur d'Harry manque un battement. Il se retourne. C'est lui. L'inconnu aux yeux trop clairs. Il le fixe, et son visage se fend d'un sourire :
- Quelque chose me dit que tu n'es pas là pour lui acheter de l'alcool, à Travers...
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