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au 31 Mai 21 :
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L'Héritier
Par Natalea , Torajio
Harry Potter  -  Drame/Action/Aventure  -  fr
33 chapitres - Complète - Rating : T (13ans et plus) Télécharger en PDF Exporter la fiction
    Chapitre 33     Les chapitres     47 Reviews    
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Epilogue

Tout est fini. Tout est allé très vite.

Dans les quelques secondes qui ont suivi cette lumière horrible, plus personne n’a bougé. Et puis les partisans de l’Héritier ont lâché leur baguette un par un. La mort d’Harry représentait la mort de toutes leurs espérances, leurs ambitions. La mort de leur folie aussi. Comme si un liquide froid s’était soudain répandu dans leurs veines, leur ôtant toute force et toute volonté.

Albus a crié, mais il ne pouvait pas se relever. Il a rampé jusqu’à son père et il l’a serré contre lui.

Personne ne comprenait la scène. Personne ne saisissait encore ce qu’il venait de se passer, et ce que cela impliquait. Le tournant de la guerre. La fin de la guerre ?

Aussi dans l’indifférence générale, Hermione s’est approchée de sa fille. Elle a pointé sa baguette sur elle, et elle l’a endormie. Elle l’a recueillie dans ses bras, l’a allongée sur le sol. Le monde commençait à se réveiller. Le monde commençait à comprendre, à murmurer, et le monde savait que Rose avait tué l’Héritier. Aussi Hermione a-t-elle regardé sa fille, jeune, belle et paisible dans son sommeil. Elle l’a attirée contre elle pour la protéger.

XXX

Vingt-quatre heures se sont écoulées. Le monde sorcier est sous le choc, incapable d’y croire. Il a peur d’y croire. Après avoir été blessé, trahi, un si grand nombre de fois… Les gens ont peur de croire que c’est fini. Le mal peut renaître de ses cendres. Il l’a prouvé tellement de fois, et avec tant d’ironie…

Les partisans d’Harry se sont laissés arrêtés avec une sorte de désarroi stupéfait. Ils évoluent dans un autre monde. Ils sont incapables de vivre dans cette nouvelle réalité qui s’est dessinée.

Presque tous les partisans d’Harry s’étaient réunis à Poudlard pour la grande bataille, aussi le pays n’a-t-il eu qu’à prendre une grande inspiration pour se retrouver libre de leur emprise. Le règne de l’Héritier n’a pas duré assez longtemps pour s’installer de façon durable. Harry n’a pas eu le temps d’éliminer tous ses ennemis, d’anéantir les piliers de ce qu’il venait de conquérir. Les Aurors qui n’ont pas été capturés, de même que les fonctionnaires ayant eu le temps de s’enfuir, tous ces gens partis en exil, en fuite, contraints à la clandestinité…

Tous ces gens n’avaient pas encore pu être éliminés par le pouvoir en place. Ils n’avaient pas eu le temps de former une résistance organisée, mais ils n’avaient pas abandonné tout espoir non plus. Leur déracinement récent les attachait encore à leur pays, leur foyer. Ils n’ont pas eu besoin de plus de vingt-quatre heures pour revenir à l’annonce de la nouvelle. Ils ont repris leurs places. Ils ont à peine eu à se battre pour ça.

Dans la journée qui suit la mort d’Harry, les principales villes du pays sont reprises, à mesure que la nouvelle se répand. A défaut de journaux, les hiboux sillonnent le pays, la radio émet le même message en boucle. Les gens sortent de leurs maisons, dans la rue, et sans se concerter forment des cortèges pour signifier que la ville est à eux.

Seul le centre de Londres doit faire face à une résistance plus vive. Quelques poches de partisans sont restées en arrière pour tenir le Ministère, garder les prisonniers. Même si l’annonce de la mort d’Harry a miné leur moral, ces hommes et ces femmes se trouvent soudain seuls dans une ville ennemie et cernés de toute part. Leur rage, leur désespoir et leur instinct de survie prennent le pas sur toute préoccupation d’avenir. Ils taillent en pièce les citadins qui tentent d’approcher du Ministère. Mais il ne faut pas longtemps pour que la voix de Londres se fasse entendre. Les habitants, conscients qu’ils ont été libérés, conscients qu’ils ont là une chance de reprendre leur vie en main, laissent s’échapper d’eux toute la frustration, la peur et la haine que la guerre a engendrées en eux. Ils ne peuvent pas prendre le risque de rester inactifs et de laisser à la dictature le temps de se relever. Alors les citoyens de Londres, toujours sans la moindre discussion, se réunissent et marchent ensemble d’un même pas sur le Ministère, comme l’Héritier a marché sur Poudlard quelques heures plus tôt. Les partisans d’Harry ne peuvent pas faire face à un tel nombre. Dans une hystérie collective, les Londoniens s’entretuent lors d’un dernier combat fratricide.

Et c’en est fini.

Le pays saigné à blanc, aussi bien dans sa morale que dans sa chair, a réclamé sa revanche. Sa ration de sang. Toutes les blessures infligées ont été rendues au centuple, et aucun partisan de l’Héritier n’a été épargné. Les livres d’histoire ne retiendront sans doute pas les détails du massacre du Ministère.

A Poudlard, ceux qui se sont rendus ont été enfermés dans les cachots que le combat n’a pas effondrés. Que va-t-on faire d’eux ? Une question dont tous sont conscients, sans oser la formuler. Elle pourrait déclencher l’horreur, la barbarie…

Après la mort d’Harry, on pourrait s’attendre à ce que de telles craintes disparaissent. Mais dans cet instant de flottement, cet interstice entre deux mondes, peut-être la situation n’a-t-elle jamais été aussi sensible. Peut-être n’a-t-on jamais été aussi proche de perdre toute humanité, de céder à la monstruosité qui sommeille en nous depuis la nuit des temps, et que le malheur réveille. Que va-t-on faire des prisonniers ?

L’Ordre du Phénix se réunit en conseil restreint. Parmi les adolescents, seul Albus est autorisé à y assister. Il demeure silencieux la majeure partie du temps. Tout entier habité par son deuil. Par ce qu’il a vu dans les yeux de son père. Tout s’est fini si brusquement qu’il a l’impression qu’on l’a amputé de quelque chose. Une partie de sa vie. Des mots, des émotions qu’il se croyait sur le point de vivre, et qu’on lui a arrachés.

Il est convenu avec une certaine appréhension que les prisonniers seront livrés à un tribunal de guerre, qui ne manquera pas de se former dès que le pays aura retrouvé un peu d’ordre. Les gens ont besoin d’un exutoire. Ils ont besoin d’ériger un bûcher collectif et de s’unir dans la haine de leurs ennemis. C’est terrible. Mais c’est le prix à payer pour espérer asseoir à nouveau un peu de stabilité. L’Ordre du Phénix vient de conquérir une foule qui pour l’instant les tient pour victorieux. Mais la foule est capricieuse. Un mot de trop, une seule contrariété, et ses nerfs mis à vif les massacreront.

La réunion s’attarde ensuite sur des questions plus proches : les morts, les blessés… Neville est mort. Fred et Roxanne, les enfants de George, également. George erre dans un silence inaccessible à tous. Seamus Finnigan a été tué dans des circonstances étranges, alors qu’il tentait visiblement de s’en prendre à Scorpius Malefoy.

Ce nom tire Albus de l’abyme, l’espace de quelques secondes. Apparemment, un des murs du cachot de Scorpius s’est effondré pendant la bataille. L’adolescent était jusqu’ici maintenu à l’isolement, pour entretenir Harry dans l’idée qu’il lui était fidèle… Quoi qu’il en soit, Scorpius s’est échappé pendant la bataille, et, sans baguette, il s’est jeté à mains nues dans les combats. Jusqu’à ce que Seamus, pour des raisons obscures, ne s’en prenne à lui. Scorpius s’est défendu. Il l’a tué.

- Et comment va Scorpius ? demande Albus qui sent la colère renaître en lui.

Etrange, comme ce sentiment devient familier. Il a laissé une trace, un sillon en lui. Il lui est si facile de retrouver le chemin de son cœur, alors que l’issu finale aurait dû le laisser vide.

- Il est grièvement blessé, répond McGonagall. Finnigan lui a jeté… le sortilège du Sectumsempra. Et personne ne l’a soigné avant la fin de la bataille.

Albus visualise les dégâts causés par ce sortilège. Son frère est mort de ce sortilège.

- Pourquoi Finnigan a-t-il…, commence Luna, mais Albus l’interrompt :

- C’est évident, non ? crache-t-il. Il le haïssait ! Ce salaud n’a jamais compris tout ce que Scorpius avait sacrifié pour lui…

Le silence recueille la colère d’Albus. Lui aussi, il fait peur. Il est la victime qui vient de vaincre son bourreau. Qui l’aimait autant qu’il le détestait. Et toute cette haine accumulée, qui maintenant laisse un vide, un vide où l’ombre pourrait s’engouffrer…

- Comment va Rose ? demande Luna à Hermione, de but en blanc. Toujours inconsciente ?

Albus regarde sa tante. L’éclat de verre de Joanna a déchiré son visage de part en part. Elle en gardera la marque pour le restant de sa vie. Il la regarde, et il sait qu’elle sait.

Hermione a un instant de concertation avec son époux. Ron reste abattu et ne murmure à son oreille que des réponses indistinctes. Il n’imagine pas une seule blessure que la vie lui ait épargnée. Lorsqu’enfin Hermione se redresse, elle parle. Elle dit tout. 

L’atmosphère de la pièce semble se refroidir à mesure qu’elle déverse les faits, souligne les liens entre les évènements, les forces de ce monde qui ont travaillé de concert pour les précipiter à la ruine. Albus ne voit plus sa tante, il ne reconnait plus sa voix. Il ne pense qu’au visage de Rose, et à la folie qui a traversé ses traits dans la chambre juste avant qu’il ne l’enferme. Dans sa précipitation, il a verrouillé la porte sans même lui enlever sa baguette. Alors elle a repris ses esprits, elle s’est enfuie, et pendant la bataille…

Rose a tué Harry. Rose a tué l’Héritier. Aux yeux de tous, elle a mis fin à la guerre. Rose est la nouvelle Elue. Et dans le cœur d’Albus, une lance incandescente arrache des larmes de ses yeux, détruit tout ce qui reste de raison en lui, tout ce qui a un jour été pur, heureux et bon, tout ce qui aurait pu renaître.

Car Rose a tué sa famille. Rose a tué Harry. Et Albus n’existe plus.

Ce n’est pas possible. Il connait la vérité, mais il ne peut pas l’accepter, il n’en a pas la force. Il ne peut pas vivre dans un monde où sa vie se révèle être un vaste mensonge. Il a vécu à côté d’un monstre, toute sa vie. Il l’a aimée. Et pourtant, il n’a rien vu.

A mesure que la réalité s’abat sur lui, le désespoir sans fond qu’elle creuse se change en fureur, face à tant d’injustice, d’absurdité, d’ironie.

Autour de lui, l’Ordre du Phénix bruisse : eux aussi commencent tout juste à comprendre à quel point leur combat a été vide de sens. Une enfant ! Une enfant de quinze ans a fait basculer leur monde ! Comment leur société, leur civilisation a-t-elle pu être aussi fragile ? Guère plus qu’une flamme entourée de néant, que l’on peut souffler ou attiser, pour détruire ou ensevelir. Comment ont-ils tous pu courir, se précipiter vers la folie ? Sans même réfléchir… Quel est ce désir en eux qui les amène à se trahir ?

Telles sont les premières pensées de l’Ordre. Mais très vite, la stupéfaction, l’incrédulité, l’absurdité ! de cette guerre les jettent sur un autre chemin. Le même, celui que la guerre a tracé pour eux et qu’ils ont l’habitude d’emprunter : la colère.

- Il faut dire la vérité aux gens ! s’écrie George.

- Ils la massacreront…, se défend Hermione.

- Elle a déclenché une guerre ! Ta gamine est une psychopathe ! Elle a tué ma sœur, elle a tué nos neveux et nièces, elle a conduit Harry jusqu’à la folie et elle a trouvé le moyen de le tuer, lui aussi ! Mes enfants sont morts à cause d’elle !

- Ne dis pas ça…

- C’est la vérité !

- C’est ta colère qui parle…

- C’est tout ce qu’elle mérite ! Le monde a le droit de connaitre la vérité ! Il faut la livrer au tribunal !

- Non ! crie Hermione.

Albus sent un tremblement parcourir tous ses membres. Il se lève brusquement, et tous se taisent. Albus s’avance vers sa tante. Il ne sait pas ce qu’il ressent. Il n’existe plus, il est une autre personne. L’adolescent qu’il a été est mort dans les bras de son père vingt-quatre heures plus tôt. Albus est devenu autre chose. Une créature qui dicte ses gestes, qui n’a plus de cœur à force de blessures, qui ne ressent que cette volonté terrible, à la fois froide et brûlante, immobile et destructrice.

- Comment peux-tu la défendre ? articule-t-il.

Hermione ne peut retenir un sanglot, et des larmes dégoulinent sur ses joues :

- C’est ma fille…

Ses yeux implorent : « Pardonne-moi ». Le pardon ne signifie plus rien pour Albus.   

- Après tout ce qu’elle a fait… Qu’est-ce que tu voudrais, qu’elle reste en vie ?

- C’est une petite fille ! Une petite fille malade ! Elle n’avait que quinze ans au moment des faits…

- Regarde ce qu’elle a été capable de planifier !

- Elle n’avait pas voulu tout ça…

- Mais c’est arrivé !

Albus sent soudain l’air lui manquer. Toute vie se retire de lui lorsque la vengeance le possède :

- George a raison, dit-il. Il faut la tuer.

Hermione le regarde comme si elle ne le reconnaissait plus :

- Tu ne peux pas dire ça…

- Regarde ce qu’elle m’a fait, Hermione ! Ce qu’elle t’a fait à toi !

Hermione se lève de sa chaise. Elle contemple les visages de l’Ordre : ses amis, sa famille, les uns après les autres. Elle murmure :

- Je vous en prie, ne tuez pas ma petite fille… C’est une enfant. Elle ne mérite pas que nous déversions notre folie sur elle.

- Nous devrons dire la vérité, Hermione, dit McGonagall à regret.

Sa propre pitié semble dépasser la vieille femme :

- La question du meurtre de la famille d’Harry reste en suspens. L’élément déclencheur de cette guerre. Le peuple va réclamer des réponses.

- Il en a déjà.

Tous se tournent vers Ron, dont la voix rocailleuse semble surgir d’outre-tombe. Il relève à peine les yeux pour parler. Ses prunelles glissent sur Albus avant de s’enfuir, comme si sa vision leur était interdite. Il sait qu’après ce qu’il s’apprête à dire, il sera condamné :

- Dans un communiqué public, Harry a déclaré que Kingsley était responsable de la libération des Mangemorts et de l’assassinat de sa famille, déclare-t-il malgré tout.

- Mais enfin, nous savons tous que c’est faux ! s’écrie Arthur Weasley.

- Evidemment, que c’est faux. Grâce à Malefoy, nous savons que les preuves désignent Lewison comme coupable, pour ce qui est des Mangemorts. Mais nous avons repris le Ministère. Les preuves, c’est nous qui les avons en notre possession. Personne n’a besoin de les rendre publiques.

Albus sent le venin se solidifier dans ses veines à mesure qu’il écoute :

- Qu’est-ce que tu suggères, exactement ?

- De ne pas démentir la version d’Harry.

De nouveau des murmures, mais Ron est lancé. Il a perçu le regard désespéré qu’Hermione lui a adressé. C’est leur unique chance de sauver leur fille :

- La situation dans laquelle nous sommes est fragile, énonce-t-il d’une voix blanche. Le peuple a été ébranlé dans la moindre de ses conceptions. Il n’a plus confiance en personne. Nous venons de lui offrir une victoire, une délivrance inespérée. Si nous changeons encore une fois la version des évènements telle qu’on la leur a racontée, la version qu’on leur a appris à croire… Ils se mettront en colère. Ils ne sauront plus qui croire, ni vers qui se tourner. Ils tailleront Rose en pièces, et ensuite, ils risquent de se retourner contre nous. Il y aura des luttes de pouvoir. Ce sera l’anarchie. Encore pire que tout ce qu’on a connu. Les « vainqueurs » se dévoreront entre eux.

- Tout cela, ce ne sont que des mots ! crache Albus. Tu ne peux pas être sûr que les choses se passeront ainsi !

- Je le sais, le coupe simplement Ron.

Il y a toute la lassitude du monde dans sa voix. Il n’est qu’une poupée de chair ballotée par les flots.

- Laissons au peuple un semblant de stabilité, soupire-t-il. Si nous révélons au monde que Rose est à l’origine de la guerre… Ce sera trop absurde. Trop invraisemblable. Les gens comprendront la fragilité de leur existence, la facilité avec laquelle leur vie a été balayée, la vacuité de cette guerre. Comment croyez-vous qu’ils réagiront face à une telle vérité ? Ils se mettront en colère. Ils massacreront Rose. Alors certes, tous, tous connaitront la vérité. Mais en la révélant, nous aurons fait plus de mal qu’il n’était possible d’en faire.

- C’est n’importe quoi ! Tu…

- Laisse-moi finir Albus, s’il te plait.

- Tu prends les gens pour des idiots ! Tu présumes de leurs réactions alors que tu ne sais pas, personne ne peut savoir comment ils réagiront ! Tu crois les gens trop stupides pour se maitriser et réfléchir ! Tu les crois trop stupides pour comprendre comment les choses se sont passées ! Ce n’est pas une horde de moutons, ce sont des êtres doués de raison ! Ils ont le droit de savoir ! Nous le leur devons à eux, nous le devons aux victimes ! 

Ron se résout enfin à le regarder en face. Il sait qu’entre lui et son neveu, la fracture est définitive :

- Regarde ce que ce monde est devenu, en seulement deux ans, Albus. Tu veux vraiment placer ta confiance en l’esprit humain ?

Albus se met à haleter de plus en plus vite. Sa bouche desséchée par la colère, il repasse ses pensées en boucle, et toutes ricochent contre les murs de son esprit, incapables d’être formulées :

- Vous n’allez pas croire ça ! hurle-t-il. Vous n’allez pas vous rallier à lui !

- Si nous maintenons Kingsley dans le rôle du coupable, nous maintiendrons une vérité dans le cœur des gens, insiste Ron. Une base de stabilité, pour qu’ils nous fassent à nouveau confiance et que nous puissions nous remettre.

- Et que faire de Rose ? intervient McGonagall.

- Nous n’avons qu’à l’enfermer quelque part. A Azkaban, à Sainte-Mangouste, peu importe. Je suis d’accord avec vous, il faut qu’elle soit punie. Mais pas sacrifiée sur l’autel de la barbarie. En plus…

Ron prend une profonde inspiration. Il n’arrive pas à croire qu’il va dire ces mots. Il a la sensation de se damner :

- Rose a tué Harry. Elle a tué l’Héritier. Cela fait d’elle la sauveuse du monde sorcier.

Un silence stupéfait suit ces paroles. Ron s’engouffre dans la brèche, dans l’abyme, il se hait pour chaque mot qu’il prononce :

- La nouvelle s’est déjà répandue à travers le pays. Aux yeux de tous, Rose est une héroïne. Nous ne pouvons pas la détrôner maintenant. Nous ne pouvons pas leur prendre ça. Vous pouvez être sûrs qu’ils se retourneraient contre nous… Mais surtout, nous devons tourner les choses à notre avantage. Jouer la carte de la jeune héroïne à fond. Nous pouvons utiliser l’image de Rose pour consolider ce pays…

- Comment oses-tu…

Ron ne laisse pas George finir :

- Elle pourrait être la figure autour de laquelle le peuple aurait envie de se reconstruire ! Elle pourrait incarner l’élan qu’il leur faut pour rebâtir une société saine ! Une héroïne jeune, courageuse, qui a sacrifié un membre de sa famille au nom de la liberté !

Les mots prennent un goût ignoble dans sa bouche…

- Il suffirait de dire qu’elle est devenue folle. Que tous ces évènements ont eu raison de son esprit, et qu’il a fallu l’enfermer pour son propre bien. Et voilà, vous avez une martyre. Le peuple se prendra de passion pour elle. Il honorera son sacrifice à elle, et il donnera le meilleur de lui-même pour que plus jamais de telles horreurs ne soient perpétrées.

Ron se tait. Il peut sentir la stupeur céder la place au dégoût autour de lui. Alors il se lève, le dos bien droit, et il prend place aux côtés de sa femme :

- Tel est le prix de la paix, dit-il simplement.

 - C’était ton ami…, murmure Albus après un long silence. Kingsley était ton ami. Et tu es prêt à salir sa mémoire à tout jamais ? A le faire passer pour un traître dans les livres d’histoire ? Tu veux que tes enfants apprennent à le haïr à l’école ? C’est ça que vous êtes prêts à accepter ?

- Qu’avez-vous à proposer, Potter ?

La voix chevrotante de McGonagall le cloue sur place. Elle le regarde depuis le bureau de la directrice, sans l’éviter, ses yeux fatigués remplis de larmes qui ne couleront jamais. Elle doit lutter contre sa propre nature, tout ce qu’il y a de moral en elle, pour reprendre la parole :

- Une enfant livrée au bûcher public ? Une exécution hystérique, la perte du peu de confiance que le peuple nous accorde ? Notre pays livré au chaos, encore une fois ? Ou laisser libre cours au mensonge, commettre il est vrai un dernier parjure en ce monde… et lui permettre de renaître ?

- Je propose la vérité, répond Albus d’une voix sèche. La vérité n’a plus cours dans ce pays depuis plus de deux ans.

- Potter… Parfois la vérité peut causer plus de mal que de bien.

- Mais ce n’est pas à nous d’en juger ! Qui sommes-nous pour décider de taire la vérité ?

- C’est votre colère qui parle. Vous voulez votre vengeance contre Rose. Dites-moi Potter, est-ce que ça changera quoi que ce soit à ce qui s’est passé ?

Albus n’en peut plus. Les derniers liens qui l’enchaînaient à ces gens se brisent. Il lance un dernier regard à Ron et Hermione, et ne ressent que de la haine. Il claque la porte du bureau de McGonagall.

Sans réfléchir à l’endroit où il va, il descend les étages, des marches, toujours plus de marches, dans la poussière, l’obscurité et le froid. La bataille n’a laissé derrière elle qu’un champ de ruines. Il chemine au milieu des gravats, l’atmosphère d’apocalypse alimentant le vide en lui, plus que jamais conscient d’être seul et d’avoir tout perdu.

Qui devient-on, lorsqu’on a tout perdu ? Un trou noir, un vaste néant dans la masse des hommes ? Attirons-nous les autres aux frontières de notre vide ? Détruisons-nous chaque lumière, pour n’en laisser échapper aucune ? Est-ce cela qui est arrivé à Harry ? Et à Rose…

Rose est née ainsi. Une déchirure dans le tissu du monde. Son abyme en a créé un autre : celui d’Albus, et il va la détruire aujourd’hui.

Albus s’arrête devant le cachot où on a enfermé Rose. Deux hommes montent la garde, sans qu’on leur ait expliqué pourquoi.

- Laissez-moi passer, leur ordonne-t-il.

- M. Weasley a dit que nous ne devions laisser entrer personne…

Albus fixe sur eux son regard de reptile. Il leur laisse le temps de s’attarder sur chaque détail, d’évaluer qui il est.

- Laissez-moi passer, répète-t-il.

Les deux hommes échangent un regard. Ils déverrouillent la porte et Albus entre.

Rose est recroquevillée dans un coin de la pièce vide, elle ne dort plus. Une torche accrochée au mur lui tient lieu de lumière. Elle relève les yeux sur Albus, et son visage s’éclaire. Albus se jette sur elle :

- Pourquoi tu as fait ça ? crie-t-il.

Un autre dirige ses gestes, il n’a plus conscience de rien, si ce n’est de cette terrible souffrance au fond de lui, cette chose monstrueuse qu’il est contraint d’abriter. Ses doigts se referment autour de cou de Rose et commencent à serrer :

- Tu as tué ma famille ! Tu as tué mon père ! Tout était de ta faute, comment est-ce possible ? Comment ai-je pu être aveugle à ce point ?

Il la plaque contre la pierre et Rose ferme les yeux de douleur. Elle ne se défend pas. Deux petites larmes naissent à ses pointes lacrymales, suivent la courbe de ses joues et soulignent un sourire à peine esquissé.

Albus éclate en sanglots. Il la rejette sur le sol et la garde en respect du bout de sa baguette :

- Je t’aimais, s’avoue-t-il à mi-voix. Pas comme toi, pas à ta manière de tarée, mais… Je t’aimais.

- Je t’aime, répond-elle.

Ces mots allument un incendie dans l’esprit d’Albus. Rose le regarde fixement, les yeux écarquillés par sa folie qui ne l’a pas quittée. Ce fanatisme qui l’a conduite vers ses crimes. Elle tend la main sans oser le toucher, et son bras retombe mollement. Elle est heureuse. Il le voit sur son visage. Heureuse à la simple idée de le voir, de lui parler, d’avoir senti ses mains sur son corps. Elle n’a pas la moindre conscience de ce qu’elle a fait.

Agenouillé dans ce cachot humide, Albus voit Rose pour la première fois de sa vie. Une créature recroquevillée qui ne vit que pour lui. Elle n’a aucun remord. Elle n’en est pas capable. Elle ne mesure pas le mal qu’elle a fait.

Albus regarde Rose, et il voit sa famille massacrée. Il voit son père s’écrouler à ses pieds. Il revoit ces deux années de malheur, d’horreur, de guerre, de deuil, de solitude. Il voit l’enfant qu’il a été, l’homme qu’il aurait pu devenir, mais qu’il ne sera jamais. Il voit tout ce qu’elle lui a pris.

Ses doigts se resserrent autour du manche de sa baguette, il lève la main, et son bras se met à trembler.

- Vas-y, murmure Rose, avec cet ignoble sourire triste et serein. Je préfère que ce soit toi qui le fasses. A défaut d’être aimée, je veux mourir de ta main.

Elle plonge ses prunelles dilatées dans les siennes :

- Nous sommes liés toi et moi.

Pendant une seconde, Albus s’imagine la scène. La sensation de la mort quittant ses lèvres pour frapper ce corps en face de lui. La vengeance, enfin. Il pointe sa baguette sur le cœur de Rose. Et alors, Albus le voit. L’abyme.

Que celui qui combat les monstres prenne garde dans sa guerre à ne pas devenir un monstre lui-même. A force de plonger trop longtemps votre regard dans l’abyme, c’est l’abyme qui entre en vous.

A cet instant précis, Albus voit l’abyme, il sent l’abyme en lui. Tant de souffrance et de mort, un gouffre béant qui ne demande qu’à l’avaler. Albus regarde dans les yeux de Rose : il y voit la folie, et il y voit son reflet. Le reflet de son père. L’instant où son père a basculé.

Albus sent son souffle se calmer. Quelque chose en lui se calme. Il aperçoit la mort, il saisit l’instant, et il le laisse passer. Il cesse de trembler.

Albus recule lentement avant de se relever, sous le regard de Rose qui ne comprend pas ce qui se passe.

- Va en Enfer, murmure-t-il.

Il frappe à la porte du cachot et la referme derrière lui. Il entend Rose hurler. Il laisse sa folie derrière lui.

XXX

Dans les semaines qui suivent, la situation se rétablit avec un ordre surprenant. Une fois le Ministère définitivement repris, McGonagall s’assure que les preuves concernant Lewison et les Mangemorts soient falsifiées ou détruites. On réécrit l’histoire. Kingsley Shacklebolt devient le traître qui a trahi son pays.

Seuls les membres qui ont assisté à la réunion à Poudlard sont au courant de la vérité, et personne d’autre ne l’apprendra après eux. Ce mensonge que la raison leur impose, c’est pire qu’une défaite. C’est le coup de grâce d’une vie qui s’est acharnée à détruire toutes leurs illusions. Complices de ce mensonge, ils se sentent sales, aussi souillés que les hommes qu’ils ont combattus, aussi coupables qu’eux. Le mensonge envahit tout. Même la victoire prend un goût de cendre dans leur bouche.

Une question demeurée en suspens trouve bientôt sa solution : où enterrer le corps d’Harry ? Pour couper court aux débats, Ron suggère de l’inhumer à Poudlard. Il en est décidé ainsi. Harry James Potter, l’Héritier et l’Elu, le sauveur et la folie du monde sorcier, est enterré à plusieurs dizaines de mètres sous terre, dans un boyau inaccessible sous les entrailles de la forteresse, pour que tous se souviennent, et pour que jamais sa tombe ne devienne un objet de haine ou de vénération.

La cérémonie est brève et discrète. A son retour à Londres, Ron est porté en triomphe par une foule en liesse. La suite des évènements ne dépend pas de lui. La foule contrôle tout. La foule fait de lui son chef, et il serait imprudent de sa part de refuser.

Contre sa volonté, Ron devient Ministre de la Magie. C’est un homme brisé. Il a perdu plus de membres de sa famille qu’il ne peut en compter. Certains sont morts. D’autres, comme George, l’ont renié à la suite de ses prises de position. La famille Weasley est déchirée. Ron doit vivre en étant le père de Rose. Le père de la guerre. Il porte en lui un poids qu’il ne pourra jamais révéler à la surface du monde. Même le mensonge, il l’a initié. Il enveloppe chaque instant de sa vie comme un voile putride. Et pourtant, Ron devient Ministre de la Magie.

A partir de ce jour, il se tient droit. Il fait partie de ces êtres à qui la souffrance confère une dignité magnifique. Aussi fort à l’extérieur qu’il est vide à l’intérieur. Ron ne laisse jamais paraître à quel point il est vide. Il fait ce qu’il faut pour rétablir le pays. Après ce qui est arrivé… c’est son devoir. Et sa seule raison de vivre.

Hermione l’assiste dans cette tâche, sans jamais faillir. Même lorsque George Weasley finit par se suicider trois ans après la fin de la guerre.

Rose est internée dans un quartier de haute sécurité spécialement édifié pour elle à Sainte Mangouste. Tout contact humain lui est interdit. Les journaux parlent de folie, de tragédie : une enfant dépassée par les horreurs de la guerre. Aux yeux du monde extérieur, Rose devient l’héroïne que son père avait prédit. Les choses rentrent dans l’ordre.

La vie reprend son cours, sauf pour ces quelques personnes qui ont vendu leur âme au nom d’une paix durable. Personne n’a revu Albus depuis la réunion de Poudlard.

XXX

Neuf ans après la fin de la guerre, Albus marche le long du rivage salé, pieds nus dans l’océan tiède. Les vagues se précipitent à sa rencontre comme un vieil ami, au rythme lent de la terre et des courants. Il est très tôt. Le Soleil n’est pas encore levé.

Albus quitte la plage pour remonter le chemin qui mène au plateau, tout en haut de la colline. C’est une longue marche. Tant mieux.

Quelques étoiles brillent encore au-dessus de lui, si vives de ce côté du globe. La nature bruisse de sons rassurants. Albus écoute le monde respirer sans penser à rien, envahi par ce sentiment d’être infiniment petit dans l’infiniment grand. Il règne un calme profond en lui. Un calme de pierre, un lac dont rien ne peut ébranler la surface. Albus a trouvé cet équilibre que rien ne peut déborder. Il y a eu un monstre en lui, il le sait. Ce monstre, il l’a abandonné dans une cellule de Poudlard alors qu’il était enfant.

Albus a vingt-quatre ans à présent. Il a quitté l’Angleterre sans un regard en arrière, sans un adieu pour personne, sans argent, sans avenir et sans rien, à vrai dire. Pendant cinq ans, il a sillonné le monde. Le temps de dompter cet abyme qu’il a vu en lui. Le temps de se comprendre, de s’apprivoiser. De trouver des réponses à ses questions, et d’accepter celles qu’il ne connaitra jamais. Le temps de faire son deuil.

Pour son père, sa mère, son frère et sa sœur, et tous ceux qu’il a perdu. Pour Rose. Pour lui.

La vie a marqué Albus de bien des façons. Elle a taillé son âme au scalpel pour en faire l’homme qu’il est devenu aujourd’hui. Et même s’il n’en porte aucune cicatrice, c’est un regard terrible de maturité qu’Albus porte à présent sur le monde. Un regard de vieil homme. Le genre de sagesse qui ne s’acquiert pas naturellement, mais au gré des épreuves. 

Pendant longtemps, il a cru que seul le vide lui serait possible. Et puis le monde l’a rempli. Albus a voyagé, et il a vu tant de choses différentes de lui. Tant de choses semblables. Tant de beauté, et tant de mal. Il a élargi sa vision. Albus a vu la vie.

Un beau jour, il a posé ses valises en Nouvelle-Zélande, et il a décidé de ne plus en repartir. Cette terre l’a séduit. Elle a réveillé en lui la sensibilité qu’il croyait avoir éteinte, qu’il croyait ne plus pouvoir endurer. Albus est devenu écrivain. Il écrit pour que ses mots trouvent le cœur des hommes et y tracent la voie du bien. Il a rencontré une fille qui ne l’aimait ni pour son nom ni pour son passé, mais pour la beauté qui avait su renaître en lui. Cela a pris du temps, mais un jour, il n’a plus eu peur de l’aimer lui aussi.

Albus arrive enfin au plateau qui domine le paysage. A ses pieds, l’océan s’abat sur les falaises avec fracas. Sa maison se tient là, à la frontière de l’horizon. Il pénètre dans les pièces silencieuses, savourant leur odeur familière, la sensation bienveillante d’amour et de sécurité qui l’entoure. Du fond de son berceau, un petit garçon au teint mat, les cheveux ébouriffés, les yeux verts, grands ouverts, le regarde.

Albus prend son fils dans ses bras et sort sur la terrasse. Ça y est, le soleil s’est levé. Emerveillé et intimidé par le silence autour de lui, le petit garçon n’ose pas faire un geste. Albus respire son odeur de savon et de caramel. Il s’assoit dans une chaise à bascule, et tous deux contemplent le lever du jour, incroyable, aux confins de la Terre, avec la sensation d’assister au premier matin du monde. 

Il y a un bruit sur la terrasse à côté d’Albus. Un homme tire une chaise et s’assoit sans le regarder. Albus ne le regarde pas non plus. Son fils s’est rendormi. Quelques minutes s’écoulent, assez pour que les rayons du Soleil viennent réchauffer leur peau. Alors l’homme dit :

- J’ai eu du mal à te retrouver, tu sais.

Albus sourit :

- Je suis étonné que tu y sois parvenu.

Ils ne disent rien, à nouveau, pendant plusieurs minutes. C’est au tour d’Albus de parler :

- Comment vas-tu, Scorpius ?

Scorpius Malefoy tourne vers lui son regard amputé. Un seul œil gris brille d’un éclat translucide, parcouru d’émeraude, dans son visage. Son autre œil est livré à l’obscurité d’un bandeau, qui ne suffit pas à masquer l’étendue de ses plaies. Le côté gauche de son visage n’est qu’un réseau de lignes blanchâtres entrecroisées, qui ont fondu ses traits. En comparaison, la partie intacte de son visage ressort par sa pâleur, son aspect lisse, sa beauté. Scorpius voit qu’Albus l’étudie : il ne s’en formalise pas. Le climat chaud à cette époque de l’année aurait dû le contraindre à adopter des vêtements légers, pourtant Scorpius est emmitouflé dans une cape qui ne dévoile pas un centimètre de son corps. Seules ses mains, longues et fines, apparaissent sous le vêtement. Il a perdu les deux derniers doigts de sa main gauche.

- Je vais bien, répond-il sobrement.

Albus baisse les yeux. Il sait ce qu’il doit dire.

- Je suis désolé, murmure-t-il. Je n’ai jamais pris la peine de savoir… ce qui t’était arrivé.

Scorpius sourit doucement. Il rapproche sa chaise d’Albus, s’exposant davantage à la lumière. Il tend sa main intacte et caresse doucement la joue de l’enfant endormi :

- Tu n’as pas à t’excuser, dit-il. Tu as pété les plombs. N’importe qui l’aurait fait, bien plus tôt que toi. Comment s’appelle-t-il ?

- Nathaniel.

Le sourire de Scorpius se fait plus franc. Etonnamment, alors qu’il le saisit là dans la pureté de l’instant, Albus trouve que ses blessures le magnifient.

- Tu as enfin rompu la tradition des noms de défunts. Dieu merci.

Albus est secoué d’un petit rire :

- Oui, je crois que ça vaut mieux pour lui.

Puis, plus sérieusement :

- Et tes parents ?

Scorpius le rassure tout de suite :

- Ils n’ont rien eu. Mon père a été retrouvé vivant dans une cellule improvisée, au Ministère. Il n’était même pas blessé. Ma mère était maintenue à l’isolement dans une pièce au cinquième étage, mais pareil, elle n’a pas été torturée.

Albus laisse échapper un soupir :

- Je suis soulagé… Je sais que tu ne me croiras peut-être pas, mais… J’y ai beaucoup pensé. Ces dernières années.

- Pas assez pour te donner envie de revenir, apparemment.

Ça y est, ils y sont.

- C’est pour ça que tu es là ?

- Entre autre. Je suis aussi venu pour revoir ta sale gueule, et te faire réaliser ta laideur, Potter.

Albus sourit :

- Tu n’as pas changé.

- Si, j’ai changé. En bien.

Sous la lumière chaude de cette terre magique, au bout du monde, Albus examine les traits de son ami, le regarde vraiment. Il voit beaucoup de souffrance. Des blessures externes qui lui rappelleront toujours ce qu’il a vécu. Des traumatismes pires encore, parce qu’ils sont intérieurs, et qu’ils ne guériront jamais totalement. Peut-être Scorpius s’habillera-t-il toujours de noir de la tête au pied pour le restant de sa vie. Peut-être ne supportera-t-il plus jamais de découvrir sa peau et son bras marqué au regard d’un étranger. Mais au fond de son œil unique, magnifique, Albus perçoit un écho de cette paix inébranlable qui l’habite. Cette sérénité profonde que nous passons notre vie à rechercher, et que si peu d’entre nous trouvent.

- Oui, tu as changé, murmure-t-il.

Il lui saisit le bras, ému jusqu’aux larmes par l’amitié qui le submerge soudain :

- Regarde-nous. On a réussi.

- On a réussi.

Scorpius lui sourit :

- Tu dois rentrer maintenant, Albus.

- Je savais que tu allais me demander ça…

- Il y a certaines choses qui ne méritent pas d’être brisées. Certaines choses qu’il faut réparer.

- Ma vie est ici maintenant.

- Oui, et c’est une très belle vie.

Scorpius caresse le bébé du regard.

- Mais certaines personnes sont encore prisonnières du passé à cause de toi. Délivre-les. Nous avons tous suffisamment souffert.

- Je vais y réfléchir.

Scorpius acquiesce.

Deux jours plus tard, Albus embrasse son fils à l’aéroport et prend l’avion pour Londres. Pour la première fois en neuf ans, il retourne sur sa terre natale. Il n’a pas prévu de rester plus d’une semaine.

Arrivé à destination, il laisse Scorpius le conduire jusqu’au Ministère de la Magie en plein cœur de la capitale. Londres s’est reconstruite. La ville respire la vie, même si elle repose sur un mensonge qui pue la mort et le sang. Albus laisse ces impressions couler en lui, glisser sans l’atteindre. De rancœur, il n’en a plus aucune. Son ancien moi s’est détaché de lui. Il n’est plus cet enfant effrayé, mort de colère et de deuil, qui a tout quitté à même pas seize ans.

Albus gravit les escaliers qu’il se rappelle avoir foulé aux côtés de son père des années auparavant. Malgré lui, son passé lui saute à la gorge. Il se maîtrise avec le calme dont il a toujours fait preuve. On ne l’introduit pas dans les espaces officiels, mais dans un petit salon à usage privé, dans une partie discrète et reculée du bâtiment. La porte s’ouvre sur un feu ronflant dans une cheminée, un tapis de soie rouge, et un couple blotti l’un contre l’autre dans l’attente terrible de ce moment.

Ron et Hermione le contemplent. Il fait quelques pas vers eux, leur ouvre les bras, et ils se trouvent réunis par ce simple geste, dans la douleur, la joie, l’amour et les larmes, le présent qui rencontre le passé pour enfin s’en guérir.

Albus accepte de revenir pour le réveillon de Noël qui s’annonce imminent. Il amènera sa femme et son fils pour que sa famille les rencontre.

Dans les années qui suivent, les liens rompus se renouent. Lentement mais sûrement, les dernières particules de la guerre s’évacuent de leurs corps et de leurs esprits. Albus ne mit jamais les pieds à l’hôpital Sainte Mangouste.

Tout au long de sa vie, il garda en mémoire l’image de son père revenant à la raison, lui disant qu’il l’aimait. Il rencontra bien des gens qui lui posèrent cette question : « Votre père était-il un homme de bien ? Ou n’y avait-il rien de bon en lui ? »

A cette question, Albus ne saurait apporter de réponse. Il ignore si Harry James Potter a davantage été l’Elu, le sauveur du monde sorcier, ou l’Héritier de tout ce qu’il avait juré de combattre.

Aussi, à cette question, Albus donne-t-il toujours la même réponse :

« C’était mon père. »

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Et voilà, cette histoire est désormais terminée ! J'espère qu'elle vous a plu ! J'ai essayé d'imaginer une descente aux Enfers qui amènerait Harry à devenir très exactement tout ce qu'il avait combattu étant adolescent (une histoire un peu à la Anakin Skywalker en somme). J'espère avoir réussi =)

Laissez-moi un petit mot pour me dire ce que vous en avez pensé : c'est la meilleure récompense pour un auteur =)

Je tiens également à vous dire que si vous aimez ce que je fais, mon premier roman papier, Ezéchiel, est paru aux éditions Edelweiss le 27 janvier 2021 ! 

C'est un roman psychologique qui parle de la frontière entre le rêve et la réalité, et de la façon dont notre subconscient peut nous manipuler. Avec une jolie romance en prime ! ;D

N'hésitez pas à jeter un coup d'œil aux premiers chapitres que j'ai gratuitement mis en ligne sur ce site si vous souhaitez vous en faire une idée, et à en parler autour de vous pour me soutenir dans mon travail et m'encourager !

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Il est également disponible en version numérique sur toutes les plateformes dédiées. 

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Nat'

 

 

 

 
 
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