Les trios de patrouilleurs passèrent à des messagers en binômes. Tel les cavaliers du pony express de l'ouest américain, ils filaient ventre à terre dans toutes les directions du département. Henri leur avait remis des messages d'informations et de propositions d'alliance.
De nombreux échanges avaient déjà eu lieu entre la Hunaudaye et le Fort la Latte. Il se comptait déjà une bonne dizaine de châteaux, d'écoles clôturées, de centre pénitentiaires(dont les deux de Rennes), d'Abbaye, etc, à les avoir rejoint. Pour se reconnaître, les messagers de tous les groupes eurent l'idée de porter sur la poitrine les armes, le blason, du château où ils vivaient. Quant à ceux qui habitaient dans des lieux plus ordinaires, ils s'étaient inventés leurs propres blasons.
Avec ces échanges pour contre-attaquer les Parisiens, ils multiplièrent les trocs et les liens amicaux. Quelques chefs s'étaient déjà retrouvés au Fort la Latte. Cela leur donna de nombreuses idées d'installations pour leurs propres châteaux.
Petit à petit, après un mois, une petite troupe de combattants avait été créée. Ce fut le chef des guerriers de la prison masculine de Rennes, Patrick, un commandant de l'Armée de l'Air qui fut désigné chef de la troupe. Il était arrivé là car il était en permission en Bretagne au moment de l'épidémie.
Il entraînait ses nouvelles troupes à lui obéir et à obéir à leurs propres capitaines ainsi qu'il les avait désignés. Beaucoup d'adolescents, dont Svein, et de femmes faisaient partie des combattants. Romain avait été promu Sergent ainsi que Manue. Tous les "sanctuaires" réunis représentaient une bonne soixantaine de personnes. Patrick et certains des guerriers de Rennes avaient fait le tour des environs pour trouver des grenades et des mines pour se débarrasser du tank, en vain.
Alors, Emmanuelle proposa qu'une petite section soit envoyée à Brest afin d'aller chercher de l'armement plus conséquent. Suite à sa proposition, il fut décidé d'y envoyer Romain et son groupe, et leur Commandant lui adjoignit plusieurs de ses propres hommes à son petit groupe de trois patrouilleurs. Un jeune originaire de la ville, Kevin, leur servirait de guide.
C'est ainsi que presque deux mois après avoir rencontré le chef de Rennes, Rodolphe, Romain, Svein, Kevin et huit autres hommes partirent pour Brest avec le Land Cruiser et une jeep. Il leur fallut toute la matinée pour arriver sur les lieux, ils étaient passés par Guipavas. Plus ils approchèrent de la ville plus il y avait de mordeurs et en longeant le port vers l'Ouest, c'était des militaires, des marins qui étaient les plus nombreux. Ils firent demi-tour et s'éloignèrent vers l'Est. Ils descendirent des voitures et posèrent leur carte d'état-major sur le capot du Land-Cruiser.
"Bon, les gars, la plupart des mordeurs sont en état de décomposition si avancée qu'ils ne représentent pas tellement de danger car même leurs mâchoires sont tombées si vous avez bien vu.
- Oui, un bon paquet n'ont plus de bras ! Intervint le Caporal Chappe.
- Le seul problème c'est la quantité, le nombre fait que ceux qui représentent un réel danger seront aidés par la masse des autres.
- J'ai vu les premiers bateaux militaires ! Dit Rodolphe.
- Oui, le problème c'est qu'il risque d'y avoir du monde tant dans les navires que dans les bâtiments. Vous savez quoi, les gars ?
- Non, Sergent ! Dirent-ils tous en chœur.
- Je crains que la mission dure plusieurs jours et que certains d'entre-nous n'en sortiront pas vivants. Vous connaissez la chaîne de commandement si je meurs, hein !?
- Oui, Sergent !
- Bon, je propose qu'on aille plutôt vers un quai de plaisance. On va se prendre un ou deux bateaux-moteurs et voir comment s'approcher des quais militaires. On va les prendre ici à la Marina du Château et descendre vers l'ouest."
Sans barguigner, ils repartirent et allèrent au port de plaisance. Romain divisa l'équipe en deux et prit trois soldats de Rennes avec lui pour aller à la Capitainerie. Pendant que le Caporal emmenait cinq de ses hommes et irait contrôler les loueurs. Tous, ils prirent la totalité des clefs qu'ils trouvèrent et essayèrent de faire fonctionner les bateaux un à un. Soudain, une grosse pétarade se fit entendre. Rodolphe avait réussi à faire démarrer un yacht qui se trouvait en bout de ponton.
Ils se précipitèrent tous rapidement vers le bateau car, déjà, les bruits qu'ils avaient fait avaient attirés une grosse quantité de mordeurs, et enlevèrent l'amarre. Sans le montrer, Romain éprouva un grand soulagement à ce que l'ensemble de sa section soit intacte. Kevin, qui apparemment connaissait bien la plaisance, pilotait le yacht.
Ce fut le plus bruyamment possible que le navire de plaisance prit la route de l'ouest. Ils virent à tribord de plus en plus de mordeurs s'amonceler sur les bords des quais et tomber à l'eau en masse. Les visages des soldats s'éclairaient de grands sourires.
"Tu vois Romain, encore une autre méthode pour se débarrasser des mordeurs. Les crabes, les poissons et les vers vont faire bombance." Dit Rodolphe
Un grand éclat de rire général envahit le bateau. Ils continuèrent leur avancée vers le port militaire. Ils virent les premiers navires militaires des frégates et des patrouilleurs principalement. Et toujours autant de mordeurs s'agglutinaient sur les quais. Plusieurs fois, Kevin essaya de s'approcher d'un escalier de quai mais la quantité de mordeurs rendait la manœuvre impossible à effectuer.
Les bras croisés, puis une main sur la bouche, Romain réfléchissait à la meilleure méthode pour approcher des bâtiments, qu'ils soient nautiques ou terrestres. Il n'était pas question de repartir bredouille, l'ensemble des alliés avait besoin d'armement lourd face au tank des Parisiens. Surtout que des espions avaient détecté qu'ils possédaient aussi des bazookas et des mortiers. Le Chef de la Hunaudaye s'étonna même qu'ils ne les aient pas utilisés contre son château et ses alliés opinèrent à ses dires.
"Kevin, continue vers l'Ouest. On va voir s'il y a moyen par là !"
Ils virent qu'il y avait une sorte de garage pour réparation de bateaux. Ils allèrent à gauche du bâtiment de réparations où se trouvaient d'autres navires de plaisance. Ils avaient de la chance, il y avait peu de mordeurs. Romain en dégomma trois avec son arc et ses compagnons descendirent aussitôt pour attendre les prochains tout en lui récupérant ses flèches.
Ils remontèrent vers l'est en explorant un premier navire militaire sur le premier ponton. Au bout d'une demi-heure, ils en sortirent très déçus, il était quasiment vide.
"Ces navires étaient en réparation, la Marine avait dû en vider un maximum d'armes à cause de cela. Rejoignons les plus gros navires sur les pontons vers l'est."
Énergiquement, ils coururent aussi vite qu'ils le purent mais une horde d'une trentaine de mordeurs s'approcha d'eux. Quelques minutes suffirent pour s'en débarrasser. Le premier navire qui leur semblait intéressant était apparemment une sorte de "porte-hélicos". Précautionneusement, ils commencèrent à l'explorer. La chance pointa enfin le bout de son nez et ils trouvèrent deux lance-roquettes et une caisse de roquettes. Les deux plus costauds de la section furent réquisitionnés par Romain pour transporter le tout. Ils se mirent les bazookas en bandoulière et tenaient la casse à eux deux.
Les autres membres fouillaient l'armurerie du navire quand un petit groupe de marins-mordeurs les abordèrent. Leur niveau de décomposition était très élevé. Les survivants s'étaient bien rendu compte qu'à partir d'un certain moment le corps des mordeurs n'était plus apte à "prédater". D'ailleurs, à peine prirent-ils la peine de les frapper que les ligaments des articulations, de ceux-ci se déchirèrent et les bras tombèrent au sol suivis rapidement par les têtes. Quelques soldats ricanèrent nerveusement.
Ils repartirent vers les navires des pontons suivants. L'un d'entre eux était un "navire guerre de mines". Il y avait bien quelques mines mais uniquement marines. Heureusement, ils compensèrent par des munitions et de nouvelles armes de combat.
"Sergent ?
- Oui, Caporal ?
- Il va devenir urgent de se trouver un lieu où se cacher, la nuit ne devrait plus tarder. Vous avez raison. Regardons la carte, Kevin, approche-toi !"
Ils ne trouvèrent rien qui soit tout près. Leur choix se porta sur un immeuble devant le deuxième ponton. Cela les obligeait à revenir sur leurs pas mais ils savaient que de ce côté-là, il y avait moins de mordeurs. Prudemment, ils s'extirpèrent du navire. Une belle horde d'une cinquantaine de cadavres les attendait. Une bonne partie d'entre eux était aussi des marins.
La plupart des soldats commença à achever les mordeurs avec leurs armes blanches et quand plus des deux tiers furent abattus, ils passèrent aux armes à feu pour gagner du temps. Au loin, une nouvelle horde se montra, les forçant à courir à vive allure vers le bâtiment choisi. La porte d'entrée était grande ouverte ce qui était souvent bon en soi car les mordeurs finissaient toujours par sortir des bâtiments ouverts. Ils fermèrent la porte derrière eux et la renforcèrent de tout ce qu'ils purent trouver dans les logements du rez-de-chaussée. C'était un immeuble d'habitations. Ce fut consciencieusement, qu'ils firent le tour de chaque étage, de chaque appartement, pour sécuriser les lieux.
Le jour finissait de disparaître quand ils finirent de s'installer dans les appartements de l'étage afin d'avoir une vue globale de l'extérieur, ils en prirent un dans chaque angle.
Ils firent le point du matériel, de leurs munitions et de l'état physique des membres. Un des baraqués avait été attrapé par un mordeur mais ne souffrait ni de morsure ni de griffure.
Les trinômes de chaque appartement se partagèrent le temps de garde. Romain avait décidé de fouiller les trois grands navires restants. Et ils n'auraient pas de trop d'une journée entière pour le faire en toute sécurité. |