Ne voulant pas trop dépenser de carburant, Emmanuelle décida de ne pas rouler vite. Elle voulait pouvoir avoir le temps de ralentir si elle devait trouver un maximum de véhicules abandonnés sur la route ou dans le cas où un mordeur traverse la route. C'est ainsi qu'ils mirent une heure et demie pour arriver au château de Gratôt. Ils virent bien deux ou trois mordeurs dans le village mais ce fut tout. A la sortie de ce dernier, ils tournèrent vers le château et doucement avancèrent dans l'allée vers le pont d'accès au bâtiment. La jeune femme regarda ses neveux en fronçant les sourcils.
« Vous restez dans la voiture pendant que je fais le tour, d'accord ?
- Non, pas d'accord, tata ! Lui intima Rodolphe du haut de ses 13 ans.
- Ah oui et pourquoi ?
- Il faut que nous commencions à apprendre à nous défendre, non ?
- Ouais, je déteste quand les gosses ont raison !
- On n'est pas des gosses ! Railla Svein.
- Peut être en attendant, seul Roro m'accompagne, vous deux restez ici avec Nita, d'ac ?
- D'ac ! Répondirent les plus jeunes. »
La tante et le neveu descendirent du véhicule. Elle s'adressa à lui : « Tu vas obéir au moindre de mes ordres, je te dis de partir, tu pars, je te dis de frapper, tu frappes, OK ? » Il opina de la tête. Pendant qu'ils avançaient sur le pont, elle lui dit : « Tu tires ton sabre tout de suite et tu le tiens de la main gauche puisque tu es gaucher, et tu prends le poignard de ton père dans l'autre main ».
Ils continuèrent leur avancée. Emmanuelle tenait sa dague dans la main droite ne se sentant pas assez sûre avec le katana. Elle savait que son frère avait poussé ses enfants à manier le sabre le plus souvent possible. Alors qu'ils approchaient, elle sentit une odeur de brûlé et aussi comme du cochon grillé. Les portes étaient démises de leurs gonds et de nombreux cadavres parsemaient la cour. La jeune femme leva la main gauche, intimant l'ordre à son neveu de s'arrêter. Arrivèrent alors, deux mordeurs. Elle s'empressa d'en poignarder un et eut la surprise de voir une lame transpercer le crâne de celui qui s'approchait à sa gauche. Elle sourit avec fierté à Rodolphe. Ils entrèrent au milieu de la cour sans voir d'autres mordeurs et ils remarquèrent que tous les crânes étaient transpercés.
Rodolphe, qui regarda alors sa tante, vit son regard déçu et triste, il vit où elle posait ses yeux. L'ensemble des bâtiments avait brûlé, les fenêtres et portes avaient fini en cendre. Le château était inutilisable. Devant cela, elle se tourna vers son neveu : « Viens on repart à la voiture ! On essaie Pirou».
Reprenant le pont, ils furent assaillis par trois mordeurs. Elle en exécuta deux quand l'ado transperça le troisième.
Une fois dans la voiture, Rodolphe expliqua ce qu'ils avaient trouvé. La jeune femme redémarra sa voiture et repartit sur la route. Elle rejoignit la route de la côte et garda le même rythme que depuis le matin. Au bout d'une trentaine de minutes à cette vitesse, elle prit le chemin menant au château de Pirou, passa sous la poterne et commença à faire le tour du château.
Soudain, des tirs se firent entendre et atteignirent le côté droit du Land Cruiser. Elle hurla : « Couchez-vous par terre ! ». Ils obéirent sans tergiverser et Inès entraîna la chienne avec elle. Emmanuelle freina violemment et sortit de la voiture en levant les mains : "Ne tirez pas, j'ai trois enfants à bord !".
Une nouvelle balle siffla, cette fois au dessus de son oreille droite.
"N'avancez plus ! Hurla une voix d'homme provenant de la tour.
- S'il vous plaît, ne tirez pas !
- D'accord mais ne bougez pas ! Que voulez-vous ?
- Nous venons vous demander de nous permettre de nous réfugier ici !
- Pas question !
- Pourquoi ? J'ai des armes, je suis une ancienne militaire, je sais jardiner et bricoler !
- Non, c'est non ! Dégagez de là !
- Mais pourquoi enfin ?
- Parce que c'est non et que nous sommes déjà plus de 30, il n'y a plus de place, pas assez de nourritures en stock pour quatre personnes de plus, et, de plus, nous avons toutes les compétences dont nous avons besoin parmi nos résidents.
- Vous êtes des salauds égoïstes ! N'avez-vous pas honte de lâcher trois enfants en pleine nature ?
- Ils ne sont pas seuls puisqu'ils vous ont !
- Merde, soyez cool !
- Ne rêvez pas ! Et maintenant, dégagez ou nous vous abattons."
Deux ou trois tirs voletèrent autour de sa tête et sur les flancs du Land Cruiser. Ses neveux hurlèrent de peur et elle entendit Inès lui crier de remonter dans la voiture. Ce qu'elle fit aussitôt, ne voulant pas les inquiéter.
Elle fit un rapide demi-tour sur les chapeaux de roue et repartit vers la grande route. Après quelques kilomètres, elle entra dans un champ vide et se rangea au milieu. Elle descendit du véhicule et s'accroupit les mains sur les genoux. Elle savait, oh oui, elle le savait que les vivants étaient finalement plus à craindre que les morts. Elle se redressa et inspira l'air chaud de ce milieu d'été.
"Bon, il est déjà midi passé, nous allons manger et faire une dernière tentative à Chanteloup, d'accord ?
- Oui ! Ânonna la fratrie.
- Dis, tata, pourquoi on s'est arrêté au milieu d'un champ ? Demanda Svein.
- Parce que si des mordeurs approchent, nous les verrons venir d'assez loin pour être prêts à les affronter."
Ils se préparèrent à manger et discutèrent assidûment de ce qui venait de se passer. Ainsi, les plus jeunes indiquèrent à leur tante qu'ils souhaitaient qu'elle fasse attention à elle et qu'elle ne devait pas mettre sa vie en danger même face à des "méchants". Ce fut alors une grande embrassade familiale. |