Partie 5 : Sweet dreams (are made of these)...
Je suis à l'hôpital depuis près de trois heures maintenant. Ne me demandez pas pourquoi, je ne le sais pas moi-même. Cette salle d'attente est froide et désagréable, toute blanche et aseptisée. Il est déjà 19 heures, et pourtant il y a encore des gens autour de moi qui attendent des soins. Moi, j'attends que l'on me dise que je peux partir. Étant la première arrivée sur les lieux de l'accident, j'ai du témoigner et faire une déclaration sous serment à l'hôpital et à la police. Et le grand type à l'iroquoise a du faire de même, vu qu'il a appelé les secours. On s'est donc retrouvés coincés tous les deux à raconter la même histoire trois fois de suite avant qu'on nous dise de patienter ici, parmi les malades, avant qu'on ne nous dise de partir. Tout ça pour un type que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam qui a eu le malheur de se faire faucher sous mes yeux.
J'ai appris qu'il s'appelait Sirius Nevarra et qu'il était en terminale dans un lycée proche. On m'a posé beaucoup de questions sur lui, en espérant que je le connaisse. Mais comme je n'ai pas cessé de le répéter, je n'en sais rien. Je ne le connais pas du tout, pas plus que Dreiden, ou le type à l'iroquoise, comme vous préférez.
Il joue avec une cigarette tout en sifflotant une mélodie compliquée, ses écouteurs dans les oreilles, le volume si fort que je peux reconnaître sans peine la musique agressive d'un groupe de métal à la mode. Il fait vraiment décalé parmi tous ces petits vieux qui attendent le bon vouloir des médecins. Non, pas décalé.
Tâche. Oui, il fait tâche, avec sa teinture bleue dans les cheveux, ses piercing et ses fringues. Il n'est pas à sa place, mais cela ne semble pas le déranger tant que ça.
Je soupire. Je m'ennuie, et ce n'est pas ma propre musique qui va me sortir de ce pétrin. J'aurais mieux fait de m'occuper de mes oignons, ça aurait été plus simple. Le plus comique, je trouve, c'est que moi et Dreiden habitons au même endroit, dans ce même immeuble tout neuf, mais pas au même étage. On n'a pas trop su quoi dire quand on a appris ça. En même temps, il n'y avait rien à dire. Mais le pire, c'est sans doute que le môme renversé vient aussi du même endroit. Vous croyez aux coïncidences? Moi, pas. Et les flics non plus, c'est sans doute pourquoi ils nous ont interrogés aussi longtemps. Mais bon, entre moi qui viens tout juste d'arriver et Dreiden qui n'avait même pas conscience de son existence, ils n'ont pas du trouver grand chose à nous reprocher.
Blancs comme neige.
Je suis fatiguée. |