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Six
Par Toucanbulle
Originales  -  Surnaturel/Général  -  fr
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    Chapitre 29     Les chapitres     6 Reviews    
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Chapitre 5.4 : Ilinsar - Sweet dreams

On peut dire ma journée était moyenne. Moyenne, ni bonne, ni mauvaise, ni noire, ni blanche, plutôt d'un gris uniforme qui me lasse et me répugne. Quoique l'on puisse distinguer des marbrures dans la marée sombre. De minces filons, signes que cette journée n'est pas si semblable aux autres. N'ai-je pas rencontré plus de mes voisins en quelques heures qu'en plusieurs mois, après tout ? Ça change agréablement du quotidien banal que je me suis construit. Et j'ai aussi envoyé bouler mon patron. Ce n'est pas nouveau, mais c'est toujours agréable de le noter.

    La fin de journée, en l'occurrence, ne ressemblait à aucune de celles que j'ai pu vivre jusqu'ici. Peut-être car, plutôt que de rester avec cette peste d'Aivân à tambouriner à la porte du psychopathe roux qui nous sert de voisin du dessus, j'ai préféré coller ce cher Major tandis qu'il essayait de filer discrètement derrière mon dos. Et j'ai ainsi fait connaissance avec les autres membres du groupe des Suicide Bombers : Capt'ain Eagle, le batteur roux à la voix qui roule comme un orage, et Neil, un type bizarre qui se balade avec un masque à gaz et des grenades en plastique à la taille. Enfin... J'ai appris plus tard que c'étaient de vraies grenades, et que si tu osais prétendre le contraire, ce malade foutais le feu à ta baraque, peu importe qui il y  avait dedans. Complètement barré, ce type.

    Bref, après m'être faite incendiée littéralement par le batteur du groupe, ce grand rouquin tatoué de partout, il a enfin accepté de me laisser prendre un verre en leur compagnie, parce qu'il avait « la flemme de bouger ses fesses pour botter les miennes ». Quelque part, je lui en suis reconnaissante, après tout, ce type porte des boots cloutées qui doivent bien peser entre cinq et dix kilos chacune. J'ai sauvé mon postérieur, non mais.

    On a donc commencé à papoter de tout et de rien, du concierge qui est loin d'être une lumière, de la galère du loyer et des corvées, de nos boulots respectifs... Et pendant ce temps là, il allait ramener Major dès que celui-ci faisait mine de toucher au bar où étaient planqués la majorité de leurs alcools. Je comprends mieux pourquoi il préfère venir se saouler dans un bar miteux, maintenant.

    Néanmoins, j'ai tout de même remarqué que ce cher bassiste est tout de même moins fermé en compagnie de ce trio déluré. Il semble sourire des blagues pas drôles du Cap'tain, avant de gueuler sur Dreiden quand celui-ci l'emmerde trop. Et puis j'ai aussi remarqué qu'il tournait beaucoup autour de Neil et de son crayon. Neil est celui qui compose aussi bien la musique que les paroles du groupe, à ce que j'ai cru comprendre. Pas étonnant qu'elles soient aussi torturées et déjantées.

    Bref, après cette fin de soirée des plus sympathiques, j'ai un peu de mal à reprendre mon train-train quotidien. Pas de Major aujourd'hui, sans doute cuve-t-il ce qu'il a absorbé après que je sois partie. Ou peut-être a-t-il déniché un nouveau lieu d'escapade pour échapper à ses gardes-chiourmes.

    Je soupire en servant une nouvelle tournée de café à des habitués. Cette existence m'enlise dans un sentiment de monotonie extrême. Un peu comme si plus le temps passe, plus je m'enfonce dans une sorte de mélasse qui ressemble à de la gelée. C'est une sensation douce-amère, à la fois agréable et détestable. Je déteste la routine. Même sécurisante, elle reste écrasante.

    Ce n'est pas pour continuer de la subir que j'ai fugué à dix-huit ans. Ce n'est pas pour me laisser enfermer de nouveau par mon pire ennemi : moi-même.


 
 
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