21) Retour à la réalité.
Le dragonnier s’éveilla en sursaut, étendu sur le sol d’une vaste clairière. Ses membres étaient engourdis, il se rendit rapidement compte que des herbes s’étaient enroulés autour de ses jambes comme pour l’empêcher de les bouger. Les vrilles des plantes se resserraient autour de ses bras. Remontant le long de ses bras et de son torse. Peu à peu les végétaux le privaient d’air en resserrant leurs tiges autour de son torse et de sa gorge. Ses bras étaient plaqués le long de ses flancs, ses jambes ne pouvaient pas briser les plantes. Les tiges s’allongeaient, grossissaient devenant impossible à briser, elles le tuaient peu à peu. Le manque d’air faisait tourner la tête du jeune homme, obscurcissant son champ de vision. Il ne pouvait plus bouger, son couteau de chasse et son épée étaient hors de portée, déjà emprisonnés par les lianes. Le désespoir emplit Eragon, il était pris au piège de ces plantes qui l’étouffait. Submergé par une soudaine vague de panique, il se débattit mais ne réussit qu’à resserrer l’étreinte des lianes autour de son corps. La panique faisait rage dans l’esprit du dragonnier. Sans vraiment en avoir conscience il ouvrit ce dernier, cherchant désespérément de l’aide et ne réussissant qu’à paniquer davantage à chaque seconde. Tous les êtres qui l’entouraient paniquèrent et reculèrent au contact de son esprit, seules les plantes maudites ne furent pas affectées ne pensant qu’à l’étouffer encore plus. La magie et l’ancien langage ne lui été plus d’aucun secours, désormais les plantes le bâillonnaient tout en l’empêchant de bouger la tête. La panique, la peur se combinaient au manque d’air et menaçaient de lui faire perdre conscience. Il reçut soudain l’équivalent d’une gifle mentale monumentale qui eut pour effet de l’aider à reprendre ses esprits, sans y penser, il se replia derrière ses barrières mentales. Il observa un moment les plantes qui l’étouffaient à la manière d’un serpent. Il se demanda comment sortir de ce piège mortel, de toute évidence seul le feu aurait pu aider le jeune homme à s’en tirer. Son esprit était embrumé à tel point qu’il n’arrivait pas à trouver une solution. Retenant sa respiration autant que possible, il cherchait en vain une solution. Au fur et à mesure il lui semblait que les mots de la langue ancestrale des elfes qu’il tentait d’invoquer ne lui étaient plus connus. La panique menaça de le submerger une nouvelle fois. De tous les mots de l’ancien langage des elfes qu’il connaissait, il n’en restait plus un seul, son esprit était vide de ces mots aussi sûrement que s’il avait été drogué. Il baissa les bras, se résignant à mourir ainsi loin de tous ceux qu’il aimait. Eragon baissa les yeux, en se débattant, il avait réussi à s’asseoir, abandonnant le combat, il s’allongea, les yeux toujours baissés sur ses jambes. Curieusement les plantes le laissaient faire, pouvaient-elles sentir qu’il avait abandonné ? Entre les feuilles il put apercevoir le fourreau bleu de son épée. Malgré le brouillard qui occultait presque entièrement sa vision et son esprit, la couleur du fourreau de son épée lui rappela un mot : brisingr. Totalement désespéré, il se concentra et hurla de la seule manière qui lui était encore possible, il donna au mot une puissance qu’il doutait de pouvoir lui conférer.
« - Brisingr ! »
L’épée s’enflamma, carbonisant les lianes qui l’entouraient. Les langues de feu de la couleur du saphir se répandirent le long des plantes, les réduisant en cendre. Libéré de l’étreinte mortelle de ces végétaux, le dragonnier inspira profondément se délectant de pouvoir respirer à nouveau librement. Il se leva et fit quelques pas pour se dégourdir les jambes. Au fur et à mesure ses membres se firent moins lourd, son esprit s’éclaircit, se remémorant la gifle mentale qui lui avait remis les idées en place. Jusqu’à présent, une seule personne avait agi ainsi dans son esprit. Et ce lorsqu’il était revenu d’Helgrind, seul. La peur, les souvenirs de son rêve lui revenaient, ainsi que ceux du temps passé dans cet « autre monde » si étrange. Linnëa, l’elfe qui était devenu l’arbre Menoa lui avait dit qu’il perdrait un être cher. Il ne voulait pas perdre Arya, pas maintenant. Il courut, plus rapide que jamais, en quelques secondes le jeune homme était agenouillé à côté de la princesse des elfes. Elle ne se débattait pas, tentant d’attraper son épée en déplaçant lentement son bras, le tendant au maximum. L’épée que la jeune femme tentait d’attraper était fichée dans le tronc d’un arbre proche. Les lianes étaient trop serrées pour que le dragonnier puisse utiliser sa propre épée sans risquer de blesser la jeune elfe. Les yeux écarquillés par la terreur l’elfe réussissait par miracle à ne pas se débattre. Eragon cherchait désespérément un moyen de l’aider, lorsqu’elle gémit de terreur et commença à se débattre, il comprit qu’il y avait vraiment urgence. Dégainant son couteau de chasse, il fit apparaître une boule de feu saphir destiné à ménager un espace dans lequel il pourrait dégainer sa lame et libérer celle qui avait prit son cœur, et ce, sans la brûler. Ménageant un espace suffisant, il enfonça la lame dans le trou et tenta de briser les lianes. Dépité, il comprit qu’il n’y arriverait pas de cette manière
- Brisingr. Marmonna-t-il comme s’il s’était agi d’un juron.
Des flammes bleues s’enroulèrent autour de la lame, l’aidant à couper les lianes qui maintenaient la jeune femme prisonnière de ce piège mortel. A peine libérée l’elfe se blottit contre le torse du dragonnier qui l’enlaça tendrement en lui répétant que tout irait bien, qu’il était là et ne la laisserait pas. D’abord étonné qu’Arya se jette ainsi dans ses bras, il oublia très vite son étonnement. Alors qu’il caressait doucement les cheveux de l’elfe il sentit des larmes mouiller sa chemise. Sans vraiment comprendre pourquoi elle pleurait, il la pressa un peu plus fort contre lui. Il se délecta de la sentir blottit contre lui sans pour autant se permettre de rêver. Des doutes l’assaillaient, il ne pouvait savoir si ce qui c’était passé avant leur réveil était réel et partagé… Elle s’écarta de lui doucement, elle leva les yeux pour croiser le regard du dragonnier qui la serrait toujours dans ses bras. Bien que les larmes aient instillé une pointe de vermeil dans les yeux émeraude de celle qu’il aimait, il ne les trouvait que plus attirant. Il ne comprit pas les émotions qu’il lisait dans ce regard. La peur s’était évaporée petit à petit, laissant la place à de la reconnaissance, de l’anxiété et un autre sentiment qu’il ne parvenait pas à décrypter. Ses yeux ne pouvaient quitter le visage parfait de la princesse des elfes, son esprit s’égarait. Les lèvres de la jeune femme n’étaient qu’à quelques millimètres des siennes. Eragon aurait tant aimé pouvoir les frôler, goûter leur goût, sentir leur douceur. Le souffle soudain court, il s’approcha lentement. Arya approcha, elle aussi ses lèvres puis se figea soudain avant de se raidir dans les bras du jeune homme qui battit immédiatement en retraite, reculant il laissa retomber ses bras le long de ses flancs.
- Ça va, tu n’as rien ?
La jeune femme était troublée, il pouvait le lire sur son visage mais pourquoi ce trouble ? Par peur des sentiments et des pensées du dragonnier ?
- Je vais bien… Elle hésita un moment avant d’ajouter. Grâce à toi.
Elle esquissa un sourire, dans son regard émeraude brillait toujours cette lueur qu’il ne lui connaissait pas. Le sourire de l’elfe fit accélérer le cœur du jeune homme, plus chaleureux que ceux auxquels le dragonnier était habitué. Sa voix lorsqu’elle avait poursuivi n’avait été qu’un murmure à peine audible. Mais l’émotion qu’elle avait tentée de cacher derrière le ton employé pour prononcer ces mots n’avait pas échappé au jeune homme. Il sourit à son tour. Puis songea au comique de la situation, son sourire s’élargit et il éclata de rire, même le regard mi- interrogateur mi- carnassier qu’elle lui lança ne put arrêter son excès d’hilarité. Voyant de la colère briller au fond des yeux vert de celle qui avait capturé son cœur, il se décida à s’expliquer.
- Ne me regarde pas comme ça. C’est juste que la situation est assez… Drôle quand on y réfléchit.
L’elfe prit un air étonné, haussant les sourcils elle dévisagea le dragonnier.
- Je ne vois vraiment pas ce qu’il y a de « drôle ». Répliqua-t-elle sans que l’ombre d’un sourire ne se dessine sur son visage.
- Et bien, nous combattons des ombres, des soldats, des dragons et le Roi en personne. Et nous ne sommes encore jamais passés aussi près de la mort… Quoique. Mais le pire c’est que se sont de simples plantes qui ont failli nous tuer. Le Roi félon n’aura même pas eu à lever le petit doigt.
L’elfe consentit enfin à sourire mais ce sourire n’avait vraiment rien de plaisant. Il était chargé de tant d’émotion que le dragonnier ne parvenait pas à toutes les saisir.
- Oui, c’est assez étrange. Une elfe tuée par des plantes de quoi rire pendant des siècles n’est-ce pas ? Il y avait de la magie derrière tout ça Eragon. Réfléchit un peu, nous « partons » enfin, c’est mon sentiment, pendant je ne sais combien de temps dans une sorte de monde parallèle duquel nous ne pouvions sortir. Nous nous réveillons et ces plantes tentent de nous tuer. Tu crois vraiment que c’est un hasard ? Pas moi. Quelqu’un a voulu nous tuer, et je ne vois pas des milliers de personnes pouvant souhaiter notre mort à ce point. La colère et la peur se disputait la plus grande présence sur le visage de la princesse des elfes.
- Arya, ce n’est pas ce que je voulais dire… Et puis, je n’avais pas vraiment réfléchit. Tu as raison excuse-moi, c’était idiot de ma part.
Honteux le dragonnier détourna le regard et contempla l’épée de l’elfe plantée dans le tronc d’un arbre proche. Il entendit la jeune femme soupirer, elle posa sa main sur la joue du demi-elfe et le força à croiser son regard dans lequel brillait à nouveau cette étrange lueur et avec elle de la peine et de l’incompréhension. Son visage était calme, le simple contact de sa main sur la joue du jeune homme le mettait dans tous ses états. Il se demanda si ce contact était réellement courant entre amis. L’elfe poussa un nouveau soupir aidant le dragonnier à reporter son attention sur elle.
- Je n’aie pas à t’excuser, c’est ma faute. J’aurai dû réfléchir et m’exprimer calmement au lieu de m’emporter comme je l’ai fait. Je suis désolée. Je… J’ai l’impression d’être partie ailleurs, dans un monde où tout était si… facile et… bon.
Le dernier mot de l’elfe n’était qu’un murmure que le jeune homme eu les plus grandes difficultés du monde à entendre. La voix de la jeune femme était chargée de nombreuses émotions dont le regret. Eragon resta sans voix, il était de l’avis de la princesse en ce qui concernait « l’autre monde ». Il la regarda longuement, s’attardant sur ses lèvres parfaites qui semblaient attendre qu’il presse les siennes dessus. Il aimait tant le visage de l’elfe. Il ne cessa de la dévisager que lorsque sa main glissa de la joue du jeune homme jusqu’à son torse. Eragon se fit violence pour ne pas laisser ses pensées s’égarer sur un chemin bien trop périlleux. Elle retira vivement sa main comme si le torse du dragonnier la brûlait. Elle semblait troublée, se levant, elle récupéra son épée fichée dans l’arbre, la rangea dans son fourreau sur la hanche droite. Quittant enfin l’elfe du regard le jeune homme reporta son attention autour de lui. Ils étaient dans une étrange clairière, entourée d’arbres plusieurs fois centenaire, un petit ruisseau coulait à une centaine de pied du dragonnier, ce dernier se leva, le ruisseau semblait être une frontière invisible entre deux parties très inégales de la clairière. Dans la partie où Arya et lui avaient faillis mourir quelques minutes plus tôt -qui représentait plus des deux-tiers de la clairière-la végétation s’épanouissait, les fleurs embaumaient l’air de leur parfum. Dans l’autre partie, on eut dit qu’un incendie avait fait rage brûlant toute la végétation, s’arrêtant au niveau des arbres. L’eau ne semblait pas toxique et puis la végétation avait brûlé, c’était incompréhensible. Fronçant les sourcils, le jeune homme tenta de se remémorer une fois où il avait pu voir l’herbe calcinée ainsi. Arya le prit de vitesse en déclarant :
- On dirait que quelqu’un a envoyé un objet ici et à en juger par la taille de la déflagration, il était tout sauf petit.
- Quelle taille selon toi ?
- Hum… Au moins celle de l’œuf de Saphira et une sacrée dépense d’énergie, je ne comprends pas.
Les sourcils froncés elle fixait l’étendu brûlée, qui mystérieusement s’arrêtait à la lisière des arbres. Elle plissa le nez, concentrée sur l’étendue noire de l’autre côté du petit ruisseau. Eragon observa un moment le lieu puis leva les yeux au ciel qui commençait à s’assombrir. Sans un mot pour l’elfe, il ramassa de quoi faire un feu. Une fois ce dernier allumé, il regarda autour de lui en quête d’un peu de nourriture et de quelque chose pour faire cuire le repas qu’il voulait préparer. Arya arriva, modifia le foyer et déposa une pierre plate sur les braises. Elle y déposa ensuite quelques racines. La nuit s’était installée, laissant les deux compagnons seuls dans l’obscurité. L’elfe s’allongea dans l’herbe, les yeux rivés sur le ciel étoilé, silencieuse, elle attendit ainsi paisiblement que le repas soit prêt, toujours absorbée par ses pensées. Eragon l’observa longuement tout en s’interrogeant sur la nature de ses rêves. Il était sûr que ce n’était pas un rêve normal et que ce qu’il avait vécu avant ce songe était faux. L’astuce résidait dans le fait de trouver où se situait le début de cet « avant » fictif. Le dragonnier commença à s’inquiéter pour ses amis et toutes les personnes dont il était proche. Saphira n’était pas dans les environs, il ne pouvait pas la sentir à travers leur lien et elle lui manquait terriblement. De plus, ils n’avaient pas de vivres ni de couvertures. Or, selon la saison dans laquelle ils se trouvaient cela pouvait se révéler mortellement dangereux. Le jeune homme observa les alentours et vit ce qui lui avait jusque-là totalement échappé, les feuillus avaient perdu leurs feuilles, ils étaient donc vers la fin de l’automne. Le dragonnier grimaça la nuit risquait d’être vraiment très froide, sa grimace devint sourire lorsqu’il songea que ce pouvait être l’occasion de serrer Arya dans ses bras. Son sourire s’effaça rapidement lorsqu’il eut lancé un bref regard à la femme en question, s’il tenait à ne pas avoir d’ennui avec elle mieux valait garder cette idée loin de son esprit. Arya se leva et après avoir lancé un sort basique lui tendit une partie des racines cuitent. Ils mangèrent en silence, chacun absorbé par ses pensées. Eragon retira la pierre à l’aide de la magie, la nettoya dans le ruisseau puis raviva le feu.
- Dis-moi Eragon qu’est ce qui te perturbe ?
Le dragonnier resta silencieux un moment puis se décida à confier ses craintes à la jeune femme.
- Rien de bien important. Enfin… Si c’est important. Je… J’ai peur voilà tout, j’ai peur de perdre une personne qui m’est chère et puis, je ne peux plus supporter la guerre et les morts qu’elle fait. Je sais que la cause que je défends est juste mais l’idée de prendre une nouvelle vie, même s’il s’agissait de celle du Roi, me répugne.
Le silence s’installa entre les deux amis, les yeux de l’elfe ne quittaient pas les flammes, de toute évidence elle réfléchissait à sa réponse.
- Je comprends tes sentiments envers la guerre et les vies qu’elle nous oblige à prendre. Je ne peux malheureusement pas t’aider. (Un sourire apparut sur le visage de la jeune femme, un sourire qui n’avait rien de plaisant, chargé de souvenirs). Quoique… Tu m’as un jour dit de ne pas perdre de vue les jardins de Tialdari Hall et que tout irai bien, il est temps que tu trouves ce lieu où disparaissent tes craintes et bien sûr que tu ne le perdes pas de vue.
Un nouveau silence fit place à ces paroles. Echo de leurs pensées et de leurs craintes. Le sourire de la princesse avait disparu, son visage ne reflétait plus qu’une inquiétude qu’elle ne parvenait pas à cacher.
- Tu dis avoir peur de perdre un être cher, et, tel que je te connais, tu dois avoir de bonnes raisons… Si tu voulais bien me les exposer, je pourrai peut-être t’aider.
Ses yeux émeraude se posèrent sur le jeune homme qui fixait à son tour les flammes. Perdu dans ses pensées, il se demandait ce qu’il devait ou plutôt ne devais pas révéler à l’elfe.
- Je… Juste avant que nous ne revenions dans ce monde, j’ai… J’ai fait un drôle de rêve.
Son regard quitta les flammes pour se perdre dans les émeraudes de celui d’Arya. Sous le charme du regard de la princesse de son peuple, il lui raconta la totalité de son rêve, n’omettant pas le moindre détail. Lorsque le visage de l’elfe devint livide, le dragonnier se maudit de ne pas avoir su tenir sa langue face au regard pénétrant qu’elle lui avait lancé.
- Linnëa t’as parlé ! Eragon, tu ne pouvais pas me le dire plus tôt !
Le jeune homme eu un sourire d’excuse et se perdit dans ses pensées un moment. Lorsqu’il accorda à nouveau de l’attention à la jeune femme, il comprit qu’il lui manquait le début de la phrase qu’elle venait de prononcer. Il écouta la suite avec attention espérant découvrir le début de celle-ci par simple déduction.
- … Le plus peur de perdre ?
Le dragonnier réfléchit un instant, mais n’eut pas de sérieuses difficultés à retrouver le début de la phrase. « Qui as-tu le plus peur de perdre ? » Ce ne pouvait être que ça. Il hésita longuement réfléchissant à la réaction qu’elle aurait face à l’une ou l’autre de ses réponses. En soupirant, il opta pour l’honnêteté.
- Eh bien, il y a Saphira, toi, Roran, Katrina, Nasuada, Orik…
- J’ai dit le plus Eragon pas toutes. Le coupa-t-elle d’une voix douce.
- Saphira et… Toi. Marmonna-t-il en grimaçant.
Le jeune homme détourna le regard, refusant de croiser le regard d’Arya. Comme l’idiot qu’il était, il avait une fois de plus tout détruit, elle n’accepterait certainement plus aucune excuse ni même une proposition d’amitié. Pourquoi n’avait-il pas tenu sa langue ? Qu’espérait-il y gagner ? Il ne dit rien, le regard fixé sur les flammes. Il entendit le bruit léger que fit l’elfe en se levant, sentit le mouvement d’air qu’elle provoqua en s’approchant. Buté, il ne lâcha pas les flammes du regard il aurait volontiers ordonné à ces dernières de le brûler sur place mais une main douce se posa sur son épaule. Il tourna alors enfin les yeux vers la princesse aux yeux émeraude qui venait de poser sa main sur son épaule. Il la regarda longuement, la détaillant, il soupira de soulagement, elle ne lui en voulait pas. S’il avait osé, il en aurait sauté de joie dans tous les sens au lieu de quoi il riva ses yeux dans ceux de l’elfe.
- Tu… Tu ne m’en veux pas ?
Une nouvelle fois l’étrange lueur s’alluma dans le regard de la jeune femme qui eut un large sourire. Il crut que son cœur allait exploser, le sourire de l’elfe était profond, vrai et chaleureux.
- Pourquoi t’en voudrais-je ? N’est-ce pas moi qui aie voulu savoir ?
Le dragonnier lui rendit alors son sourire, la main de la jeune femme n’avait pas quitté son épaule pour le plus grand plaisir du jeune homme. Elle tourna alors son regard vers le ruisseau et ferma les yeux un instant. Il ne perdit pas une seule seconde du fabuleux spectacle qu’était le visage de l’elfe.
- Je sens la magie…
- Tu sens la magie ?
La jeune princesse ouvrit les yeux et le regarda d’une étrange manière comme sil elle se demandait ce que pouvait bien-être la réponse attendue par le dragonnier.
- C’est dur à expliquer, tu te souviens de la fois où je t’ai parlé d’écouter la nature ? C’est un peu la même chose ici. J’écoute, la nature et ressent la magie qui a été utilisé.
Le jeune homme la dévisagea perplexe.
- Autrement dit la magie te dit elle-même quels sorts ont été lancés ici ?
- Non, juste le style de sort, je ne peux connaître les termes exacts du sort mais je sais qu’il existe. Ici, il y a eu un sort de transfert, certainement pour l’objet mais ça c’est parfaitement visible ce qui l’est moins c’est qu’il y a un autre sort de transfert latent. Celui-ci fut lancé, il y a au moins deux ans… Et il y a aussi ce ruisseau, il a été créé par la magie.
Le jeune homme fronça les sourcils, dans son rêve ils étaient sur la Crête et si c’était la réalité et qu’Arya avait raison en ce qui concernait le sort de transfert latent cela voulait dire que…
- Arya pourrais-tu identifier la personne ayant lancé le sort de transfert latent si tu la connais déjà ?
L’elfe fronça les sourcils, décontenancée par la demande d’Eragon.
- Je suppose que oui mais, il faudrait que je connaisse la signature magique de cette personne, où au moins que j’ai déjà été en contact avec son esprit.
Le dragonnier déglutit et observa les alentours l’oreille à l’affût du moindre bruit pouvant lui indiquer où il se trouvait. Il regarda attentivement entre les arbres avant de repérer une forme noire, une tige noire. Il s’approcha et s’arrêta à quelques pas de la forme noire qui était en fait une flèche. Stupéfait, il la saisit et l’observa longuement, les dernières pièces du puzzle se mirent en place, le jeune homme savait désormais exactement où ils étaient.
- Arya, je crois… Enfin non, je suis sûr de savoir où nous sommes.
La princesse haussa les sourcils tournant vers le jeune homme un regard interrogateur.
- Et où sommes-nous donc ?
Le dragonnier la saisie par la main et l’entraîna au centre exact de la clairière, lâchant sa main, il montra la flèche à l’elfe qui l’examina rapidement avant de la qualifier de « plutôt bon travail d’humain ». Le dernier espoir des vardens sourit en entendant ces mots.
- Je voudrais que tu te concentre sur le sort de transfert latent et que tu me dises qui a lancé ce sort ou quand exactement.
Arya roula des yeux et soupira avant de fermer ses paupières, et de se concentrer Eragon vit lorsqu’elle les rouvrit qu’elle avait compris.
- C’est ici que j’ai envoyé l’œuf de Saphira… Murmura-t-elle stupéfaite.
Son regard exprimait un trouble immense, elle partit en courant à travers les arbres. |