*** 23– Marius Black ***

Samedi 17 février 1934

Septimus caressait tendrement les cheveux de la jeune fille, l’engageant à lui parler de ses tourments, mais alors que Cedrella s’apprêtait à lui avouer que ses parents allaient la fiancer cet été , un craquement se fit entendre et Callidora et leur père Arcturus, deuxième du nom, surgirent devant eux.

« Ainsi donc, gronda Arcturus d’une voix menaçante, la petite Isabella Mac Nair avait raison. Ma propre fille fraye avec de la vermine et déshonore notre nom. Et dire que toutes ces années je me suis refusé à croire Callidora sur ton comportement indécent. Vous me décevez Cedrella, poursuivit son géniteur en passant au vouvoiement qu’il n’utilisait que lors de ses accès de colère. »

Instinctivement le jeune Weasley se plaça devant la jeune fille qui tremblait d’effroi et sortit sa baguette. Le sieur Black le toisa de toute sa hauteur et ricana :

« Que croyez-vous donc faire Weasley ? 
- Protéger la femme que j’aime, rétorqua le rouquin avec ferveur. Cedrella, chuchota t’il ensuite, je t’en conjure viens avec moi. »

Septimus n’avait encore jamais songé à fuguer avec la cadette des Black mais l’air sinistre de son père et la joie malsaine et cruelle de sa sœur lui soufflaient que rien de réjouissant ne l’attendait chez elle. Le jeune oubliator sentit l’adolescente hésiter contre lui mais Arcturus intervint de nouveau :

« Vous oubliez Weasley que ma fille n’est pas encore majeure.
- Mais je le serais dans deux mois, se rebella Cedrella. »

Arcturus la fusilla du regard mais bientôt esquiva un rictus narquois.

« Peut-être ma fille mais pour deux mois encore vous m’appartenez et quiconque osera vous emmener sans mon autorisation sera passible d’Azkaban. Vous n’êtes pas sans savoir que le magenmagot sanctionne sévèrement le kidnapping. »

Cedrella blêmit. Elle se tourna vers Septimus des larmes pleins les yeux. L’ancien Gryffon la supplia de désobéir mais la jeune fille avait trop peur qu’il ne croupisse à Azkaban s’ils se faisaient attraper. Cedrella posa une dernière fois ses lèvres sur celles de Sept qui répondit avec la fougue du désespoir. Arcturus s’énerva alors et tirant violemment Cedrella vers lui cria.

« Il suffit à présent. Vous allez gentiment me suivre square Grimmaurd.
- Mais, balbutia sa cadette, et Poudlard, et mes Aspic ?
- Vous n’aviez qu’à y songer plus tôt. De toute manière vous serez marié avant vos dix-sept printemps, se moqua Arcturus délibérément à l’attention du jeune Weasley »

Et sans autre cérémonie Arcturus transplana avec ses filles.

Jeudi 8 mars 1934

Septimus enrageait. Cela faisait un peu plus de deux semaines qu’il n’avait pas eu de nouvelles de Cedrella et les funestes paroles du père de cette dernière n’étaient pas pour le rassurer. De plus, le jeune homme était certain qu’Arcturus ne laisserait pas passer aussi facilement ce qu’il devait prendre pour un affront, et il avait peur des représailles qu’encourait et avait peut-être déjà subi sa bien-aimée. Il avait bien envie d’aller tordre le cou de cette péronnelle d’Isabella Mac Nair.

Au 12 square Grimmaurd, l’ambiance était sombre. Cedrella avait été confinée dans sa chambre et mis au pain sec et à l’eau. Cependant la jeune fille n’en avait que faire, elle préférait mille fois ce traitement que d’être en présence de sa famille. Son retour de Poudlard, lui avait largement suffit. Lysandra, sa mère avait eu pour elle des mots durs et l’avait giflée à la volée. Arcturus l’avait également largement maltraité à coup de sortilèges sous les rires railleurs de Callidora. Depuis Cedrella ne les avait pas revus. Seul un des vieux elfes de maison au service des Black avait l’autorisation de pénétrer dans son antre pour lui déposer ses maigres repas.

Pendant que la jeune fille se morfondait dans sa chambre, pensant à Septimus, ses parents recevaient dans le salon le frère cadet du maître de maison. Cygnus, second du nom et son épouse Violetta étaient accompagné par leurs cinq enfants, pourtant seuls quatre d’entre eux se pavanaient devant leur oncle et leur tante. Le cinquième avait été relégué près des elfes de maison. Il ne paraissait jamais devant aucun membre de la très noble et ancienne famille des Black car pour son plus grand malheur, Marius Black était un cracmol. Il était d’ailleurs le seul objet de discorde entre Arcturus et Cygnus. L’aîné disait :

« Si cet être inférieur était né dans ma maison, il y a longtemps qu’il n’y vivrait plus. Tu aurais dû le confier à de stupides moldus. Il est la honte de notre famille. »

Alors Cygnus soupirait, épongeait son front moite, lançait un regard de biais à sa femme et répondait invariablement :

« Je sais mon frère et n’eut égard à la santé fragile de Violetta, j’aurais volontiers appliqué vos précieux conseil. Il a cependant bien été renié et n’est traité guère mieux qu’un elfe de maison. Violetta sait que le jour de sa majorité, il sera prié de plier bagage. »

Violetta blêmissait alors mais n’argumentait point. Elle savait son époux intraitable sur ce sujet et se consolait en se disant qu’elle aurait au moins réussi à garder la chair de sa chair six ans de plus.

Ce jour-là ne fit pas exception mais alors que les autres fois, Arcturus grommelait que son frère était encore trop bon et que Marius était encore trop bien traité, il jubila cette fois :

« Ce qui ne serait plus tarder si mes souvenirs sont bons.
- Effectivement, répliqua Cygnus passablement gêné. Ce … ce garçon aura ses dix-sept ans dans quelques mois.
- Bien, approuva Arcturus, dans ce cas passons à un autre sujet sensible. Comme tu le sais, Cedrella a eu de mauvaises fréquentations et nous avons décidé sa mère et moi de la marier sans tarder pour couper court aux rumeurs qui ne manqueraient pas de se répandre autrement. Les noces auront lieu le 17 mars. J’ai déjà été trouvé les Nott. Ils étaient au premier abord un peu réticents. Les Mac Nair ont déjà dû calomnier notre famille mais le patriarche a cependant tranché en notre faveur disant que son fils serait fort de mater notre fille récalcitrante. Le délai étant court, Lysandra aurait besoin de toute l’aide possible pour l’organisation de cette cérémonie. Il ne sera pas dit qu’un Black marie sa fille au rabais.
- Tu peux compter sur notre entière coopération, assura Violetta. »

Dans le couloir, Marius porta une main à sa bouche. De grosses larmes perlèrent entre ses cils. Un témoin de la scène aurait pu croire que le jeune homme était révolté du sort qui l’attendait mais la réalité était tout autre. Marius savait depuis longtemps qu’il lui faudrait quitter le doux foyer de son enfance car avant ses onze ans et la confirmation de son anormalité il y avait été choyé. Il en était même presque impatient puisqu’ainsi il ne subirait plus toutes ses brimades. Non ce qui le peinait était le destin réservé à sa cousine, la seule hormis sa mère à l’aborder avec considération. Le jeune homme fila dans les cuisines avant que l’on ne l’aperçoive, le seul lieu où Arcturus le tolérait. Par Merlin, heureusement que chez ses parents on ne se souciait de lui que pour le réprimander et qu’il pouvait vaquer comme il l’entendait à ses obligations.

Marius tout en aidant les elfes à préparer le repas réfléchissait. Il espérait en apprendre plus une fois de retour dans la demeure l’ayant vu naître. Violetta et Cygnus ne se priverait pas de parler devant lui puisque seule celle-ci lui portait de l’attention, pour les autres il était invisible la plupart du temps. Il voulait croire qu’il pourrait aider sa chère Cedrella.

Lily et Scorpius suivaient le déroulement de ses souvenirs avec stupeur et aberration. Scorpius pourtant descendant d’une lignée de sang purs n’arrivait pas à croire que de telles conduites aient pu exister. A leur décharge, la guerre avait durablement modifié les esprits et si les traditions sang-purs étaient toujours de rigueurs elles étaient désormais plus souples. Le Serdaigle n’arrivait pas à imaginer son père pourtant froid et intransigeant le torturer comme Arcturus l’avait fait sur sa cadette. Lors de cette réminiscence particulièrement cruelle, Lily ne pouvant supporter ce spectacle s’était blotti inconsciemment contre le torse du jeune homme. Scorpius avait alors refermé ses bras autour d’elle. Une satisfaction incohérente l’avait soudainement envahi.

Mercredi 14 mars 1934

Cedrella en venait à regretter sa captivité. A trois jours de son mariage, elle devait subir sans broncher les essayages de sa robe, les recommandations de Lysandra, les piques incessantes et fielleuses de Callidora, la surveillance constante imposée par Arcturus et tout cela avec le sourire. Tous les soirs depuis que son père lui avait annoncé sa prochaine alliance avec le jeune Gresham Nott, la jeune fille pleurait des heures durant. Chaque matin, Lysandra appliquait sur sa fille des sortilège glamour pour réparer les dégâts sur son visage.

Marius étouffa un grognement quand Pollux, son frère de vingt-deux ans le bouscula sans ménagement alors qu’il vidait la cheminée de ses cendres, les répandant alors sur le tapis. Cygnus posa alors son journal et le rudoya vertement. Violetta intervint alors détournant l’attention de son époux sur un autre sujet. Marius entreprit donc de nettoyer la suie tombée au sol. Il dressa l’oreille quand il comprit que ses parents parlaient de sa cousine. Il apprit ainsi tout ce dont il avait besoin. Il s’empressa de terminer son ouvrage, puis se précipita dans la cuisine où il attrapa sa veste et, sans se soucier de quiconque, il sortit dans le jardin et se rendit à la volière. Il savait qu’il y trouverait parchemin et encre camouflé derrière une brique mal scellée. Sa sœur Cassiopéïa s’en servait pour correspondre avec un jeune sorcier d’origine moldue. La demoiselle avait juré que puisque sa famille ne lui permettrait jamais d’épouser celui qu’elle aimait, elle resterait vieille fille. Marius griffonna laborieusement un bref message qu’il adressa au jeune Septimus Weasley. Il roula le parchemin qu’il noua à la patte d’un des hiboux de la famille. Il le regarda s’éloigner quand on le tira sans ménagement. Pollux, l’air furieux et enragé lui hurlait :

« Qu’as-tu encore manigancé sale engeance ? Vermine vas-tu me dire ce que tu fais ici ? »

Pollux jeta à terre son cadet et le roua de coup jugeant qu’un tel être ne méritait même pas qu’on usât de sa baguette pour lui. Alors qu’il sombrait dans l’inconscience Marius eut un sourire. Si Septimus aimait sa cousine comme celle-ci le chérissait, Cedrella serait bientôt une traitresse à son sang. Alerté par les cris, Cygnus et Violetta arrivèrent. Cygnus voyant Marius à terre enjoignit Pollux de le suivre dans la maison, laissant Violetta faire ce que bon lui semblait. Violetta les larmes pleins les yeux ne put que constater que son fils, les côtes broyées, le visage tuméfié, le bras droit tordu respirait à peine