Nuit du 31 octobre au 1er novembre 1981
Sirius observa sa moto disparaître dans le ciel, Hagrid emportait son seul rayon de lumière en cette nuit macabre. Il resta un instant immobile, incapable de bouger. L'effroi que la mort de son meilleur ami avait suscité, l'empêchait de raisonner correctement. Des larmes se mirent à ruisseler sur ses joues cireuses. Le vent froid de cette nuit d'automne balaya ses longues mèches brunes. Il ferma les yeux qu'il essuya rageusement. Un tourbillon d'émotion lui battant les tempes et le cœur : colère, chagrin, culpabilité, rage, fureur, vengeance, déni, vengeance...
Puisqu'Harry était en sécurité avec Dumbledore, Peter allait payer. Ce sale traître... Cet immonde rat... Et dire que c'était lui-même qui avait conseillé à James de prendre cet avorton comme gardien des secrets...
Sirius se tourna une dernière fois vers les ruines de la demeure des Potter. Un part de lui refusait encore de laisser ses amis ainsi. Le jeune homme se morigéna. Plus rien ne pouvait être fait pour Lily et James. De nouvelles larmes inondèrent son visage. Il se força à faire un pâle sourire en songeant avec nostalgie aux blagues partagées avec les maraudeurs mais très vite ses traits se durcirent, son regard devint aussi froid que l'Arctique et il transplana.
De retour dans le logis destiné à cacher Peter, de Voldemort, il entra à la recherche d'un indice. La marque n'était pas présente comme c'était le cas au dessus de celle des Potter, donc Voldemort n'était certainement pas venu ici. De plus, la maison était trop bien ordonnée, aucun signe de lutte n'était à signaler. Par acquis de conscience, Sirius fouilla chaque pièce.
Ne trouvant rien de tangible, il se transforma en Patmol. Il songea, cyniquement, qu'aujourd'hui son apparence de Sinistros était tout à fait approprié. Il commença à humer l'air avant de renifler franchement le sol. Animagus depuis ses quinze ans, Patmol avait largement appris à se servir de son flair, sans compter qu'il connaissait parfaitement l'odeur de Peter.
La piste qu'il avait sentie l'emmena dans le jardin puis dans un champ. La pluie tombait sans discontinuer et le sol n'était que boue. Pourtant Sirius continuait de traquer le rat, l'empreinte odorante s'effaçait, petit à petit, balayait par la météo catastrophique. Patmol lâcha sa baguette pour bien s'imprégner de l'odeur ambiante. D'après ses premières constatations, la trace de Queudver s'arrêtait ici. Il reprit forme humaine et ramassa sa baguette.
Sirius était issu d'une longue lignée de sang-pur très conservatrice et adepte de magie noire. Le jeune homme avait tout fait pour se démarquer de sa famille mais ce soir là, il fut heureux des enseignements de sa mère, la sévère Walburga. Il respira profondément et chassa ses pensées en se concentrant sur un emplacement précis. Walburga lui avait appris, dès son plus jeune âge, à ressentir la magie et à en détecter la trace. De plus, sa formation d'Auror, l'avait poussé à entretenir et approfondir cette science. Il ne mit donc pas longtemps avant de repérer les réminiscences d'un transplanage.
Sirius était déterminé. Son presque frère était mort avec sa douce épouse et ce crime ne resterait pas impuni. Le jeune homme savait qu'il s'apprêtait à effectuer une manœuvre dangereuse. Le transplanage était basé sur trois points précis : détermination, décision et destination. Là, il allait simplement suivre une émanation magique sans en connaître le lieu d'arrivée.
Il souffla se focalisa sur la trace magique et transplana, au pire, il irait rejoindre James dans l'au-delà.
Étonné, Sirius reconnut la maison d'enfance de Queudver. De nouveau, il reprit sa forme canine et traqua son ancien ami. Mais une fois encore, il était arrivé trop tard. La même chose se reproduisit plusieurs fois, Peter ayant sûrement tenté de masquer sa fuite.
Ce ne fut qu'aux petites lueurs de l'aube, qu'une piste sérieuse apparut. Seule l'adrénaline et son obsession de vengeance maintenaient Sirius alerte malgré sa nuit blanche et son désarroi. Patmol fouina dans les bas fonds de Londres. L'odeur du rat était encore fraîche. Il ne devait plus être loin. Pendant encore trois bonnes heures, il suivit son flair et son instinct.
A l'heure où les moldus arpentaient les rues pour se rendre au travail, ce moment où le calme était encore de rigueur mais où les clameurs du petit matin animaient chaque quartier, Sirius aperçut Peter. Nerveux, ce dernier avait les yeux qui se baladaient de gauche à droite, comme s'il se savait poursuivit. Il puait la peur. Elle transpirait par chaque pore de sa peau. Il tenta de s'échapper mais voyant qu'il n'arrivait pas à distancer Patmol, il opta pour la confrontation. Il tremblait mais bientôt, alors que Sirius se retransformait, ses convulsions devinrent, pour des témoins extérieurs, de longs sanglots.
« Lily et James ! Comment as-tu pu faire cela, Sirius ? »*
Incrédule, Sirius le dévisagea certainement une seconde de trop. Peter sortit sa baguette. Il lança un sort d'explosion qui arracha une bonne partie du macadam, mettant à nues les canalisations. Les moldus passant par là furent projetés en tous sens. Avant que Sirius ne puisse comprendre ce qu'il se passait, les cadavres recouvraient le sol et Peter avait disparu. Un unique doigt se trouvait à présent à la place occupait quelques instants plus tôt par Pettigrow. Sirius se mit à rire, d'un rire guttural et sans joie.
Des Aurors et des tireurs de baguettes d'élite apparurent, suivi peu après par une brigade d'oubliators. Sirius riait toujours quand les Aurors l'arrêtèrent pour le meurtre des Potter, celui de Pettigrow et de douzes moldus. Il n'opposa aucune résistance persuadé que cette mascarade serait vite éventée.
Il fut traîné au ministère sans aucune douceur et présenté à Bartemius Croupton, alors directeur de la justice magique. Celui-ci ayant eu confirmation par Albus Dumbledore que Sirius Black était bien le gardien des secrets des Potter, décida alors de son transfert immédiat à Azkaban.
Sirius, comprenant qu'un procès n'était même pas envisagé, tenta de se débattre. Il cria son innocence... La peur lui noua l'estomac mais bien vite sa culpabilité revint le narguer car c'était lui, le responsable. La mort de Lily et James... Harry, orphelin... S'il avait accepté d'être ce fichu gardien... Rien de tout cela ne serait arrivé. Alors, il arrêta de crier puis de se débattre et se laissa mener vers son expiatoire.
Scorpius, sentant les tremblements incontrôlés de plus en plus fréquents de Lily Luna, décida d'arrêter là, le souvenir. Et ils revinrent au square Grimmaurd.
Dimanche 19 août 2023
Comme chaque dimanche de l'année, hormis lorsqu'ils étaient à Poudlard, un repas familial avait lieu à midi au Terrier. James riait encore d'une blague de son oncle Ron alors qu'il rentrait au domicile londonien de ses parents, puis devant l'air courroucé de sa mère il fila dans sa chambre. Albus et Harry s'éclipsèrent à leur tour à l'étage, fuyant les foudres de Ginny.
Cette dernière regarda sa fille Lily avec colère et déception. Lily avait pourtant toujours aimé aller chez ses grands-parents mais ce jour là, l'adolescente n'avait guère apprécié les remarques de sa mère puis de sa grand-mère sur ses projets d'avenir. Elle s'était donc repliée sur elle-même et n'avait plus participé aux discussions. Lily avait refusé de venir à table malgré l'insistance de ses oncles, des remontrances de sa mère ou des supplications de sa grand-mère. Hermione était alors intervenue et tous avaient fini par la laisser tranquille.
Cependant, Ginny ne comptait pas en rester là.
« Pourrais-je savoir quel doxy t'a piqué chez ta grand-mère ? - Rien, répondit Lily en croisant ses bras sur sa poitrine. - Rien ?! Tu te moques de qui là ? - Ah ! Parce que toi tu ne te moques jamais peut-être, cria Lily alors que des larmes s'échappèrent de ses yeux. Tu es tellement parfaite. Mais moi... Moi, renifla Lily, qu'importe ce que je ressens... Qu'importe mes désirs... Ce n'est pas assez bien pour toi. »
Ébranlée, Ginny s'approcha d'elle, lui effaça ses larmes et demanda plus calmement :
« De quoi parles-tu Lily ? - Tu critiques tous mes choix. Oh ! Lily passe son temps dans le grenier, je me demande bien ce qu'elle peut y trouver, relata-t-elle dans une mauvaise imitation de sa mère. Tu ne sais pas la meilleure maman, Lily veut devenir archéomage... Elle qui est si brillante si ce n'est pas malheureux... Tu en veux encore ou tu as compris ? »
Dans un geste qu'elle regretta immédiatement, Ginny secoua sa fille : « Rien ne te donne le droit de me manquer de respect. Je suis désolée si je t'ai blessée mais je ne te comprends plus. Tu as toujours été si vive et énergique, désormais tu passes tout ton temps avec Scorpius dans les combles. Tu voulais être journaliste tu veux maintenant être historienne. - Oh maman, réveilles-toi, je voulais être journaliste à huit ans ! Dis-moi depuis quand t'es tu intéressée à ce que je faisais réellement ?Tu critiques ce que je fais mais tu ne sais même pas de quoi il s'agit . Qu'est ce qui te gêne dans le fait que je m'entende bien avec Scorpius ou que je m'enferme dans le grenier ? - Lily ! soupira Ginny en se massant du bout des doigts les tempes. Si tu me parlais plus souvent peut-être que j'arriverai à comprendre. - Tu travailles beaucoup et puis tu n'as montrée aucun intérêt pour ce que je faisais sauf pour m'engueuler quand il y a eu un incident, reprit l'adolescente avec morgue. »
Ginny soupira, un dialogue de sourd s'était instauré et la rouquine réfléchissait au moyen de le briser. Ginny ne comprenait pas comment Lily et elle, avaient pu autant s'éloigner l'une de l'autre en aussi peu de temps.
« Montre-moi, dit soudain sa mère. - Te monter quoi ? s’enquit la Serdaigle interloquée. - Montre-moi ce que tu fais avec Scorpius. » Lily rougit légèrement sous le double sens de ces paroles puis elle expliqua :
« Il nous faudrait un objet intéressant. »
Ginny sortit de la pièce quelques minutes puis elle revint avec une épingle de cravate. Lily fronça les sourcils mais sortit son pendentif en enseignant à sa mère le sort à jeter. Dimanche 2 mai 2010
Les lueurs de l'aube filtraient à peine à travers les vitres de la pièce. A cette heure aussi matinale, tous les élèves de Poudlard ou presque dormaient encore d'un sommeil mérité. Teddy Lupin, jeune Poufsouffle de deuxième année, était roulé en boule dans un canapé de sa salle commune. Depuis quelques heures, le deux mai avait commencé et Teddy détestait cette date que tous ceux de sa génération célébraient .
Cette journée avait été décrétée férié onze ans plus tôt et été consacrée à la célébration de la victoire et au devoir de mémoire des victimes du sinistre mage Voldemort. On louait son propre parrain d'avoir débarrassé leur monde du fléau qu'était devenu Tom Jedusor et les camarades du jeune Lupin fêtait la journée et entretenait la légende du Sauveur. Pourtant à l'instar de ceux qui avait connu la guerre et de quelques autres élèves, Teddy pleurait des êtres chers, au delà de la victoire.
Teddy avait pourtant la chance d'être très entouré et aimé : par sa grand-mère Andromeda Tonks qui l'éduquait, par son parrain et son épouse Harry et Ginny Potter qui le considéraient comme leur quatrième enfant et qui étaient toujours présents pour lui, par Victoire Weasley qui depuis ses cinq ans ne le lâchait pas d'une semelle... Cependant, aucun d'entre eux n'arrivait à combler le vide laissé par ses parents morts douze ans auparavant, lors de la bataille de Poudlard.
Petit, il avait écouté avec avidité tous les récits de sa grand-mère et de son parrain concernant ceux-ci. Puis en grandissant, il avait cherché à les connaître davantage. Il n'avait aucun souvenir d'eux. Mais Teddy avait vu à quel point Andromeda avait du mal à parler de sa défunte fille, tant la tristesse la tenaillait encore, et il avait fini par cesser de l'interroger sur Nymphadora.
Harry lui avait promis de partager certains de ses souvenirs avec lui quand il aurait eu ses buses mais Teddy trouvait ce temps là encore trop lointain.
Le jeune Poufsouffle resserra son étreinte sur le coussin qu'il serrait contre lui. Il soupira quand il entendit les premiers rires fusaient des dortoirs. Matthew, le meilleur ami du métamorphomage, savait à quel point celui-ci était déprimé à cette période de l'année, aussi se plaça-t-il à ses côtés sans une parole, lors de la cérémonie officielle organisé par le ministère, espérant que sa présence serait tout de même réconfortante pour son ami. Victoire vint à son tour près de Teddy et lui attrapa la main qu'elle serra dans la sienne. A la fin des discours et de la lecture des noms des victimes, une longue procession se dirigea vers le nouveau cimetière de Pré-au-Lard, à l'orée de la forêt interdite. Teddy fut bientôt rejoint par Harry, Ginny et Andromeda, pour se recueillir sur la tombe de Remus et Nymphadora Lupin. Le jeune garçon dut se mordre les lèvres pour s'empêcher de pleurer.
Quelques heures plus tard, alors que beaucoup de visiteurs étaient déjà repartis, Teddy, muni de la cape d'invisibilité d'Harry, se faufila dans le parc de Poudlard. Avec un pincement au cœur, il se souvint que ses parents y avaient passé leurs derniers instants. Il arriva à la grille de Poudlard qui était grande ouverte comme tous les ans lors des commémorations.
Il la franchit sans un remord et retourna sur la sépulture de ses parents où il laissa alors librement ses larmes s'écoulaient. Assis à même le sol devant la tombe, Teddy sursauta quand une main se posa sur son épaule. Bientôt un homme au visage bardé de cicatrice s'assit près de lui, sans se soucier de la poussière.
« Je sais que tu te moques que tes parents soient des héros, fit Bill, pourtant tu sais que c'est pour toi qu'il voulait un monde meilleur. Je crois que si ton père avait su que ta mère allait le suivre, il l'aurait sûrement stupéfixé. Il a mis du temps à accepter ses sentiments pour Tonks mais il l'aimait plus que sa propre vie. Il était si fier de toi quand tu es né. Je me souviendrais toujours du soir où il est venu nous l'annoncer. Tu sais, tu as le droit de pleurer mais dans ces moments là, tu ne devrais pas rester seul. - Léonor Flint dit que je ne les ai pas connus alors que je ne peux pas être triste. - Flint est un idiot, répliqua instantanément le père de Victoire. Tu sais ma fille aînée est très triste aussi. Elle dit que nous avons mal choisi son prénom car le jour de sa naissance est un jour de deuil et que rien n'est plus triste que la mort. Tu vois je ne suis pas d'accord. Mon frère Fred est parti le même jour que tes parents et j'en suis très peiné mais je sais qu'il aurait voulu nous voir heureux et en sécurité. Ils se sont battus pour cela et le plus grand honneur qu'on puisse leur faire c'est de ne pas les oublier bien sûr mais surtout d'être comblé par la vie. »
Bill se tut et le petit garçon s'imprégna de ses paroles et un pâle sourire naquit sur ses lèvres, alors il déposa un baiser sur la joue du rouquin, se leva et parti souhaiter à Victoire un bon anniversaire |