Chapitre 21
Scroutts, fouine et araignées
Pour leur premier cours de Soins aux Créatures Magiques, Hagrid les attendait devant sa cabane, une main sur le collier de Crockdur, son énorme chien noir. A ses pieds, plusieurs caisses en bois étaient posées sur le sol et Crockdur tirait sur son collier en gémissant, apparemment impatient d'en examiner le contenu de plus près. Lorsqu'ils approchèrent, ils entendirent un raclement ponctué de petites explosions. -Bonjour ! lança Hagrid en souriant à Potter et sa bande. Approchez-vous les Serpentard, ça au moins, ça va vous plaire... des Scroutts à pétard ! Hagrid montra les caisses. « Beuârk ! » s'écria Lavande Brown en faisant un bond en arrière. « Beuârk » était le mot qui pouvait le mieux définir les Scroutts à pétard aux yeux de Drago. On aurait dit des homards difformes, dépourvus de carapace, d'une pâleur horrible, d'aspect gluant, avec de petites pattes qui dépassaient aux endroits les plus inattendus et sans tête visible. Il y en avait environ une centaine dans chaque caisse. Longs d'une quinzaine de centimètres, ils rampaient les uns sur les autres, se cognant contre les parois, comme s'ils étaient aveugles, et dégageaient une forte odeur de poisson pourri. De temps à autre, des étincelles jaillissaient à l'extrémité de l'une des créatures qui se trouvait alors propulsée de plusieurs centimètres en avant. -Ils viennent d'éclore, dit fièrement Hagrid. Vous allez pouvoir les élever vous-mêmes ! J'ai pensé que ça ferait un bon projet ! -Et pourquoi est-ce qu'on aurait envie de les élever ? dit Drago d'une voix glaciale. Qu'est-ce que c'était encore que cette idée à la noix... Crabbe et Goyle ponctuèrent son intervention d'un petit rire. Hagrid parut pris de court par la question. Drago enchaîna : -Qu'est-ce qu'ils font, ces animaux-là ? A quoi servent-ils ? Hagrid ouvrit la bouche. Apparemment, il réfléchissait. Il y eut quelques instants de silence, puis il répondit d'un ton brusque : -Ça, ce sera pour le prochain cours, Malefoy. Aujourd'hui, il faut les nourrir, c'est tout. On va essayer différentes sortes d'aliments. C'est la première fois que j'en ai, de ceux-là, je ne sais pas très bien ce qui peut leur plaire. J'ai apporté des œufs de fourmi et des foies de grenouille et puis un morceau de couleuvre. Vous n'aurez qu'à essayer de leur donner un peu de chaque. -Ouïe ! s'écria Dean Thomas, une dizaine de minutes plus tard. Il m'a eu ! Hagrid se précipita vers lui d'un air inquiet. -Il a explosé ! expliqua Dean d'un ton furieux en montrant à Hagrid une brûlure sur sa main. -Ah, oui, ça, ce sont des choses qui arrivent, dit Hagrid avec un hochement de tête. -Beuârk ! répéta Lavande Brown. Hagrid, qu'est-ce que c'est que cette chose pointue, là ? -Il y en a qui ont des dards, répondit Hagrid avec enthousiasme. (Lavande retira vivement sa main de la boîte.) Je pense que ce sont les mâles... Les femelles ont une espèce de ventouse sur le ventre... Ça doit être pour sucer le sang. -Je comprends maintenant pourquoi il est si important de les maintenir en vie, dit Drago d'un ton sarcastique, peu enchanté à la perspective d'un nouveau cours du garde-chasse les mettant en danger. Qui n'a jamais rêvé d'avoir des animaux de compagnie qui brûlent, piquent et sucent le sang ? -Ce n'est pas parce qu'ils ne sont pas très beaux qu'ils ne peuvent pas être utiles, répliqua sèchement Granger. Le sang de dragon a des vertus magiques prodigieuses, mais il n'empêche qu'on n'a pas très envie d'avoir un dragon à la maison. Drago apprécia encore moins s'être fait rabattre le caquet par la Sang de Bourbe après avoir vu Potter et Weasley échanger un sourire amusé.
Il pensait pouvoir avoir sa revanche sur les trois Gryffondor quelques jours plus tard, lorsqu'il interpella Weasley dans le hall rempli d'élèves qui faisaient la queue pour entrer dans la Grande Salle. -Weasley ! Hé, Weasley ! Potter, Weasley et Granger se retournèrent. Drago, Crabbe et Goyle arrivaient derrière eux, l'air ravi. -Qu'est-ce qu'il y a ? demanda sèchement Weasley. -Ton père est dans le journal, Weasley ! dit Drago. Il brandissait un exemplaire de La Gazette du sorcier en parlant le plus fort possible pour que tout le monde l'entende. -Écoute un peu ça !
NOUVELLES BÉVUES AU MINISTÈRE DE LA MAGIE
Il semble que les ennuis du ministère de la Magie soient loin d'être terminés, écrit notre envoyée spéciale, Rita Skeeter. Récemment montré du doigt pour l'insuffisance de son service d'ordre lors de la Coupe du Monde de Quidditch, et toujours incapable de donner la moindre explication concernant la disparition de l'une de ses sorcières, le ministère se voit à nouveau plongé dans l'embarras à la suite des fantaisies d'Arnold Weasley, du Service des détournements de l'artisanat moldu.
Drago releva la tête. -Tu te rends compte, Weasley, croassa-t-il, ils ne connaissent même pas son nom exact, c'est comme si ton père n'avait aucune existence. Dans le hall, à présent, tout le monde écoutait. D'un geste théâtral, Drago déplia le journal et reprit sa lecture.
Arnold Weasley, qui fut poursuivi il y a deux ans pour possession d'une voiture volante, s'est trouvé impliqué hier dans un incident qui l'a opposé à des représentants de l'ordre moldu (appelés gendarmes) à propos de poubelles particulièrement agressives. Il semblerait que Mr Weasley se soit précipité au secours de Maugrey « Fol Œil », un ex-Auror d'un âge avancé, qui fut mis à la retraite par le ministère lorsqu'il apparut qu'il était devenu incapable de faire la différence entre une poignée de main et une tentative de meurtre. Comme on pouvait s'y attendre, en arrivant devant la maison transformée en camp retranché de Mr Maugrey, Mr Weasley fut bien obligé de constater que l'ancien Auror avait une fois de plus déclenché une fausse alerte. Avant de pouvoir échapper aux gendarmes, Mr Weasley s'est vu contraint de lancer plusieurs sortilèges d'Amnésie afin de modifier la mémoire des témoins. Il a cependant refusé de répondre aux questions de La Gazette du sorcier qui souhaitait lui demander pourquoi il avait cru bon d'impliquer le ministère de la Magie dans cette bouffonnerie peu digne d'un de ses représentants, et dont les conséquences pourraient se révéler fort embarrassantes.
-Et il y a une photo, Weasley ! dit Drago en agitant le journal qu'il tenait bien en vue. Une photo de tes parents devant leur maison - si on peut appeler ça une maison ! Ta mère aurait peut-être intérêt à perdre quelques kilos, tu ne crois pas ? Weasley tremblait de fureur. Tous les élèves avaient les yeux fixés sur lui. -Va te faire voir, Malefoy, dit Potter. Viens, Ron... -Ah oui, c'est vrai que tu es allé chez eux, cet été, Potter, lança Drago d'un air dédaigneux. Alors, dis-moi, est-ce que sa mère ressemble vraiment à un cochonnet ou bien c'est simplement la photo qui fait ça ? Potter et Granger durent retenir Weasley par le dos de sa robe pour l'empêcher de se ruer sur Malefoy. -Et ta mère à toi, Malefoy, répliqua Potter, pourquoi est-ce qu'elle avait l'air d'avoir une bouse de dragon sous le nez, quand je l'ai vue ? Elle est toujours comme ça ou bien c'est simplement parce que tu étais avec elle ? Le teint pâle de Drago rosit légèrement. -Ne t'avise pas d'insulter ma mère, Potter ! -Dans ce cas, ferme-la, répliqua Potter en s'en allant. Drago vit rouge et lui balança le premier maléfice qui lui était passé par la tête. BANG ! Il le rata de peu et le sortilège frôla la joue du bonoclard. Potter plongea la main dans sa poche pour saisir sa baguette magique mais, avant qu'il ait eu le temps de riposter, il y eut un second « BANG » et un rugissement qui résonna dans tout le hall d'entrée : -PAS DE ÇA, MON BONHOMME ! Drago eut alors une atroce sensation d'écrasement, son champ de vision bascula et autour de lui tout sembla prendre des proportions gigantesques. Le professeur Maugrey descendait en claudiquant les marches de l'escalier de marbre. Il avait sorti sa baguette magique et la pointait droit sur Drago. Ce dernier essaya de lui parler mais seuls quelques couinements sortirent de sa bouche. Il vit les yeux de Potter et de tous les autres s’écarquiller en découvrant que Fol Œil l'avait transformé... en fouine ! Drago-fouine tremblait de tout son corps sur le sol recouvert de dalles, à l'endroit exact où s'était trouvé son corps d'humain quelques instants auparavant. Un silence terrifié régna soudain dans le hall. A part Maugrey Fol Œil, personne n'osait faire un geste. Maugrey regarda Potter de son œil normal, l'autre étant tourné vers l'arrière de sa tête. -Tu as été touché ? grogna Maugrey. Sa voix était grave et rocailleuse. -Non, répondit un Potter perplexe, il m'a raté. -LAISSE-LE ! s'écria Maugrey. -Laisse quoi ? demanda Potter, sans comprendre. -Pas toi, lui ! gronda Maugrey en montrant du pouce pardessus son épaule Crabbe, qui venait de s'immobiliser au moment où il s'apprêtait à ramasser la fouine. Zut, l'œil mobile de Maugrey était magique et lui permettait de voir derrière sa tête. Maugrey s'avança en boitant vers Crabbe, Goyle et Drago-fouine qui poussa un couinement terrifié et fila vers l'escalier qui menait au sous-sol du château. -Non, pas par là ! rugit Maugrey en pointant à nouveau sa baguette magique sur la fouine qui fit un bond de trois mètres, retomba avec un bruit sourd sur le sol (Aïe!) puis s'éleva à nouveau dans les airs. Je n'aime pas les gens qui attaquent par-derrière, grogna-t-il, tandis que la fouine faisait des bonds de plus en plus hauts en lançant des cris de douleur. Chaque coup contre le sol envoyait des décharges de douleurs dans tous les membres du corps de Drago, aussi petits soient-ils devenus. C'est lâche, c'est minable, c'est répugnant... Drago-fouine fut à nouveau projeté en l'air, agitant inutilement sa queue et ses pattes. -Ne - refais - jamais - ça ! lança Maugrey, en détachant chaque mot au rythme des bonds et des chutes de la fouine. Pitié que cela s'arrête, supplia Drago dans de nouveaux couinements. Il n'avait jamais souffert pareille douleur par le passé et ses minuscules larmes coulaient à flot dans son pelage. -Professeur Maugrey ! s'exclama une voix d'un ton scandalisé. Le professeur McGonagall descendait l'escalier de marbre, les bras chargés de livres. Drago n'avait jamais été aussi heureux de la voir. -Bonjour, professeur, dit calmement Maugrey, qui continuait de faire bondir l'animal de plus en plus haut. -Que... Qu'est-ce que vous faites ? balbutia le professeur McGonagall en suivant des yeux l'animal qui se tortillait dans les airs. -J'enseigne, répondit-il. -Vous ens... Maugrey, c'est un élève ? s'écria le professeur McGonagall d'une voix suraiguë en laissant tomber ses livres par terre. Enfin une réaction à la hauteur de la punition aberrante que Drago était en train de subir. -Ouais, dit Maugrey. -Non ! hurla McGonagall qui dévala l'escalier, sa baguette magique en avant. Plus vite McGonagall, plus vite ! Un instant plus tard, il y eut un craquement sonore et Drago réapparut, recroquevillé sur le sol, ses cheveux blonds et soignés tombant sur son visage qui était devenu d'un rosé brillant. Il se releva en faisant la grimace. La moindre parcelle de son corps le faisait désormais souffrir. -Maugrey, nous n'avons jamais recours à la métamorphose pour infliger des punitions ! dit le professeur McGonagall d'une voix faible. Le professeur Dumbledore vous l'a sûrement précisé ? -Il y a peut-être fait allusion, c'est possible, répondit Maugrey en se grattant le menton d'un air indifférent. Mais j'ai pensé qu'un bon traitement de choc... -Nous donnons des retenues, Maugrey ! Ou nous parlons avec le responsable de la maison à laquelle appartient l'élève fautif ! -D'accord, c'est ce que je ferai, dit-il en regardant Drago d'un air dégoûté. Drago, dont les yeux pâles étaient encore humides de douleur et d'humiliation, mais qui avait heureusement réussi à cacher ses larmes, lança un regard hostile à Maugrey et marmonna que son père en entendrait parler... -Ah ouais ? dit tranquillement Maugrey en avançant d'un pas claudicant, ponctué par le claquement régulier de sa jambe de bois qui résonnait dans tout le hall. Je le connais depuis longtemps, ton père, mon bonhomme... Tu n'as qu'à lui dire que Maugrey surveille son fils de près... Dis-lui ça de ma part... Le responsable de ta maison, c'est Rogue, non ? -Oui, répondit Drago d'un ton hargneux, ne se laissant pas démonter devant la menace. Il avait au contraire hâte d'entendre ce que son directeur de maison aurait à dire au sujet de tout cela. -Encore un vieil ami, grogna Maugrey. Ça fait longtemps que j'ai envie de bavarder avec le vieux Rogue... Allez, viens un peu par là... Il saisit Drago par le bras et l'entraîna en direction du sous-sol. Comme c'était à prévoir, Rogue entra dans une colère noire en apprenant ce que Maugrey avait fait subir à son élève favori. Après avoir proféré suffisamment de menaces sur ce qui attendait Fol Œil s'il s'avisait de toucher à un seul cheveu d'un autre élève de Serpentard et avoir promis d'aller voir le directeur sur le champ, Rogue congédia le professeur de Défense contre les forces du Mal qui ne semblait pas véritablement affecté par le sermon du Maître des Potions. Il proposa ensuite à Drago de passer par l'infirmerie mais celui-ci refusa. Même s'il souffrait encore et se demandait si l'une de ses côtes n'était pas fêlée, il était hors de question de donner à Maugrey la satisfaction de l'avoir envoyé chez Madame Pomfresh. A la fois furieux et terrifié à l'idée d'avoir à refaire face à cet enseignant le lendemain pour son premier cours de Défense contre les forces du Mal, Drago prit le chemin de son dortoir pour aller se reposer quelques heures avant le dîner. Il aurait aimé rester dans son lit pour de bon, mais il fallait néanmoins qu'il fasse une apparition dans la Grande Salle, sans quoi les ragots à son sujet n'en seraient que plus alimentés.
Le lendemain, Drago Crabbe et Goyle s'étaient installés aussi loin de possible du bureau de Maugrey pour son cours de Défense contre les forces du Mal, lorsqu'ils entendirent le claquement de sa jambe de bois sur le sol résonner en écho dans le couloir. -Les livres, vous pouvez les ranger, grogna le professeur mutilé, en allant s'installer à son bureau. Vous n'en aurez pas besoin. Ils remirent aussitôt leurs manuels dans leurs sacs. Maugrey sortit un registre, secoua sa longue crinière de cheveux gris pour dégager son visage tordu et couturé, puis commença à faire l'appel, son œil normal suivant la liste des noms tandis que l'œil magique tournait dans son orbite, se fixant sur chaque élève qui répondait «présent ». Au nom de Drago Malefoy, il laissa durer une pause gênante, sans nul doute pour l'intimider encore plus après sa métamorphose de la veille. Il attaqua ensuite son cours, entrant directement dans le vif du sujet : -Quelqu'un peut-il me dire quels sont les maléfices que les lois de la sorcellerie répriment avec le plus de sévérité ? Plusieurs mains se levèrent timidement. Le premier élève interrogé cita l'Imperium. Maugrey marqua son approbation, puis se leva avec lenteur, ouvrit le tiroir de son bureau et en sortit un bocal en verre. A l'intérieur, trois grosses araignées s'agitaient en tous sens pour essayer de sortir. Maugrey plongea une main dans le bocal, attrapa une des araignées et la posa au creux de sa main pour que tout le monde puisse la voir. Puis il pointa sa baguette magique sur elle et murmura : « Impero ! » L'araignée sauta alors de sa main, se laissa descendre le long d'un imperceptible fil de soie et commença à se balancer comme si elle exécutait un numéro de trapèze. Puis elle tendit les pattes et fit un saut périlleux en arrière, rompant le fil et tombant sur le bureau où elle se mit à faire la roue en décrivant des cercles. Maugrey agita sa baguette magique et l'araignée se dressa sur ses pattes de derrière en sautillant comme un danseur de claquettes. Tout le monde se mit à rire. Tout le monde, sauf Maugrey et Drago. Il avait déjà compris où leur enseignant voulait en venir. -Vous trouvez ça drôle, hein ? grogna-t-il. Ça vous plairait que je vous oblige à faire la même chose ? Les rires s'évanouirent presque instantanément. -Contrôle total, dit Maugrey à voix basse tandis que l'araignée se recroquevillait et roulait sur elle-même d'un bout à l'autre du bureau. Je pourrais lui ordonner de se jeter par la fenêtre, de se noyer, ou de sauter dans la gorge de l'un ou l'une d'entre vous... Il y a des années, nombre de sorcières et de sorciers se sont retrouvés soumis à un sortilège d'Imperium. Les gens du ministère ont eu bien du travail pour déterminer qui avait été forcé d'agir sous la contrainte et qui avait agi de sa propre volonté. Il fixa alors Drago, autant de son œil magique que de son œil véritable. Les paroles de Lucius lui revinrent alors en tête, plus claires que jamais « A sa disparition, nous avons dû survivre au mieux à la prise de contrôle des opposants ». Son père avait donc prétendu avoir agi sous l'influence de l'Imperium... Mais vu l'expression qu'avait prise Maugrey en le scrutant, Drago comprit qu'il n'avait jamais cru à l'histoire de Lucius. Il soutint néanmoins son regard, déterminer à ne pas laisser l'ex Auror le déstabiliser. Ce dernier reprit : -L'Imperium peut être combattu, et je vais vous apprendre comment, mais il faut une vraie force de caractère pour s'y opposer et tout le monde n'en est pas capable. Il vaut mieux éviter d'en être victime si c'est possible. VIGILANCE CONSTANTE ! aboya-t-il, et tout le monde sursauta. Ce vieux bonhomme était complètement cinglé en fait... Drago s'était retenu d'écrire à son père la veille, trop humilié par ce qu'il s'était passé, mais hésitait désormais à le faire s'il y avait peut-être une chance de retirer son poste d'enseignant à ce vieux débris de guerre... Maugrey prit l'araignée sauteuse et la remit dans le bocal. -Quelqu'un peut-il me citer un autre sortilège interdit ? On lui proposa alors le sortilège Doloris. Maugrey se tourna vers la classe tout entière, et plongea une nouvelle fois la main dans le bocal et prit une autre araignée qu'il posa sur le bureau où elle resta immobile, apparemment trop terrifiée pour bouger. -Le sortilège Doloris, dit Maugrey. Il va falloir l'agrandir un peu pour que vous compreniez mieux le principe. Il pointa sa baguette sur l'araignée. Amplification ! marmonna-t-il. L'araignée enfla aussitôt. Elle était à présent plus grosse qu'une tarentule. Celui-ci leva à nouveau sa baguette, la pointa sur l'araignée et murmura : « Endoloris ! » Les pattes de l'araignée cédèrent alors sous son corps. Elle roula sur elle-même, agitée d'horribles convulsions, se balançant de tous côtés. Elle n'avait aucune possibilité d'émettre le moindre son mais Drago était sûr que, si elle avait eu une voix, elle aurait poussé des hurlements déchirants. Maugrey tint sa baguette immobile et l'araignée fut parcourue de spasmes et de tremblements de plus en plus violents. Drago connaissait déjà les trois sortilèges impardonnables de ses lectures, mais assister à la torture du Doloris en direct était très différent de lire à son sujet. Il avait l'impression d'avoir été intégralement trempé de la tête aux pieds dans un bain glacé en assistant aux souffrances de l'araignée. Mais en même temps... Une telle puissance se dégageait de son tortionnaire à ce moment-là qu'il en devenait presque impressionnant.... Un tel pouvoir imposait forcément la considération, or Drago avait toujours rêvé d'être respecté de tous... Ce sortilège était terrible, certes, mais... quelle envergure... Maugrey leva sa baguette. Les pattes de l'araignée se détendirent, mais elle continua de se convulser. -Reducto, murmura Maugrey. L'araignée retrouva instantanément sa taille normale et Maugrey la remit dans le bocal. -La douleur, dit-il à voix basse. On n'a besoin d'aucune arme pour faire mal à quelqu'un quand on est capable de jeter le sortilège Doloris... Celui-là aussi a été très utilisé à une certaine époque. Quelqu'un peut-il me citer d'autres sortilèges interdits ? Drago regarda autour de lui. A en juger par l'expression qu'il voyait sur les visages de ses camarades, tout le monde se demandait ce qui allait bien pouvoir arriver à la dernière araignée. Comme le silence durait, il finit par prendre la parole. -Avada Kedavra. Maugrey le regarda quelques instants sans rien dire, et plusieurs élèves lui jetèrent des coups d'oeil d'un air anxieux. Maugrey finit par reprendre d'un voix basse, presque lasse : -Oui, le dernier et le pire. Avada Kedavra... Le sortilège de la mort. Il glissa la main dans le bocal et, comme si elle devinait le sort qui l'attendait, la troisième araignée se mit à courir frénétiquement au fond du récipient pour essayer de lui échapper. Mais Maugrey l'attrapa et la posa à son tour sur le bureau où elle recommença à courir, en proie à une véritable panique. Maugrey leva sa baguette et Drago fut parcouru d'un frisson. « Avada Kedavra ! » Il y eut un éclair aveuglant de lumière verte et un bruit semblable à une rafale de vent, comme si quelque chose d'invisible et d'énorme avait brusquement pris son vol. Aussitôt, l'araignée roula sur le dos. Elle était apparemment intacte mais il n'y avait aucun doute : elle était morte sur le coup. D'un geste de la main, Maugrey balaya le bureau, jetant par terre le cadavre de l'araignée. Lorsque son cours s'acheva enfin, les Serpentard en sortirent bouleversés, mais également exaltés pas un apprentissage bien au-delà de ce à quoi ils avaient jusque là été habitués. Drago, lui, resta silencieux jusqu'au dîner.
Durant les semaines qui suivirent, le sommeil de Drago fut souvent perturbé par d'indéfinissables cauchemars qui s'achevaient généralement dans un éclat de lumière verte. Drago dormait si mal qu'il se sentait tous les jours nerveux, presque à bout de nerfs... Au moins, aussi stupide soit le projet du garde-chasse avec ses créatures infâmes, il avait le mérite de lui changer les idées après d'aussi mauvaises nuits. Les Scroutts à pétard grandissaient à une vitesse étonnante, compte tenu du fait que personne n'avait encore découvert en quoi consistait leur régime alimentaire. Hagrid était enchanté et suggéra, dans le cadre de leur « projet », qu'ils viennent le soir à tour de rôle jusqu'à sa cabane pour observer les Scroutts et prendre des notes sur leur extraordinaire comportement. -Il n'en est pas question, dit Drago d'un ton catégorique lorsque Hagrid eut proposé l'idée avec l'expression du père Noël sortant de sa hotte un jouet inattendu. Je vois suffisamment ces bestioles répugnantes pendant les cours, merci bien. Le sourire de Hagrid s'évanouit. -Tu vas faire ce qu'on te dit, grogna-t-il, sinon, je pourrais bien suivre l'exemple du professeur Maugrey... Il paraît que tu fais très bien la fouine, Malefoy. Les élèves de Gryffondor éclatèrent d'un grand rire. Drago rougit de colère, mais le souvenir du châtiment de Maugrey restait suffisamment cuisant pour le retenir de répondre. |