Chapitre 2 : Je t'offre la gloire en échange de ta vie

Shizuka Hiu, celle qui tenait entre ses mains le destin de Miyuki était là, à l'entrée et ne se doutait de rien. Elle semblait attendre sagement aux côtés de son père, un haut gradé de la marine, Fugo Hiu, l'oncle de Miyuki. Celle-ci d'ailleurs la regardait d'un air entendu en compagnie de son frère du haut de l'escalier avant que celui-ci ne dise :

- Méfies-toi, ma chère sœur. Tu n'auras qu'une seule et unique chance de la convaincre... Tâches de ne pas te louper, fit-il légèrement moqueur

- La ferme ou je dis aux parents toutes tes charmantes petites combines, menaça-t-elle à voix basse.

En effet, cela faisait de nombreuses années que Miyuki était au courant pour les activités de contrebande de son frère. Marijoa était un lieu stratégique reliant Grand Line au nouveau monde. Or, cet endroit était strictement réservé aux tenryubitos, leurs familles ainsi que leurs serviteurs et bien entendus, les hauts gradés du gouvernement mondial. Le seul autre moyen de passage était de plonger sous les flots et se rendre sur l'île des Hommes poissons, endroit instable et sauvage, du moins en 1452, ayant ouvertement déclaré la guerre au gouvernement mondial. Plus de 90 % des marchandises envoyées étant réquisitionnées par ceux-là même, tuant les humains et pillant leurs richesses. Cependant, Hisashi Hiu était un tenryubito intelligent qui eut pour idée de se remplir les poches du droit de passage et d'acheminement de marchandises de luxe vers le nouveau monde. Il assurait bien sur ce petit business dans le dos de ses parents et de sa jeune sœur jusqu'à ce qu'elle finisse par le surprendre un jour en pleine transaction…

C'est alors que suite à cette menace, Hisashi se mit à ricaner, lui disant d'un air moqueur :

- Voyons… tu n'oseras pas, tout de même…. Et puis, sincèrement, qui croirait une gamine de 12 ans ? Même si tu l'avouais à nos imbéciles de parents, ils n'en croiraient mots, avant bien sûr d'en avoir vu la preuve …

Suite à ces mots, il se détourna d'elle et descendit l'escalier en adoptant une allure et un air parfaitement hypocrite, feignant la joie de ces retrouvailles familiales. Or, bien sûr, tout cela n'était qu'une scène, un mensonge joué mainte fois, inculqué depuis la petite enfance sur le comment saluer des personnes importantes... Miyuki soupira un bon coup, n'ayant jamais véritablement été une bonne élève à ce petit jeu et alla à l'encontre des arrivants avec un air certes poli, mais passable, trahissant une sorte d'exaspération de ce milieu bien trop maniéré et hypocrite pour elle... C'est justement pour cela qu'elle voulait s'enfuir, loin de cette ville maudite où tous prononçaient des mots qui sonnaient faux, creux à en mourir.

Mais personne ne semblait se rendre compte de son état d'esprit tandis qu'elle s'approchait de sa cousine, récitant d'une voix morne les paroles d'usage.

- Comment allez-vous ma chère cousine ? J'espère que vous avez fait bon voyage.

La ressemblance entre elle et sa cousine était ahurissante. On aurait dit deux jumelles. Elle en profita pour l'observer, alors que son grand frère échangeait des banalités polies et ennuyantes au possible avec leur oncle. Le regard de sa cousine semblait calme et poli, sa posture était gracieuse, mais stricte, normal venant d'une fille de marine.

Mais Miyuki comprit grâce aux quelques touches légères et quasi imperceptible de maquillage, ainsi qu'avec le ruban en dentelle qu'elle portait discrètement dans ses cheveux, qu'elle aimait à se sentir belle et attirante aux yeux des autres. Miyuki sourit un peu plus à la découverte de ces points non négligeables et commença à discuter de manière polie et convenable avec cette fille qu'elle ne voyait à peine une fois par an. Une fille qu'elle ne connaissait absolument pas, une ombre.

- Oh, mais certainement, celui-ci m'a comblé de ravissements, répondit celle-ci en souriant faussement.

- J'en suis fort aise, lui répondit Miyuki sous un masque parfait d'hypocrisie alors qu'elle en avait franchement rien à faire de savoir si elle avait ou non passé un bon voyage... Du moment qu'elle puisse rapidement lui prendre sa place pour mieux s'enfuir !

Puis ce fut rapidement l'heure de déjeuner et l'on vit arriver à table les maîtres de maison, Akiyuki Hiu et sa femme Olgara, ils étaient les parents de Hisashi et Miyuki, tous deux tenryubitos. Miyuki vit son père étreindre son oncle qu'il n'avait revu depuis l'an dernier alors que sa mère restait légèrement en retrait. Miyuki savait bien que la grande tenryubito Olgara Hiu n'était pas du genre à converser avec n'importe qui. Surtout avec un tenryubito ayant quitté Marijoa pour ce qu'elle considérait être une injure envers la culture des nobles mondiaux. Non mais franchement, un tenryubito devenant marine ! Quelle ineptie était-ce donc ? De plus, elle voyait d'un très mauvais œil la "mixité " entre tenryubito et ce qu'elle appelait vermine, soit les nobles de peu ou tout simplement les roturiers. Cependant, quoi qu'elle puisse en dire, même à demi-tenryubito, Shizuka Hiu faisait néanmoins partie de la famille Hiu et avait de ce fait été considérée tenryubito dès sa naissance. Mais il ne fallait pas se leurrer, tous savaient que si on acceptait juste quelques enfants mêlés par famille, c'était uniquement pour éviter toutes ces histoires à propos de consanguinités entre tenryubitos...

Finalement, tout le repas se poursuivit en discussions inutiles menées par des personnes ne faisant que s'échanger des amabilités toutes droites sorties d'un livre de bonnes manières... Navrant. Plus Miyuki assistait à cet échange et plus elle éprouvait le souhait profond et inaltérable envie de sortir de cette pièce en courant et en hurlant telle une possédée. Et cela se voyait sur son visage à la peau de porcelaine où ses sourcils avaient tendance à se froncer un peu plus à chaque instant... Voyant cela, Olgara Hiu brisa la conversation et fit d'une voix douce :

- Peut être que ces deux charmantes demoiselles pourraient passer leur soirée dans le boudoir des appartements de Miyuki ? Qui sait, peut-être réaffirmeraient-elles leurs liens familiaux de cette manière ?

Miyuki sortit alors de table avec sa cousine Shizuka qui fit un signe d'au-revoir poli au reste de la famille avant de suivre Miyuki jusqu'à ses appartements... N'en pouvant plus, Miyuki dit alors :

- Arrêtons ce jeu, j'en ai plus qu'assez de ces hypocrisies constantes, parlons franchement !

Un fin et gracieux éclat de rire parvint alors aux oreilles de Miyuki. Avant de retomber dans le chaos. Miyuki souriait. Les masques venaient enfin de tomber.

- Oui, et alors ? tu comptes faire quoi, me dénoncer ? détruire ma vie ? je m'en contrefous ! fit-elle alors que ses yeux lançaient des éclairs. Tu veux que je te dise ? ke te hais et ce du plus profond de mon âme t'entends ? nous sommes de véritables sosies et toi, tu as droit à tout : prestige, richesse, confort... Et moi ? c'est simple, à rien ! rien, tu m'entends ?!

- Donc, tu caches vraiment très bien ton jeu, lui répondit Miyuki.

- Bien sûr ! imbécile ! crois-tu sérieusement que mon père laisserait passer mes écarts de conduite ? déjà que mon vieux souhaiterait que j'intègre la marine...

- Dans ce cas, ma proposition risquerait de te plaire.

Shizuka cessa tout d'un coup de parler et regarda Miyuki d'un air intéressé :

- Une proposition ? laquelle ? qu'as-tu à me proposer qui puisse m'intéresser ?

- Nous nous ressemblons comme deux gouttes d'eau. Et si j'ai bien compris, toi, tu souhaites vivre comme une princesse dans le luxe et l'opulence. Mais moi, vois-tu, je me contrefous de tout ça.

Puis elle se leva, alla chercher ses bijoux en or massif et serti de diamants, de rubis, de perles et autres merveilles et les posa négligemment contre la table du boudoir sous le regard rempli d'incompréhension de Shizuka qui semblait se demander ce qu'il se passait dans la tête de son « illustre » cousine. Du moins, jusqu'à ce que celle-ci lui dise :

- Tout ça sera à toi si tu acceptes ma proposition.

- Laquelle ? Demanda Shizuka, les yeux remplis d'avidité.

- Tu prends ma place, je prends la tienne. A partir d'aujourd'hui, tu te nommeras Miyuki Hiu et moi je me nommerai Shizuka Hiu, déclara alors Miyuki, sûre d'elle. En d'autres termes, je t'offre la gloire en échange de ta vie.

- Tu es folle... Cela ne marchera jamais !

- Oh que si... Il te suffira de jouer la comédie et personne ne se rendra compte de rien. Cependant il te faudra des alliés et je suis certaine que mon frère et mon amie t'aideront. Ils t'apprendront tout ce que tu dois savoir et faire afin de ne pas te faire prendre. Mais ne t'en fais pas. De toute manière, mes parents ne sont pas des lumières et puis... ce ne sont que des imbéciles !

Shizuka sourit. Décidément, cette Miyuki Hiu était vraiment un cas. Elle avait rarement vu chez une femme un tel caractère. Elle avait l'impression en l'entendant que tout était toujours possible. Oui, que cela pourrait marcher. C'était même plus que probable... c'est donc sans la moindre trace d'hésitation que Shizuka fit alors :

- Ok, j'accepte. A moi le luxe et les diamants et à toi la vie dure et fastidieuse.

Puis, sur un ton sérieux, elle lui demanda franchement :

- Cependant je ne comprends pas. Pourquoi toi, une princesse de Marijoa, voudrait-elle partir de ce luxe et de ce paradis doré que tous aimeraient fouler du pied ? En gros, pourquoi partir, seule, sans rien, dans un monde où ne règnent que l'insécurité et l'angoisse ?

Miyuki haussa les épaules et répondit :

- Je préfère mourir dans la misère en me disant que j'ai vécu ma vie comme je l'entend plutôt que de me dire une fois vieille et ridée que ma vie en tant que tenryubito n'aura au final été qu'une vaste plaisanterie, ressemblant à tout point à celle de mes malheureux parents !

- Je vois, répondit Shizuka, c'est sûr qu'il vaut mieux courir après ses rêves tant qu'on le peut encore.…

Miyuki hocha froidement de la tête et elles commencèrent ensuite à se changer et à revêtir la tenue de l'autre sans le moindre bruit. Après cela, toutes deux firent un pacte : celui de ne jamais révéler la vérité à qui que ce soit jusqu'à leurs morts respectives. A partir de ce moment-là, Miyuki perdait son frère, sa place dans le clan des Hiu, ses parents, tout ce qu'elle avait connu. Mais peu importait pour elle. Il était 14 heures de l'après-midi et elle savait que lorsque son oncle aurait fini de discuter avec ses anciens parents, tous deux partiraient et ne reviendraient certainement plus.

Le soleil commençait lentement à décliner sur les hauteurs de Marijoa... Tandis que Miyuki regardait de la rue le couché de l'astre du jour symbolisant son départ de la cité des tenryubitos. A côté d'elle, se tenait Midori qui semblait appréhender le cruel instant de son départ. Elle se retourna vers son amie en affichant une mine triste et fit alors :

- Tu sais qu'il est possible que l'on ne se revoit jamais ?

Miyuki se retourna à son tour vers Midori et vu qu'elle était au bord des larmes. Elle lui répondit alors doucement :

- C'est même fort probable... mais je ne souhaite pas y penser... il sera toujours temps de regretter après...

Midori retrouva alors toute contenance et s'agrippa à son amie de manière suppliante :

- Jure-le moi... jure-moi que tu ne m'oublieras pas et je te promets que je ferais en sorte que cette fille qui a pris ta place ne te fasse pas défaut... alors...

- Je te le jure, fit-elle en ignorant cependant si elle serait capable de tenir parole tout en étant si loin de Marijoa...

Midori se jeta dans les bras de son amie en lui disant :

- Tu vas me manquer ! j'espère que tu trouveras dans le monde ce que tu sembles tant rechercher !

- Je l'espère en tout cas.

Elle se détourna de Midori et de la rue déserte pour retourner dans sa maison ou du moins son ancienne maison. Elle devait se montrer prudente désormais. Il ne fallait pas que son oncle découvre le pot aux roses. Elle devrait répondre au nom de Shizuka Hiu quoi qu'il puisse lui en coûter ! Elle franchit alors la porte d'entrée et tomba alors sur son oncle qui apparemment la cherchait pour dire au revoir au reste de la famille. Elle le suivit alors sans faire le moindre commentaire et adopta le comportement d'une jeune fille douce et réservée qu'adoptait Shizuka quand elle est venue dans le domaine quelques heures plus tôt. Elle arriva donc dans le grand salon et vit du coin de l'œil son grand frère qui avait un regard assez malicieux, preuve qu'il devait surement être au courant de l'échange. Quant à Shizuka, elle vit qu'elle arrivait parfaitement à la remplacer et qu'il n'y avait donc aucune raison de s'inquiéter. Après quelques échanges de convenances, son oncle lui fit signe de sortir et elle obéit sans poser de questions.

Ils descendirent en silence les rues de Marijoa en ignorant les esclaves et autres serviteurs qui se hâtaient de rentrer chez leurs maîtres. Miyuki regarda son oncle qui marchait devant elle et se mit à imaginer sa carrière de marine ou bien ce qui l'a décidé de suivre cette voie. Après tout, il était lui aussi un habitant de Marijoa, un tenryubito. Ce pourrait-il qu'il soit parti de la cité céleste pour les mêmes raisons qui ont fait que Miyuki le fasse ce jour là en l'année 1463 de l'ère du gouvernement mondial ? Mais peu importait à ce moment. Miyuki voyait que quelque chose n'allait pas entre Shizuka et son père. La preuve : pourquoi marchait-il seul devant ? Et peut-être n'avaient-ils échangés que peu de mots tous les deux... A bien y réfléchir, il serait peut-être assez difficile pour Miyuki de prendre comme cela la place de sa cousine dont elle ignorait jusqu'à la vie qu'elle menait... Après tout, sa vie à Marijoa était plutôt facile à imaginer : vide. Désespérément vide. Le néant. En tout cas elle se promit d'en découvrir davantage une fois sortie de Marijoa.

Tous deux se trouvaient désormais au poste frontière après une bonne marche de vingt minutes dans la ville. Poste frontière qu'ils passèrent sans le moindre souci. Derrière ce poste se trouvait un imposant escalier d'au moins cinq cents marches descendant jusqu'à un immense port qui faisait face à Grand Line, la route de tous les périls... Jamais Miyuki n'était allée aussi loin en dehors de la ville. Pour elle, ce poste frontière était la limite de ce qu'elle connaissait du monde. La fin de son monde. Après la descente de ces escaliers qui la mèneraient vers le monde de la mer, le monde de Grand Line, elle se disait qu'il était fort probable qu'elle ne serait plus la même. Un changement irréversible qui briserait à jamais son monde et ses idéaux. Avide de rêves et de liberté, souhaitant à tout prix sortir du cadre que l'on avait choisi pour elle, elle avait décidé de rejoindre le cercle secret des insolites. Mais à présent, elle se rendait compte que ce qu'elle était en train faire, c'est à dire, quitter Marijoa pour l'inconnu, aucun de ses camarades du club ou même sa meilleure amie Midori ne l'avait fait. Qu'allait-elle découvrir dans ce monde du dessous ? Elle n'arrêtait pas de se le demander mentalement. Elle avait douze ans. Elle allait commencer à vivre une aventure qu'elle espérait extraordinaire. Unique. Fantastique.

Si seulement elle savait ce qui l'attendait... Peut être aurait elle renoncer à ce goût du risque et de l'aventure qui sait ? Peut-être se serait-elle contentée d'être une simple tenryubito ? Car plus loin, alors que son oncle marchait droit devant lui en dehors de la portée d'écoute de Miyuki, il sortit son escargotphone et fit :

- Bonsoir, j'aimerais parler au directeur d'Impel Down ...

À suivre ...